CA Chambéry, ch. civ. sect. 1, 1 juin 2021, n° 18/01002
CHAMBÉRY
Arrêt
Autre
PARTIES
Défendeur :
Financiere Kartesis (SAS), Induspo (SARL)
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Ficagna
Conseillers :
Mme Fouchard, Mme Real Del Sarte
La société Financière Kartesis a été créée le 8 octobre 2013, à l'initiative de plusieurs chefs d'entreprise :
- M. Thierry C.
- M. Jean-Claude P.
- M. C.
- et M. Z.,
dans le but de regrouper plusieurs sociétés de Haute-Savoie, spécialisées dans la fabrication et/ou la commercialisation de composants de précision pour l'industrie automobile avec pour objectif : 'd'atteindre une taille critique nécessaire pour faire face aux contraintes du marché' et de 'développer une activité complémentaire dans le secteur du turbo'.
Cette opération s'est concrétisée par apport en nature des parts ou des activités des sociétés réunies au sein du nouveau groupe Kartesis, lesquels apports ont été rémunérés par un certain nombre d'actions de la société Financière Kartesis.
Ainsi, la société Holding 2P, contrôlée par M. Jean-Claude P. et Mme Chantal C., a apporté les titres de la société 2P, laquelle détenait l'intégralité du capital social des sociétés Bargy décolletage et Bargy SK SRO , en contrepartie de 2 348 000 actions de 1 € de la société Financière Kartesis, représentant 12,54 % du capital.
Sont entrés également au capital de la société Karsetis, des investisseurs financiers qui ont apporté des fonds pour accompagner le développement de la nouvelle structure.
La société Kartesis a ainsi été capitalisée à hauteur de 18 710 000 €.
Aux termes de la même décision du 17 décembre 2013, la société Kartesis a en outre décidé :
- une augmentation de capital par apport en numéraire de 9 594 679 €, par l'emission de 9 594 679 actions nouvelles, permettant l'entrée au capital de partenaires financiers, et également de la société Blumeca ( M. C.) et de M. et Mme C. ...
- l'émission de 2 150 000 bons de souscription d'actions (BSA) au prix de 110 000 €, donnant droit au titulaire de souscrire au moyen de chaque bon une action nouvelle.
On été nommés comme premiers dirigeants 'clés' et membres du conseil d'administration :
- M. Pierre Z., président,
- M. Thierry C.,
- M. Christian C.,
- M. Jean-Claude P., directeur général.
et comme experts sectoriels :
- M. David C.,
- M. Yves C..
Les actionnaires ont conclu le même jour, un pacte d'associés et les quatre fondateurs ont conclu entre eux, une promesse unilatérale de vente des titres détenus par eux ou par les sociétés contrôlées par eux, au bénéfice des autres.
La société Kartesis a recueilli pour principal client, la société de droit américain Borg Warner, client des sociétés Bargy et FCMP, et dont le directeur des achats était M. Donald L., avec lequel M. C. était entré en discussion avant la constitution du groupe Kartesis, pour une embauche en qualité de directeur au sein du nouveau groupe.
Des désaccords sont rapidement survenus au sein de l'équipe dirigeante, provoquant le départ de M. C. en 2015 ainsi que celui de M. C..
A cette occasion la promesse de vente signée par la société Blumeca ( M. C.), a été mise en oeuvre au profit des trois autres bénéficiaires de la promesse de sorte que la société H2P a acquis 150 000 actions supplémentaires et 716 667 bons de souscription d'action.
Peu après, M. Jean-Claude P. est entré en conflit avec MM. C. et Z., à propos de la stratégie de la société, notamment au sujet du rôle de M. David C..
Estimant avoir été victime d'un dol lors de la constitution du groupe Karsetis, par la dissimulation du projet d'embauche de M. Donald L., M. P. a saisi un avocat lequel annonçait, notamment, au président de la société Kartesis en avril 2016, qu'il préparait une action en annulation des actes souscrits par M. P., Mme C. et la société H2P.
Au regard de la gravité de ces désaccords, un conseil d'administration a été convoqué pour le 26 juillet 2016 lequel a décidé de soumettre la révocation des mandats de M. P., à l'approbation d'une future assemblée générale.
Aux termes de ce conseil d'administration, il a été noté au procès-verbal que : la direction du groupe connait de graves dysfonctionnements du fait des abstentions et oppositions quasiment systématiques de M. Jean-Claude P., sur des questions importantes concernant le groupe. Il constate par ailleurs une absence de vision partagée sur l'évolution du groupe et de graves désaccords à cet égard. M. Jean-Claude P. souhaite connaître les raisons qui pourrait conduire à une remise en cause de ses mandats.M. Jean -Claude P. considère le vote comme la possibilité de s'opposer à une décision.
M. Thierry C. souligne la différence des objectifs des administrateurs :
- M. Jean-Claude P. souhaite sortir Bargy Decolletage du groupe Kartesis et ne diriger que cette entité,
- les autres administrateurs souhaitent développer le groupe dans son périmètre actuel.
L'assemblée a été convoquée le 3 août 2016 pour se tenir le 30 août 2016.
Entre temps , par acte du 18 août 2016, M. Jean Claude P. et Mme Chantal C., conjointement avec la société Holding 2P, ont assigné devant le tribunal de commerce d'Annecy, la société Financière Kartesis, en nullité du traité d'apport, du pacte d'associés ainsi que de l'ensemble des actes et engagements stipulés au protocole d'accord du 22 novembre 2013 et 17 décembre 2013.
L'assemblée générale du 30/08/2016 , constatant une faute grave de M. P., a voté les révocations sollicitées, à l'unanimité des actionnaires sauf M. P..
Par courrier du 26/10/2016, la société Induspo (M. Z.) et M. Thierry C. ont demandé la mise en œuvre de la promesse unilatérale de vente des titres de la société Financière Kartesis détenus par la société Holding 2P, en leur faveur, à hauteur pour chacun de :
- 1 412 500 € actions,
- 358 334 bons de souscription d'actions,
au prix prévu à l'article 4(c) de la promesse de vente, à savoir au prix unitaire de souscription réduit d'une décote de 20 % du fait de la révocation pour faute grave, étant précisé que cette levée d'option était suspendue :
- aux négociations amiables en cours,
- à l'obtention d'une décision de justice rejetant définitivement les demandes formulées suite à l'assignation du 18 août 2016.
