Livv
Décisions

Cass. com., 20 janvier 1998, n° 94-15.135

COUR DE CASSATION

Arrêt

Rejet

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Bézard

Rapporteur :

M. Tricot

Avocat général :

M. Raynaud

Avocat :

SCP Piwnica et Molinié

Colmar, 1re ch. civ. 2, du 22 mars 1994

22 mars 1994

Attendu, selon l'arrêt déféré (Colmar, 22 mars 1994), qu'après la mise en redressement puis en liquidation judiciaires de la société Y... et fils, la cour d'appel a condamné M. Walter Y..., dirigeant de droit, et son fils, M. Bernard Y..., pris en qualité de dirigeant de fait, à payer les dettes de la société par application de l'article 180 de la loi du 25 janvier 1985 ;

Sur le premier moyen :

Attendu que M. Bernard Y... reproche à l'arrêt de l'avoir ainsi condamné à payer la somme de 500 000 francs alors, selon le pourvoi, que peut être qualifié de dirigeant de fait celui qui, directement ou par personne interposée, exerce une activité positive et indépendante dans l'administration générale de la société, sous le couvert ou au lieu et place de ses représentants légaux ; que la cour d'appel n'a relevé en l'espèce, que la participation de M. Bernard Y... à des réunions, le bénéfice d'une procuration sur les comptes et une délégation de signature en l'absence du dirigeant de droit, qui ne pouvaient traduire que l'existence d'un mandat ;

qu'en estimant néanmoins que M. Bernard Y... avait la qualité de dirigeant de fait, sans constater qu'il avait disposé d'un quelconque pouvoir d'initiative ou de décision, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 180 de la loi du 25 janvier 1985 ;

Mais attendu qu'après avoir relevé que le conseil de prud'hommes n'avait pas retenu la qualité de salarié de M. Bernard Y..., au motif qu'en l'absence de contrat de travail effectif et de lien de subordination, le fils n'exerçait aucune fonction technique véritable mais dirigeait la société, la cour d'appel a retenu que M. Bernard Y... avait été considéré par plusieurs décisions judiciaires comme l'un des dirigeants de la société ; qu'en l'état de ces constatations et appréciations, la cour d'appel, retenant la direction de fait de M. Bernard Y... depuis 1986, a légalement justifié sa décision ; d'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

Et sur le second moyen :

Attendu que MM. Walter et Bernard Y... reprochent à l'arrêt de les avoir condamnés à payer les dettes sociales à hauteur, respectivement, de 2 000 000 francs et 500 000 francs alors, selon le pourvoi, que l'action en paiement des dettes sociales a pour objet de faire supporter aux dirigeants les conséquences de leurs fautes de gestion ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a retenu, à la charge de MM. Y..., des fautes dont elle a, par ailleurs, constaté qu'elles avaient conduit à une condamnation définitive de ceux-ci par le tribunal correctionnel pour abus de biens sociaux ; qu'en décidant néanmoins de mettre à la charge de MM. Y... une partie de l'insuffisance d'actif de la société Y..., sans rechercher si le préjudice subi par cette société du fait des agissements litigieux n'avait pas déjà été totalement ou partiellement réparé dans le cadre de l'instance pénale, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 80 de la loi du 25 janvier 1985 ;

Mais attendu que MM. Y... n'ont pas prétendu devant la cour d'appel que la condamnation pénale prononcée à leur encontre pour abus de biens sociaux ait été assortie de leur condamnation à payer des dommages-intérêts à la société ; que, dès lors, le moyen qui reproche à la cour d'appel de n'avoir pas pris en compte de tels dommages-intérêts pour la détermination de l'insuffisance d'actif est nouveau et, mélangé de fait et de droit, irrecevable ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi.