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Décisions

CA Bordeaux, 1re ch. civ., 15 mars 2021, n° 20/03343

BORDEAUX

Arrêt

Infirmation partielle

PARTIES

Demandeur :

Europe Invest (SARL)

Défendeur :

Success Market (SAS)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Patrie

Conseillers :

M. Braud, Mme Vallee

T. com. Bordeaux, du 14 sept. 2020, n° 2…

14 septembre 2020

En 2010 Jean-David L. a créé avec d'autres associés personnes physiques la société Success Market sous forme de société par actions simplifiée et en assure, depuis lors, la présidence.

En 2014 la société à responsabilité limitée Europe Invest, dirigée par Grégory R., est entrée au capital de ladite société, qui se répartissait comme suit :

Jean-David L. : 27,57 % du capital social ;

Sébastien L. : 18,07 % du capital social ;

Jean-François J. : 18,07 % du capital social ;

Denis Moïse B. : 7,71 % du capital social ;

Europe Invest : 28,57 % du capital social.

La société Europe Invest a assigné la société Success Market et Jean-David L. devant le président du tribunal de commerce de Bordeaux par acte du 16 juin 2020 aux fins de:

' à titre principal, désigner un administrateur judiciaire provisoire ;

' à titre subsidiaire, désigner un commissaire aux comptes ;

' en tout état de cause, ordonner la communication de pièces sous astreinte.

La société Europe Invest se plaignait que ses droits d'actionnaires ne sont pas respectés en ce que la société Success Market s'exonère de l'essentiel de ses obligations à l'égard de ses associés en ne tenant pas régulièrement ses assemblées générales, et donc en ne faisant pas prendre régulièrement par les actionnaires les décisions qui sont de leur ressort exclusif dont, notamment, les arrêtés des comptes , rapports de gestion, nomination du président et d'un commissaire aux comptes . La société Europe Invest demandait dès lors de considérer que les circonstances de fait rendent impossible le fonctionnement normal de la société Success Market et la menacent d'un péril imminent et, en conséquence, de faire droit à ses demandes dont la nomination d'un administrateur provisoire chargé de gérer la société Success Market et de procéder aux investigations et communications permettant à la société Europe Invest d'être exactement informée de tous les actes significatifs de gestion.

Par ordonnance en date du 1er septembre 2020, le juge des référés du tribunal de commerce de Bordeaux a :

' Dit qu'il n'y a pas lieu de substituer à l'actuelle direction un administrateur provisoire ;

' Dit n'y avoir lieu à référé sur l'ensemble des demandes de la société Europe Invest en ce compris celle d'imposer à la société Success Market la nomination d'un commissaire aux comptes ;

' Condamné la société Europe Invest à payer à la seule société Success Market la somme de 1 500 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;

' Condamné la société Europe Invest aux dépens.

La société Europe Invest a interjeté appel total de cette décision par déclaration du 14 septembre 2020, et par conclusions du 8 janvier 2021, elle demande à la cour de :

' Déclarer la société Europe Invest recevable et bien fondée en son appel ;

' Infirmer l'ordonnance du président du tribunal de commerce de Bordeaux du 1er septembre 2020 en ce qu'elle a :

- Dit qu'il n'y a pas lieu de substituer à l'actuelle direction un administrateur provisoire ;

- Dit n'y avoir lieu à référé sur l'ensemble des demandes de la société Europe Invest en ce compris celle d'imposer à la société Success Market la nomination d'un commissaire aux comptes ;

- Condamné la société Europe Invest à payer à la seule société Success Market la somme de 1 500 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;

- Condamné la société Europe Invest aux dépens ;

Et statuant de nouveau :

' Nommer un administrateur provisoire aux fins de mener les missions suivantes :

- Représenter la société Success Market ;

- Gérer et administrer la société Success Market ;

- Procéder aux obligations sociales et déclaratives de la société Success Market ;

- Fournir à l'ensemble des associés la documentation comptable intégrale de la société Success Market ;

- Accompagner la société Success Market dans le choix d'un commissaire aux comptes titulaire et d'un commissaire aux comptes suppléant ;

' Nommer un commissaire aux comptes titulaire, à compter de ce jour et pour une durée de six exercices avec pour mandat exprès de certifier les comptes de la société Success Market des exercices clos le 30 juin 2018 et le 30 juin 2019 et, s'il s'avère que les seuils légaux de désignation obligatoire étaient d'ores et déjà atteints au titre de l'exercice précédent, de certifier également les comptes de l'exercice clos le 30 juin 2017 ;

' Nommer un commissaire aux comptes suppléant appelé à remplacer le commissaire aux comptes titulaire en cas de refus, d'empêchement, de démission ou de décès, si le commissaire aux comptes titulaire ainsi désigné est une personne physique ou une société unipersonnelle ;

' Ordonner à Jean-David L. et Success Market de communiquer, sous astreinte de 1 000 euros par jour de retard à compter du prononcé de l'ordonnance :

- Le montant de la rémunération du président et son évolution, et ce depuis 2014 ;

- Depuis 2015 : toutes informations sur les investissements supérieurs à la somme de 50 000 euros et sur la cession d'éléments d'actif d'une valeur supérieure à 30 000 euros, ainsi que les documents justificatifs s'y rapportant ;

- Au titre des exercices clos depuis le 30 juin 2015 : la copie des rapports de gestion signés, les rapports sur les conventions réglementées ;

- Au titre des exercices 2015 et 2016, les procès-verbaux d'assemblées générales ordinaires datés et signés ;

- Les feuilles de présence relatives à l'approbation des comptes 2017 et 2018 ;

- La convocation de l'assemblée générale d'approbation des comptes pour le dernier exercice clos le 30 juin 2019 et, dans ce cadre, la communication de l'ensemble des documents qui doivent être adressés aux associés ;

- Au titre des décisions stratégiques depuis 2015 :

* Toutes pièces justifiant de la qualité d'« institut de sondage » de la société Success Market ;

* Le détail des contentieux en cours ;

* Le contrat Pressimo on line du 29 octobre 2015 signé ;

* Le détail des contrôles, audits et enquêtes en cours (notamment AFNOR, mais également fiscal, URSSAF, DGCCRF, CNIL') ;

* Toutes pièces justifiant de la possibilité pour la société Success Market d'utiliser le logo CNIL sur le site internet « opinionsystem.fr » ;

* Toutes pièces justifiant que la société Success Market est en conformité avec le RGPD ;

* Les rapports annuels des audits AFNOR au titre des deux dernières années ;

* La politique de « censure » adoptée par Success Marketpour écarter certains

avis clients sur le site internet « opinionsystem.fr » ;

* Le détail des titres et participations détenus par la société Success Marketet l'organigramme correspondant ;

- Les comptes clos au 30 juin 2020, dans leur intégralité ;

Et y ajoutant

' Condamner Jean-David L. à la somme de 10 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens de première instance et d'appel.

Par conslusions du 18 janvier 2021, la société Success Market et Jean-David L. demandent à la cour de :

' Recevoir la société Success Market et Jean-David L. en leurs entières demandes, fins et prétentions, et les en déclarer bien fondés ;

' Confirmer l'ordonnance en toutes ses disposition ;

' Débouter la société Europe Invest de toutes ses demandes, fins et prétentions ;

' Condamner la société Europe Invest à payer à la société Success Market et Jean-David L., chacun la somme de 5 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, outre les entiers dépens.

Au visa de l'article 905 du code de procédure civile, l'affaire a fait l'objet le 1er octobre 2020 d'une ordonnance de fixation à bref délai à l'audience du 1er février 2021.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur la désignation d'un administrateur provisoire :

Aux termes de l'article 872 du code de procédure civile, dans tous les cas d'urgence, le président du tribunal de commerce peut, dans les limites de la compétence du tribunal, ordonner en référé toutes les mesures qui ne se heurtent à aucune contestation sérieuse ou que justifie l'existence d'un différend.

Aux termes de l'article 873, alinéa premier, du même code, le président peut, dans les mêmes limites, et même en présence d'une contestation sérieuse, prescrire en référé les mesures conservatoires ou de remise en état qui s'imposent, soit pour prévenir un dommage imminent, soit pour faire cesser un trouble manifestement illicite.

Il est de jurisprudence constante que la désignation judiciaire d'un administrateur provisoire est une mesure exceptionnelle qui suppose de rapporter la preuve de circonstances rendant impossible le fonctionnement normal de la société et menaçant celle-ci d'un péril imminent.

La société Europe Invest dénonce le fonctionnement anormal de la société Success Market en ce que :

' elle a été pour la première fois convoquée à une assemblée générale le 3 juillet 2020 ;

' les procès-verbaux d'assemblée générale ordinaire des 22 décembre 2017 et 28 décembre 2018, approuvant les comptes des exercices clos au 30 juin 2017 et au 30 juin 2018, ainsi que le procès-verbal d'assemblée générale extraordinaire du 21 octobre 2018, transférant le siège de la société, seraient des faux ;

' aucun rapport spécial sur les conventions réglementées n'a été adressé à la société Europe Invest, alors qu'une convention a été conclue avec la société M. E. O. de Jean-David L. au titre de laquelle il perçoit quelque 130 000 euros annuels ;

' au regard des comptes des exercices clos le 30 juin 2017 et le 30 juin 2018, la société Success Market était tenue de désigner un commissaire aux comptes , ce qu'elle s'est refusée à faire lors de l'assemblée générale du 3 juillet 2020.

Selon l'appelante, ces faits traduisent l'incapacité de Jean-David L. à administrer la société Success Market, rendent impossible son fonctionnement normal et la menacent d'un péril imminent.

Il est certes reconnu par la société Success Market et Jean-David L. que toutes les assemblées générales n'ont pas été régulièrement tenues ; que, notamment, les procès-verbaux d'assemblée générale datés des 22 décembre 2017 et 28 décembre 2018 n'ont été signés que le 11 février 2019. Mais alors que la société Europe Invest constatait depuis six ans de telles négligences, la condition d'urgence requise par l'article 872 précité n'apparaît pas remplie, comme l'a relevé le premier juge.

L'appelante ne rapporte pas davantage la preuve de circonstances rendant impossible le fonctionnement normal de la société. Ainsi, la convention passée avec la société M. E. O. avait-elle fait l'objet d'un rapport spécial lors de l'assemblée générale ordinaire du 17 décembre 2014. En outre, depuis l'introduction de la présente instance, deux assemblées générales ordinaires ont été convoquées, l'une le 3 juillet 2020 ayant notamment pour objet la ratification en tant que de besoin de l'approbation des comptes du 30 juin 2017 et du 30 juin 2018, l'approbation des comptes de l'exercice clos le 30 juin 2019, et la nomination d'un commissaire aux comptes ; l'autre le 4 décembre 2020 en vue de l'approbation des comptes de l'exercice clos le 30 juin 2020.

Le premier juge a exactement retenu qu'il n'appartient pas au juge des référés d'apprécier la validité des assemblées générales et l'authenticité des procès-verbaux contestés,contestation au demeurant portée devant le juge du fond par la société Europe Invest.

Au reste, les comptes annuels de la société Success Market montrent le développement de son activité, jusqu'à l'assemblée générale du 4 décembre 2020 décidant d'une première distribution de dividendes. Le péril imminent allégué par la société Europe Invest n'est pas caractérisé. L'ordonnance querellée sera confirmée en ce qu'elle dit n'y avoir lieu à désignation d'un administrateur provisoire.

Sur la désignation d'un commissaire aux comptes :

Aux termes de l'article L. 227-9-1, alinéa 2, du code de commerce dans sa rédaction en vigueur au 30 juin 2018, sont tenues de désigner au moins un commissaire aux comptes les sociétés par actions simplifiées qui dépassent, à la clôture d'un exercice social, deux des seuils suivants, fixés par décret en Conseil d'État : le total de leur bilan, le montant de leur chiffre d'affaires hors taxe ou le nombre moyen de leurs salariés au cours de l'exercice.

Aux termes de l'article R. 227-1, alinéa premier, du même code, pour l'application de l'article L. 227-9-1 relatif à la désignation d'un commissaire aux comptes , le total du bilan est fixé à 1 000 000 euros, le montant hors taxe du chiffre d'affaires à 2 000 000 euros et le nombre moyen de salariés permanents employés au cours de l'exercice à vingt.

Il est constant qu'à la clôture de l'exercice social du 30 juin 2018, la société Success Market dépassait ces seuils. Elle était donc tenue de désigner un commissaire aux comptes au titre de cet exercice. La nomination du commissaire doit intervenir au cours de l'exercice qui suit celui pendant lequel les seuils ont été dépassés ; elle n'est pas obligatoire auparavant.

En application de l'article L. 823-3, alinéa premier, du code de commerce, le commissaire aux comptes est nommé pour un mandat de six exercices. Il est donc indifférent qu'en application de la loi du du 22 mai 2019 relative à la croissance et la transformation des entreprises, les seuils précités aient été relevés si bien que la société Success Market n'était plus tenue de désigner un commissaire aux comptes au titre de son exercice clos le 30 juin 2019. Par l'effet des textes précités, dont l'application ne soulève pas de contestation sérieuse, la société Success Market était en effet tenue, au titre de son exercice clos le 30 juin 2018, de nommer un commissaire aux compte pour un mandat de six exercices à partir de l'exercice ouvert le 1er juillet 2018.

L'article L. 223-35 du code de commerce invoqué par l'appelant au soutien de son action en désignation d'un commissaire aux comptes s'applique aux sociétés à responsabilité limitée. En revanche, aux termes de l'article L. 227-9-1, alinéa 3, du même code, dans sa rédaction applicable à l'instance, même si les conditions prévues au deuxième alinéa précité ne sont pas atteintes, la nomination d'un commissaire aux comptes peut être demandée en justice par un ou plusieurs associés représentant au moins le dixième du capital d'une société par actions simplifiée.

La société Europe Invest représente au moins le dixième du capital de la société Success Market. Elle a donc qualité pour demander la nomination d'un commissaire aux comptes . Sa demande est fondée puisque les conditions prévues par la loi ont été atteintes.

Par application de l'article L. 823-1, paragraphe premier, alinéa 2, du code de commerce, lorsque le commissaire aux comptes ainsi désigné est une personne physique ou une société unipersonnelle, un ou plusieurs commissaires aux comptes suppléants, appelés à remplacer les titulaires en cas de refus, d'empêchement, de démission ou de décès sont désignés dans les mêmes conditions.

La demande aux fins de désignation d'un commissaire aux comptes titulaire et d'un suppléant apparaît donc fondée. Il convient d'y faire droit dans les conditions indiquées au dispositif de la décision, les frais devant être supportés par la société Success Market au regard du rôle et de la mission dévolus au commissaire aux comptes .

Le premier exercice contrôlé par le commissaire aux comptes est celui au cours duquel il est nommé. Sa mission commence donc dès le début de l'exercice au cours duquel il est nommé. Par ailleurs, la nomination du commissaire doit intervenir au cours de l'exercice qui suit celui pendant lequel les seuils ont été dépassés ; elle n'est pas obligatoire auparavant. Il s'ensuit que les intimés font valoir à juste titre que la mission confiée au commissaire aux comptes ne saurait rétroagir à l'exercice clos le 30 juin 2018 comme le demande la société Europe Invest.

L'ordonnance querellée sera infirmée en ce qu'elle dit n'y avoir lieu d'imposer à la société Success Market la nomination d'un commissaire aux comptes .

Sur la communication de pièces :

La société Europe Invest sollicite la communication de pièces sur le fondement des articles 873, alinéa 2, du code de procédure civile et 145 du même code.

Aux termes de l'article 145 du code de procédure civile, s'il existe un motif légitime de conserver ou d'établir avant tout procès la preuve de faits dont pourrait dépendre la solution d'un litige, les mesures d'instruction légalement admissibles peuvent être ordonnées à la demande de tout intéressé, sur requête ou en référé.

L'appelante n'indique pas le litige à venir dont la solution pourrait dépendre de faits établis par les pièces sollicitées. Sa demande ne peut donc prospérer sur ce fondement.

Aux termes de l'article 873, alinéa 2, du code de procédure civile, dans les cas où l'existence de l'obligation n'est pas sérieusement contestable, le président du tribunal de commerce peut accorder une provision au créancier, ou ordonner l'exécution de l'obligation même s'il s'agit d'une obligation de faire.

L'appelante fonde ses demandes présentées en vertu de ce texte sur les stipulations des articles 31 et 35 des statuts de la société Success Market.

Aux termes de l'article 35 des statuts, « tout associé a le droit d'obtenir, avant toute consultation des documents nécessaires pour lui permettre de se prononcer en connaissance de cause et de porter un jugement sur la gestion et le contrôle de la société. »

La société Success Market et Jean-David L. indiquent avoir communiqué les pièces suivantes :

' le montant de la rémunération du président et son évolution depuis 2014 (pièce no 26 des intimés) ;

' depuis 2015, toutes informations sur les investissements supérieurs à la somme de 50 000 euros et sur la cession d'éléments d'actif d'une valeur supérieure à 30 000 euros : les intimés déclarent n'en avoir pas réalisé (pièce no 36 des intimés) ;

' la copie des rapports de gestion signés et les rapports sur les conventions réglementées au titre des exercices clos depuis le 30 juin 2015 : les intimés déclarent que la société Europe Invest a reçu tous les documents existants ;

' au titre des exercices 2015 et 2016, les procès-verbaux d'assemblées générales ordinaires datés et signés : les intimés déclarent que la société Europe Invest a reçu tous les documents existants relatifs aux exercices clos depuis le 30 juin 2015 ;

' Les feuilles de présence relatives à l'approbation des comptes 2017 et 2018 : les intimés déclarent que les procès-verbaux signés par les associés présents en tiennent lieu ;

' la convocation de l'assemblée générale d'approbation des comptes pour le dernier exercice clos le 30 juin 2019 et, dans ce cadre, la communication de l'ensemble des documents qui doivent être adressés aux associés : la cour constate que l'appelante produit ces documents (pièce no 14), que complètent les productions des intimées (pièces nos 21 à 28), à la suite de l'assemblée générale du 3 juillet 2020 ;

' Les comptes clos au 30 juin 2020 : les intimés déclarent que la société Europe Invest a reçu tous les documents existants relatifs aux exercices clos depuis le 30 juin 2015 (pièces nos 38 à 43 des intimés afférentes à l'assemblée générale du 4 décembre 2020).

La société Success Market et Jean-David L. nepeuvent se voir enjoindre de communiquer des pièces dont ils déclarent qu'elles n'existent pas.

Aux termes de l'article 31, alinéa 2, des statuts, les décisions stratégiques devront être prises en assemblée générale.

L'appelante n'indique toutefois pas à quelles décisions stratégiques prises en assemblée générale se rapportent les autres documents qu'elle réclame. Apparaît ainsi sérieuse la contestation soulevée par les intimés sur leur obligation de fournir à la société Europe Invest les documents qu'elle sollicite au titre des décisions stratégiques depuis 2015, outre ceux qu'ils lui ont déjà fournis (pièce no 10 des intimés).

L'ordonnance querellée sera confirmée en ce qu'elle dit n'y avoir lieu à référé sur les demandes de communication de pièces.

Sur les dépens et les frais irrépétibles :

Aux termes de l'article 696, alinéa premier, du code de procédure civile, la partie perdante est condamnée aux dépens, à moins que le juge, par décision motivée, n'en mette la totalité ou une fraction à la charge d'une autre partie. L'appelante obtenant pour partie gain de cause, les intimés supporteront la charge des dépens.

En application de l'article 700 du code de procédure civile, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou qui perd son procès à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Dans tous les cas, le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à ces condamnations.

L'appelante sollicite à ce titre la condamnation de Jean-David L.. La décision de ne pas nommer de commissaire aux comptes ayant toutefois été prise par l'assemblée générale de la société Success Market, contre laquelle aucune demande n'est formée au titre des frais irrépétibles, il n'y a pas lieu en l'espèce à condamnation de ce chef.

LA COUR, PAR CES MOTIFS,

Confirme l'ordonnance en ce qu'elle a :

' Dit qu'il n'y a pas lieu de substituer à l'actuelle direction un administrateur provisoire ;

' Dit n'y avoir lieu à référé sur la demande de communication de pièces de la Société Europe Invest ;

L'infirme pour le surplus ;

Statuant à nouveau dans cette limite,

Nomme Pierre G., domicilié [...], tél. : [...], tlc. : [...], portable : [...], courriel : [...], en qualité de commissaire aux comptes titulaire de la société Success Market pour certifier les comptes annuels à compter de l'exercice en cours au prononcé de la décision ;

Nomme Dominique L., domicilié [...], portable : [...], courriel : [...], en qualité de commissaire aux comptes suppléant de la société Success Market ;

Dit que les honoraires des commissaires aux comptes seront à la charge de la société Success Market ;

Dit n'y avoir lieu à condamnation au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

Condamne la société Success Market et Jean-David L. aux dépens de première instance et d'appel ;

Rejette toute autre demande plus ample ou contraire.