Cass. 3e civ., 15 octobre 2008, n° 07-16.725
COUR DE CASSATION
Arrêt
Cassation
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Weber
Rapporteur :
M. Assié
Avocat général :
M. Guérin
Avocats :
SCP Nicolaÿ, de Lanouvelle, Hannotin, SCP Thouin-Palat et Boucard
Attendu que les juges saisis d'une demande présentée dans les formes et conditions prévues aux articles 1244-1 à 1244-3 du code civil peuvent, en accordant des délais, suspendre la réalisation et les effets des clauses de résiliation, lorsque la résiliation n'est pas constatée ou prononcée par une décision de justice ayant acquis l'autorité de chose jugée ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Lyon, 2 mars 2006), que M. X..., propriétaire de locaux à usage commercial donnés à bail à la société Aux Gourmets des Monts (société Aux Gourmets), lui a fait délivrer le 9 mars 2001 un commandement de payer un arriéré de loyers visant la clause résolutoire, puis l'a assignée en référé pour faire constater la résiliation du bail ; que, par ordonnance du 3 janvier 2002, confirmée par un arrêt du 2 mars 2004, la société Aux Gourmets a été condamnée à payer au bailleur une certaine somme ; que, par la même décision, des délais lui ont été accordés pour s'acquitter de cet arriéré en sus du loyer courant ; que l'arriéré de loyer n'ayant pas été réglé à la bonne date, le bailleur a saisi le juge de l'exécution qui, par un jugement du 15 octobre 2002 devenu définitif, a déclaré valable le commandement de quitter les lieux délivré le 19 juin 2002 à la locataire ; que, par exploit du 17 mars 2004, cette dernière a assigné le bailleur au fond aux fins de voir dire qu'il n'y a pas lieu à résiliation et obtenir, à titre subsidiaire, un délai pour s'acquitter d'un éventuel arriéré ;
Attendu que, pour accorder un nouveau délai de paiement à la société Aux Gourmets, l'arrêt retient, par motifs adoptés, que l'ordonnance de référé du 3 janvier 2002 n'a pas en principe autorité de chose jugée, que cette société est en conséquence recevable à faire arbitrer par la juridiction du fond le principe de la résiliation du bail, indépendamment de cette ordonnance, dans les termes de l'article L. 145-41 du code de commerce, que si le jugement du juge de l'exécution du 15 octobre 2002 a validé le commandement de quitter les lieux délivré du fait de la reprise des effets de la clause résolutoire, il n'a toutefois autorité de chose jugée que pour la contestation qu'il tranche, à savoir l'exécution de l'ordonnance de référé et non le prononcé de la résiliation du bail, que compte tenu des efforts importants effectués par la société Aux Gourmets depuis le commandement pour solder son arriéré locatif, il convient de lui accorder un délai d'un mois pour apurer la somme de 1 031,16 euros correspondant à un retard de TVA, en plus du loyer en cours, et de suspendre la clause résolutoire pendant ce délai, celle-ci reprenant ses effets de plein droit en cas de non-respect de son échéance ;
Qu'en statuant ainsi, alors qu'elle constatait que les délais accordés par l'ordonnance de référé ayant suspendu la réalisation de la clause résolutoire n'avaient pas été respectés, la cour d'appel, qui, saisie au fond ne pouvait accorder de nouveaux délais, a violé le texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 2 mars 2006, entre les parties, par la cour d'appel de Lyon ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Lyon, autrement composée ;
Condamne, ensemble, la société Aux Gourmets des Monts et M. Y..., ès qualités d'administrateur judiciaire et de commissaire à l'exécution du plan de redressement de cette société aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne, ensemble, la société Aux Gourmets des Monts et M. Y..., ès qualités, à payer à M. X... la somme de 2 500 euros ; rejette la demande de la société Aux Gourmets des Monts et M. Y..., ès qualités ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du quinze octobre deux mille huit.