Cass. 2e civ., 1 juillet 2010, n° 09-15.594
COUR DE CASSATION
Arrêt
Cassation
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Loriferne
Rapporteur :
M. Kriegk
Avocats :
SCP Gadiou et Chevallier, SCP Nicolaÿ, de Lanouvelle et Hannotin, SCP Rocheteau et Uzan-Sarano
Attendu, selon l'arrêt attaqué, rendu sur renvoi après cassation (2e Civ. 21 décembre 2006, pourvoi n° 06-12. 667), que M. X..., qui utilisait du matériel informatique pour les besoins de son activité professionnelle exercée à domicile, a souscrit, par l'entremise de la société de courtage IART conseil, une assurance multirisques habitation auprès de la société Le Continent à effet du 8 décembre 1995 ; qu'il a notifié son changement de résidence principale à son assureur le 15 janvier 1996 et qu'il a souscrit le 18 janvier 1996 auprès de la société Axa une police " tous risques informatiques " garantissant le mobilier informatique, à l'exclusion expresse des pertes d'exploitation ; qu'ayant été victime d'un vol par effraction entre le 27 et le 29 janvier 1996, au cours duquel a été dérobé son matériel informatique, la société Le Continent a refusé de l'indemniser de la perte de ce matériel ; que M. X... a assigné cet assureur, aux droits duquel vient la société Generali assurances IARD (la société Generali), ainsi que la société IART conseil et son assureur, la Caisse de garantie des professionnels de l'assurance (la CGPA) en garantie, responsabilité et indemnisation ; qu'un arrêt de la cour d'appel de Paris du 16 janvier 2001, ayant décidé que la police souscrite par M. X... auprès de la société Le Continent ne couvrait pas le vol de son matériel informatique, a été cassé par arrêt de la Cour de cassation en date du 5 mai 2004 ; que l'arrêt rendu le 9 décembre 2005 par la cour d'appel statuant sur renvoi de cassation a été cassé partiellement par arrêt de la deuxième chambre civile de la Cour de cassation en date du 21 décembre 2006 en ce qu'il a débouté M. X... de sa demande en paiement des préjudices immatériels subis ; que M. X... a saisi la cour d'appel de renvoi ;
Sur le pourvoi principal, pris en ses premier et deuxième moyens, tels que reproduits en annexe :
Attendu que M. X... fait grief à l'arrêt de limiter à 5 % sa perte de chance de ne pas contracter une garantie complémentaire et en conséquence de condamner la société Generali à lui payer une somme de 15 000 euros en réparation de son préjudice professionnel immatériel ;
Mais attendu que la cour d'appel relève que par suite de l'arrêt rendu par la Cour de cassation le 21 décembre 2006, il est définitivement jugé qu'il résulte des stipulations de la police multirisques habitation que le matériel informatique professionnel installé dans la résidence principale de l'assuré était couvert par la police souscrite auprès de la société Le Continent par l'intermédiaire de la société IART conseil, et qu'il revenait à cet assureur ou / et à cette dernière société par l'intermédiaire de laquelle il avait contracté, de l'informer et de le conseiller sur la possibilité ou l'impossibilité de contracter la garantie complémentaire " dommages professionnels immatériels " ; qu'elle retient que les conditions de conclusion de ce contrat et ce contrat en lui-même ayant légitimement pu persuader M. X... que la société IART conseil était le mandataire de la société d'assurance Le Continent, celui-ci était fondé à invoquer la théorie du mandat apparent et à rechercher la responsabilité de la société Generali pour les éventuels manquements commis par la société IART conseil ; qu'il appartenait à cette société d'aviser M. X... de la possibilité de souscrire la garantie complémentaire dommages professionnels immatériels consécutifs ou de l'orienter utilement vers une couverture adaptée de l'entier risque à garantir ; qu'elle retient que lors de la conclusion du contrat d'assurance auprès de la société Le Continent le 8 décembre 1995, M. X... avait pu croire que ce contrat couvrait les risques professionnels ; que celui-ci ayant entendu souscrire le 18 janvier 1996 auprès de la société Axa une garantie auprès d'un autre assureur et n'ayant pas souhaité souscrire la garantie complémentaire du risque " pertes d'exploitation ", la probabilité pour qu'il choisisse d'adhérer à cette couverture complémentaire de risque auprès de la société d'assurances Le Continent le 8 décembre précédent, soit seulement quelques semaines auparavant, si cette couverture lui avait été proposée et conseillée par la société IART conseil, était particulièrement faible ;
Que de ces constatations et énonciations, procédant aux recherches prétendûment omises, sans avoir à entrer dans le détail de l'argumentation des parties, et sans être tenue de s'expliquer sur les éléments de preuve qu'elle décidait d'écarter, c'est dans l'exercice de son pouvoir souverain d'appréciation de la valeur et de la portée des éléments de preuve produits devant elle que la cour d'appel a évalué la perte de chance subie par M. X... en ne contractant pas de garantie pour pertes d'exploitation du fait de la défaillance du courtier de la société Generali ;
Et attendu qu'il ne résulte ni de l'arrêt ni des pièces de la procédure que M. X... ait soutenu qu'il avait volontairement souscrit la garantie auprès d'Axa sans y inclure les pertes d'exploitation pour cette raison qu'il croyait que ces pertes étaient garanties par la société Le Continent ;
D'où il suit que le moyen qui est nouveau, mélangé de fait et de droit en sa première branche du deuxième moyen, et comme tel irrecevable, n'est pas fondé pour le surplus ;
Et attendu que le troisième moyen n'est pas de nature à permettre l'admission du pourvoi ;
Mais sur le moyen unique du pourvoi incident de la CGPA, pris en sa première branche :
Vu l'article 564 du code de procédure civile ;
Attendu que la notion d'évolution du litige est étrangère à la recevabilité des demandes formées en appel contre une personne qui était partie au procès devant le tribunal ;
Attendu que pour condamner la GCPA à garantir la société Generali de la moitié des condamnations prononcées à son encontre, l'arrêt énonce que l'appel en garantie formé pour la première fois devant la cour d'appel par la société Generali à l'encontre de la CGPA doit être déclaré recevable dès lors qu'il résulte de l'évolution du présent litige à la suite de l'arrêt rendu par la Cour de cassation le 21 décembre 2006 ;
Qu'en statuant ainsi alors que la société Generali et la CGPA avaient été parties au procès dès la première instance, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres branches du moyen unique du pourvoi incident :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a condamné la Caisse de garantie des professionnels de l'assurance à garantir la société Generali assurances IARD de la moitié des condamnations prononcées à son encontre, l'arrêt rendu le 14 mai 2009, entre les parties, par la cour d'appel de Versailles ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Versailles, autrement composée.