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Décisions

Cass. com., 17 juillet 2001, n° 98-12.790

COUR DE CASSATION

Arrêt

Rejet

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Dumas

Rapporteur :

M. Delmotte

Avocat général :

M. Lafortune

Avocat :

Me Cossa

Paris, 3e ch. civ., sect. C, du 19 sept.…

19 septembre 1997

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 19 septembre 1997), qu'après la mise en redressement puis liquidation judiciaires de la société SMP Aublet (la société), le tribunal a, par jugement du 12 juin 1995, condamné M. X..., gérant de la société jusqu'au 30 septembre 1992, à payer les dettes sociales à concurrence de 500 000 francs et a prononcé contre lui une interdiction de diriger, gérer, administrer ou contrôler directement ou indirectement toute entreprise commerciale ou artisanale pour une durée de quinze ans ;

Sur le premier moyen :

Attendu que M. X... fait grief à l'arrêt d'avoir dit n'y avoir lieu à révocation de l'ordonnance de clôture et, en conséquence, d'avoir déclaré irrecevable la demande de sursis à statuer qu'il avait formée et écarté des débats les pièces communiquées postérieurement au 28 février 1997, alors, selon le moyen, qu'en considérant que la procédure pénale pendante dont il faisait état au soutien de sa demande de révocation de l'ordonnance de clôture n'était pas susceptible d'influer sur la solution du présent litige, dans le cadre duquel le liquidateur de la société lui reprochait un détournement d'actif, tout en constatant elle-même qu'il était poursuivi pénalement pour des faits de complicité de détournement d'actif, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences qui s'évinçaient légalement de ses propres constatations au regard de l'article 4 du Code de procédure pénale, ensemble l'article 784 du nouveau Code de procédure civile et les articles 180 et 197 de la loi n° 85-98 du 25 janvier 1985, qu'elle a ainsi violés ;

Mais attendu qu'en retenant que la connaissance qu'aurait eu M. X..., postérieurement à la clôture, de l'existence d'une procédure pénale, ne peut constituer une cause grave de révocation de cette clôture, au regard des dispositions de l'article 784 du nouveau Code de procédure civile, dès lors qu'il n'y a pas entre les procédures civiles et pénales identité d'objet et de cause, la cour d'appel a légalement justifié sa décision ; que le moyen n'est pas fondé ;

Sur le deuxième moyen :

Attendu que M. X... fait encore grief à l'arrêt d'avoir confirmé le jugement qui a prononcé contre lui une interdiction de gérer, alors, selon le moyen, qu'en considérant que la cession d'un élément d'outillage par la société à la société Microclim était constitutive d'un détournement d'actif qui lui était imputable sans préciser de quels éléments du débat s'évinçait la matérialité de la fraude, mais en se bornant à faire référence, d'une part, aux énonciations du jugement entrepris, bien que celui-ci ne comportât pas le moindre motif relatif à cette question, et, d'autre part, au fait qu'il n'avait pas justifié de la régularité de l'opération de cession litigieuse, considération inopérante dès lors que, n'ayant pas caractérisé elle-même une quelconque présomption d'irrégularité à l'encontre de ladite opération, elle ne pouvait exiger qu'il rapporte la preuve de sa régularité, la cour d'appel a privé sa décision de fondement légal au regard des articles 182, 188 et 189 de la loi n° 85-98 du 25 janvier 1985 ;

Mais attendu que loin de se borner à faire référence aux seules énonciations des premiers juges, l'arrêt retient, par motifs propres, que M. X... a détourné partie de l'actif social en facturant à une société Microclim, dirigée par son frère du matériel à un prix qui ne correspondait pas à la valeur réelle du bien et qu'il ne fournit aucune pièce justificative à l'appui de son affirmation selon laquelle "les opérations de cession invoquées par le mandataire sont régulières au vu des pièces comptables" ; que la cour d'appel a ainsi légalement justifié sa décision ; que le moyen n'est pas fondé ;

Et sur le troisième moyen, pris en ses deux branches :

Attendu que M. X... fait enfin grief à l'arrêt d'avoir confirmé le jugement qui l'a condamné au paiement des dettes sociales, alors, selon le moyen :

1 / qu'en considérant que la cession d'un élément d'outillage par la société à la société Microclim était constitutive d'un détournement d'actif qui lui était imputable sans préciser de quel élément du débat s'évinçait la matérialité de cette fraude, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 180 de la loi n° 85-98 du 25 janvier 1985 ;

2 / qu'en décidant que la poursuite d'une activité déficitaire depuis l'exercice 1990 jusqu'au 30 septembre 1992 constituait une faute de gestion qui lui était imputable sans caractériser l'intérêt personnel qu'il y aurait trouvé, la cour d'appel n'a pas justifié légalement sa décision au regard de l'article 180 de la loi n° 85-98 du 25 janvier 1985 ;

Mais attendu, d'une part, que les faits de détournement d'actif qui ont été retenus pour justifier l'interdiction de gérer, constituent en eux-mêmes des fautes de gestion ;

Attendu, d'autre part, que la faute de gestion pouvant entraîner la condamnation d'un dirigeant au paiement des dettes sociales en application de l'article 180 de la loi du 25 janvier 1985, devenu l'article L. 624-3 du Code de commerce peut exister, indépendamment du fait que le dirigeant a agi dans un intérêt personnel ; que l'arrêt relève, par motifs propres et adoptés, que la poursuite par M. X... d'une activité lourdement déficitaire depuis l'exercice 1990 jusqu'au 30 septembre 1992, l'absence de tenue d'une comptabilité régulière depuis le 30 septembre 1990 et la dissimulation de la situation réelle de la société lorsqu'il a démissionné de ses fonctions de gérant, caractérisent des fautes de gestion qui ont contribué à l'insuffisance d'actif ; qu'ainsi, la cour d'appel a légalement justifié sa décision ;

D'où il suit que le moyen n'est fondé en aucune de ses branches ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi.