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Décisions

Cass. com., 13 avril 2010, n° 07-17.912

COUR DE CASSATION

Arrêt

Rejet

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Favre

Rapporteur :

Mme Bélaval

Avocat général :

M. Bonnet

Avocats :

Me Blondel, SCP Capron

Paris, du 24 mai 2007

24 mai 2007

Sur les trois moyens réunis :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 24 mai 2007), que par acte du 3 décembre 1988, une société civile immobilière, dénommée 4 rue de Monbouy (la SCI) a été constituée entre M. André X..., président du conseil d'administration de la société anonyme X... (la SA), et MM. Bernard et Jean-Pierre X..., administrateurs de cette société ; que le 24 décembre 1988, la caisse régionale de crédit agricole du Loiret, devenue la caisse régionale du Centre Loire (la caisse), a consenti à la SCI un prêt pour l'acquisition d'un immeuble devant être donné à bail à la SA ; qu'après la mise en redressement judiciaire de la SA par jugement du 6 mars 1992, cette procédure collective a été étendue à la SCI par jugement du 11 juin 1993, sur le fondement de la confusion des patrimoines, la date de cessation des paiements étant fixée au 1er mars 1991 ; qu'après avoir déclaré sa créance au passif de la SCI, la caisse a assigné M. Y..., qui avait acquis le 17 juin 1992 la totalité des parts de la SCI, en paiement du solde du prêt, sur le fondement de l'article 1857 du code civil ;

Attendu que M. Y...fait grief à l'arrêt de l'avoir condamné à payer à la caisse une certaine somme, alors, selon le moyen :

1° / que le juge doit, en vertu de l'article 12 du code de procédure civile, appliquer, au besoin d'office, la règle de droit pertinente eu égard à la situation de fait telle qu'elle lui est soumise et en l'état des données de fait constantes cette obligation est stricte lorsque la matière est d'ordre public ; que les dettes dont les associés peuvent être appelées à répondre au sens de l'article 1857 du code civil sont les dettes sociales mais seuls les associés à la date de conclusion du contrat peuvent y être ; qu'il résulte de l'arrêt que le contrat de prêt a été consenti par acte authentique le 24 décembre 1988, cependant qu'il est devenu l'associé de la SCI le 17 juin 1992, soit trois ans et demi après la signature de l'acte de prêt ; qu'en l'état de ces données, la cour d'appel ne pouvait que rejeter la demande de la caisse ; qu'en jugeant le contraire, la cour d'appel méconnaît son office au regard du texte précité, ensemble au regard de l'article 6-1 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et viole par fausse application l'article 1857 du code civil ;

2° / qu'en cas de changement d'associé et plus précisément lorsqu'il y a eu cession de parts, en raison du caractère d'ordre public de l'article 1857 du code civil, l'associé qui quitte la société ne peut être déchargé de sa responsabilité à l'égard des tiers pour les dettes antérieures ; qu'en le condamnant au tout sans faire le départ entre les dettes résultant du prêt antérieur à la cession de la totalité des parts de la SCI le 17 juin 1992 alors que le prêt était consenti le 24 décembre 1988 et que du 24 décembre 1988 au 17 juin 1992, il était totalement étranger à la SCI, la cour d'appel ne justifie pas légalement son arrêt infirmatif au regard de l'article 1857 du code civil ;

3° / que là ou la loi ne distingue pas, il n'y a pas matière à distinction ; qu'il résulte de l'arrêt lui-même que la date de cessation des paiements a été fixée au 1er mars 1991 ; qu'il appert de l'arrêt que ce n'est que le 17 juin 1992 qu'il a acquis la totalité des parts de la SCI ; qu'ainsi, aux termes de l'article 1857 du code civil, il ne pouvait répondre des dettes sociales à partir du moment où, au jour de la cessation des paiements, il n'avait pas la qualité d'associé ; qu'en jugeant le contraire, la cour d'appel a violé le texte précité ;

4° / que dans ses conclusions signifiées le 12 janvier 2007, il insistait sur la circonstance que les échéances du prêt étaient en fait indûment prélevées par la banque sur le compte de la SCI tandis qu'il n'avait plus aucun pouvoir sur les comptes de la SCI, étant mis à l'écart de sa gestion ; qu'en ne répondant pas à ce moyen d'où il résultait qu'il est resté totalement étranger aux prélèvements effectués par la caisse, la cour d'appel méconnaît les exigences de l'article 455 du code de procédure civile ;

Mais attendu que les associés répondent à l'égard des tiers des dettes sociales à la date de leur exigibilité ou à celle de la cessation des paiements ; que l'arrêt retient que lorsque M. Y...avait acquis la totalité du capital social, la SCI continuait de rembourser le prêt qu'elle n'avait cessé de payer que postérieurement au 24 février 2004 ; qu'en l'état de ces constatations et appréciations, abstraction faite des motifs surabondants critiqués par la troisième branche, la cour d'appel, sans être tenue de répondre à des conclusions devenues inopérantes et qui n'a pas méconnu son office, a exactement retenu que la caisse pouvait agir à l'encontre de M. Y...en paiement des dettes de la société ; que le moyen ne peut être accueilli en aucune de ses branches ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi.