Cass. crim., 29 mai 1984, n° 82-92.817
COUR DE CASSATION
Arrêt
Cassation
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Bruneau
Rapporteur :
Mme Ract-Madoux
Avocat général :
M. Méfort
Avocat :
Me Célice
SUR LE MOYEN UNIQUE DE CASSATION, PRIS DE LA VIOLATION DES ARTICLES 1 ET 2 DE LA LOI N° 73-5 DU 2 JANVIER 1973 RELATIVE AU PAIEMENT DIRECT DE LA PENSION ALIMENTAIRE, DE L'ARTICLE 4-1 DU DECRET 73-216 DU 1ER MARS 1973 PRIS POUR L'APPLICATION DE LADITE LOI, DE L'ARTICLE 1134 DU CODE CIVIL, ENSEMBLE VIOLATION DE L'ARTICLE 593 DU CODE DE PROCEDURE PENALE, DEFAUT ET CONTRADICTION DE MOTIFS, MANQUE DE BASE LEGALE,
" EN CE QUE L'ARRET ATTAQUE A DECLARE MONSIEUR GILBERT X..., DIRECTEUR DE L'AGENCE DE LA SOCIETE GENERALE A VALENCE, COUPABLE D'AVOIR CONTREVENU AUX DISPOSITIONS DE L'ARTICLE 2 DE LA LOI DU 2 JANVIER 1973 ET L'A CONDAMNE A 6 AMENDES DE 1 200 FRANCS CHACUNE, DECLARE BIEN FONDEE LA CONSTITUTION DE PARTIE CIVILE, CONDAMNE X... A PAYER A DAME Y... LA SOMME DE 2 500 FRANCS EN REPARATION DE SON PREJUDICE, DECLARE LA SOCIETE GENERALE CIVILEMENT RESPONSABLE DE X... ET CONDAMNE CELUI-CI ET CELLE-LA AUX FRAIS ET DEPENS AINSI QU'A PAYER 1 000 FRANCS A DAME Y... SUR LE FONDEMENT DE L'ARTICLE 475-1 DU CODE DE PROCEDURE PENALE,
" AUX MOTIFS QUE DURANT TOUTE LA PERIODE DE REFERENCE, LE SOLDE DES COMPTES DE BERNARD Z... A TOUJOURS ETE DEBITEUR, QUE LES COMPTES ONT ENREGISTRE CHAQUE MOIS DES MOUVEMENTS DE FONDS IMPORTANTS CONSTITUES PAR DES REMISES OU DES PRELEVEMENTS OU PAIEMENTS A DES TIERS ;
QUE L'ETUDE DU FONCTIONNEMENT DU COMPTE PERMET DE RELEVER UNE CONSTANCE DANS L'OUVERTURE DE CREDITS QUI REVELENT UNE CONVENTION DE DECOUVERT PASSEE ENTRE LA SOCIETE GENERALE ET BERNARD Z... ET QUE LA BANQUE DANS LE CADRE DES ACCORDS CONCLUS DETENAIT AU NOM DE SON CLIENT DES FONDS DISPONIBLES ;
QU'AINSI LA BANQUE ETAIT BIEN DEPOSITAIRE POUR LE COMPTE DE BERNARD Z... DE SOMMES LIQUIDES ET EXIGIBLES ;
QUE PAR AILLEURS, LA BANQUE AYANT REGLE D'AUTRES SOMMES POUR LE COMPTE DE BERNARD Z..., SE DEVAIT DE REGLER PAR PREFERENCE LA CREANCE DE DAME Y... ;
QUE, FAUTE DE L'AVOIR FAIT, X... A CONTREVENU A L'ARTICLE 2 DE LA LOI PRECITEE ;
" ALORS, D'UNE PART, QUE L'INFRACTION NE PEUT ETRE CONSTITUEE QUE SI LE DEBITEUR D'ALIMENTS A SUR LE TIERS UNE CREANCE LIQUIDE ET EXIGIBLE, POUVANT ETRE NOTAMMENT CONSTITUEE D'UN DEPOT DE FONDS ;
QU'EN CONSTATANT QUE LE COMPTE DU DEBITEUR D'ALIMENTS A ETE CONSTAMMENT DEBITEUR A L'EGARD DE LA BANQUE, LES JUGES DU FOND ONT PAR LA MEME RECONNU QUE LES CONDITIONS LEGALES DE L'INCRIMINATION N'ETAIENT PAS REUNIES ET VIOLE PAR LA CONDAMNATION PRONONCEE LES TEXTES VISES AU MOYEN ;