Par jugement du 19 avril 2018, le tribunal de commerce d'Annecy a déclaré irrecevables les demandes d'annulation des actes pour dol, faute de mise en cause de l'ensemble des parties au protocole d'accord , du pacte d'associés etc., au total 22 parties.
Parallèlement, par acte du 18 janvier 2017, M. Jean Claude P. et la société Holding 2P ont assigné la société Financière Kartesis devant le tribunal de commerce d'Annecy aux fins d'obtenir la nullité des décisions de l'assemblée générale du 30 août 2016 le révoquant de ses mandats de directeur général et d'administrateur dans la société Financière Kartesis et à ordonner sa réintégration.
La société Induspo et M. Thierry C. sont intervenus volontairement à la procédure.
Les défendeurs ont formé des demandes reconventionnelles relativement à la mise en oeuvre de la promesse de vente des titres.
Par jugement en date du 29/03/2018, assorti de l'exécution provisoire, le tribunal de commerce d'Annecy a :
- débouté M. Jean Claude P. et la société Holding 2P de leur demande de nullité des décisions de l'assemblée générale du 30/08/2016 de la société Financière Kartesis,
- dit que M. Jean Claude P. n'a pas été révoqué pour faute grave,
- dit l'intervention volontaire de la société Induspo et de M. Thierry C. recevable,
- constaté la levée, par la société Induspo, de l'option d'achat des titres de la société Financière Kartesis envers la société Holding 2P,
- dit que l'achat de ces titres se fera au prix de 2.825.000€ et sera réglé par un chèque de banque,
- condamné M. Jean-Claude P. représentant légal de la société Holding 2P à signer les ordres de mouvement des 2.825.000 titres détenus par la société H2P dans la société Financière Kartesis contre remise par les bénéficiaires d'un chèque de banque de 2.825.000 € à l'ordre de la société Holding 2P, ce sous astreinte de 3.000 euros par jour de retard à compter du 15ème jour suivant la signification du présent jugement,
- condamné solidairement, d'une part M. Jean Claude P. et la société Holding 2P, d'autre part la société Financière Kartesis, la société Induspo et M. Thierry C. aux dépens par moitié.
M. P. et la société Holding 2P ont interjeté appel de cette décision.
Après mise en état, l'affaire a été fixée à l'audience de la cour du 3 décembre 2018.
Par arrêt avant dire droit du 18 décembre 2018, la cour a :
- ordonné la comparution personnelle des parties le 10/01/2019 à 14h30 à la cour d'appel de Chambéry,
- désigné le conseiller de la mise en état de la 1ère chambre civile pour y procéder,
- dit que le présent arrêt vaut convocation.
Par ordonnance du 26 septembre 2019, confirmée sur déféré par la cour par arrêt du 4 février 2020, le conseiller de la mise en état a rejeté les demandes de M. P. tendant à voir ordonner une expertise et à voir ordonner un sursis à statuer.
Aux termes de leurs conclusions n° 8 notifiées le 22 février 2021, M. Jean-Claude P. et la société Holding2P (H2P) demandent à la cour :
Vu l'article 1654 du code civil,
Vu les anciens articles 1131, 1134, 1152, 1161, 1149 anciens du code civil, Vu l'article 1120 nouveau du code civil,
Vu l'article 1844-1 alinéa 2 du code civil,
Vu l'article i" du protocole additionnel n°1 à la CESDH,
Vu les articles 2 et 17 de la DDHC,
Vu les articles 114 et 910-4 du code de procédure civile,
Vu les articles 129-4 alinéa 2 et 131-14 du code de procédure civile,
Vu l'article 910-4 du code de procédure civile,
Vu les pièces,
In limine litis,
- déclarer irrecevables, comme ne répondant pas aux exigences de l'article 910-4 du code de procédure civile, et infondées, les deux nouvelles demandes formulées pour la première fois par les intimés dans leur second jeu de conclusions, l'une portant sur la cession forcée de 716.688 bons de souscription, et l'autre sur l'octroi de dommages et intérêts à hauteur de 50.000 euros, outre une amende civile de 10.000 euros pour procédure abusive,
- déclarer recevables et bien fondées les demandes formées par M. Jean-Claude P. et la société Holding 2P, en ce qu'elles ne sont ni frappées par l'estoppel, ni par un défaut de la déclaration (lequel aurait dû être soumis à l'appréciation de M. Conseiller de la Mise en Etat par voie de conclusions spécialement adressées), ni par un défaut lié à la qualité à agir,
- confirmer le jugement déféré en ce qu'il a dit que M. P. n'avait pas commis de faute grave caractérisée justifiant sa révocation,
- réformer ou infirmer le jugement du tribunal de commerce d'Annecy du 29 mars 2018 en ce qu'il a :
1. débouté M. Jean Claude P. et la société Holding 2P de leur demande de nullité des décisions de l'assemblée générale du 30/08/2016 de la société Financière Kartesis alors qu'il apparaît que ces décisions étaient abusives, puisqu'elle avait pour seul objet de provoquer la cession forcée des titres de la société H2P en suite de la révocation des mandats de M. P.,
2. dit que l'achat des titres de la société Financière Kartesis se fera au prix de 2.825.000 euros (soit à leur prix de souscription) alors que la valeur des titres de la société Financière Kartesis a considérablement augmenté par rapport à leur valeur de souscription,
3. condamné M. Jean-Claude P. représentant légal de la société Holding 2P à signer les ordres de mouvement des 2.825.000 titres détenus par la société Holding 2P dans la société Financière Kartesis contre remise par les bénéficiaires d'un chèque de banque de 2.825.000 euros à l'ordre de la société Holding 2P, ce sous astreinte de 3.000 euros par jour de retard à compter du 15ème jour suivant la signification du présent jugement, alors que l'exercice de la promesse de vente par ses bénéficiaires était caduque,
4. condamné solidairement, d'une part M. Jean-Claude P. et la société H2P, d'autre part la société Financière Kartesis, la société Induspo et M. Thierry C. aux dépens par moitié,
