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Décisions

Cass. 1re civ., 9 janvier 2007, n° 04-11.779

COUR DE CASSATION

Arrêt

Rejet

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Ancel

Rapporteur :

Mme Ingall-Montagnier

Avocat général :

M. Sarcelet

Avocats :

SCP Piwnica et Molinié, SCP Tiffreau

Paris, du 10 nov. 2003

10 novembre 2003

Sur le moyen unique, après avis de la deuxième chambre civile :

Attendu, selon l'arrêt confirmatif attaqué (Paris, 10 novembre 2003), que la société Eridania Beghin Say (EBS) a fait assigner l'Etablissement public d'aménagement de la ville nouvelle de Melun-Senart (EPA Senart) devant le tribunal de grande instance de Melun aux fins de le voir condamner, sur le fondement de l'article 1382 du code civil, à la dédommager des sommes qu'elle avait été contrainte de verser à la société Marto, dans le cadre du contentieux l'opposant à cette entreprise ; que l'EPA Senart a soulevé, in limine litis, une exception tirée de la compétence du juge administratif et, à titre subsidiaire, du juge commercial ; que le tribunal de grande instance, après avoir écarté la compétence administrative, s'est déclaré incompétent au profit du tribunal de commerce ;

Attendu que l'EPA Senart fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir confirmé le jugement ayant déclaré le tribunal de grande instance incompétent au profit du tribunal de commerce, alors, selon le moyen :

1°/ que si le demandeur à une exception de compétence doit faire connaître à peine d'irrecevabilité la seule juridiction devant laquelle il demande que l'affaire soit portée, cette règle n'est pas applicable lorsqu'il invoque la compétence de deux juridictions de nature différente ; qu'en déclarant irrecevable l'exception d'incompétence qu'il a soulevée au profit du juge administratif en ce qu'il invoquait également à titre subsidiaire la compétence du juge commercial, la cour d'appel a violé par fausse application l'article 75 du nouveau code de procédure civile ;

2°/ que le principe à valeur constitutionnelle de séparation des juridictions de l'ordre administratif et judiciaire exige que le juge judiciaire dont la compétence est contestée au profit du juge administratif se prononce sur ce point, sans s'arrêter à la circonstance que la compétence d'un autre juge de l'ordre judiciaire ait été également invoquée ; que la circonstance qu'il ait invoqué à titre subsidiaire la compétence du juge commercial ne pouvait faire obstacle à ce que la cour d'appel, dont la compétence était contestée à titre principal au profit de celle du juge administratif, se prononce sur ce point ; que ce faisant, la cour d'appel, qui a ainsi renvoyé le litige devant le juge commercial sans s'assurer qu'il relevait bien de la compétence du juge judiciaire, a violé le principe de séparation des juridictions de l'ordre judiciaire et administratif et les dispositions de la loi des 16-24 août 1790 ;

Mais attendu d'une part que l'article 75 du nouveau code de procédure civile impose que le demandeur à l'exception d'incompétence désigne la juridiction devant laquelle il demande que l'affaire soit portée, et interdit, hors le cas où il existe une option de compétence, qu'il se dispense de faire un choix en opérant une désignation principale accompagnée d'une désignation subsidiaire ; que cette règle s'applique aussi lorsque les juridictions respectivement revendiquées ne relèvent pas du même ordre de juridiction ; qu'ainsi la cour d'appel a exactement retenu que l'EPA Senart n'était pas recevable à désigner comme principalement compétent le tribunal administratif de Melun et, subsidiairement le tribunal de commerce de Melun ;

Et attendu, d'autre part, que la cour d'appel a, par motifs adoptés, écarté la compétence des juridictions administratives ;

D'où il suit que le moyen non fondé en sa première branche est inopérant en sa seconde ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi.