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Décisions

Cass. 3e civ., 27 mai 2009, n° 08-11.388

COUR DE CASSATION

Arrêt

Cassation

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Lacabarats

Rapporteur :

M. Assié

Avocat général :

M. Gariazzo

Avocats :

SCP Boullez, SCP Delaporte, Briard et Trichet, SCP Thomas-Raquin et Bénabent

Chambéry, du 27 nov. 2007

27 novembre 2007

Sur le premier moyen :

Vu l'article 1351 du code civil, ensemble l'article 480 du code de procédure civile ;

Attendu que l'autorité de la chose jugée n'a lieu qu'à l'égard de ce qui a fait l'objet d'un jugement ; qu'il faut que la chose demandée soit la même ; que la demande soit fondée sur la même cause, que la demande soit entre les mêmes parties et formée par elles et contre elles en la même qualité ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Chambéry, 27 novembre 2007), que, par acte notarié du 1er juillet 1986, la Société d'économie mixte Centre routier du Freney Mont-Cenis (Sémicrof) a donné à bail à construction pour une durée de quarante ans à la société Comafre, aux droits de laquelle est venue la société Joana, le lot 551d'un terrain désigné "Autoport de Fréjus" en vue de l'exploitation d'un restaurant, le lot voisin étant exploité par la société de Pétroles Shell (société Shell), elle aussi liée à la société Sémicrof par un bail à construction de trente ans en date du 7 janvier 1982 ; que ce bail prévoyait au bénéfice de la société Comafre une jouissance commune et indivise avec la société Shell de trente-deux emplacements de parking pour poids lourds ; que la société Sémicrof a autorisé la société Shell à agrandir la station-service qu'elle exploitait sur les lieux loués ; que, faisant valoir que cet agrandissement avait supprimé toute les places de parking et qu'elle ne pouvait plus exploiter son fonds de commerce dans des conditions normales, la société Joana a assigné la société Sémicrof pour obtenir réparation de son préjudice ; qu'un arrêt du 17 février 2004, devenu définitif, a dit que la société Sémicrof avait manqué à son obligation contractuelle en supprimant les trente-deux emplacements dont la société Joana avait la jouissance commune et indivise avec la société Shell, déclaré irrecevable la demande de remise en état formulée par la société Joana pour la première fois en cause d'appel et, avant dire droit sur le préjudice subi par la société Joana, ordonné une expertise ; que, par acte des 3 et 5 mars 2004, la société Joana a assigné la société Sémicrof et la société Shell pour obtenir en application de l'article 1723 du code civil la remise en état des lieux loués, qu'un jugement a été rendu sur cette assignation le 21 avril 2006 dont les sociétés Shell et Sémicrof ont relevé appel ; que cette procédure a été jointe avec la précédente ; que la société Sémicrof a soulevé l'irrecevabilité de la demande de remise en état des lieux en raison de l'autorité de chose jugée attachée à l'arrêt du 17 février 2004 ;

Attendu que, pour accueillir cette fin de non-recevoir, l'arrêt retient que le litige ayant donné lieu au jugement du 21 avril 2006 est identique à celui déjà jugé le 17 avril 2004 puisqu'il s'agit toujours pour la société Joana d'obtenir réparation des conséquences de la suppression des trente-deux emplacements de parking dont la jouissance lui a été conférée, qu'un tel litige ne peut s'analyser qu'en un non-respect des obligations sur lequel il a déjà été statué et que par l'introduction d'une nouvelle procédure devant le tribunal de grande instance, la société Joana cherche à revenir sur l'irrecevabilité de sa demande de remise en état des lieux ;

Qu'en statuant ainsi, alors que l'autorité de la chose jugée attachée à l'arrêt ayant déclaré irrecevable une demande, comme formée pour la première fois en cause d'appel, n'interdit pas à son auteur d'introduire celle-ci dans une nouvelle instance devant les juges du premier degré, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;

Et attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer sur le deuxième moyen qui ne serait pas de nature à permettre l'admission du pourvoi ;

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur le troisième moyen :

CASSE ET ANNULE, sauf en ce qu'il a débouté la société Joana de toutes ses demandes à l'encontre de la société des Pétroles Shell, l'arrêt rendu le 27 novembre 2007, entre les parties, par la cour d'appel de Chambéry ; remet, en conséquence, sur le surplus, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Lyon.