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Décisions

Cass. 1re civ., 13 février 1996, n° 93-19.824

COUR DE CASSATION

Arrêt

Rejet

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Lemontey

Rapporteur :

Mme Marc

Avocat général :

M. Sainte-Rose

Avocat :

SCP Delaporte et Briard

Bastia, ch. civ., du 18 août 1993

18 août 1993

Sur le moyen unique, pris en ses deux branches :

Attendu, selon les énonciations des juges du fond, qu'après installation dans la boulangerie de M. X..., par la société Mapreal et par la société Les Fils d'Oscar Bongard, de matériels d'équipement, cette boulangerie a été détruite par un incendie ; que la compagnie Groupe de Paris, subrogée dans les droits de son assuré, M. X..., ayant assigné ces deux sociétés et leurs assureurs respectifs, les compagnies Le Secours et Rhin et Moselle, en paiement des sommes par elle versées à M. X... et ce dernier ayant lui-même réclamé auxdites sociétés et à leurs assureurs des réparations complémentaires, l'arrêt attaqué (Bastia, 18 août 1993) a condamné in solidum les deux sociétés au paiement de sommes d'argent et a dit que la compagnie Présence Assurances, venant aux droits de la compagnie Le Secours, et la compagnie Rhin et Moselle devraient garantir solidairement leurs assurés ; qu'il a, en outre, "débouté" la compagnie Rhin et Moselle de sa demande présentée pour la première fois en cause d'appel et tendant à l'application d'une clause d'exclusion de garantie concernant les dommages subis par le produit livré ;

Attendu que la compagnie Rhin et Moselle, la société Les Fils d'Oscar Bongard en liquidation des biens et le syndic de cette dernière font grief à l'arrêt attaqué d'avoir déclaré irrecevable, comme ayant été formée pour la première fois en cause d'appel, la demande de la compagnie Rhin et Moselle tendant à l'application de l'exclusion de garantie figurant dans le contrat souscrit par son assuré, alors, selon le moyen, d'une part, que l'irrecevabilité d'une prétention nouvelle n'étant pas d'ordre public, les juges du second degré ne peuvent refuser de statuer à son sujet si la partie intéressée ne soulève pas l'exception ; qu'en statuant comme elle a fait, bien que M. X... n'ait pas prétendu que cette demande était irrecevable, la cour d'appel a violé l'article 564 du nouveau Code de procédure civile ; alors, d'autre part, qu'en vertu de ce texte, la prétention nouvelle est recevable en cause d'appel si elle est susceptible de faire écarter une prétention adverse ; qu'en se prononçant comme elle l'a fait, alors que la demande de la compagnie Rhin et Moselle tendait seulement à faire écarter les prétentions adverses, la cour d'appel a encore violé ledit texte ;

Mais attendu qu'il résulte de l'article 1351 du Code civil que le moyen tiré de la chose jugée est d'ordre public quand, au cours de la même instance, il est statué sur les suites d'une précédente décision passée en force de chose jugée ; que la cour d'appel a relevé qu'un précédent arrêt rendu le 1er octobre 1990 dans la même instance et devenu irrévocable avait déclaré la société Mapreal et la société Les Fils d'Oscar Bongard solidairement responsables des conséquences dommageables de l'incendie et dit que les compagnies Le Secours et Rhin et Moselle devraient garantir leurs assurés ; qu'il en résulte que l'arrêt du 1er octobre 1990 avait acquis force de chose jugée et que, lors de la poursuite de l'instance sur le montant des dommages-intérêts, le principe même de la garantie due par la compagnie Rhin et Moselle ne pouvait être remis en cause, par une demande tendant à l'application d'une clause d'exclusion de garantie ; que par ce motif de pur droit substitué à celui critiqué, l'arrêt attaqué se trouve légalement justifié ; que le moyen ne peut donc être accueilli en aucune de ses branches ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi.