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Décisions

Cass. 3e civ., 13 juillet 1994, n° 91-10.568

COUR DE CASSATION

Arrêt

Cassation

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Beauvois

Rapporteur :

Mme Fossereau

Avocat général :

M. Vernette

Avocat :

Me Vuitton

Riom, 2e ch. civ., du 8 nov. 1990

8 novembre 1990

Sur le moyen unique du pourvoi principal :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Riom, 8 novembre 1990), qu'un incendie est survenu, le 1er juillet 1988, dans l'immeuble des époux Z... dont une partie était donnée à bail aux époux A..., assurés par la compagnie Assurances générales de France (AGF), et l'autre partie à la société Meubles B... qui a assigné en indemnisation les bailleurs et leur assureur, la Mutuelle assurances artisanale de France (MAAF), lesquels ont appelé en garantie les époux A... et l'assureur de ceux-ci ;

Attendu que la compagnie AGF fait grief à l'arrêt de déclarer les époux A... responsables du sinistre et de la condamner à garantie envers eux, alors, selon le moyen, "1 / que personne ne se trouvait, lors du sinistre, dans les locaux de la société B..., que M. B... lui-même a déclaré, lors de l'enquête de police, ne pouvoir apporter aucune précision quant à l'origine du sinistre ;

que, dès lors, la cour d'appel ne pouvait affirmer que l'incendie s'était déclaré dans les locaux loués aux époux A... ; qu'en statuant comme elle l'a fait, elle a procédé par voie d'affirmation pure et simple, en violation de l'article 455 du nouveau Code de procédure civile ; 2 / qu'aux termes de l'article 1734 du Code civil, ceux des locataires qui n'ont pu se dégager de la présomption de responsabilité doivent réparer la totalité du préjudice subi par le bailleur ; que l'expertise diligentée et les témoignages recueillis n'ayant pas permis de localiser le foyer initial, les juges du fond ne pouvaient écarter la présomption pesant sur la société B... ; qu'en statuant comme il l'a fait, l'arrêt a violé l'article susvisé" ;

Mais attendu qu'ayant constaté qu'aux termes des déclarations des témoins et de Mme A... elle-même la fumée et les flammes étaient apparues au fond de la réserve du bâtiment loué par les époux A..., le feu s'étant ensuite propagé en raison du vent vers les locaux alors inoccupés loués par la société B..., la cour d'appel a légalement justifié sa décision de ce chef en relevant souverainement qu'il résultait de ces éléments de preuve que l'incendie était né dans la partie des locaux donnée à bail aux époux A... et en en déduisant exactement que les locataires ne s'exonéraient pas de leur responsabilité au regard de l'article 1734 du Code civil ;

Mais sur le moyen unique du pourvoi provoqué :

Vu l'article 1722 du Code civil ;

Attendu que, si pendant la durée du bail, la chose louée est détruite en totalité par cas fortuit, le bail est résilié de plein droit ; que si elle n'est détruite qu'en partie, le preneur peut, suivant les circonstances, demander ou une diminution du prix, ou la résiliation même du bail ; que, dans l'un et l'autre cas, il n'y a lieu à aucun dédommagement ;

Attendu que, pour déclarer les consorts Z..., bailleurs, tenus d'indemniser la société B..., locataire, du préjudice subi par elle en raison de l'incendie des lieux loués, l'arrêt retient, par motifs adoptés, que le sinistre n'est pas imputable à cette société ;

Qu'en statuant ainsi, tout en retenant que le bail était de plein droit résilié sur le fondement de l'article 1722 du Code civil, la cour d'appel, qui n'a pas relevé de faute à l'encontre des propriétaires, a violé le texte susvisé ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a jugé que les consorts Z... étaient responsables envers la société B... des conséquences du sinistre et les a condamnés, in solidum, avec la MAAF à lui verser une provision en ordonnant une expertise pour évaluer son préjudice et a condamné les époux A... et la compagnie Assurances générales de France à les garantir de ce chef, l'arrêt rendu le 8 novembre 1990, entre les parties, par la cour d'appel de Riom ; remet, en conséquence, quant à ce, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Lyon.