Cass. 1re civ., 30 janvier 1996, n° 93-16.493
COUR DE CASSATION
Arrêt
Cassation
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Lemontey
Rapporteur :
M. Sargos
Avocat général :
Mme Le Foyer de Costil
Avocats :
SCP Coutard et Mayer, SCP Boulloche
Attendu que la société Maison idéale a souscrit, le 2 avril 1979, auprès de la compagnie Rhône Méditerranée une " assurance de responsabilité décennale des constructeurs de maisons individuelles " dont les garanties s'appliquaient aux travaux pour lesquels les marchés avaient été passés ou qui avaient commencé à compter de la date de prise d'effets du contrat fixée au 1er janvier 1979 ; que, toutefois, une clause étendait ces garanties " à des sinistres survenus ou déclarés dont les assurés n'avaient pas connaissance le 1er janvier 1979 et qui concerneraient des ouvrages livrés ou réceptionnés au plus tard le 31 décembre 1975 " ; qu'à la suite de malfaçons ayant affecté un immeuble dont Mme X... avait, en 1970 et 1971, confié la construction à la société Maison idéale, un premier sinistre s'est produit après la réception, survenue le 19 octobre 1972, et a abouti à un accord aux termes duquel furent réalisés des travaux de réparation et de consolidations, qui firent eux-mêmes l'objet d'une réception le 30 juin 1975 ; que de nouveaux désordres étant apparus, Mme X... a assigné la société Maison idéale, qui a appelé en garantie la compagnie Rhône Méditerranée ; qu'après la condamnation par le premier juge de la société Maison idéale à réparer les malfaçons, et celle de l'assureur à garantir son assurée, cette société a été mise en redressement judiciaire ; que la cour d'appel a condamné la compagnie d'assurances à indemniser Mme X... sur le fondement de l'action directe invoquée pour la première fois dans les conclusions d'appel de cette dernière ;
Sur le premier moyen :
Attendu que la société Rhône Méditerranée reproche à la cour d'appel d'avoir, en raison de l'élément nouveau résultant de la mise en redressement judiciaire de la société Maison idéale, déclaré recevable la demande formée en cause d'appel par Mme X... sur le fondement de l'article 555 du nouveau Code de procédure civile, alors que l'assureur était déjà partie en première instance, de sorte qu'aurait été violé l'article 554 du même Code ;
Mais attendu que la mise en redressement judiciaire de la société Maison idéale, postérieurement au jugement la condamnant à réparer les malfaçons affectant l'immeuble de Mme Gourdel, constituait à l'égard de cette dernière une évolution du litige la rendant recevable à demander pour la première fois en cause d'appel, sur le fondement de l'action directe lui appartenant, la condamnation de la société Rhône Méditerranée, et cela alors même que cet assureur avait été partie en première instance ; que le moyen ne peut donc être accueilli ;
Mais sur le second moyen, pris en ses deuxième et troisième branches :
Vu l'article 1134 du Code civil ;
Attendu que, pour retenir la garantie de l'assureur, la cour d'appel a énoncé que le sinistre, objet du litige, était survenu après le 2 avril 1979, date de signature du contrat d'assurance ;
Attendu, cependant, que la garantie de l'assureur ne concernait que les travaux dont les marchés avaient été passés ou l'exécution commencée après le 1er janvier 1979, avec une extension aux ouvrages livrés et réceptionnés au plus tard le 31 décembre 1975 ; d'où il suit que la cour d'appel a dénaturé les clauses claires et précises de la police d'assurance ;
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur la première branche du second moyen :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a condamné la société Rhône Méditerranée à indemniser Mme X..., l'arrêt rendu le 13 avril 1993, entre les parties, par la cour d'appel de Toulouse ; remet, en conséquence, quant à ce, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Bordeaux.