Cass. 1re civ., 22 novembre 1994, n° 92-21.792
COUR DE CASSATION
Arrêt
Rejet
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. de Bouillane de Lacoste
Rapporteur :
Mme Lescure
Avocat général :
Mme Le Foyer de Costil
Avocat :
SCP Le Bret et Laugier
Sur le moyen unique, pris en ses deux branches :
Attendu, selon les énonciations de l'arrêt attaqué (Poitiers, 16 septembre 1992), qu'en 1983, MM. Maurice Y..., Maurice-Marie Y... et Marc X... ont constitué une société civile professionnelle d'avocats ; que l'article 12 des statuts prévoyait que "la part de chaque associé dans les bénéfices, après prélèvement de la rémunération des parts sociales, est proportionnelle à son apport en industrie tel qu'énoncé à l'article 6 ; les associés se réservent le droit de modifier cette répartition lors d'une assemblée générale convoquée à cet effet et statuant à l'unanimité" ; qu'en 1986, les associés sont convenus du retrait de M. X... ; qu'un litige les a alors opposés concernant la répartition des résultats ; qu'après avoir obtenu en référé une expertise comptable, les parties ont sollicité l'arbitrage du bâtonnier qui, se fondant sur les dispositions statutaires, a décidé que M. X... devait payer à la SCP et à MM. Y..., créanciers solidaires, la somme de 131 797 francs correspondant à un trop perçu sur les bénéfices réalisés du 1er novembre 1983 au 31 décembre 1986 ; que, sur appel de M. X..., la cour d'appel a réformé la sentence arbitrale, déboutant la SCP et MM. Y... de ce chef de prétentions ;
Attendu que ceux-ci font grief à l'arrêt d'avoir ainsi statué, alors, selon le moyen, d'une part, que, liée comme les parties elles-mêmes par le contrat de société, la cour d'appel ne pouvait pas substituer une répartition nouvelle des bénéfices à celle résultant de façon précise de l'article 12 des statuts, dès lors que les associés n'avaient pas usé de la procédure de modification inscrite dans cet article, ce que cette juridiction a constaté en rappelant que le projet de résolution en ce sens n'avait pas été maintenu lors de l'assemblée générale du 7 août 1986 ; qu'en se bornant à retenir, en l'absence de tout autre écrit antérieur, des éléments soit négatifs, tels que le défaut de contestations des associés ou un projet non réalisé, soit inopérants, s'agissant de déclarations fiscales ayant un objet étranger à toute modification statutaire, la cour d'appel a privilégié une volonté de substituer une répartition de fait à la répartition statutaire au prix d'une violation de la loi des parties et des articles 1134 du Code civil et 12 des statuts ; alors, d'autre part, qu'en décidant qu'une modification des règles de la répartition fixées par le pacte social pouvait résulter d'une "intention des parties" non exprimée dans la forme collective d'un vote en assemblée, exigée tant par la loi que par les statuts, leur imposant de respecter la personnalité morale à laquelle ils avaient accepté de se soumettre, l'arrêt a violé l'article 1134 du Code civil et, par refus d'application, les articles 1er, alinéa 3, 13 et 14 alinéa 2, de la loi du 29 novembre 1966 ;
Mais attendu que, constatant que les prélèvements sur les bénéfices, opérés par M. X... de 1983 à 1986, l'avaient été d'un commun accord avec ses associés et retenant comme certaine l'intention des parties de s'en tenir à la répartition ainsi effectuée, la cour d'appel a justement décidé qu'il n'y avait pas lieu de revenir sur cette répartition, même si elle n'était pas conforme aux dispositions statutaires ; qu'il s'ensuit que le moyen n'est fondé en aucune de ses branches ;
Sur la demande présentée au titre de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile :
Attendu que M. X... sollicite sur le fondement de ce texte l'allocation d'une somme de 10 000 francs ;
Mais attendu qu'en équité, il n'y a pas lieu à cette condamnation ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi.