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Décisions

CJUE, 7e ch., 14 septembre 2023, n° C-393/22

COUR DE JUSTICE DE L’UNION EUROPEENNE

Arrêt

PARTIES

Demandeur :

EXTÉRIA s.r.o.

Défendeur :

Spravime, s.r.o.

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président de chambre :

Mme Arastey Sahún

Juges :

M. Biltgen (rapporteur), M. Passer

Avocat général :

M. Campos Sánchez-Bordona

Avocat :

Me Čajka

CJUE n° C-393/22

13 septembre 2023

LA COUR (septième chambre),

1 La demande de décision préjudicielle porte sur l’interprétation de l’article 7, point 1, sous b), du règlement (UE) no 1215/2012 du Parlement européen et du Conseil, du 12 décembre 2012, concernant la compétence judiciaire, la reconnaissance et l’exécution des décisions en matière civile et commerciale (JO 2012, L 351, p. 1, ci-après le « règlement Bruxelles I bis »).

2 Cette demande a été présentée dans le cadre d’un litige opposant EXTÉRIA s.r.o., établie à Ostrava (République tchèque), à Spravime, s.r.o., établie à Ivanovice (République slovaque), au sujet d’une demande tendant au paiement d’une pénalité contractuelle fondée sur la non-exécution d’un avant-contrat relatif à la conclusion future d’un contrat de franchise.

Le cadre juridique

3 L’article 4, paragraphe 1, du règlement Bruxelles I bis est libellé comme suit :

« Sous réserve du présent règlement, les personnes domiciliées sur le territoire d’un État membre sont attraites, quelle que soit leur nationalité, devant les juridictions de cet État membre. »

4 Aux termes de l’article 7, point 1, de ce règlement :

« Une personne domiciliée sur le territoire d’un État membre peut être attraite dans un autre État membre :

1) a)  en matière contractuelle, devant la juridiction du lieu d’exécution de l’obligation qui sert de base à la demande ;

b) aux fins de l’application de la présente disposition, et sauf convention contraire, le lieu d’exécution de l’obligation qui sert de base à la demande est :

– pour la vente de marchandises, le lieu d’un État membre où, en vertu du contrat, les marchandises ont été ou auraient dû être livrées,

– pour la fourniture de services, le lieu d’un État membre où, en vertu du contrat, les services ont été ou auraient dû être fournis ;

c) le point a) s’applique si le point b) ne s’applique pas ».

Le litige au principal et la question préjudicielle

5 La requérante au principal, qui fournit des services de conseil dans le domaine de la sécurité et de la santé au travail, et la défenderesse au principal ont conclu, le 28 juin 2018, un avant-contrat relatif à la conclusion future d’un contrat de franchise (ci-après l’« avant contrat »), qui permettrait à cette dernière d’exploiter et de gérer des succursales franchisées de la requérante au principal en Slovaquie. Cet avant contrat contenait, outre l’obligation de conclure ce contrat dans le futur, certaines modalités contractuelles ainsi que l’engagement, de la part de la défenderesse au principal, de payer une avance d’un montant de 20 400 euros, hors taxe sur la valeur ajoutée, et, en cas de non-respect de cette obligation, une pénalité contractuelle d’un montant égal à celui de cette avance (ci-après la « pénalité contractuelle »).

6 Ladite avance, qui avait pour objectif non seulement de garantir ladite obligation, mais également de préserver la confidentialité de toutes les informations contenues dans ledit avant-contrat relatives au concept de franchise de la requérante au principal, devait être payée dans les dix jours suivant la signature du même avant-contrat. Par ailleurs, ce dernier prévoyait la faculté, pour la requérante au principal, de se rétracter si la défenderesse au principal ne lui versait pas la redevance convenue dans le délai prévu.

7 L’avant-contrat prévoyait l’application du droit tchèque, sans qu’aucune convention attributive de juridiction ait été conclue.

8 Alléguant que la défenderesse au principal avait manqué à son obligation de payer l’avance en cause, la requérante au principal s’est rétractée de l’avant-contrat et a réclamé le paiement de la pénalité contractuelle.

9 À cette fin, elle a engagé une procédure d’injonction de payer européenne devant l’Okresní soud v Ostravě (tribunal de district d’Ostrava, République tchèque).

10 Par une ordonnance du 17 décembre 2020, cette juridiction a rejeté l’exception d’incompétence des juridictions tchèques soulevée par la défenderesse au principal et a jugé qu’elle était compétente pour connaître du litige en cause sur le fondement de l’article 7, point 1, sous a), du règlement Bruxelles I bis, dès lors que ce litige avait pour objet l’exécution d’une obligation, au sens de cette disposition, à savoir l’obligation de paiement de la pénalité contractuelle, qui devait être exécutée au lieu du siège social de la requérante au principal.

11 Dans le cadre de l’appel intenté contre cette ordonnance, la défenderesse au principal a invoqué la compétence des juridictions slovaques, au motif que l’obligation garantie par cette pénalité contractuelle, qui trouvait certes sa source dans l’avant-contrat, était néanmoins liée au lieu de production et de livraison des marchandises dans le cadre du contrat de franchise qui devait être conclu.

12 Par une ordonnance du 16 février 2021, le Krajský soud v Ostravě (cour régionale d’Ostrava, République tchèque), en tant que juridiction d’appel, a confirmé la décision de première instance, en considérant que le recours avait pour objet le droit au paiement de la pénalité contractuelle en raison du non-respect, par la défenderesse au principal, des termes de l’avant-contrat et n’était donc pas lié à la production ou à la livraison de marchandises, de telle sorte que l’article 7, point 1, sous b), du règlement Bruxelles I bis ne s’appliquait pas. Par conséquent, la compétence juridictionnelle devrait être déterminée conformément à l’article 7, point 1, sous a), de ce règlement, en vertu duquel est compétente la juridiction du lieu d’exécution de l’obligation qui sert de base à la demande, ce lieu devant être déterminé selon le droit de la juridiction saisie, en l’occurrence le droit tchèque.

13 La défenderesse au principal a introduit un pourvoi en cassation contre cette ordonnance devant le Nejvyšší soud (Cour suprême, République tchèque), la juridiction de renvoi, en affirmant que la nature du droit au paiement de la pénalité contractuelle n’avait pas été correctement appréciée.

14 Faisant référence à la jurisprudence constante de la Cour relative à l’interprétation de la notion de « matière contractuelle » (arrêts du 17 juin 1992, Handte, C 26/91, EU:C:1992:268, point 15, et du 15 juin 2017, Kareda, C 249/16, EU:C:2017:472, point 30), cette juridiction conclut que le litige dont elle est saisie, concernant le droit au paiement de la pénalité contractuelle, trouve son origine dans l’avant-contrat, de telle sorte que ce litige relève de la notion de « matière contractuelle », au sens de l’article 7, point 1, du règlement Bruxelles I bis.

15 Étant donné que, selon ladite juridiction, ce droit n’est pas lié à la production ou à la livraison de marchandises, l’application de cet article 7, point 1, sous b), premier tiret, devrait être écartée d’emblée.

16 Il conviendrait alors d’apprécier s’il ne s’agit pas d’un droit relatif à une « fourniture de services », au sens dudit article 7, point 1, sous b), second tiret.

17 La juridiction de renvoi relève que deux solutions sont envisageables aux fins de la détermination de la juridiction compétente internationalement, à savoir l’une serait de qualifier l’avant-contrat de contrat autonome, l’autre consisterait à déterminer la nature des droits résultant de l’avant-contrat en fonction de la nature du contrat à conclure.

