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Décisions

Cass. crim., 8 avril 2014, n° 12-87.505

COUR DE CASSATION

Arrêt

Rejet

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Louvel

Rapporteur :

M. Barbier

Avocat général :

M. Mathon

Avocat :

Me Le Prado

Colmar, du 26 sept. 2012

26 septembre 2012

Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation des articles 22 et 22-1 du décret n° 90-200 du 5 mars 1990 relatif à l'exercice de la profession de commissionnaire de transport, 7 de l'arrêté du 11 février 1991, L. 227-6 du code de commerce, 593 du code de procédure pénale, défaut de réponse à conclusions, défaut de motif et manque de base légale ;

"en ce que l'arrêt confirmatif attaqué a déclaré M. X... coupable de la contravention d'exercice de la profession de commissionnaire de transport routier de marchandises sans registre conforme des opérations d'affrètement, et l'a condamné à une amende contraventionnelle de 1 500 euros ;

"aux motifs que, le 5 février 2009, un contrôleur des transports terrestres a procédé à un contrôle sur pièces dans les locaux de la société X..., entreprise de transports routiers de marchandises ; qu'au vu des documents présentés, il a constaté que ladite société, exerçant entre autre l'activité de commissionnaire de transport routier de marchandises, n'avait tenue de manière régulière le registre des opérations d'affrètement portant sur l'exercice 2008 ; qu'en effet, il manquait sur ce registre certaines mentions obligatoires, telle que la nature de la marchandise, l'heure de chargement ou encore le numéro de document accompagnant la marchandise et qu'en outre l'ordre chronologique imposé par l'article 7 du décret du 11 février 1991 relatif aux documents à établir et à tenir par les commissionnaires de transport n'étaient pas respecté ; qu'il ajoutait qu'à la suite d'une analyse approfondie dudit registre, il apparaissait que certaines prestations faisaient l'objet de saisies multiples, non autorisées par le règlement ; que dès lors, c'est justement que le premier juge a déclaré M. X..., directeur général de la société à la date de la commission et de la constatation des faits, coupable de la contravention visée à la prévention ;

"1) alors que la cour d'appel ne pouvait déclarer établie la contravention d'exercice de la profession de commissionnaire de transport routier de marchandises sans registres conformes des opérations d'affrètement, sans répondre aux conclusions de la défense, lesquelles, se référant à la procédure et tout particulièrement au procès verbal d'audition du responsable des contrôleurs des transports terrestres de la DREAL d'Alsace, faisait valoir que le contrôle sur la période fixée par les contrôleurs n'avait pu être mené à bien par suite des difficultés rencontrées au cours du traitement des données informatiques de l'entreprise Transport Taglang et sans que cela puisse être imputable à cette dernière ; que la cour d'appel n'a pas, en l'état de ce défaut de réponse, établi l'existence même de la contravention dont a été déclaré coupable M. X..." ;

Sur le second moyen de cassation, pris de la violation des articles 22 et 22-1 du décret n° 90-200 du 5 mars 1990 relatif à l'exercice de la profession de commissionnaire de transport, L. 227-6 du code de commerce, 121-1 du code pénal, 593 du code de procédure pénale, défaut de réponse à conclusions, défaut de motif et manque de base légale ;

"en ce que l'arrêt confirmatif attaqué a déclaré M. X... coupable de la contravention d'exercice de la profession de commissionnaire de transport routier de marchandises sans registre conforme des opérations d'affrètement, et l'a condamné à une amende contraventionnelle de 1 500 euros ;

"aux motifs que M. X... tout en reconnaissant qu'à la date du 5 février 2009 exerçait la fonction de directeur général soutient qu'il n'est pas démontré la nature de ses pouvoirs délégués par le président de la SAS X... et qu'une délégation de pouvoirs, en la matière, ayant été accordée le 1er février 2005 à Mme X..., il ne peut faire l'objet de la poursuite ; que le ministère public a la faculté, comme toute autre partie à la procédure, de déposer devant le juge pénal des documents, même étrangers à l'affaire examinée, dès lors que joints à la procédure ils ont fait l'objet, comme dans le cas d'espèce, d'un débat contradictoire ; que, dès lors, la cour ne peut, comme le réclame l'appelant principal, ordonner le retrait de ces pièces versées par la partie poursuivante ; qu'il résulte de l'enquête de gendarmerie que Mme X... n'exerce pas de manière effective les pouvoirs qui lui ont été donnés par délégation précitée ; qu'il résulte du procès-verbal de synthèse de la gendarmerie que M. Y..., responsable des contrôleurs des transports terrestres à la direction générale de l'équipement d'Alsace indiquait que, lors d'un contrôle effectué le 2 février 2009, M. X... avait reçu les enquêteurs, restant leur interlocuteur principal en prenant la direction des conversations, MmeTaglang ne faisant que l'assister ; que, par ailleurs, les notes de service, les rappels de réglementation adressés postérieurement au 1er février 2005, aux chauffeurs de l'entreprise sont signés, sous le terme « la direction », par le prévenu et non par Mme X... ; que, de plus, un certain nombre de chauffeurs de la société (MM. Z..., A..., B..., C..., D..., E...) ont affirmé avoir toujours eu des contacts professionnels avec le prévenu, Mme X... n'intervenant d'aucune manière ; que, de plus, Mme X... a admis qu'elle n'était pas rémunérée pour la délégation de pouvoir dont elle était titulaire, ajoutant que c'était son frère Christophe qui prenait les décisions importantes dans la société en tant que directeur ; qu'ainsi, il doit être retenu que la délégation de pouvoirs donnée à Mme X... n'est qu'une fiction en l'absence de son exercice réel par celle qui en est titulaire ; que dès lors, il apparaît que le prévenu exerçait effectivement le rôle de dirigeant de la société X..., en sa qualité de directeur général, auxiliaire du président ; que la contravention incriminée commise par la société X... est imputable à son dirigeant, personne physique, dès lors que ce dernier comme c'est le cas en l'espèce, n'a pas pris les dispositions de nature à faire respecter la réglementation des faits concernés ;

"1) alors que les infractions aux dispositions de l'article 22 du décret n° 90-200 du 5 mars 1990 relatif à l'exercice de la profession de commissionnaire de transport sont imputables de plein droit à l'entreprise ou à son dirigeant, lequel dans le cadre d'une SAS se trouve être son président qui aux termes de l'article L. 227-6 du code de commerce, dispose de l'universalité des pouvoirs ; que par conséquent, la responsabilité pénale du directeur général pour de telles infractions ne peut être retenue qu'à condition qu'une clause spécifique des statuts ou encore l'existence d'une délégation de pouvoir conférée par le président au directeur général l'y autorise ; que dès lors, la cour d'appel qui, délaissant l'intégralité des conclusions de la défense faisant valoir qu'aux termes des statuts de la SAS Transport X..., le directeur général n'avait qu'un rôle auxiliaire du président auquel il était subordonné, que par ailleurs, M. X... ne disposait d'aucune délégation de pouvoir, et qu'enfin l'essentiel de ses attributions avait trait à la gestion de l'entreprise et surtout à la partie commerciale, a néanmoins retenu sa responsabilité pénale pour défaut de registre conforme des opérations d'affrètement tel qu'exigé par l'article 22 du décret susvisé, a entaché sa décision d'un manque de base légale ;

"2) alors que, et subsidiairement, sauf si la loi en dispose autrement, le chef d'entreprise qui n'a pas personnellement pris part à la réalisation de l'infraction peut s'exonérer de sa responsabilité pénale en justifiant de l'existence d'une délégation de pouvoirs donnée à une personne pourvue de la compétence, de l'autorité et des moyens nécessaires ; que la cour d'appel qui, faisant abstraction du fait rappelé dans les conclusions de la défense que Mme X... responsable d'exploitation était la seule capacitaire au sein de la société Transport Taglang et répondait à ce titre aux exigences du décret n° 90-200 du 5 mars 1990 relatif à l'exercice de la profession de commissionnaire de transport, a déclaré fictive la délégation de pouvoirs qui lui avait été conférée, sans même rechercher si au-delà des ses compétences indéniables, l'intéressée avait disposé des moyens et de l'autorité nécessaire, n'a pas en l'état de cette insuffisance de motif justifié sa décision, le fait, à le supposé avéré, que Mme X... n'ait pas rempli les attributions qui étaient les siennes, comme la circonstance qu'elle n'ait pas perçu de rémunération spécifique à raison de cette délégation étant autant d'éléments inopérants à justifier de la validité d'une délégation de pouvoir ;

"3) alors qu'enfin, et subsidiairement, le fait que M. X..., directeur général, plus particulièrement en charge de l'activité commerciale de la société, ait pu donner des instructions au personnel, signer des courriers au nom de la direction de l'entreprise et apparaître aux yeux des tiers comme participant à cette direction est inopérant, l'autorité d'un chef d'entreprise ne disparaissant pas du seul fait qu'il a concédé une ou plusieurs délégations de pouvoir au sein de l'entreprise ; qu'en se fondant ainsi sur l'exercice par M. X... de ses pouvoirs de directeur général, pour en déduire que la délégation de pouvoir de Mme X... était fictive la cour d'appel a entaché sa décision d'insuffisance" ;

Les moyens étant réunis ;

Attendu que les énonciations de l'arrêt attaqué mettent la Cour de cassation en mesure de s'assurer que la cour d'appel a, sans insuffisance ni contradiction, répondu aux chefs péremptoires des conclusions dont elle était saisie et caractérisé en tous ses éléments l'infraction dont elle a déclaré coupable le prévenu, dirigeant d'une société de transports auquel incombe, à défaut d'une délégation de pouvoirs effective, la responsabilité pénale des infractions en matière de transports ;

D'où il suit que les moyens, qui se bornent à remettre en question l'appréciation souveraine, par les juges du fond, des faits et circonstances de la cause, ainsi que des éléments de preuve contradictoirement débattus, ne sauraient être admis ;

Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;

REJETTE le pourvoi.