Cass. soc., 12 novembre 2008, n° 07-44.636
COUR DE CASSATION
Arrêt
Rejet
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Bailly
Avocat :
Me Blondel
Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Dijon, 13 septembre 2007), que M. X... a été engagé le 26 septembre 2001 par la société Crédit immobilier de Champagne, devenue depuis la société d'intérêt collectif pour l'accession à la propriété Sud-Champagne (la société), en qualité de directeur général salarié, chargé notamment d'assurer la direction des services de la société, sous l'autorité de son président ; qu'en décembre 2001, le conseil d'administration a décidé de le nommer directeur général, avec des pouvoirs étendus ; qu'à la suite de l'entrée en vigueur de la loi du 15 mai 2001 sur les nouvelles régulations économiques, M. X... s'est vu confier par le conseil d'administration le mandat social de directeur général, en avril 2003 ; que ce mandat a été révoqué le 7 janvier 2005, M. X... étant par ailleurs licencié le 13 janvier 2005 pour faute grave ;
Attendu que la société fait grief à l'arrêt d'avoir, après infirmation du jugement, jugé que la juridiction prud'homale était compétente pour connaître des demandes indemnitaires de M. X..., alors, selon le moyen :
1°/ que l'existence d'une relation de travail ne dépend ni de la volonté exprimée par les parties ni de la dénomination qu'elles ont donnée à leur convention mais des conditions de fait dans lesquelles est exercée l'activité de l'intéressé ; qu'en l'espèce, pour déclarer la juridiction prud'homale compétente pour statuer sur les demandes de M. X..., la cour se borne à considérer que le contrat de travail consacrait l'existence, dans son principe, d'un état de subordination à l'égard du président du conseil d'administration pour l'exercice des fonctions de directeur général ; qu'en statuant ainsi, sans rechercher, comme l'y invitaient les conclusions de la société Crédit immobilier de Champagne si M. X... ne bénéficiait pas en vertu d'une délibération du conseil d'administration d'une délégation de pouvoirs pour diriger la société, la cour ne justifie pas légalement sa décision au regard de l'article 12 du code de procédure civile, ensemble l'article L. 121-1 du code du travail ;
2°/ qu'en tout état de cause, tout jugement doit être motivé à peine de nullité et que le défaut de réponse à conclusions constitue le défaut de motifs ; qu'en l'espèce, pour déclarer la juridiction prud'homale compétente pour statuer sur les demandes de M. X..., la cour considère qu'avant le 6 mai 2003, il n'est pas établi que M. X... bénéficiait dans l'exercice de ses fonctions de directeur général de l'indépendance inhérente à l'exercice d'un mandat social ; qu'en statuant ainsi, sans répondre aux conclusions de la société Crédit immobilier de Champagne qui soutenaient que par délibération du conseil d'administration du 13 décembre 2001, M. X... avait reçu délégation pour exercer les pouvoirs les plus étendus au sein de la société, la cour n'a pas satisfait aux exigences de l'article 455 du code de procédure civile ;
3°/ que modifie les termes du litige, en violation de l'article 4 du code de procédure civile, la cour d'appel qui affirme que la société Crédit immobilier de Champagne ne produit aucun document interne antérieur au 9 mai 2003 qui établirait que M. X... a bénéficié de l'indépendance inhérente à l'exercice d'un mandat social, cependant que l'exposante a produit la délibération du conseil d'administration du 13 décembre 2001 qui transfère les pouvoirs les plus étendus à M. X... pour diriger la société ;
4°/ que le juge doit examiner tous les éléments de preuve qui lui sont soumis et procéder à une analyse au moins sommaire de ces éléments ; qu'en l'espèce, l'exposante a versé aux débats le procès-verbal du conseil d'administration du 10 avril 2003 qui indique qu'à titre de régularisation au regard de la loi du 15 mai 2001, la proposition de confirmer M. X... dans ses fonctions de directeur général a été adoptée ; qu'en se fondant uniquement sur la délibération du 6 mai 2003 du conseil d'administration qui se borne à confirmer cette nomination et à limiter la durée du mandat, sans examiner ni s'expliquer sur la délibération du 10 avril 2003 de nature à démontrer la continuité des fonctions de M. X..., la cour ne satisfait pas aux exigences de l'article 455 du code de procédure civile ;
Mais attendu d'abord, qu'après avoir exactement retenu qu'en présence d'un contrat de travail apparent, il appartient à celui qui invoque son caractère fictif d'en rapporter la preuve, la cour d'appel, qui a constaté que M. X... n'était titulaire d'aucun mandat social lorsqu'il avait été engagé en septembre 2001 en qualité de cadre dirigeant salarié pour assurer la direction des services de la société sous l'autorité de son président et que son employeur ne rapportait pas la preuve du caractère fictif du contrat de travail alors conclu, en a déduit à bon droit, sans modifier les termes du litige et par une décision motivée, que le différend auquel donnait lieu sa rupture relevait de la juridiction prud'homale ;
Attendu ensuite qu'une désignation comme mandataire social au cours de l'exécution du contrat de travail ne pouvant avoir pour effet, sauf convention contraire, que de suspendre le contrat de travail, lorsque le salarié cesse d'être placé sous la subordination de la société, le moyen qui reproche à la cour d'appel de ne s'être pas expliquée sur les effets des pouvoirs conférés en décembre 2001 et en avril 2003 à M. X..., postérieurement à la conclusion du contrat de travail, est inopérant, dès lors que les délibérations alors adoptées par le conseil d'administration de la société ne pouvaient entraîner à elles seules la disparition du contrat de travail antérieurement conclu ;
Que le moyen ne peut être accueilli ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi.