Cass. 3e civ., 3 octobre 2007, n° 06-16.361
COUR DE CASSATION
Arrêt
Rejet
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Weber
Rapporteur :
M. Assié
Avocat général :
M. Guérin
Avocats :
SCP Vier, Barthélemy et Matuchansky, SCP Waquet, Farge et Hazan
Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Versailles, 9 février 2006), rendu en matière de référé, que, par acte du 20 octobre 2004, Mme X..., propriétaire de locaux à usage commercial donnés à bail à la société Visha, lui a fait délivrer un commandement de payer une certaine somme à titre d'arriéré de loyers et de charges, puis l'a assignée en constatation de la résiliation du bail par acquistion de la clause résolutoire et en expulsion ;
Attendu que Mme X... fait grief à l'arrêt de prononcer la nullité du commandement du 20 octobre 2004 et d'ordonner la réintégration de la locataire dans les lieux loués, alors, selon le moyen :
1°/ que le commandement litigieux prévoyait clairement et sans ambiguïté que, s'il restait sans effet, au bout de huit jours, la bailleresse entendait recourir à une saisie-vente, et que s'il continuait à rester sans effet, au bout de deux mois, la bailleresse entendait se prévaloir de la clause résolutoire de plein droit ; que cet acte clair démontrait que la bailleresse entendait, au bout de huit jours, recourir à des mesures de paiement forcé, et à défaut d'exécution, faire jouer la clause résolutoire au bout de deux mois ; qu'en affirmant que cet acte n'aurait pas clairement indiqué au locataire ce qui lui était demandé, et la sanction des délais qui lui étaient impartis, la cour d'appel a dénaturé ledit acte et violé l'article 1134 du code civil ;
2°/ que le délai d'un mois prévu par l'article L. 145-41 du code de commerce à l'expiration duquel la clause résolutoire peut prendre effet, est un délai minimal, auquel le bailleur peut volontairement renoncer, en octroyant à son locataire un délai supérieur pour s'acquitter de ses obligations ; que ne viole donc pas les droits de la défense ni l'article L. 145-41 précité le commandement qui octroie au débiteur deux mois pour s'acquitter de son obligation avant mise en oeuvre de la clause résolutoire ; que la cour d'appel a violé par fausse application l'article L. 145-41 du code de commerce et les droits de la défense ;
3°/ que de la même façon, le bailleur peut volontairement octroyer à son locataire, dans le commandement qu'il lui délivre, un délai supérieur au délai prévu par le contrat ; qu'un tel procédé ne porte aucunement atteinte aux droits du locataire ; que la cour d'appel a violé par fausse application l'article 1134 du code civil et les droits de la défense ;
4°/ que le commandement qui fait injonction de payer une somme déterminée dans un délai de deux mois sous peine de recours à la clause résolutoire, avec indication de ce que le bailleur se réserve auparavant d'obtenir un règlement forcé par voie de saisie, ne fait aucun grief au locataire, parfaitement informé de ses obligations, et que ce commandement est donc valable ; que la cour d'appel a donc violé les articles 1184 et 1134 du code civil, L. 145-41 et L. 145-15 du code de commerce, ainsi que les droits de la défense par fausse application ;
Mais attendu qu'ayant relevé que le commandement délivré le 20 octobre 2004 à la société Visha visait la loi du 6 juillet 1989 qui ne concerne que les baux d'habitation, que cette référence à des textes sans rapport avec les baux de locaux commerciaux était de nature à tromper la société locataire sur les causes et la portée du commandement qu'elle recevait, que cet acte faisait en outre commandement de payer une somme en visant, d'une part, un délai de huit jours sous peine de saisie-vente et, d'autre part, un délai de deux mois autorisant le bailleur à se prévaloir de la clause résolutoire insérée au bail, que l'indication de deux délais qui ne se référaient pas aux mêmes conséquences de droit était source de confusion pour le destinataire, la cour d'appel, abstraction faite de motifs surabondants et sans dénaturation de l'acte du 20 octobre 2004, a pu en déduire que les irrégularités ou les imprécisions affectant cet acte n'avaient pas permis à la société Visha de prendre la mesure exacte des injonctions et d'y apporter une réponse appropriée dans le délai requis et qu'il convenait en conséquence d'en prononcer la nullité ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi.