Cass. 1re civ., 11 janvier 2023, n° 21-16.839
COUR DE CASSATION
Arrêt
Cassation
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Chauvin
Rapporteur :
Mme Dumas
Avocat général :
M. Poiret
Avocats :
SARL Le Prado - Gilbert, SAS Boulloche, Colin, Stoclet et Associés
Faits et procédure
1. Selon l'arrêt attaqué (Reims, 22 septembre 2020), par acte du 18 juin 2013, la société civile immobilière 2R (la SCI 2R) s'est portée caution personnelle des engagements souscrits par les sociétés Etelec et RM immo auprès de la société Pro armature Champagne et s'est engagée sous astreinte à consentir à celle-ci un cautionnement réel.
2. La société Pro armature Champagne a assigné la SCI 2R en paiement au titre de son engagement de caution personnelle et en liquidation de l'astreinte.
Examen des moyens
Sur les deuxième et troisième moyens, ci-après annexés
3. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ces moyens qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation.
Mais sur le premier moyen
Enoncé du moyen
4. La SCI 2R fait grief à l'arrêt de rejeter sa demande d'annulation du contrat de cautionnement et d'accueillir les demandes en paiement de la société Pro armature Champagne, alors :
« 1°/ que le cautionnement donné par une société relativement à un acte qui n'entre pas directement dans son objet social et ne résulte pas du consentement unanime des associés, n'est valable que s'il existe une communauté d'intérêts entre cette société et la personne cautionnée ; que la communauté d'intérêts suppose que la société qui donne son cautionnement et la personne cautionnée partagent, au-delà d'une éventuelle identité de gérants, certains liens d'affaire ; qu'en l'espèce, en retenant qu'il existait une communauté d'intérêts entre la SCI 2R et les sociétés Etelec et RM immo au regard de ce qu'il s'agissait de trois sociétés de gestion et construction d'immeubles qui avaient le même dirigeant et de ce que si la SCI 2R n'avait pas régularisé le cautionnement, les livraisons d'acier par la société Pro armature Champagne sur les chantiers concernant la société Etelec et la société RM immo se seraient interrompues, la cour d'appel a statué par des motifs impropres à établir une telle communauté d'intérêts en violation de l'article 1849 du code civil ;
2°/ que la régularité du cautionnement donné par une société, s'agissant du point de savoir si le cautionnement entre directement dans son objet social ou s'il s'y rattache du fait d'une communauté d'intérêts avec la personne cautionnée, s'apprécie au regard de cette seule société ; qu'en l'espèce, en énonçant que le dirigeant de la SCI 2R ne pouvait sans se contredire exciper d'une éventuelle contradiction entre le cautionnement donné par la SCI 2R et l'objet social de celle-ci, dès lors que ce dirigeant savait pertinemment quels étaient les contours notamment de cet objet social, la cour d'appel a statué par des motifs impropres à établir la régularité de l'acte de cautionnement du 18 juin 2013 en violation de l'article 1849 du code civil. »
Réponse de la Cour :
Vu les articles 1849, 1852 et 1854 du code civil :
5. Le cautionnement donné par une société relativement à un acte qui n'entre pas directement dans son objet et qui ne résulte pas du consentement unanime de ses associés n'est valable que s'il existe une communauté d'intérêts entre la société et la personne cautionnée.
6. Pour rejeter la demande d'annulation du cautionnement litigieux, l'arrêt retient, d'une part, qu'il existe une communauté d'intérêts entre les sociétés 2R, Etelec et RM immo, au motif qu'il s'agit de sociétés de gestion et de construction d'immeubles ayant le même dirigeant et que, sans le cautionnement de la première, les livraisons d'acier auraient cessé au profit des deux autres, d'autre part, que le dirigeant de la SCI 2R ne peut, sans se contredire, exciper d'une éventuelle contradiction entre le cautionnement donné par cette société et son objet, dès lors qu'il en connaissait pertinemment les contours.
7. En statuant ainsi, par des motifs impropres à établir la validité de l'acte de cautionnement litigieux, la cour d'appel, qui ne s'est interrogée que sur l'intérêt de la société cautionnée, a violé les textes susvisés.
PAR CES MOTIFS, la Cour :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il déboute la SCI 2R de sa demande d'annulation du contrat de cautionnement et la condamne à verser à la société Pro armature Champagne la somme de 100 497,50 euros au titre de son engagement de caution personnelle et la somme de 100 000 euros en exécution de la clause pénale, l'arrêt rendu le 22 septembre 2020, entre les parties, par la cour d'appel de Reims ;
Remet l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel d'Amiens.