18 Eu égard à la jurisprudence de la Cour, la simple conclusion d’un avant contrat ne constituerait pas une fourniture de services, telle que définie de manière autonome en droit de l’Union comme étant un contrat comportant l’exercice d’une activité au moyen d’actes positifs, au profit d’une autre personne, en contrepartie d’une rémunération (voir, en ce sens, arrêts du 23 avril 2009, Falco Privatstiftung et Rabitsch, C 533/07, EU:C:2009:257 ; du 14 juillet 2016, Granarolo, C 196/15, EU:C:2016:559, ainsi que du 25 mars 2021, Obala i lučice, C 307/19, EU:C:2021:236), de telle sorte que le Nejvyšší soud (Cour suprême) est enclin à conclure que cet avant-contrat ne relève pas de l’article 7, point 1, sous b), second tiret, du règlement Bruxelles I bis.

19 Par conséquent, conformément à cet article 7, point 1, sous c), selon lequel ledit article 7, point 1, sous a), s’applique si le même article 7, point 1, sous b), ne s’applique pas, il conviendrait de déterminer la juridiction compétente en fonction du lieu d’exécution de l’obligation en cause.

20 Dans la mesure où la Cour n’aurait pas encore expressément abordé la question de savoir si un pactum de contrahendo peut être qualifié de « contrat de services », il existerait un doute raisonnable quant à l’interprétation correcte de l’article 7, point 1, sous b), du règlement Bruxelles I bis.

21 C’est dans ces conditions que le Nejvyšší soud (Cour suprême) a décidé de surseoir à statuer et de poser à la Cour la question préjudicielle suivante :

« L’article 7, point 1, sous b), du [règlement Bruxelles I bis] doit-il être interprété en ce sens que la notion de “contrat de fourniture de services” couvre également un avant-contrat (pactum de contrahendo) dans le cadre duquel les parties se sont engagées à conclure un contrat futur qui serait un contrat de fourniture de services au sens de ladite disposition ? »

Sur la question préjudicielle

22 Par sa question, la juridiction de renvoi demande, en substance, si l’article 7, point 1, sous b), du règlement Bruxelles I bis doit être interprété en ce sens qu’un avant-contrat, relatif à la conclusion future d’un contrat de franchise, prévoyant une obligation de paiement d’une pénalité contractuelle fondée sur la non-exécution de cet avant-contrat, obligation contractuelle dont la violation sert de base à une demande en justice, relève de la notion de contrat de « fourniture de services », au sens de cette disposition.

23 À titre liminaire, il convient de rappeler que dans la mesure où le règlement Bruxelles I bis a abrogé et remplacé le règlement (CE) no 44/2001 du Conseil, du 22 décembre 2000, concernant la compétence judiciaire, la reconnaissance et l’exécution des décisions en matière civile et commerciale (JO 2001, L 12, p. 1), lequel avait remplacé la convention du 27 septembre 1968 concernant la compétence judiciaire et l’exécution des décisions en matière civile et commerciale (JO 1972, L 299, p. 32), l’interprétation fournie par la Cour en ce qui concerne le règlement no 44/2001 vaut également pour le règlement Bruxelles I bis, lorsque les dispositions de ces instruments du droit de l’Union peuvent être qualifiées d’équivalentes. Tel est notamment le cas de l’article 5, point 1, du règlement no 44/2001 et de l’article 7, point 1, du règlement Bruxelles I bis (voir, en ce sens, arrêt du 8 mai 2019, Kerr, C 25/18, EU:C:2019:376, points 19 et 20 ainsi que jurisprudence citée).

24 S’agissant de l’article 7, point 1, sous b), second tiret, du règlement Bruxelles I bis, il y a lieu de constater que le libellé de cette disposition ne permet pas, à lui seul, de répondre à la question posée, dès lors que ladite disposition ne définit pas la notion de contrat de fourniture de services (voir, en ce sens, arrêt du 23 avril 2009, Falco Privatstiftung et Rabitsch, C 533/07, EU:C:2009:257, point 19).

25 Conformément à une jurisprudence constante, les termes « matière contractuelle » et « fourniture de services », visés respectivement à l’article 7, point 1, sous a), et à l’article 7, point 1, sous b), second tiret, du règlement Bruxelles I bis, doivent être interprétés de façon autonome, en se référant principalement au système et aux objectifs de ce règlement, en vue d’assurer l’application uniforme de celui-ci dans tous les États membres. Ils ne sauraient, dès lors, être compris comme renvoyant à la qualification que la loi nationale applicable donne au rapport juridique en cause devant la juridiction nationale (voir, en ce sens, arrêt du 14 juillet 2016, Granarolo, C 196/15, EU:C:2016:559, point 19 et jurisprudence citée).

26 À cet égard, il y a lieu de rappeler que le règlement Bruxelles I bis vise à unifier les règles de conflit de juridictions en matière civile et commerciale au moyen de règles de compétence qui présentent un haut degré de prévisibilité et poursuit ainsi un objectif de sécurité juridique qui consiste à renforcer la protection juridique des personnes établies dans l’Union européenne, en permettant à la fois au demandeur d’identifier facilement la juridiction qu’il peut saisir et au défendeur de prévoir raisonnablement celle devant laquelle il peut être attrait (voir, en ce sens, arrêt du 14 juillet 2016, Granarolo, C 196/15, EU:C:2016:559, point 16 et jurisprudence citée).

27 Par ailleurs, il ressort de la jurisprudence que le système des attributions de compétences communes prévues au chapitre II du règlement Bruxelles I bis est fondé sur la règle générale, énoncée à l’article 4, paragraphe 1, de celui-ci, selon laquelle les personnes domiciliées sur le territoire d’un État membre sont attraites devant les juridictions de cet État membre, indépendamment de la nationalité des parties. Ce n’est que par dérogation à cette règle générale de la compétence des juridictions du domicile du défendeur que le chapitre II, section 2, de ce règlement prévoit un certain nombre de règles de compétence spéciales, parmi lesquelles figure celle énoncée à l’article 7, point 1, dudit règlement (voir, en ce sens, arrêt du 14 juillet 2016, Granarolo, C 196/15, EU:C:2016:559, point 17 et jurisprudence citée).

28 Dans ce contexte, il importe de rappeler que les règles de compétence spéciales prévues par le règlement Bruxelles I bis sont d’interprétation stricte et ne permettent pas une interprétation allant au-delà des hypothèses envisagées de manière explicite par ce règlement (arrêt du 8 mai 2019, Kerr, C 25/18, EU:C:2019:376, point 22 et jurisprudence citée).

29 La règle de compétence spéciale en matière contractuelle, prévue à l’article 7, point 1, du règlement Bruxelles I bis, répond à un souci de proximité et se trouve motivée par l’existence d’un lien de rattachement étroit entre le contrat concerné et le tribunal appelé à en connaître. Ainsi, la règle générale de la compétence des juridictions du domicile du défendeur, visée au point 27 du présent arrêt, est complétée par cette règle de compétence spéciale en matière contractuelle, en application de laquelle le défendeur peut également être attrait devant le tribunal du lieu où l’obligation qui sert de base à la demande a été ou doit être exécutée (voir, en ce sens, arrêt du 23 avril 2009, Falco Privatstiftung et Rabitsch, C 533/07, EU:C:2009:257, points 24 et 25).

30 En ce qui concerne le lieu d’exécution des obligations contractuelles découlant d’un contrat de fourniture de services, l’article 7, point 1, sous b), second tiret, du règlement Bruxelles I bis définit, de manière autonome, le critère de rattachement à l’égard de ce contrat comme étant le lieu d’un État membre où, en vertu dudit contrat, les services ont été ou auraient dû être fournis, afin de renforcer les objectifs d’unification et de prévisibilité des règles de compétence judiciaire, et, dès lors, de sécurité juridique. Ce critère de rattachement autonome a vocation à s’appliquer à toutes les demandes fondées sur un même contrat de fourniture de services (voir, en ce sens, arrêts du 23 avril 2009, Falco Privatstiftung et Rabitsch, C 533/07, EU:C:2009:257, points 26 et 27, ainsi que du 11 mars 2010, Wood Floor Solutions Andreas Domberger, C 19/09, EU:C:2010:137, point 23).

31 C’est à la lumière de ces considérations qu’il convient de déterminer si une obligation au paiement d’une pénalité contractuelle en raison de la non-exécution d’un avant-contrat, telle que celle en cause au principal, relève de la notion de « fourniture de services », au sens de l’article 7, point 1, sous b), second tiret, du règlement Bruxelles I bis.

32 Tout d’abord, il convient de constater que les obligations liant les parties et découlant des termes d’un avant-contrat, tel que celui en cause au principal, relèvent de la notion de « matière contractuelle », au sens de l’article 7, point 1, sous a), du règlement Bruxelles I bis.

33 Ensuite, si l’article 7, point 1, sous a), du règlement Bruxelles I bis détermine la compétence judiciaire en matière contractuelle au regard du lieu d’exécution de l’obligation qui sert de base à la demande, cet article 7, point 1, sous b), retient, en ce qui concerne la vente de marchandises et la fourniture de services, des critères de rattachement particuliers, en fixant ce lieu d’exécution respectivement au lieu d’un État membre où, en vertu du contrat, les marchandises ont été ou auraient dû être livrées et au lieu d’un État membre où, en vertu du contrat, les services ont été ou auraient dû être fournis.

34 S’agissant plus particulièrement de la qualification de « contrat de fourniture de services », il ressort de la jurisprudence que la notion de « services », au sens dudit article 7, point 1, sous b), second tiret, implique, pour le moins, que la partie qui les fournit effectue une activité déterminée en contrepartie d’une rémunération (voir, notamment, arrêts du 23 avril 2009, Falco Privatstiftung et Rabitsch, C 533/07, EU:C:2009:257, point 29, ainsi que du 15 juin 2017, Kareda, C 249/16, EU:C:2017:472, point 35).

35 En ce qui concerne le premier critère figurant dans cette définition, à savoir celui de l’existence d’une activité, la Cour a précisé qu’il requiert l’accomplissement d’actes positifs, à l’exclusion de simples abstentions. À cet égard, s’agissant d’un contrat ayant pour objet la distribution des produits de l’une des parties par l’autre partie, la Cour a jugé que ce critère correspond à la prestation caractéristique fournie par la partie qui, en assurant une telle distribution, participe au développement de la diffusion des produits concernés (voir, notamment, arrêts du 19 décembre 2013, Corman-Collins, C 9/12, EU:C:2013:860, point 38, et du 14 juillet 2016, Granarolo, C 196/15, EU:C:2016:559, point 38).

36 Quant au second critère, à savoir celui de la rémunération accordée en contrepartie d’une activité, il convient de souligner qu’il ne saurait être entendu au sens strict du versement d’une somme d’argent, le fait de bénéficier d’un ensemble d’avantages représentant une valeur économique pouvant être considérée comme étant constitutive d’une rémunération (voir, en ce sens, arrêts du 19 décembre 2013, CormanCollins, C 9/12, EU:C:2013:860, point 39, et du 14 juillet 2016, Granarolo, C 196/15, EU:C:2016:559, point 40).

37 Or, si l’objet du contrat de franchise qui aurait dû être conclu à la suite de l’avant-contrat répond parfaitement aux deux critères visés aux points 35 et 36 du présent arrêt, tel n’est pas le cas de cet avant-contrat, qui avait pour objectif la conclusion d’un contrat de franchise dans le futur et la préservation de la confidentialité des informations contenues dans ledit avant-contrat. En outre, en l’absence d’une activité réelle effectuée par le cocontractant, le paiement de la pénalité contractuelle ne saurait être qualifié de rémunération.

38 Dans la mesure où l’avant-contrat ne requiert l’accomplissement d’aucun acte positif, ni le paiement d’une rémunération, les obligations qui découlent de cet avant-contrat, en particulier l’obligation de paiement de la pénalité contractuelle, ne sauraient relever de la notion de « fourniture de services », au sens de l’article 7, point 1, sous b), second tiret, du règlement Bruxelles I bis.

39 Cette conclusion n’est pas remise en cause par l’argument tiré du fait que l’obligation de paiement de la pénalité contractuelle serait intimement liée au contrat de franchise qui devait être conclu et en vertu duquel il serait possible de déterminer le lieu où les services concernés auraient dû être fournis.

40 En effet, un tel argument va à l’encontre non seulement de l’exigence d’interprétation stricte les règles de compétence spéciales prévues par le règlement Bruxelles I bis, telle que rappelée au point 28 du présent arrêt, mais également des objectifs de prévisibilité et de sécurité juridique visés aux points 26 et 30 de cet arrêt.

41 Enfin, il convient de relever qu’il ressort du système de l’article 7, point 1, du règlement Bruxelles I bis que le législateur de l’Union a adopté des règles de compétence distinctes pour les contrats de vente de marchandises ainsi que pour les contrats de fourniture de services, d’une part, et pour tout autre type de contrat ne faisant pas l’objet de dispositions spécifiques dans ce règlement, d’autre part (voir, en ce sens, arrêt du 23 avril 2009, Falco Privatstiftung et Rabitsch, C 533/07, EU:C:2009:257, point 42).

42 À cet égard, il convient de rappeler que l’article 7, point 1, sous c), du règlement Bruxelles I bis prévoit que « le point a) s’applique si le point b) ne s’applique pas ».

43 Or, élargir le champ d’application de l’article 7, point 1, sous b), second tiret, du règlement Bruxelles I bis, de manière à y inclure tout avant contrat relatif à la conclusion future d’un contrat de fourniture de services, reviendrait à contourner l’intention du législateur de l’Union à cet égard et affecterait l’effet utile de cet article 7, point 1, sous c) et a) (voir, en ce sens, arrêt du 23 avril 2009, Falco Privatstiftung et Rabitsch, C 533/07, EU:C:2009:257, point 43).

44 Au vu des considérations qui précèdent, il convient de répondre à la question posée que l’article 7, point 1, sous b), du règlement Bruxelles I bis doit être interprété en ce sens qu’un avant-contrat, relatif à la conclusion future d’un contrat de franchise, prévoyant une obligation de paiement d’une pénalité contractuelle fondée sur la non-exécution de cet avant-contrat, obligation contractuelle dont la violation sert de base à une demande en justice, ne relève pas de la notion de contrat de « fourniture de services », au sens de cette disposition. Dans un tel cas, la compétence judiciaire à l’égard d’une demande à laquelle cette obligation sert de base se détermine, conformément à l’article 7, point 1, sous a), de ce règlement, au regard du lieu d’exécution de ladite obligation.

Sur les dépens

45 La procédure revêtant, à l’égard des parties au principal, le caractère d’un incident soulevé devant la juridiction de renvoi, il appartient à celle-ci de statuer sur les dépens. Les frais exposés pour soumettre des observations à la Cour, autres que ceux desdites parties, ne peuvent faire l’objet d’un remboursement.

Par ces motifs, la Cour (septième chambre) dit pour droit :

L’article 7, point 1, sous b), du règlement (UE) no 1215/2012 du Parlement européen et du Conseil, du 12 décembre 2012, concernant la compétence judiciaire, la reconnaissance et l’exécution des décisions en matière civile et commerciale,

Doit être interprété en ce sens que :

Un avant-contrat, relatif à la conclusion future d’un contrat de franchise, prévoyant une obligation de paiement d’une pénalité contractuelle fondée sur la non-exécution de cet avant-contrat, obligation contractuelle dont la violation sert de base à une demande en justice, ne relève pas de la notion de contrat de « fourniture de services », au sens de cette disposition. Dans un tel cas, la compétence judiciaire à l’égard d’une demande à laquelle cette obligation sert de base se détermine, conformément à l’article 7, point 1, sous a), de ce règlement, au regard du lieu d’exécution de ladite obligation.