CA Paris, 16e ch. B, 26 juin 2008, n° 07/09464
PARIS
Arrêt
Confirmation
PARTIES
Demandeur :
EST STRASBOURG (SCI)
Défendeur :
LAROCHE (Consorts)
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. BOULY de LESDAIN
Conseillers :
Mme LEBE, M. MAUBREY
Avoués :
Me CORDEAU, Me BODIN-CASALIS
Avocats :
SELARL SOLARO ET LAPORTE - CABINET D'AVOCATS, Me SILVE
Prononcé publiquement et solennellement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile
Signé par Renaud BOULY de LESDAIN, Président, et par Carole TREJAUT, Greffier, à laquelle la minute du présent arrêt a été remise par le magistrat signataire.
LA COUR, statuant sur renvoi de cassation et annulation dans toutes ses dispositions d'un arrêt rendu le 23 novembre 2005 par la Cour d'Appel de Paris,
Vu le jugement prononcé le 8 avril 2004 par le Tribunal de Grande Instance de
PARIS qui a déclaré le bail du 30 avril 2001 opposable à la SCI EST STRASBOURG, et les époux LAROCHE occupants réguliers des lieux loués, a débouté la SCI EST STRASBOURG et Mme DHAUSSY de leurs demandes et a condamné la SCI EST STRASBOURG a versé aux époux LAROCHE la somme de 1.500 euros au titre de l'article 700 du Code de Procédure Civile,
Vu les conclusions déposées le 26 février 2008 par la SCI EST STRASBOURG qui conclut à l'infirmation du jugement de première instance et demande à la Cour de constater l'inopposabilité tant du bail que de la cession de celui-ci, de dire que les époux LAROCHE sont occupants sans droit ni titre, d'ordonner leur expulsion, de fixer l'indemnité d'occupation ainsi que de condamner M et Mme LAROCHE à lui payer les sommes de 1.500 euros à titre de dommages intérêts, 3.050 euros au titre des honoraires d'avocat exposés dans la première procédure d'appel, 2.400 euros au titre des frais d'avoués et de 6.000 euros au titre de l'article 700 du Code de Procédure Civile,
Vu les conclusions déposées le 26 novembre 2007 par les époux LAROCHE qui sollicitent la confirmation de la décision entreprise et la condamnation de la SCI EST STRASBOURG à leur verser la somme de 2.000 euros au titre de l'article 700 du Code de Procédure Civile,
Vu l'ordonnance de clôture prononcée le 17 avril 2008,
SUR QUOI
Considérant qu'il ressort des pièces et documents régulièrement versés aux débats que La SCI EST STRASBOURG a donné à bail le 1er octobre 1992 aux époux LENOIR une boulangerie pâtisserie sise [...] moyennant un loyer annuel de 80.000 F (12.195,92 euros) ; que les époux LENOIR ont cédé leur fonds aux époux DUVALLET, lesquels l'ont ensuite cédé, en juin 2002, aux époux LAROCHE en signant concomitamment à l'acte de vente un acte de cession de bail faisant référence au bail consenti le 30 avril 2001 pour une durée de neuf années à compter du 1er avril 2001 ; que la SCI EST STRASBOURG a alors indiqué qu'elle ignorait l'acte du 30 avril 2001 et qu'elle n'avait ni donné congé ni signé de renouvellement de bail ; qu'elle a alors assigné les époux LAROCHE pour entendre juger que le bail du 30 avril 2001 et la cession de juin 2002 lui sont inopposables, que les époux LAROCHE sont occupants sans droit ni titre, et obtenir leur expulsion ; que c'est dans ces conditions qu'est intervenu le jugement déféré dont le dispositif a été précédemment rappelé ;
Considérant que la SCI EST STRASBOURG soutient que la signature figurant sur le document intitulé bail commercial en date du 30 avril 2001 n'est pas la sienne et qu'en conséquence, cet acte et la cession postérieure du bail lui sont inopposables ; que les époux LAROCHE font valoir que la SCI bailleresse a délivré des quittances de loyer portant le nouveau montant fixé dans le document contesté et que, d'autre part, Maître HADJI, avocat de la SCI, avait adressé le bail en indiquant qu'il était signé par la propriétaire ;
Considérant que la comparaison des signatures figurant sur le bail initial du 1er octobre 1992 avec celle du bail contesté en date du 30 avril 2001 fait apparaître que les signatures sont différentes et que ce n'est pas la signature de Mme DHAUSSY épouse HADJI qui figure sur le contrat du 30 avril 2001 ;
Considérant, cependant, que l'écrit est « ad probationem » et non « ad validitatem » ; qu'en l'espèce, il apparaît que Maître Michel HADJI, avocat à la Cour d'Appel de Paris et fils de Mme Pauline DHAUSSY-HADJI, a adressé antérieurement au bail du 30 avril 2001 deux courriers à M. MAUPU, mandataire des époux DUVALLET, dans lesquels il indiquait, le 14 mars 2001 « la SCI EST STRASBOURG vient de me communiquer copie de votre correspondance du 9 janvier dernier. Ma cliente est d'accord pour procéder au renouvellement du bail moyennant bien sûr l'application des nouveaux indices. Je vous souhaite bonne réception de la présente » et le 15 mai 2001 « Je vous prie de bien vouloir trouver ci-joint le bail signé par ma cliente. Je vous en souhaite bonne réception. » ;
Considérant que la SCI EST STRASBOURG indique que Maître HADJI n'avait pas reçu mandat pour conclure le renouvellement objet des débats ; que, toutefois, la teneur des courriers cités ci-dessus fait apparaître que cet avocat, fils de Mme DHAUSSY-HADJI, qui n'a jamais au cours de la procédure indiqué qu'il aurait agi sans instruction de la gérante de la SCI, était parfaitement au courant de la demande de renouvellement de bail et a pu transmettre un nouveau contrat faisant mention du loyer révisé qui a été repris sur les quittances de loyer délivrées par la suite ;
Considérant que le mandant est obligé envers les tiers lorsque ceux-ci ont pu légitimement croire que le mandataire agissait en vertu d'un mandat et dans les limites de celui-ci ; qu'il faut que la croyance des tiers à l'étendue des pouvoirs du mandataire soit légitime ; qu'en l'espèce, les correspondances émanant d'un avocat, se trouvant de plus être le fils de la gérante de la SCI propriétaire, permettaient légitimement aux époux DUVALLET de penser que les pouvoirs de ce mandataire étaient légitimes et les autorisaient à ne pas vérifier les limites de ceux-ci ;
Considérant, en conséquence, qu'il convient de confirmer le jugement critiqué en toutes ses dispositions ;
PAR CES MOTIFS
Confirme la décision déférée ;
Condamne la SCI EST STRASBOURG à payer à M et Mme LAROCHE la somme de 2.000 euros (deux mille euros) au titre de l'article 700 du Code de Procédure Civile ;
Condamne la SCI EST STRASBOURG aux dépens avec le bénéfice de l'article 699 du code de procédure civile pour l'avoué adverse.