CA Versailles, 12e ch., 17 décembre 2013, n° 12/04947
VERSAILLES
Arrêt
Confirmation
PARTIES
Demandeur :
LE CAM
Défendeur :
GESLO (SCI)
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
Mme ROSENTHAL
Conseillers :
Mme CALOT, Mme ORSINI
Avocats :
SCP COURTAIGNE-FLICHY-MAIGNE-DASTE & ASSOCIÉS, Me CANU, Me CHOUTEAU, Me PARIENTE-AKNIN
Vu l'appel interjeté le 10 juillet 2012 par M. Hervé Le Cam d'un jugement rendu le 14 mai 2012 par le tribunal de grande instance de Nanterre qui saisi par la SCI Geslo le 16 juin 2010 d'une demande en fixation du loyer du bail en renouvellement à la somme annuelle en principal de 25. 000 euros à compter du 1er janvier 2010, a sous le bénéfice de l'exécution provisoire :
- déclaré nulle la demande de renouvellement du bail de M. Le Cam du 29 décembre 2000,
- constaté le renouvellement au 1er janvier 2010 du bail entre M. Le Cam et la société Gesloconcernant les locaux à usage commercial si [...] à la [...],
- ordonné avant dire droit, une expertise afin d'évaluer le montant du loyer du bail et a commis M. Avignon pour y procéder,
- fixé à la somme de 3.000 euros la provision à valoir sur la rémunération de l'expert aux frais avancés par la SCI Geslo,
- fixé le loyer provisionnel dû par M. Le Cam pour la durée de l'instance au loyer actuellement pratiqué,
- renvoyé l'affaire à l'audience du 28 janvier 2013,
- sursis à statuer sur l'application de l'article 700 code de procédure civile et réservé les dépens.
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Par acte sous seing privé du 18 février 1981, M. Assouly aux droits duquel se trouve actuellement la société Geslo, a donné à bail commercial à M. Boitelle aux droits duquel se trouve actuellement M. Le Cam, des locaux commerciaux situés [...], pour une activité de garage et d'atelier pour 3, 6 et 9 ans à compter du 1er janvier 1981 moyennant un loyer annuel en principal de 36.000 francs (5.488 euros).
Par jugement du 2 avril 1999 rendu par le tribunal de grande instance de Nanterre, le bail a été renouvelé pour une durée de 9 ans à compter du 1er janvier 1992 moyennant un loyer annuel de 59.134 francs, soit 9.015 euros en principal.
Par acte d'huissier du 29 décembre 2000, M. Le Cam a demandé le renouvellement du bail prenant fin le 31 décembre 2000 en application de l'article L.145-10 du code de commerce.
Par acte d'huissier du 2 mars 2006, la société Geslo, agissant poursuites et diligences de son gérant, M. Aknin domicilié chez Beoc (bureau d'études et d'organisation comptables), [...], a donné congé à M. Le Cam avec offre de renouvellement pour le 30 septembre 2006, moyennant un loyer annuel de 18.000 euros.
Par acte d'huissier du 22 décembre 2009, M. Le Cam a demandé le renouvellement du bail à compter du 1er janvier 2010.
Par acte d'huissier du 4 mars 2010, la société Geslo a accepté le renouvellement du bail moyennant un loyer annuel en principal de 25.000 euros, hors taxes et hors charges, à compter du 1er janvier 2010, les clauses et conditions du précédent bail étant maintenues, estimant que le bail ayant eu une durée effective de plus de douze ans, le loyer était déplafonné.
L'expert judiciaire a déposé son rapport le 12 avril 2013.
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Vu les dernières écritures en date du 15 octobre 2013 par lesquelles M. Le Cam, poursuivant l'infirmation du jugement entrepris, demande à la cour, de :
- à titre principal, fixer la date de renouvellement du bail au 1er janvier 2010 et fixer le loyer principal du bail renouvelé à compter de cette date à la somme annuelle arrondie à 13.650 euros,
- à titre subsidiaire, fixer la date de renouvellement du bail au 1er octobre 2006 et débouter la société Geslo de l'ensemble de ses demandes,
- à titre infiniment subsidiaire, débouter la société Geslo de sa demande d'évocation
- en tout état de cause, condamner la société Geslo à lui payer la somme de 5.000 euros au titre de l'article 700 code de procédure civile ainsi qu'aux dépens.
Vu les dernières écritures en date du 25 septembre 2013, aux termes desquelles la société Geslo prie la cour de :
- confirmer le jugement entrepris dans toutes ses dispositions,
- la recevoir dans sa demande d'évocation,
- dire que le bail commercial des locaux de la Garenne-Colombes est renouvelé pour une durée de 3, 6 et 9 années consécutives à compter du 1er janvier 2010 moyennant un loyer annuel indexé de 19.431 euros en principal,
- dire que l'arriéré de loyer portera intérêts au fur et à mesure de son échéance à compter du 1er janvier 2010 avec capitalisation,
- dire que le dépôt de garantie sera porté à la somme de 4.835 euros, soit un complément à verser par M. Le Cam de 3.468 euros,
- condamner M. Le Cam à lui verser la somme de 6.000 euros au titre de l'article 700 code de procédure civile ainsi qu'aux dépens.
Conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile, la cour renvoie expressément aux conclusions déposées par les parties qui développent leurs prétentions et leurs moyens.
MOTIFS DE LA DECISION
- Sur la nullité de la demande de renouvellement du bail du 29 décembre 2000 par le preneur
Considérant que M. Le Cam estime que sa demande de renouvellement est valide, qu'il soutient qu'il a toujours dû adresser ses courriers et envois à une adresse autre que celle du siège social de son bailleur, que par courrier du 22 mai 1998, Me El Mouchnino, notaire, l'informait que son interlocuteur était M. Aknin, gérant de la société Geslo et que les courriers devaient directement être envoyés à l'adresse personnelle de M. Aknin au [...], qui ne correspond pas à l'adresse du siège social de la société Geslo, que dans le courrier du 5 novembre 1998, l'huissier de justice mandaté par M. Aknin lui écrivait que les loyers courants devaient être versés au profit de la société Geslo chez la société Beok, [...], que même s'il n'est plus fait référence à M. Aknin, cette adresse était son adresse personnelle et non celle du siège social de la société Beoc, que plusieurs fois, les coordonnées du bailleur ont été modifiées, que l'article L. 145-10 alinéa 2 du code de commerce dispose que la demande de renouvellement peut être faite aussi bien au bailleur qu'à la personne du gérant, lequel est réputé avoir qualité pour la recevoir, que la demande a été adressée au bon interlocuteur à la bonne adresse, qu'une vérification du siège social de la société Geslo aurait été inutile, que le bailleur a entretenu une confusion lui causant grief, que la société Geslo ne peut pas nier avoir eu connaissance de la demande de renouvellement, que cette société a reçu un courrier recommandé mentionnant l'existence de cette demande de renouvellement mais ne s'y est jamais opposée ;
Considérant que la société Geslo réplique que la demande de renouvellement signifiée le 29 décembre 2000 est nulle et de nul effet, qu'elle n'a jamais eu connaissance de la demande de renouvellement à la société Beoc, que la demande de renouvellement a été délivrée à la société Beoc en qualité de gérant de l'immeuble du [...] alors que la société Beoc est étrangère à la société Geslo, que cette même demande ne fait même pas état de la société Geslo, bailleur, que la société Beoc n'est pas le gérant de la société Geslo et n'a jamais été le propriétaire des lieux loués , que la société Geslo n'a jamais changé d'adresse de siège social, contrairement à son gérant qui a changé plusieurs fois de domicile, qu'il appartenait à M. Le Cam de vérifier sur un extrait Kbis, l'adresse du siège social de la société Geslo afin de lui envoyer la demande de renouvellement du bail ;