" ALORS, D'AUTRE PART, QU'EN NE RECHERCHANT PAS SI LES RELATIONS ENTRE LA BANQUE ET LE DEBITEUR D'ALIMENTS CONFERAIENT A CELUI-CI SUR LA BANQUE UNE CREANCE LIQUIDE ET EXIGIBLE, DONT IL AURAIT PU DISPOSER, L'ARRET ATTAQUE N'A PAS DONNE DE BASE LEGALE A SA DECISION ;
" ALORS, DE TROISIEME PART, QU'EN DEDUISANT D'UNE CONVENTION DE DECOUVERT QUE LA BANQUE ETAIT DEPOSITAIRE POUR LE COMPTE DU DEBITEUR D'ALIMENTS DE SOMMES LIQUIDES ET EXIGIBLES, L'ARRET ATTAQUE A DENATURE LADITE CONVENTION ET VIOLE TOUT A LA FOIS L'ARTICLE 1134 DU CODE CIVIL ET 1ER DE LA LOI DU 2 JANVIER 1973 ;
" ALORS, ENFIN, QUE L'ARRET ATTAQUE IMPOSE A LA BANQUE, A PEINE DE SANCTIONS PENALES, DE CONSENTIR AU DEBITEUR D'ALIMENTS UN CREDIT SUSCEPTIBLE DE SERVIR D'ASSIETTE A LA POURSUITE DU CREANCIER ALIMENTAIRE ET VIOLE AINSI A LA FOIS LE PRINCIPE DE LA LIBERTE CONTRACTUELLE ET CELUI DE LA LEGALITE DES PEINES ET DES DELITS ;
" ATTENDU QU'IL RESULTE DES ENONCIATIONS DE L'ARRET ATTAQUE QUE X... GILBERT, DIRECTEUR D'AGENCE ET LA SOCIETE GENERALE, CIVILEMENT RESPONSABLE, ONT ETE POURSUIVIS DEVANT LE TRIBUNAL DE POLICE DE VALENCE, POUR AVOIR CONTREVENU AUX DISPOSITIONS DE LA LOI DU 2 JANVIER 1973, EN NE VERSANT PAS A MARIE-DANIELLE Y..., MALGRE UNE NOTIFICATION D'HUISSIER EN DATE DU 14 MAI 1981, LES PENSIONS ALIMENTAIRES ET LES SOMMES DUES A CELLE-CI EN VERTU D'UN JUGEMENT EXECUTOIRE DU 10 JANVIER 1978 ;
ATTENDU QUE POUR DECLARER ETABLIES A L'ENCONTRE DE X... LES INFRACTIONS A LADITE LOI, COMMISES DU 1ER OCTOBRE 1981 AU 1ER MARS 1982, LA COUR D'APPEL ENONCE " QU'IL RESULTE DES DOCUMENTS PRODUITS PAR LA BANQUE QUE DE JUIN 1981 A MARS 1982, LE SOLDE DES COMPTES DE BERNARD Z... A TOUJOURS ETE DEBITEUR, SOLDE VARIANT DE 14 087,20 A 68 678,21 FRANCS ;
QUE LES COMPTES ONT ENREGISTRE CHAQUE MOIS DES MOUVEMENTS DE FONDS IMPORTANTS CONSTITUES PAR DES REMISES EN ESPECES OU PAR CHEQUES, PAR DES PRELEVEMENTS OU DES PAIEMENTS A DES TIERS ;
QUE L'ETUDE DU FONCTIONNEMENT DU COMPTE PERMET DE RELEVER UNE CONSTANCE DANS L'OUVERTURE DE CREDIT QUI REVELE UNE CONVENTION DE DECOUVERT PASSEE ENTRE LA SOCIETE GENERALE ET BERNARD Z... ET QUE LA BANQUE, DANS LE CADRE DES ACCORDS CONCLUS, DETENAIT AU NOM DE SON CLIENT DES FONDS DISPONIBLES ;
QU'AINSI LA BANQUE ETAIT BIEN DEPOSITAIRE POUR LE COMPTE DE BERNARD Z... DE SOMMES LIQUIDES ET EXIGIBLES ;
QUE PAR AILLEURS, LA BANQUE AYANT REGLE D'AUTRES SOMMES POUR LE COMPTE DE BERNARD Z..., SE DEVAIT DE REGLER PAR PREFERENCE LA CREANCE DE MARIE-DANIELLE Y..." ;
ATTENDU QU'EN CET ETAT, LA COUR D'APPEL, QUI A SOUVERAINEMENT DEDUIT DES ELEMENTS DE PREUVE SOUMIS AU DEBAT CONTRADICTOIRE L'EXISTENCE D'UNE CONVENTION DE DECOUVERT RENDANT LE BANQUIER DEBITEUR DE SOMMES LIQUIDES ET EXIGIBLES ET QUI A CONSTATE QUE CELUI-CI AVAIT MANQUE A L'OBLIGATION DE VERSER LES PENSIONS ALIMENTAIRES AU CREANCIER D'ALIMENTS, PAR PREFERENCE A TOUS AUTRES CREANCIERS, A JUSTIFIE SA DECISION ;
D'OU IL SUIT QUE LE MOYEN N'EST PAS FONDE ;
SUR LE POURVOI DE Y... MARIE-DANIELLE :
SUR LE PREMIER MOYEN DE CASSATION PRIS DE LA VIOLATION DES ARTICLES 567, 591, 593 ET 659 DU CODE DE PROCEDURE PENALE, ABSENCE OU INSUFFISANCE DE MOTIFS, ATTENDU QUE POUR DECLARER IRRECEVABLE L'ACTION ENGAGEE PAR MADAME Y..., VISANT LES FAITS COMMIS DU 1ER JUIN AU 1ER SEPTEMBRE 1981, LA COUR D'APPEL ENONCE QUE CETTE DERNIERE AVAIT PRECEDEMMENT SAISI LE TRIBUNAL DE POLICE DE LYON DES MEMES FAITS ET QUE CETTE PROCEDURE N'AVAIT PAS DONNE LIEU A UNE DECISION DEFINITIVE ;
ATTENDU QU'EN STATUANT AINSI, LA COUR D'APPEL N'A NULLEMENT ENCOURU LES GRIEFS ALLEGUES AU MOYEN, AUCUN CONFLIT DE COMPETENCE N'EXISTANT, AU SENS DE L'ARTICLE 659 DU CODE DE PROCEDURE PENALE, ET UN MEME FAIT NE POUVANT DONNER LIEU A DEUX ACTIONS PENALES DISTINCTES ET SUCCESSIVES ;
D'OU IL SUIT QUE LE MOYEN DOIT ETRE ECARTE ;
SUR LE SECOND MOYEN DE CASSATION, PRIS DE LA VIOLATION DES ARTICLES 567, 591 ET 593 DU CODE DE PROCEDURE PENALE, DE L'ARTICLE 2 DE LA LOI DU 2 JANVIER 1973, DE L'ARTICLE 4-1 DU DECRET DU 1ER MARS 1973, ABSENCE OU INSUFFISANCE DE MOTIFS,
ATTENDU QUE POUR FIXER A 2 500 F LE PREJUDICE GLOBAL SUBI PAR MARIE-DANIELLE Y... ET LA DEBOUTER DU SURPLUS DE SA DEMANDE TENDANT A L'ALLOCATION D'UNE SOMME DE 41 841,10 FRANCS, LA COUR D'APPEL RELEVE QUE " LES FAITS RETENUS A LA CHARGE DU PREVENU ONT CAUSE UN PREJUDICE INDISCUTABLE A LA PARTIE CIVILE QUI S'EST TROUVEE PRIVEE DES SOMMES QUI AURAIENT DU LUI ETRE VERSEES, QUE CEPENDANT Z... RESTE TOUJOURS DEBITEUR DE CES SOMMES ;
" ATTENDU QU'EN CET ETAT ET ALORS QUE L'ARTICLE 5 DU DECRET DU 1ER MARS 1973 ATTRIBUE COMPETENCE AU TRIBUNAL D'INSTANCE POUR CONNAITRE DES CONTESTATIONS RELATIVES A LA PROCEDURE DE PAIEMENT DIRECT ET QUE LA JURIDICTION PENALE EST INCOMPETENTE POUR STATUER SUR LA DEMANDE DE PAIEMENT DE PENSION ALIMENTAIRE, FUT-ELLE DIRIGEE CONTRE LE TIERS VISE A L'ARTICLE 1ER DE LA LOI DU 2 JANVIER 1973, LA COUR D'APPEL QUI A APPRECIE SOUVERAINEMENT LE MONTANT DE LA REPARATION DU PREJUDICE RESULTANT DIRECTEMENT DE L'INFRACTION, A DONNE UNE BASE LEGALE A SA DECISION ;
QUE DES LORS LE MOYEN NE SAURAIT ETRE ADMIS ;
ET ATTENDU QUE L'ARRET EST REGULIER EN LA FORME ;
REJETTE LES POURVOIS.