5. omis de statuer sur la demande des appelants, qui l'invitaient à leur donner acte de ce qu'ils se réservaient la faculté de solliciter l'indemnisation du préjudice subi du fait de la mise en œuvre de la promesse unilatérale de vente des titres de la société Financière Kartesis, tout en sollicitant la désignation d'un expert avec pour mission de procéder à la valorisation des titres de la société Financière Kartesis au jour du 18 aout 2016,
Et statuant de nouveau,
A titre principal,
Vu l'article 6 de la promesse unilatérale consentie par la société Holding 2P qui dispose que la cession des titres devra avoir lieu au plus tard dans les quatre-vingt-dix (90) jours suivant l'exercice de l'option d'achat,
Vu l'exercice en date du 26 octobre 2016 de l'option d'achat résultant de ladite promesse par la société Financière Induspo et par M. Thierry C.,
- déclarer que la cession devait intervenir le 27 janvier 2017 au plus tard,
Vu l'absence de paiement du prix malgré plusieurs relances,
- déclarer caduque la levée de l'option d'achat par les bénéficiaires, ou à défaut,
- ordonner la résolution de la vente, en raison du manquement des bénéficiaires à leur obligation de paiement du prix dans le délai susvisé,
- déclarer en conséquence que la société H2P est toujours associée de la société Financière Kartesis,
A titre subsidiaire,
Vu le dernier alinéa de l'article 4 c) de la promesse unilatérale de vente qui prévoit que lorsque la faute grave invoquée pour justifier la révocation de M. P. n'est pas caractérisée par une décision de justice définitive, les bénéficiaires de la Promesse ayant levé l'option d'achat des titres "verseront au promettant un complément de prix de vente égal à la différence entre le prix de cession des titres calculé conformément à ce qui est indiqué en Annexe 2, et le prix déjà versé, augmenté des intérêts légaux à compter de la date de paiement de la partie du Prix de Cession déjà versée au promettant",
Vu l'absence d'Annexe 2 visée par cette clause dans le contrat de promesse,
- juger que l'article 4 b) de la promesse unilatérale de vente est dépourvu de cause, constitue une clause léonine et se trouve être contraire aux droits fondamentaux et en particulier au droit de propriété, et écarter en conséquence l'application de cette disposition au présent litige,
En conséquence,
- dire et juger que le transfert des titres susvisés se fera au prix de 6.682.000 euros (soit à leur valeur résultant des derniers comptes sociaux disponibles de la société Kartesis - fin 2019) ou à titre subsidiaire, au prix de 6.017.000 euros (soit à leur valeur au jour de la levée de l'option par les bénéficiaires de la promesse - fin 2016),
- condamner chacun des bénéficiaires de la promesse ayant exercé leur option d'achat à remettre à la société Holding 2P un chèque de banque d'un montant de 3.341.000 euros (selon valeur à fin 2019) ou à titre subsidiaire, d'un montant de 3.008.500 euros (selon valeur à fin 2016) contre signature par M. Jean-Claude P. des ordres de mouvement des 2.825.000 titres susvisés et ce, sous astreinte de 3.000 euros par jour de retard à compter du 15ème jour suivant la signification de l'arrêt, précisant qu'une telle astreinte courra à l'encontre de toutes les parties, chacune pour les obligations la concernant,
A titre très subsidiaire,
- dire et juger que l'article 4 de la promesse unilatérale de vente constitue en réalité une clause pénale,
- dire et juger que les sanctions qui résultent de cette clause pénale pour la société Holding 2P sont totalement disproportionnées eu égard au fait que la société Holding 2P n'a elle-même commis personnellement aucune faute,
En conséquence,
- réviser le prix fixé par le tribunal en application de l'article 4(b) de la promesse de vente et - dire et juger que le transfert des titres susvisés se fera au prix de 6.682.000 euros (selon valeur à fin 2019) ou à titre subsidiaire, au prix de 6.017.000 euros (selon valeur à fin 2016),
- condamner en conséquence chacun des bénéficiaires de la promesse ayant exercé leur option d'achat à remettre à la société Holding 2P un chèque de banque d'un montant de 3.341.000 euros (selon valeur à fin 2019) ou à titre subsidiaire, d'un montant de 3.008.500 euros (selon valeur à fin 2016) contre signature par M. Jean-Claude P. des ordres de mouvement des 2.825.000 titres susvisés et ce, sous astreinte de 3.000 euros par jour de retard à compter du 15ème jour suivant la signification de l'arrêt, précisant qu'une telle astreinte courra à l'encontre de toutes les parties, chacune pour les obligations la concernant,
Si par impossible la Cour venait à dire recevable la demande portant sur la cession forcée de 716.688 bons de souscription,
- condamner les intimés à verser à la société H2P la somme de 981.833 euros (selon valeur à fin 2019), ou à titre subsidiaire, la somme de 809.834 euros (selon valeur à fin 2016), au titre de la perte de chance d'obtenir une plus-value en raison du non-exercice de ses bons de souscription d'actions,
En tout état de cause,
- confirmer le jugement déféré en ce qu'il a dit que M. P. n'avait pas commis de faute grave caractérisée justifiant sa révocation,
- dire et juger abusives et frauduleuses les circonstances de la révocation de M.Jean-Claude P., et condamner la société Financière Kartesis à lui verser la somme de 60.000 euros (50.000 euros à titre de préjudice matériel et 10.000 euros à titre de préjudice moral),
- débouter la société Financière Kartesis, la société Induspo, ainsi que M. C. de l'ensemble de leurs demandes, fins et conclusions contraires,
- condamner la Financière Kartesis, la société Induspo, ainsi que M. C. à verser à la société H2P et à M. Jean-Claude P. la somme de 30.000 euros à chacun au titre de l'article 700, et les condamner aux entiers dépens de première instance et d'appel, avec pour ces derniers application des dispositions de l'article 699 du code de procédure civile au profit de Maître Clarisse D. avocat.
Aux termes de leurs conclusions du 24 décembre 2019, la société Financière Kartesis (ci-après Kartesis), la société Induspo, et M.Thierry C. demandent à la cour :
Vu l'article L.225-7 du code de commerce,
Vu les articles 32-1, 562,564,565 du code de procédure civile,
Vu les articles 1134 et 1382 (ancien) du code civil,
Vu les statuts,
Vu la promesse unilatérale de vente signée le 17 décembre 2013,
Vu la jurisprudence et les pièces versées aux débats,
- rejeter la demande de sursis à statuer formulée par les appelants,
- dire et juger nouvelles en cause d'appel l'ensemble des demandes présentées par les appelants devant la Cour à l'exception des demandes présentées en tout état de cause,
- dire et juger que les appelants n'ont pas mentionné, sur leur déclaration d'appel, le chef de jugement relatif au constat de la levée de l'option d'achat,
- dire et juger en conséquence que l'effet dévolutif ne peut jouer à cet égard et que la Cour n'est pas saisie des demandes formulées à ce titre par M. P. et la société Holding 2P,
En conséquence,
- déclarer irrecevable l'intégralité les demandes présentées par M. P. et la société Holding 2P à titre principal, à titre subsidiaire et à titre très subsidiaire ainsi que l'intégralité des demandes présentées à l'encontre de la société Induspo et de M. C.,
- confirmer le jugement de première instance et notamment en ce qu'il a constaté la validité de la levée d'option à la date du 26/10/2016 et la cession concomitante des titres de Kartesis et l'infirmer seulement en ce qu'il a refusé de constater l'existence d'une faute grave ayant justifié la révocation pour faute grave de M. P.,
- infirmer le jugement de première instance en ce qu'il a refusé de constater l'existence d'une faute grave ayant justifié la révocation pour faute grave de M. P.,
Et statuant à nouveau,
- dire et juger que la faute grave ayant justifié la révocation de M. P. est caractérisée et que la mise en œuvre de la promesse de vente portera sur l'intégralité des actions et des bons de souscription d'actions de la société Kartesis détenus par la société Holding 2P, lesquels seront cédés à un prix par titre égal au prix unitaire de souscription réduit d'une décote de 20%,
En conséquence,
- condamner le représentant légal de la société Holding 2P en la personne de M. P. à signer les ordres de mouvement des 2.825.000 actions détenues par la société H2P dans la société Kartesis contre remise par les intimés d'un ou plusieurs chèques de banque d'un montant total de 2.260.000 € à l'ordre de la société Holding 2P,
- à défaut, et dans l'hypothèse où celui-ci ne déférerait pas à la présente condamnation dans un délai de 15 jours suivant le jugement à intervenir, dire et juger que l'arrêt vaudra cession des 2.825.000 actions détenues par la société Holding 2P au prix de 2.260.000 € au bénéfice des intimés agissant in solidum,
- condamner le représentant légal de la société Holding 2P en la personne de M. P. à signer les ordres de mouvement des 716.668 bons de souscription d'actions détenus par la société H2P dans la société Kartesis contre remise par les intimés d'un ou plusieurs chèques de banque d'un montant total de 29.333,34 € à l'ordre de la société Holding 2P,
A défaut, et dans l'hypothèse où celui-ci ne déférerait pas à la présente condamnation dans un délai de 15 jours suivant l'arrêt à intervenir,
- dire et juger que le jugement vaudra cession des 716 668 bons de souscription d'actions détenus par la société Holding 2P au prix de 29.333,34 € au bénéfice des intimés agissant in solidum,
- ordonner à la société Kartesis de modifier son registre des mouvements de titres en conséquence au prorata des quotes-parts acquises par les intimés,
- constater que la révocation de M. P. a eu lieu pour juste motif et sans caractère vexatoire ou abusif et débouter M. P. de ses demandes de dommages et intérêts,
- rejeter toutes les demandes, fins, prétentions et moyens soulevés par M. P. et la société Holding 2P,
- condamner les appelants à telle amende civile qu'il plaira à la Cour de fixer au titre de l'article 32-1 du code de procédure civile,
- condamner les appelants à payer à la société Kartesis la somme de 50.000 € au titre de l'article 32- 1 du code de procédure civile,
- condamner les appelants à payer à la société Kartesis la somme de 15.000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens de l'instance, ceux d'appel distraits au profit de la société Juliette C. B..
MOTIFS
I - Sur les moyens d'irrecevabilités
1°) sur la demande des intimés aux fins de dire et juger nouvelles en cause d'appel l'ensemble des demandes présentées par les appelants devant la Cour à l'exception des demandes présentées en tout état de cause
Aux termes des articles 564 et 565 du code de procédure civile, à peine d'irrecevabilité relevée d'office, les parties ne peuvent soumettre à la cour de nouvelles prétentions si ce n'est ...pour faire écarter les prétentions adverses.
En l'espèce, il résulte des énonciations du jugement et des conclusions de première instance des parties, que l'objet du litige définit par l'assignation délivrée par M. P. et la société H2P et le dispositif de ses conclusions était :
- la nullité des décisions de l'assemblée générale du 30 août 2016 ayant prononcé sa révocation et par voie de conséquence, la réintégration de M. P. dans ses mandats,
- la contestation du motif de cette révocation (faute grave),
- l'octroi de dommages et intérêts en lien avec la révocation.
La société Induspo et M. Thierry C. sont intervenus volontairement à l'instance et ont alors formé une demande reconventionnelle, demandant au tribunal de commerce d'acter qu'ils ont par courrier du 26 octobre 2016, mis en oeuvre la promesse de vente des titres détenus par la société H2P, en raison du départ de M. P., et de dire que la levée l'option d'achat qu'ils ont formalisée doit être effectuée selon les modalités prévues à l'article 4, soit à un prix égal au prix unitaire de souscription réduit d'une décote de 20 % en raison de la faute grave retenue par l'assemblée générale.
M. P. et la société H2P ont soutenu que cette demande était irrecevable au motif qu'il n'existait aucun lien avec le 'présent litige'. Ils ont sollicité à titre subsidiaire qu'il soit donné acte à M. P. ' de ce qu'il se réserve la faculté tant pour son compte qu'en qualité de représentant légal de la société H2P de solliciter l'indemnisation du préjudice subi du fait de la mise en oeuvre de la promesse unilatérale de vente des titres de la société Financière Karsetis, le cas échéant'.
Le jugement mentionne également : ' A titre subsidiaire, ils soulignent que les demandes sont mal fondées puisqu'il n'existe aucune contestation quant à la levée d'option demandée'.
Il apparaît ainsi que M. P. et la société H2P n'avaient opposé aucun moyen de défense spécifique à l'encontre de la demande reconventionnelle relative aux modalité de mise en oeuvre de la levée d'option.
Dans son jugement, le tribunal a déclaré recevables les interventions volontaires des sociétés Induspo et de M. C. et statuant sur leur demande reconventionnelle a :
- dit que M. P. n'avait pas été révoqué pour faute grave,
- fixé le prix conformément à l'article 4, mais sans décote.
En appel, M.P. et la société H2P développent des moyens et formulent des prétentions en lien avec la demande reconventionnelle , à savoir :
- déclarer caduque la levée de l'option d'achat par les bénéficiaires, ou à défaut,
- ordonner la résolution de la vente, en raison du manquement des bénéficiaires à leur obligation de paiement du prix,
A titre subsidiaire,
- juger que l'article 4 b) de la promesse unilatérale de vente est dépourvu de cause, constitue une clause léonine et se trouve être contraire aux droits fondamentaux et en particulier au droit de propriété, et écarter en conséquence l'application de cette disposition au présent litige,
- dire et juger que le transfert des titres susvisés se fera au prix de 6.682.000 euros (soit à leur valeur résultant des derniers comptes sociaux disponibles de la société Kartesis - fin 2019) ou à titre subsidiaire, au prix de 6.017.000 euros (soit à leur valeur au jour de la levée de l'option par les bénéficiaires de la promesse - fin 2016),
A titre très subsidiaire,
- dire et juger que l'article 4 de la promesse unilatérale de vente constitue en réalité une clause pénale, et réviser le prix fixé par le tribunal en application de l'article 4(b) de la promesse de vente et dire et juger que le transfert des titres susvisés se fera au prix de 6.682.000 euros (selon valeur à fin 2019) ou à titre subsidiaire, au prix de 6.017.000 euros (selon valeur à fin 2016),
Si par impossible la Cour venait à dire recevable la demande portant sur la cession forcée de 716.688 bons de souscription,
- condamner les intimés à verser à la société H2P la somme de 981.833 euros (selon valeur à fin 2019), ou à titre subsidiaire, la somme de 809.834 euros (selon valeur à fin 2016), au titre de la perte de chance d'obtenir une plus-value en raison du non-exercice de ses bons de souscription d'actions.
Il convient de constater que ces demandes tendent simplement à faire écarter la demande reconventionnelle adverse et que dès lors elles ne constituent pas des demandes nouvelles.
Le silence de M. P. en première instance sur le prix demandé ne peut pas constituer une contradiction avec les moyens qu'il développe en appel pour s'opposer à cette prétention.
Le moyen d'irrecevabilité sera donc rejeté.
2°) Sur la demande des intimés de dire et juger que les appelants n'ont pas mentionné, sur leur déclaration d'appel, le chef de jugement relatif au constat de la levée de l'option d'achat, et que l'effet dévolutif ne peut jouer à cet égard
Le dispositif du jugement du tribunal de commerce mentionne :
' Constate le levée par la société Induspo de l'option d'achat des titres de la société Financière Karsetis encers la société H2P'
Ce chef du jugement ne porte pas sur une prétention. Le tribunal en énonçant ce constat n'a tranché aucun point du litige, étant rappelé que M. P. avait indiqué qu'il n'existe aucune contestation quant à la levée d'option demandée.
Ce chef de jugement n'était donc pas susceptible d'appel.
La cour est bien saisie des modalités de mise en oeuvre de la promesse de vente des titres, par les prétentions de M. P. et de la société H2P qui tendent à faire écarter les demandes adverses.
Le moyen sera donc rejeté.
3°) sur la demande des appelants aux fins de voir déclarer irrecevables, comme ne répondant pas aux exigences de l'article 910-4 du code de procédure civile, les deux nouvelles demandes formulées pour la première fois par les intimés dans leur second jeu de conclusions, l'une portant sur la cession forcée de 716.688 bons de souscription, et l'autre sur l'octroi de dommages et intérêts à hauteur de 50.000 euros, outre une amende civile de 10.000 euros pour procédure abusive.
En ce qui concerne les bons de souscription d'actions, la société Induspo et M. C. demandaient au tribunal de ' prendre acte que la mise en oeuvre de la promesse de vente portera sur l'intégralité des titres de la société Financière Kartesis détenus par la société H2P ...'
La levée d'option qu'ils ont faite portait expressément tant sur les actions que les BSA.
Dans ses premières conclusions en appel, les intimés ont bien demandé à la cour de : 'dire que la mise en oeuvre de la promesse de vente portera sur l'intégralité des titres de la société Kartesis détenus par la société Holding 2P etc....'
En conséquence, la prétention complémentaire portant sur les bons de souscription d'action , qui sont des ' Titres' a bien été présentée dans les premières conclusions.
En revanche, la demande de dommages et intérêt présentée par les intimés et fondée sur des manquements de M. P. à l'origine de la révocation et sur des faits postérieurs à la révocation (discrédit et diffamation de la société Kartesis courant février 2018), et en tout cas antérieurs aux premières conclusions, n'ayant pas été formulée dans les premières conclusions du 5 septembre 2018, est irrecevable.
La demande de prononcé d'amende civile est irrecevable, les parties n'ayant pas qualité pour formuler une demande à ce titre.
II - Sur la révocation de M. P. de ses mandats
M. P. demande à la cour de réformer le jugement en ce qu'il a :
'débouté M. Jean Claude P. et la société Holding 2P de leur demande de nullité des décisions de l'assemblée générale du 30/08/2016 de la société Financière Kartesis alors qu'il apparaît que ces décisions étaient abusives, puisqu'elle avait pour seul objet de provoquer la cession forcée des titres de la société H2P en suite de la révocation des mandats de M. P.'.
Mais, il sera constaté, à la lecture du dispositif des dernières conclusions des appelants, qu'il n'est pas demandé à la cour, statuant de nouveau, de prononcer la nullité des décisions de l'assemblée générale, de sorte que la cour n'est saisie d'aucune demande en ce sens.
La demande de réformation sera donc rejetée et le jugement se trouve implicitement confirmé de ce chef.
III - Sur la mise en oeuvre de la promesse de vente par la société H2P de ses titres en cas de départ de M. P.
1°) sur la caducité de la levée de l'option d'achat par les bénéficiaires
M. P. et la société H2P font valoir que l'article 6 de la promesse unilatérale consentie par la société Holding 2P stipule que la cession des titres devra avoir lieu au plus tard dans les quatre-vingt-dix (90) jours suivant l'exercice de l'option d'achat, de sorte que la cession, qui devait intervenir le 27 janvier 2017 au plus tard, est caduque.
Toutefois, l'article 6 de la promesse de vente mentionne :
' dans le cas où la promesse serait exercée, la cession des Titres devra avoir lieu au plus tard dans les quatre-vingt-dix (90) jours, suivant l'expiration du délai prévu à l'article 3.2 ce délai étant porté à 6 mois en cas de décès de M. Jean-Claude P..'
Aucune sanction n'étant stipulée, ce délai ne peut que constituer le point de départ autorisant la partie la plus diligente à contraindre judiciairement l'autre à exécuter la cession.
Le moyen n'est donc pas fondé.
2°) sur la demande de résolution de la cession
Les appelants font valoir le manquement des bénéficiaires à leur obligation de paiement du prix dans le délai de 90 jours.
L'article 6 de la promesse de vente prévoit que la paiement doit intervenir ' à la date de la cession', laquelle n'est pas encore intervenue.
La demande de résolution n'est donc pas fondée en l'absence de manquement des bénéficiaires.
En conséquence, la levée d'option doit recevoir exécution.
3°) sur le prix de cession
Selon l'article 4 (c) de la promesse de vente, dans l'hypothèse d'une révocation pour faute grave, la promesse porte sur 'l'intégralité des titres détenus par le promettant lesquels seront cédés à un prix par Titre égal au prix unitaire de souscription des Titres ( prime d'émission incluse) réduit d'une décote de 20 % ou, s'il est inférieur, au prix calculé conformément à ce qui est indiqué en Annexe 1 réduit d'une décote de 20 % '.
La promesse de vente précise que :
' les termes 'faute grave' pour les seuls besoins de la détermination du prix de cession des Titres dans la cadre de la Promesse, désignent la révocation de Monsieur Jean-Claude P. pour faute créant ou susceptible de créer un préjudice grave à la société où une filiale (...)
Il résulte du procès-verbal de l'assemblée générale du 30 août 2016, que M.P. a bien fait l'objet d'une révocation pour faute grave. En effet, le procès-verbal mentionne :
' Cette situation de blocage et les conséquences opérationnelles qu'elle a eu caractérise incontestablement une attitude gravement fautive de M. Jean-Claude P. ',
- ' Cette assignation est constitutive d'une faute grave de la part d'un mandataire..'
Le procès verbal est parfaitement motivé et ses énonciations factuelles sont établies.
Ainsi, l'assignation délivrée par M. P., en annulation des actes constitutifs de la société Kartesis, fondée sur des allégations de dol et rejetée par le tribunal de commerce était bien susceptible de créer un préjudice grave à la société où une filiale .
Cette assignation avait été annoncée par un message du Me L. au président de la société Kartesis et à divers actionnaires en date du 8 avril 2016.
Par ailleurs, dans ce même courrier produit par les intimés, il est également dit :
' Mon client m'a d'ores et déjà mandaté pour intervenir auprès de Borg Warner afin d'attirer l'attention de cette société sur l'ambiguïté des relations qui ont manifestement existé entre les deux parties, Borg Warner et Kartesis depuis 2013. (...) Devant l'absence de réaction des actionnaires à la suite de mes multiples tentatives de discussion amiable, je me trouve contraint d'agir sur la place publique et devant les juridictions compétentes'
Or, la société Borg Warner est selon les termes de ce même courrier, ' de loin le client n°1, et sans Borg Warner le groupe Kartesis n'existe pas', de sorte que les menaces faites étaient de nature à mettre gravement en danger la société Kartesis.
Le procès-verbal de l'assemblée générale relate que M. P. a pris la parole et qu'il a affirmé avoir toujours agi dans l'intérêt du groupe au cours des trente derniers mois passés au service du groupe Kartesis, mais que la découverte de l'existence d'un mail du 24 octobre 2013 entre M. Donald L., David C. et Pierre Z. l'avait amené à demander des explications. Selon lui, le contenu de ce mail remettait en cause les principes qui avaient guidé sa décision d'apporter la société Bargy Decolletage au groupe Kartesis et qu'en l'absence de réponse claire il avait été contraint de faire valoir ses droits pour récupérer sa société devant le tribunal de commerce.
En premier lieu, ce message du 24 octobre 2013, produit en pièce 14, n'a pas été dissimulé puisque réexpédié en 2015 par M. Z. à l'ensemble des directeurs dont M. P..
Il est constitué d'un projet de collaboration future entre la société FCMP (société de M. C.) avec M. Donald L., avec description du poste et des conditions, lesquelles ne remettait pas en cause les fonctions de M. P..
Il était question en 2014, que M. L. prennent en charge la filiale située à Mexico.
De plus, les intimés justifient qu'il a été répondu à M. L. par un message du 6 novembre 2013 avec copie à M. P., ce dont il résulte que ce dernier ne peut soutenir de bonne foi avoir découvert ultérieurement ce projet d'embauche.
La société Kartesis justifie par ailleurs que l'arrivée de M. L. a été débattue entre les directeurs courant 2014. Par un message du 17 juillet 2014, M. P. a répondu à propos de l'entrée de M. L. chez Kartesis, : ' qu'il n'était pas opposé à cette opportunité si les conditions d'entrée sont acceptables pour le groupe'.
De plus l'assignation en nullité pour dol pour dissimulation du projet d'embauche de M. L., a été déclarée irrecevable par le tribunal de commerce qui l'a donc rejetée et aucun appel n'a été interjeté.
D'autre part, l'assemblée générale a relevé l'attitude d'obstruction de M. P. dans le cadre du management notamment :
- blocage à se rapprocher du site de Saint Pierre en Faucigny,
- refus de se déplacer sur le site Kartesis à Mexico,
- refus de se déplacer chez le premier client du site de Thyez.
Ces événements sont manifestement des fautes graves eu égard à l'importance de ces visites.
En conséquence, au regard des éléments retenus par l'assemblée générale qui a voté à l'unanimité des actionnaires sauf la société H2P (M. P.), il sera jugé que la révocation est bien intervenue pour faute grave , à savoir pour une faute créant ou susceptible de créer un préjudice grave à la société où une filiale et que cette appréciation de l'assemblée générale était bien fondée.
4°) sur la demande des appelants tendant à faire juger que l'article 4 b) de la promesse unilatérale de vente est dépourvu de cause, constitue une clause léonine et se trouve être contraire aux droits fondamentaux et en particulier au droit de propriété, et écarter en conséquence l'application de cette disposition au présent litige
Les appelants font valoir à cet égard que l'article 4(b) de la promesse unilatérale aboutit en réalité à une privation et à une renonciation anticipée de celle-ci aux gains de valeur de la société Financière Kartesis et qu'il n'existe finalement aucune cause à une telle renonciation.
L'article 4(b) stipule qu'en cas de démission ou de révocation sans faute grave, la promesse portera sur l'intégralité des Titres détenus par le Promettant, lesquels seront cédés à un prix par Titre égal au prix unitaire de souscription des Titres (prime d'émission incluse) ou s'il est inférieur, au prix calculé conformément à ce qui est indiqué en Annexe 1.
Il sera rappelé que chacun des quatre dirigeants clés a souscrit envers les trois autres le même engagement.
La fixation de ce prix a pour objectif de faciliter et pérenniser l'engagement de chacun des dirigeant clés et la cause de cette renonciation aux éventuels bénéfices se trouve dans la réciprocité de cette renonciation. Il sera observé que M. Jean-Claude P. en a d'ailleurs bénéficié à l'occasion du départ de M. C..
Les appelants font également valoir, qu'en application de l'article 1844-1 alinea 2 du code civil, ' est réputée non écrite la stipulation excluant totalement un associé du profit ou mettant à sa charge la totalité des pertes'.
Toutefois, n'est prohibée par l'article 1844-1 du code civil que la seule clause qui porte atteinte au pacte social dans les termes de cette disposition légale. En l'espèce, la promesse de vente ne comporte pas une telle conséquence, s'agissant d'une convention, même entre associés, dont l'objet n'était autre, sauf fraude, que d'assurer, moyennant un prix librement convenu, la transmission de droits sociaux.
Ce type de clause est valable dès lors qu'elle a pour objet principal la cession d'actions à un prix déterminé et ne constitue pas un moyen pour fixer une répartition des bénéfices ou des pertes. Jusqu'à leur départ, les dirigeants concernés ont bien été soumis au risque de disparition ou de dépréciation des titres.
Il convient aussi de relever que la clause litigieuse ne trouve à s'appliquer que dans l'hypothèse spécifique d'un 'départ' du promettant dans des cas spécifiques, alors que le promettant peut également se retirer de la société en cédant ses titres à un tiers, à un prix librement consenti avec l'acquéreur. En cas d'exercice par un associé de son droit de préemption le prix est éventuellement déterminé par expertise.
Les appelants soutiennent enfin que cette clause serait contraire aux dispositions de la CEDH, comme portant atteinte au droit de propriété.
Toutefois, il n'est porté aucune atteinte au droit de propriété dès lors que M. Jean-Claude P. a signé et consenti la promesse de vente de ses actions, la liberté de céder étant une des manifestations du droit de propriété.
La thèse de M. P. soutenant le caractère léonin de la clause de l'article 4 (b) est d'autant plus surprenante que, ainsi qu'il a été dit plus haute, par un courrier du 25 février 2015, lui-même es-qualité d'actionnaire de la société Financière Kartesis via la holding H2P, a mis en oeuvre la promesse de vente consentie par M. C. (société Blumeca) dans les termes suivants :
' L'assemblée générale des associés de la société Financière Kartesis en date du 24 février 2015 a décidé la révocation de vos mandats d'administrateur et de directeur général.
En vertu des article 3.1(b) et 3.2(b) de la Promesse de Vente, je vous notifie par la présente l'exercice de mon option d'achat.
Mon option d'achat porte sur 150 000 actions et 716 667 bons de souscription d'actions de la société Financière Kartesis .
L'exécution de la cession desdits titres interviendra selon les conditions de prix et délais fixés par avance dans la Promesse de Vente et notamment ses articles 4(b) et 6 ( Délais et forme).'
Il en résulte que M. P. ayant mobilisé en sa faveur l'article 4(b) ne saurait faire juger sans se contredire qu'elle serait dépourvue de cause ou léonine ou bien attentatoire au droit de propriété et la voir écarter.
En tout état de cause, le rachat au prix maximum de souscription, n'est pas une clause léonine en soit, puisque l'appréciation du caractère léonin dépend du prix réel de l'action au jour du rachat, lequel prix pourrait théoriquement être égal à la valeur de souscription.
5°) sur la demande tendant à faire juger que l'article 4 de la promesse unilatérale de vente constitue en réalité une clause pénale
La « clause pénale est celle par laquelle une personne, pour assurer l'exécution d'une convention, s'engage à quelque chose en cas d'inexécution ».
En l'espèce, M. Jean-Claude P. s'est engagé a vendre ses actions au prix de souscription avec une décote de 20 % en cas de révocation pour faute grave.
Or la révocation pour faute grave est la constatation d'une inexécution par le dirigeant mandataire social de son mandat.
La décote de 20 % est donc une clause pénale consentie par chacun des quatre dirigeants au profit des autres tendant à voir sanctionner celui qui serait révoqué pour faute grave.
Aux termes de l'article 1152 ancien du code civil, 'le juge peut même d'office modérer ou augmenter la peine qui avait été convenue si elle est manifestement excessive ou dérisoire.'
En l'espèce, la décote de 20 % se rajoute à un prix de cession égal au prix de souscription, c'est à dire en excluant le promettant de la valorisation des titres.
Elle s'élève à plus de 570 000 €.
En l'espèce, les analyses financières produites, notamment la note de Mme S. expert judiciaire désignée par le conseiller de la mise en état dans le cadre de la comparution personnelle des parties, à estimé la valeur totale des titres, selon la méthode de l'annexe 1 ( hypothèse de décès ou d'invalidité) dans une fourchette de 23 468 à 20 968 KF, soit pour les 15,1% de la société H2P, une valeur supérieure à 3 100 000 €, ce qui représente déjà , pour m. P., un sacrifice financier d'environ 300 000 €.
De surcroît, la clause litigieuse fait supporter par le promettant l'éventuelle dévalorisation des actions par rapport au prix de souscription. Le prix de souscription n'est pas un prix minimum , mais un prix maximum.
Ainsi la clause litigieuse est manifestement excessive, compte-tenu des conditions déjà très avantageuses consenties par le promettant. Elle sera réduite à un montant de 1 % au lieu de 20 %.
6°) sur les modalités du transferts de propriétés des titres
Le prix de cession sera donc fixé à :
. pour les 2 825 000 actions : 2 825 000 € - 28 250 € (décote 1%) = 2 796 750 €
. pour les 716 667 BSA: 36 666,62 € - 366,66 (décote 1%) = 36 299,96 €
Valeur totale des titres:
2 796 750 € + 36 299,96 € = 2 833 049,90 €
La cession ne peut se faire qu'au profit des bénéficiaires de la promesse de vente qui ont levé l'option et non au profit de tous les ' intimés in solidum'.
Il n'y a pas lieu d'ordonner à la société Kartesis de modifier son registre des mouvements de titres, cette formalité ne dépendant que d'elle et ne faisant pas l'objet d'une contestation sur laquelle il y a lieu de trancher.
La demande d'astreinte sera écartée, dès lors que M. P. a déjà offert ensuite du jugement de signer les ordres de mouvements, contre paiement, proposition à laquelle ce sont les intimés qui n'ont pas donné suite.
IV - Sur la demande aux fins de dommages et intérêts à hauteur de 60.000 euros pour révocation dans des circonstances abusives et frauduleuses
La révocation de M. P. a nécessairement eu lieu pour juste motif dès lors que l'assemblée générale devant laquelle M. P. a été en mesure de s'expliquer, a justement fondé la révocation sur la faute grave.
La demande de dommages et intérêts ne peut dès lors qu'être rejetée.
V - Sur l'article 700 du code de procédure civile
Il convient de fixer à 10 000 € le montant de l'indemnité due par les appelants au titre de l'article 700 du code de procédure civile au regard des frais du procès.
VI - Sur les dépens
La partie perdante supportera les dépens.
PAR CES MOTIFS
La Cour, statuant publiquement et contradictoirement,
Déclare irrecevable la demande de dommage et intérêts présentée par les intimés ainsi que leur demande d'application d'une amende civile,
Rejette les autres moyens d'irrecevabilité des parties et déclare recevables les autres demandes des appelants et des intimés,
Réformant le jugement des chefs soumis à la cour et statuant de nouveau,
Dit que M. Jean Claude P. a été révoqué pour faute grave,
Déboute la société H2P et M. Jean-Claude P. de leur demande tendant à voir écarter l'article 4 (b) et (c) de la promesse de vente du 17 décembre 2013,
Dit que l'article 4(c) de la promesse de vente en ce qu'il prévoit une réfaction de 20 % sur le prix de souscription des titres constitue une clause pénale manifestement excessive qui sera réduite à 1%,
Dit que la mise en œuvre de la promesse de vente portera sur l'intégralité des titres ( actions et bons de souscription d'actions ) de la société Kartesis détenus par la société Holding 2P, lesquels seront cédés à un prix par titre égal au prix unitaire de souscription avec une décote de 1%,
Condamne M. Thierry C. et la société Financière Induspo à remettre à la société Holding 2P un ou plusieurs chèques de banque d'un montant total de total 2 833 049,90 € , à l'ordre de la société Holding 2P, au plus tard le jour de la signature des ordres de mouvement par la société Holding 2P,
Condamne in solidum la société Holding 2P et M. Jean-Claude P. à signer les ordres de mouvement des 2.825.000 actions et des 716.667 bons de souscription d'actions détenues par la société H2P dans la société Kartesis, dans le délai de 1 mois, à compter de la signification du présent arrêt, contre remise du prix de cession,
Dit qu'à défaut d'exécution de l'arrêt par les appelants, l'arrêt vaudra cession des bons de souscription d'actions et des actions détenus par la société Holding 2P € au bénéfice de M. Thierry C. d'une part et de la société Induspo, dans les termes de leur courrier de levée d'option,
Dit n'y avoir lieu au prononcé d'une astreinte,
Déboute M. Jean-Claude P. de sa demande de dommages et intérêts et de ses autres prétentions,
Déboute les intimés de leurs autres demandes,
Condamne in solidum M. Jean-Claude P. et la société Holding 2P à payer à la société Kartesis la somme de 10 000 € (dix mille euros) au titre de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens de première instance et d'appel, ceux d'appel distraits au profit de la société Juliette C. B..