Considérant que la demande de renouvellement de bail de M. Le Cam a été adressée par exploit d'huissier en date du 29 décembre 2000 à la société Beoc, [...] et actuellement au [...], prise en sa qualité de gérant de l'immeuble donné à bail (remise à mairie, la société étant fermée pour congés ) ;
Considérant que les premiers juges pour déclarer à bon droit nulle la demande de renouvellement du bail de M. Le Cam ont dit que cette demande a été mal dirigée, car la société Beoc n'a aucun lien de droit avec la SCI Geslo et il n'est pas démontré qu'en tant que gérante, elle avait la qualité de la recevoir au sens de l'article L. 145-10 du code de commerce ;
Qu'en effet, la société Beoc n'a pas la qualité de bailleur et n'a jamais été le gérant de la SCI Geslo, ni son mandataire ;
Que le jugement sera confirmé de ce chef ;
- Sur les effets du congé délivré le 2 mars 2006 par le bailleur pour le 30 septembre 2006
Considérant que par acte d'huissier du 2 mars 2006, la société Geslo, agissant poursuites et diligences de son gérant, M. Aknin domicilié chez Beoc (bureau d'études et d'organisation comptables), [...], a donné congé à M. Le Cam avec offre de renouvellement pour le 30 septembre 2006, moyennant un loyer annuel de 18.000 euros ;
Considérant que M. Le Cam fait valoir à titre subsidiaire que si la demande de renouvellement des 27 et 29 décembre 2000 était nulle, le congé avec offre de renouvellement délivré par le bailleur le 2 mars 2006 pour le 30 septembre 2006 serait valable ;
Qu'en effet, le bail n'ayant pas été renouvelé au 1er janvier 2001, il a continué à courir, de sorte que le bailleur pouvait délivrer congé avec offre de renouvellement à tout moment, alors que la société intimée ne fait état que de la demande de renouvellement au 22 décembre 2009, qui est postérieure de 3 ans ;
Que comme le relève l'appelant, celui-ci est resté dans les lieux après le 30 septembre 2006 et la société Geslo a accepté le loyer versé pendant plus de six ans , que le bail a donc été renouvelé à partir du 1er octobre 2006 pour une durée de neuf ans, soit jusqu'au 30 septembre 2015, qu'ainsi, la demande de renouvellement du 22 décembre 2009 est sans effet, que le loyer est à ce jour toujours plafonné, le bail n'ayant pas duré plus de neuf ans et par voie de conséquence, la demande de fixation du loyer renouvelé au 1er décembre 2010 n'a pas lieu d'être ;
Que le jugement sera infirmé en ce qu'il a constaté le renouvellement au 1er janvier 2010 du bail entre M. Le Cam et la société Geslo concernant les locaux à usage commercial [...] et la société Geslo sera déboutée de ses demandes ;
Sur les autres demandes:
Considérant que l'équité commande d'allouer à M. Hervé Le Cam la somme de 3. 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile; que la SCI Geslo supportera la charge des dépens de première instance et d'appel ;
PAR CES MOTIFS
Statuant par arrêt contradictoire,
CONFIRME le jugement en ce qu'il a déclaré nulle la demande de renouvellement du bail de M. Le Cam du 29 décembre 2000,
Le REFORME pour le surplus,
Statuant à nouveau,
FIXE la date du renouvellement au 1er octobre 2006 du bail entre M. Le Cam et la société Geslo concernant les locaux à usage commercial sis [...],
DÉBOUTE la SCI Geslo de l'ensemble de ses demandes,
Y ajoutant,
CONDAMNE la SCI Geslo à payer à M. Hervé Le Cam la somme de 3. 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
REJETTE toute autre demande,
CONDAMNE la SCI Geslo aux entiers dépens de première instance et d'appel et dit qu'ils seront recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.
- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
- signé par Mme Dominique ROSENTHAL, Président et par Monsieur GAVACHE, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.