Cass. 1re civ., 20 octobre 2021, n° 19-25.399
COUR DE CASSATION
Arrêt
Cassation
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Chauvin
Rapporteur :
M. Mornet
Avocat général :
M. Lavigne
Avocats :
SCP Sevaux et Mathonnet, SCP Ricard, Bendel-Vasseur, Ghnassia
Faits et procédure
1. Selon l'arrêt attaqué (Chambéry, 10 octobre 2019), à l'issue de la pose d'une prothèse du genou, le 7 septembre 2010, M. [F] a présenté un descellement tibial avec des phénomènes inflammatoires importants ayant justifié une ablation de la prothèse le 4 mars 2011 et la mise en place d'une nouvelle prothèse le 11 mai suivant.
2. Se plaignant de douleurs persistantes et d'une réduction de son périmètre de marche, M. [F] a saisi la commission régionale de conciliation et d'indemnisation des accidents médicaux. Par un avis du 11 avril 2012, rendu après une expertise médicale, celle-ci a estimé que le dommage subi par M. [F] ouvrait droit à une indemnisation au titre de la solidarité nationale sur le fondement de l'article L. 1142-1, II, du code de la santé publique. Le 12 septembre 2012, M. [F] a accepté une offre d'indemnisation provisionnelle de l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales (l'ONIAM) au titre de son déficit fonctionnel temporaire.
3. Après avoir refusé l'offre d'indemnisation définitive présentée par l'ONIAM le 17 février 2016, M. [F] l'a assigné en indemnisation.
Examen des moyens
Sur le premier moyen, pris en ses première et quatrième branches
Enoncé du moyen
4. M. [F] fait grief à l'arrêt de rejeter ses demandes, alors :
« 1°/ que l'acceptation de l'offre d'indemnisation provisionnelle adressée par l'ONIAM à la victime en application de l'article L. 1142-17 du code de la santé publique vaut transaction au sens de l'article 2044 du code civil ; que cette transaction lie l'ONIAM et lui est opposable, peu important que l'offre d'indemnisation définitive présentée postérieurement par l'office ait été acceptée ou refusée ; qu'en l'espèce, une offre d'indemnisation provisionnelle en date du 17 août 2012 présentée par l'ONIAM a été acceptée par M. [F], ce contrat valant ainsi transaction ; qu'en retenant cependant que le refus par M. [F] de l'offre d'indemnisation définitive présentée par l'ONIAM le 16 février 2016 rendait l'offre provisionnelle du 17 août 2012 caduque et inopposable à l'ONIAM, la cour d'appel a violé l'article L. 1142-17 du code de la santé publique ainsi que les articles 2044 et 2052 du code civil, dans leur version antérieure à la loi n° 2016-1547 du 18 novembre 2016 ;
4°/ que l'offre d'indemnisation provisionnelle présentée par l'ONIAM et acceptée par la victime, qui vaut transaction en application de l'article L. 1142-17 du code de la santé publique, a autorité de la chose jugée entre les parties quant au droit à indemnisation de la victime, lequel ne peut plus être remis en cause dans le cadre d'un contentieux relatif à l'indemnisation du préjudice définitif ; qu'en l'espèce, l'offre d'indemnisation provisionnelle en date du 17 août 2012 présentée par l'ONIAM a été acceptée par M. [F], ce contrat valant ainsi transaction ; qu'en retenant cependant que le droit à indemnisation de M. [F] pouvait être contesté en son principe, la cour d'appel a violé l'article L. 1142-17 du code de la santé publique, les articles 2044, 2049 et 2052 du code civil, dans leur version antérieure à la loi n° 2016-1547 du 18 novembre 2016, ainsi que l'article 1134 du code civil dans sa version antérieure à l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016. »
Réponse de la Cour
Vu les articles L. 1142-1, II, et L. 1142-17 du code de la santé publique et les articles 2044 et 2052 du code civil, dans leur rédaction antérieure à celle issue de la loi n° 2016-1547 du 18 novembre 2016 :
5. Selon le deuxième de ces textes, lorsque la commission de conciliation et d'indemnisation estime que le dommage est indemnisable sur le fondement du premier, l'ONIAM adresse à la victime, dans un délai de quatre mois suivant la réception de l'avis, une offre d'indemnisation visant à la réparation intégrale des préjudices subis. L'offre a un caractère provisionnel si l'office n'a pas été informé de la consolidation de l'état de la victime. L'offre définitive doit être faite dans un délai de deux mois à compter de la date à laquelle l'office est informé de cette consolidation. L'acceptation de l'offre vaut transaction au sens de l'article 2044 du code civil.
6. Selon le troisième de ces textes, la transaction termine une contestation née et, en application du quatrième, elle a, entre les parties, l'autorité de la chose jugée en dernier ressort.
7. Il s'en déduit que l'acceptation par la victime de l'offre provisionnelle de l'ONIAM valant transaction met fin à toute contestation relative à son droit à réparation sur le fondement de l'article L. 1142-1, II, du code de la santé publique.
8. Pour rejeter les demandes de M. [F], l'arrêt retient que, même si une offre provisionnelle a été précédemment acceptée, le refus, par le patient, de l'offre définitive adressée par l'ONIAM rend celle-ci caduque et l'en délie, et qu'il appartient à la juridiction saisie par le patient de statuer tant sur l'existence que sur l'étendue de ses droits.
9. En statuant ainsi, alors que seuls demeuraient en débat les préjudices subis par M. [F] et consécutifs à l'accident médical, la cour d'appel a violé les textes susvisés.
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs, la Cour :
CASSE ET ANNULE, sauf en ce qu'il constate le désistement partiel de M. [F], met hors de cause la caisse primaire d'assurance maladie des Landes et donne acte au régime social des indépendants de sa non intervention, l'arrêt rendu le 10 octobre 2019, entre les parties, par la cour d'appel de Chambéry ;
Remet, sauf sur ces points, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Lyon.