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Décisions

Cass. com., 25 mars 2014, n° 12-27.612

COUR DE CASSATION

Arrêt

Rejet

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Espel

Rapporteur :

Mme Bregeon

Avocat général :

M. Debacq

Avocats :

Me Foussard, SCP Capron

Rennes, du 8 juin 2012

8 juin 2012

Sur les deuxième, troisième et quatrième moyens, réunis :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Rennes, 8 juin 2012), qu'en 1993, après leur divorce prononcé le 10 avril 1992, l'administration fiscale a mis en recouvrement auprès de M. X... et Mme Y... des rappels d'impôt sur le revenu au titre des années 1988, 1989 et 1990 ; qu'elle a notifié à M. X... un avis à tiers détenteur, le 10 août 2004, puis des commandements de payer, les 8 septembre 2006 et 5 avril 2007 ; qu'elle a notifié des avis d'imposition à Mme Y... le 22 décembre 2006, suivis d'un commandement de payer, le 22 mai 2007, puis de trois avis à tiers détenteur de ses comptes bancaires, le 16 juillet 2008 ; que, dans le cadre de la procédure d'opposition à ces actes de 2007 et 2008, engagée par Mme Y..., l'administration s'est prévalue de l'interruption de la prescription de son action en recouvrement par les avis à tiers détenteur et commandements de payer notifiés à M. X... en 2004, 2006 et 2007 ; qu'à la suite du rejet, par le trésorier-payeur général, de sa contestation amiable de ces derniers actes, Mme Y... a saisi le juge de l'exécution afin d'obtenir leur annulation ;

Attendu que le comptable du service des impôts des particuliers de Nantes Nord-Est fait grief à l'arrêt d'avoir constaté l'inopposabilité à Mme Y..., pour défaut de notification personnelle régulière, de l'avis à tiers détenteur du 10 août 2004 et des deux commandements de payer des 8 septembre 2006 et 5 avril 2007 et dit que cette inopposabilité avait pour effet d'anéantir les poursuites engagées contre elle sur la base de ces trois actes, alors, selon le moyen :

1°/ que la seule qualité de codébiteur solidaire ayant intérêt à faire annihiler tout acte interruptif de prescription de la créance fiscale ne confère aucunement à Mme Y... le droit de contester des actes d'exécution forcée ne visant que son ex-époux et notifiés régulièrement à ce dernier au regard des dispositions de l'article L. 281 du livre des procédures fiscales ; qu'en déclarant recevable l'action de Mme Y..., alors même que celle-ci ne pouvait faire valoir aucune exception personnelle au regard de la régularité des actes querellés, la cour d'appel a violé ensemble les articles L. 281 du livre des procédures fiscales, 1685 dans sa version en vigueur du code général des Impôts ainsi que les articles 1201, 1206, 1208 et 2245 du code civil ;

2°/ que visant les articles L. 281 et R.* 281-4 (du livre des procédures fiscales) dans son opposition à poursuite du 14 septembre 2009, Mme Y... a invoqué la nullité des actes de poursuite notifiés à M. X... successivement en 2004, 2006 et 2007 ; qu'elle a ultérieurement demandé au juge de l'exécution de « dire nuls et de nul effet l'avis à tiers détenteur du 10 août 2004, le commandement de payer du 8 septembre 2006 et le commandement de payer du 5 avril 2007 » ; que la cour d'appel, confirmant le jugement déféré, a estimé que Mme Y..., codébitrice solidaire avec son ex-époux de dettes d'impôts contemporaines de leur mariage, prétendait à l'annulation, mais aussi à l'inopposabilité d'actes de poursuite visant son ex-époux ; qu'en considérant que des actes pourtant régulièrement notifiés à M. X... et donc de nature à interrompre la prescription de l'action en recouvrement étaient inopposables à Mme Y... pour défaut de notification personnelle régulière et que cette inopposabilité avait pour effet d'anéantir les poursuites contre elle, alors même que la demande initiale était limitée à la seule annulation des actes notifiés entre 2004 et 2007, la cour d'appel a violé les articles L. 281 et R.* 281-5 du livre des procédures fiscales et les règles relatives à l'interruption de prescription définies par les articles 1206 et 2245 du code civil, ensemble l'article 4 du code de procédure civile ;

3°/ que la cour d'appel a rappelé qu'aux termes des articles 1206 et 2245 du code civil, les poursuites faites contre l'un des débiteurs solidaires interrompent la prescription à l'égard de tous et l'interpellation faite à l'un des débiteurs solidaires par une demande en justice ou par un acte d'exécution forcée interrompt le délai de prescription contre tous les autres ; qu'elle en a déduit que les avis à tiers détenteur du 10 août 2004 et les deux commandements de payer des 8 septembre 2006 et 5 avril 2007 notifiés à M. X... ont pu avoir pour effet d'interrompre la prescription à l'égard de Mme Y..., comme l'a jugé le tribunal administratif de Nantes le 16 décembre 2010 par décision ayant rejeté les requêtes de Mme Y... en annulation des avis à tiers détenteur à elle notifiés le 16 juillet 2008 ; qu'elle a néanmoins considéré que si l'administration fiscale peut notifier les titres exécutoires et actes de poursuite à l'un seulement des redevables solidaires de la dette fiscale, la procédure doit cependant être contradictoire et la loyauté des débats oblige l'administration à notifier, en cours de procédure, à l'ensemble des personnes qui peuvent être poursuivies, les actes de procédure les concernant ; qu'en faisant application d'un principe dégagé par la Cour de cassation dans le cadre de l'établissement global et contradictoire de l'assiette de l'impôt à l'encontre de redevables solidaires de droits d'enregistrement à la procédure de recouvrement et d'exécution forcée menée à l'encontre d'un époux tenu solidairement au paiement de l'impôt sur le revenu, la cour d'appel a ajouté une condition d'interruption de prescription de l'action en recouvrement à l'encontre de l'époux tenu solidairement au paiement de l'impôt sur le revenu qui n'est prévue par aucun texte et a violé les articles 1206 et 2245 du code civil ;

Mais attendu que l'arrêt constate que Mme Y... invoquait l'absence de notification à sa personne de l'avis à tiers détenteur et des deux commandements de payer litigieux que lui opposait l'administration ; que, donnant aux faits ainsi soumis la qualification juridique qu'ils comportaient, l'arrêt retient que l'intéressée invoquait une exception personnelle et que, si l'administration pouvait notifier les titres exécutoires et actes de poursuite à l'un seulement des redevables solidaires de la dette fiscale, la procédure devait cependant être contradictoire, la loyauté des débats l'obligeant à notifier, en cours de procédure, à l'ensemble des personnes pouvant être poursuivies, les actes de la procédure les concernant ; que la cour d'appel, qui ne s'est pas prononcée sur la prescription de l'action en recouvrement, a exactement déduit de ses constatations et appréciations l'inopposabilité à Mme Y... des actes en cause, faute de notification personnelle régulière ; que le moyen n'est pas fondé ;

Et attendu que le dernier grief ne serait pas de nature à permettre l'admission du pourvoi ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi.