CA Aix-en-Provence, 15e ch. a, 20 décembre 2013, n° 11/19683
AIX-EN-PROVENCE
Arrêt
Infirmation
PARTIES
Demandeur :
Cabinet Médical Ferrari
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Coleno
Conseillers :
M. Couchet, Mme Bel
Avocat :
Me Cengher
FAITS PROCÉDURE PRÉTENTIONS ET MOYENS DES PARTIES :
Par le jugement dont appel du 29 octobre 2011, le juge de l'exécution du tribunal de grande instance de Marseille saisi par assignation pour statuer sur le sort des meubles après expulsion du cabinet médical preneur à bail, a :
-rejeté la demande de nullité du procès-verbal d'expulsion pour irrégularité de forme, comme non démontrée et en l'absence de preuve d'un grief,
-rejeté la demande de dommages-intérêts formée par les parties expulsées, faute de preuve du préjudice causé par la faute commise par le bailleur en les empêchant d'enlever les meubles entreposés,
-rejeté la demande d'expertise sur le fauteuil de dentiste, au motif que son état initial n'est pas démontré,
-fixé à deux mois le délai pour procéder à l'enlèvement.
Vu les dernières conclusions de Messieurs SALEMME et GOURGEONNET et la société Civile Cabinet médical FERRARI déposées et notifiées le 20 juin 2012, auxquelles il convient de se référer pour plus amples exposés des faits et moyens, par lesquelles les appelants demandent à la Cour de :
prononcer la nullité du procès-verbal d'expulsion du 15 juillet 2011, de leur allouer 30.000 € de dommages intérêts pour l'indemnisation des préjudices subis et la somme de 10.000 € pour les frais irrépétibles ainsi que les dépens comprenant le coût des procès-verbaux des 15 juillet 2011 et 1ERseptembre 2011,
au motif de grief établi, de la faute du propriétaire,
Vu les dernières conclusions des consorts AGOSTINI déposées et notifiées le 20 avril 2012 auxquelles il convient de se référer pour plus amples exposés des faits et moyens , par lesquelles les intimés demandent la confirmation du jugement entrepris et la condamnation à 10.000 € pour procédure abusive, le prononcé d'une amende civile et la somme de 5000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile,
rejetant tout grief , au motif de la présence sur les lieux des locataires, d'incidents au cours des opérations, de l'indétermination du fait générateur de responsabilité.
Avis du prononcé de la clôture a été donné aux parties le 18 juin 2013 pour le 7 octobre 2013 date à laquelle l'instruction a été déclarée close.
MOTIFS
La nullité du procès-verbal d'expulsion du 15 juillet 2011 :
- le défaut de signature du serrurier et de l'officier de police judiciaire : faute pour les locataires de démontrer le grief causé par l'absence de ces mentions, la simple affirmation d'un grief étant insuffisante à l'établir, la demande de nullité du procès-verbal de ce chef est rejetée.
- le défaut d'indication dans l'inventaire des biens laissés sur place ou déposés par l'huissier de justice en un lieu approprié, de l'indication qu'ils paraissent avoir ou non une valeur marchande.
Cette indication est posée par l'article 202 du décret 92-755 du 31 juillet 1992 en vigueur, repris à l'article 433-1 du code des procédures civiles d'exécution .
Le procès-verbal ne comporte pas l'indication que les biens laissés sur place paraissent avoir ou non une valeur marchande.
Il ne mentionne pas non plus selon les appelants une description complète du fauteuil de dentiste, en l'absence de la mention de l'éclairage spécifique.
Le premier juge a retenu qu'il apparaissait que les biens laissés dans les lieux sont inventoriés précisément dans le procès-verbal et qu'il est mentionné leur état pour la plupart; que les biens dont la valeur marchande n'est pas indiquée sont des biens qui ne présentent pas intrinsèquement de valeur.
En réalité le procès-verbal litigieux ne mentionne pas la valeur marchande des biens inventoriés, la seule mention de valeur apparaissant en page 3 du procès-verbal à la ligne ' divers objets hétéroclites, le tout sans valeur particulière'.
Or, parmi les meubles laissés sur place se trouvent un appareil à radiographie, un fauteuil de dentiste, un appareil marqué 'Turbocid' nécessitant l'intervention d'un spécialiste, ces biens permettant l'exercice de l'activité du dentiste, d'une technicité certaine et nécessairement pourvus d'une valeur marchande.
Monsieur SALEMME se plaint de l'endommagement du fauteuil après qu'a été dressé le procès-verbal d'expulsion, preuve étant rapportée par le constat du 1ERseptembre 2011dressé à la requête du cabinet médical mentionnant des dégradations et par un avis de valeur dressé le 19 juin 2002 du matériel.
Il s'évince de l'ensemble de ces éléments que Monsieur SALEMME et le cabinet médical, subissant une dégradation d'un des meubles inventoriés laissés sur place, mais dont la valeur marchande n'a pas été mentionnée, établit le grief de l'absence de la mention prescrite par décret, de sorte que la nullité du procès-verbal du 15 juillet 2011 doit être prononcée aux frais du propriétaire et que le jugement dont appel infirmé de ce chef.
L'interdiction de l'accès aux locaux repris :
Les biens laissés sur place devant être retirés dans le délai d'un mois, le locataire a le droit de les retirer et le propriétaire ne pouvait retarder jusqu'à la fin août début septembre selon courrier du 5 août 2011 de l'étude d'huissier au conseil des locataires le retrait des meubles et faire interdiction à messieurs SALEMME et GOURGEONNET par courrier d'avocat du 23 août 2011 de pénétrer dans les lieux, le bailleur ayant l' obligation selon la jurisprudence de la Cour de Cassation d'assurer cette reprise.
Cette interdiction a retardé l'évacuation des meubles en particulier le fauteuil nécessaire à l'activité professionnelle mais il appartenait ensuite au locataire de prendre toutes dispositions pour assurer l'évacuation des meubles dans les meilleurs délais en particulier le démontage du fauteuil.
Les frais du procès-verbal du 1ER septembre 2011 resteront à la charge du propriétaire.
La responsabilité du propriétaire :
Force est de constater que la preuve de dégradations sur le fauteuil est rapportée après que le procès-verbal d'expulsion a été dressé , les serrures des locaux changées, de sorte que le propriétaire des lieux est tenu à indemnisation.
Les dégradations sont détaillées dans le procès-verbal de constat dressé par Me Gandelli requis par le cabinet médical; elles ne mentionnent pas d'atteinte à la partie éclairage mais des bris d'autres équipements et du bras situé en partie supérieure du fauteuil.
Les appelants ne justifiant pas d'autres dégradations, il sera alloué au vu de la facture du 19 juin 2002 la somme de 5000 € en réparation du préjudice subi, condamnation prononcée in solidum.
La nullité du procès-verbal du 15 juillet 2011 a causé un grief mais n'a pas entraîné de préjudice distinct de l'indemnisation du fauteuil endommagé, ainsi que le refus du propriétaire de laisser les locataires accéder aux locaux, de sorte que la demande formée à ce titre est rejetée.
La demande en dommages intérêts formée par les consorts AGOSTINI du chef de l'abus de procédure est rejetée, faute d'objet.
Le prononcé d'une amende civile, du seul pouvoir de la Cour est sans objet.
PAR CES MOTIFS
La Cour,
Infirme le jugement dont appel sauf en ce qu'il a mis à la charge des consorts AGOSTINI les frais du procès-verbal du 1ER septembre 2011, a autorisé les locataires à récupérer les meubles restant dans le local, a rejeté la demande d’expertise, dit n'y avoir lieu à application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile et condamné in solidum la société civile de moyens CENTRE MÉDICAL FERRARI, Monsieur Vincent SALEMME et Monsieur Alain GOURGEONNET aux entiers dépens,
Statuant à nouveau,
Annule aux frais des consorts AGOSTINI le procès-verbal d'expulsion du 15 juillet 2011 en ce qu'il ne comporte pas l'indication que les biens laissés sur place paraissent avoir ou non une valeur marchande,
Juge les consorts AGOSTINI responsables de la dégradation du fauteuil de dentiste,
Condamne in solidum les consorts AGOSTINI à payer à la société civile de moyens CENTRE MÉDICAL FERRARI, Monsieur Vincent SALEMME et Monsieur Alain GOURGEONNET la somme de 5000 € ( cinq mille euros ) à titre de dommages intérêts,
Vu l'article 700 du code de procédure civile,
Rejette toute demande,
Rejette toutes les autres demandes,
Condamne in solidum la société civile de moyens CENTRE MÉDICAL FERRARI, Monsieur Vincent SALEMME et Monsieur Alain GOURGEONNET aux entiers dépens, sauf les frais du procès-verbal du 15 juillet 2011, qui seront recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.