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Décisions

CA Montpellier, 1re ch. B, 11 septembre 2001, n° 99/04118

MONTPELLIER

Arrêt

Autre

PARTIES

Demandeur :

Mme Pignon

Défendeur :

M. Porterat, Mme Porterat, M. Porterat, M. Porterat

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Guichard

Conseillers :

M. Armingaud, Mme Bresdin

Avoués :

SCP Touzery-Cottalorda, SCP Capdevila-Vedel Salles

Avocats :

Me Jeusset, Me Gouttes, Me Serres

TGI Carcassonne, du 10 juin 1999

10 juin 1999

FAITS, PROCEDURE ET PRETENTIONS DES PARTIES

 

Bernadette PIGNON et Jacques PORTERAT vivaient en concubinage de 1966 à décembre 1995.

A la suite de la rupture de ce concubinage, par acte d’huissier en date du 13 novembre 1996, Bernadette PIGNON faisait assigner Jacques PORTERAT, aux fins de le voir condamner au paiement de la somme de 70.000 francs en remboursement de sa participation à I ‘acquisition du véhicule 405 et de la caravane conserves par lui, d'une somme de 80.000 francs à titre de dommages-intérêts pour préjudice moral et de celle de 6.000 francs au titre de l’article 700 du nouveau Code de procédure civile.

Le 20 novembre 1997, une mesure d'expertise judiciaire était ordonnée sur les droits indivis des parties et Madame CROS-MAYREVIEILLE était désignée en qualité d'Expert.

Par jugement du 10 juin 1999, le Tribunal de grande instance de CARCASSONNE :

-             vu le rapport d'expertise du 9 juin 1998,

-             condamnait Madame PIGNON à payer à M. PORTERAT, après compensation, la somme de 87.526 francs avec intérêts au taux légal à compter du 13 novembre 1996, date de I ‘assignation,

-             rejetait toutes autres demandes,

-             condamnait Madame PIGNON à verser à Monsieur

PORTERAT la somme de 5.000 francs au titre de I ’article 700 du nouveau Code de procédure civile et aux dépens comprenant les frais d’expertise. :

Bernadette PIGNON a régulièrement relevé appel de cette décision et soutient essentiellement que :

-             sur la liquidation de la société de fait :

-             Jacques PORTERAT a commis une faute qui ouvre droit à compensation, en achetant le véhicule le 28 juin 1995, au lieu d'attendre le mois de juillet 1995 pour acquérir un modèle 1996, lequel aurait subi une décote moins importante,

-             du fait de la perte de jouissance du véhicule après son départ, arrêt André PORTERAT - Patrick PORTERAT - Patricia PORTERAT c/ Bernadette Pignon elle a été contrainte de se faire transporter par les voisins,

-             Jacques PORTERAT a emporté outillage, dont il était le seul utilisateur, même si la preuve n'est pas rapportée qu'il en était le propriétaire,

-             il n’y a pas lieu de tenir compte d’un jeu d'écriture ultérieure à I ‘acquisition de la caravane, il lui revient donc la moitié de la valeur de la caravane acquise en commun, soit une somme minimum de 10.230 francs, par homologation du rapport d'expertise,

-             elle justifie des frais dentaires qu’elle a engagés pour Jacques PORTERAT selon attestation du Docteur DURAND pour un montant de 8.000 francs,

-             A I ’exception des années 1991, 1992 et 1993 pendant lesquelles il a travaillé, Jacques PORTERAT n’a eu quasiment pas de revenus en 29 années de vie commune, il n’a contribué que de façon minime à I ’entretien du ménage, de sorte que les travaux réalisés par lui dans la maison constituent une modeste et normale participation a son entretien,

-             en ce qui concerne son préjudice moral, elle produit des attestations de voisins établissant le brutal abandon qu’elle a subi dans des conditions particulièrement cruelles, puisqu'il l’a quittée quand il a perçu ses premières retraites, pour aller vivre avec une voisine, alors qu’elle était âgée de 77 ans, elle communique le certificat du Docteur BINET établissant l’état anxio-dépressif qu’elle a développé ensuite.

Elle demande A la Cour de :

-condamner Monsieur PORTERAT à lui payer la somme de 118.230 francs après compensation, la somme de 80.000 francs à titre de dommages-intérêts pour préjudice moral sur le fondement de l’article 1382 du Code chdl et la somme de 10.000 francs au titre de I ‘article 700 du nouveau Code de procédure civile.

Jacques PORTERAT étant décédé le 29 septembre 1999, ses enfants, Patricia, puis André et Patrick PORTERAT sollicitent de la Cour qu’il leur soit donne acte de leur intervention volontaire et de leur reprise d'instance. I

Ils demandent à la Cour de confirmer le jugement déféré et sollicitent la somme de 10.000 francs sur le fondement de I ‘article 700 du nouveau Code de procédure civile.

arrêts André PORTERAT - Patrick PORTERAT - Patricia PORTERAT c/ Bernadette PIGNON

Ils font valoir que :

-             s'agissant de la liquidation de la société de fait,

-             leur père a rembourse à Madame PIGNON 1'avance qu’elle lui avait faite pour I ‘acquisition de la caravane par chèque de 20.000 le 12 septembre 1992,

-             dans la part de Jacques PORTERAT pour les travaux réalisés dans la maison d'habitation, il y a les travaux eux-mêmes, mais aussi les fournitures, outre une part de la plus-value dont a bénéficié immeuble appartenant à Bernadette PIGNON ; il n’y a pas lieu de compenser cette créance sur I ‘immeuble avec la nourriture et le logement que lui avait fournis sa concubine, comme le préconise l’expert pour tenter de concilier les parties, d'autant qu'il justifie avoir participé à hauteur de 3.000 francs par mois aux achats de la vie codante,

-             sur les dommages-intérêts pour préjudice moral, les circonstances de la rupture sont inconnues, il n'y a pas eu de témoin.

MOTOS

Sur la liquidation de la société de fait

Attendu qu'il convient d’examiner chacun des points restant en discussion entre les parties au vu du compte préconisée par I ‘expert judiciaire Helene CROS-MAYREVIE1LLE ;

Sur la décote du véhicule et le préjudice de jouissance

Attendu que l'expert a l’évalue la créance de Bernadette PIGNON sur le véhicule PEUGEOT conserve par Jacques PORTERAT, a la somme de 54.000 francs, correspondant à son apport lots de I ‘acquisition en commun ;

Attendu que Bernadette PIGNON n'apporte pas d’éléments nouveaux en cause d'appel sur l’imputabilité a son ancien concubin de la décote du véhicule du fait de I ‘acquisition d’un modèle 1995 le 28 juin 1995 au lieu d’un modèle 1996 à partir du 1er juillet suivant, que de même les attestations de voisins lui ayant proposé leur aide lorsqu’elle s'est trouvée seule sans arrêt André PORTERAT - Patrick PORTERAT - Patricia PORTERAT d Bernadette PIGNON voiture, sont insuffisantes à rapporter la preuve d'un préjudice résultant de la perte de jouissance d’un véhicule qu’elle ne conduisait pas;

Que la décision entreprise sera donc confirmée sur réentérinaient du rapport d’expertise sur ce point ;

Sur la caravane et I ’outillage

Attendu que les Premiers Juges ont fait une exacte appréciation des faits de l’espèce, en décidant que la somme de 20.000 francs versée par Monsieur PORTERAT par chèque peu après I ‘acquisition du véhicule, constitue le remboursement de la somme avancée par Madame PIGNON lors de l’achat de la caravane et que Bernadette PIGNON qui n’a pas fait d’apport ne peut pas réclamer la moitié de la valeur de la caravane ; que la décision sera donc confirmée sur ce point ;

Attendu que Bernadette PIGNON ne justifie pas devant la Cour de sa demande au titre de I ‘outillage emporte par Jacques PORTERAT, qu’elle reconnait d'ailleurs ne pas rapporter la preuve de la propriété de cet outillage ;

Que la décision entreprise sera donc confirmée sur le rejet de ces demandes ;

Sur les frais dentaires

Attendu que Bernadette PIGNON produit en cause d'appel le justificatif établi par le docteur DURAND du règlement de la somme de 8.000 francs, qu’elle a effectué le 9 juillet 1993 pour la prothèse dentaire concernant Jacques PORTERAT ;

Que la décision entreprise sera reformée sur ce point et il sera fait droit à cette demande ;

Sur les travaux effectués dans la maison de Madame PIGNON

Attendu que les Premiers Juges ont retenu la somme de 84.500 francs, au titre de rapport en industrie de Monsieur PORTERAT, excluant ainsi la compensation préconisée par l’expert avec la nourriture et le logement fournie par Bernadette PORTERAT ;

Arrêt André PORTERAT - Patrick PORTERAT - Patricia PORTERAT c/ Bernadette PIGNON

Or attendu qu'il résulte des avis d'imposition et bulletins de paie verses aux débats pour la période courant à compter de l'année 1983, que Jacques PORTERAT a perçu un revenu d’environ 3.000 à 4.000 francs mensuels sur une courte période allant de 1991 à 1993, que pendant les nombreuses autres années de vie commune son revenu a été de l’ordre de 1.000 à 2.000 francs par mois, alors que Bernadette PIGNON, employée de banque jusqu'à sa retraite en 1982, permit depuis la retraite de l’ordre de 6.000 francs par mois ; que les souches de chèques de Jacques PORTERAT depuis 1982 font apparaitre de rares dépenses destines a l’entretien du ménage, de faibles montants, alors qu'il n'assumait pas de charges de logement; qu'il consent dans ces conditions par entérinement du rapport d'expertise, eu égard aux rapports privilégiés ayant existé entre les parties, de considérer qu'il a réalisé les travaux en échange de la nourriture et du logement fournis par Bernadette PORTERAT ;

Attendu en conséquence qu’il n'y a pas lieu de retenir une créance sur l’immeuble au bénéfice de Jacques PORTERAT ; que le jugement sera reformé sur ce point et il sera débouté de cette demande ;

Sur les dommages-intérêts pour préjudice moral

Attendu qu'il n'existe pas de témoins directs de la rupture du concubinage dont les causes restent indéterminées ; que les attestations de proches témoignant des conséquences de la rupture sur Bernadette PIGNON, ainsi que les certificats médicaux établissant l’état dépressif qui en est résulté pour elle sont insuffisants à rapporter la preuve d’une faute de Jacques PORTERAT dans la rupture du concubinage ;

Que Bernadette PIGNON sera en conséquence déboutée de sa demande de dommages-intérêts de ce chef ;

Sur l’article 700 du nouveau Code de procédure civile

Attendu que l’équité commande d'allouer à Bernadette PIGNON la somme de 8.000 francs sur le fondement de l’article 700 du nouveau Code de procédure civile ;

 Arrêt André PORTERAT - Patrick PORTERAT - Patricia PORTERAT d Bernadette PIGNON

PAR CES MOTIFS

LA COUR

Donne acte à Patricia PORTERAT, André PORTERAT et Patrick PORTERAT de lent intervention volontaire et de leur reprise d'instance à la suite du décès de Jacques PORTERAT le 29 septembre 1999,

Reforme la décision déférée,

Condamne les Consorts PORTERAT à payer à Bernadette PIGNON la somme de 8.000 francs au titre des frais dentaires,

Rejette toutes autres demandes des parties ;

Condamne les Consorts PORTERAT à payer à Bernadette PIGNON la somme de 8.000 francs sur le fondement de l’article l’article 700 du nouveau Code de procédure civile,

Condamne les Consorts PORTERAT aux dépens, avec droit de recouvrement direct au profit de la SCP TOUZERY- COTTALLORDA, avoue, conformément aux dispositions de l’article 699 du nouveau Code de procédure civile.