CA Poitiers, 2e ch. civ., 31 août 2021, n° 21/00313
POITIERS
Arrêt
Confirmation
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Franco
Conseillers :
M. Chiron, M. Vetu
EXPOSE DU LITIGE :
Suivant jugement en date du 5 septembre 2018, le Tribunal d'instance de Jonzac ordonnait l'expulsion de Noël B. et de Jeanine B., née D., (les époux B.) des biens immobiliers qu'ils occupaient situés à BOISREDON (17150) en suite de la résiliation du bail les liant avec M. et Alix H. (les consorts H.).
Sur les terres prises à bail, le fils des époux B. possédait un cheptel d'animaux composé de trois vaches, vingt-trois chèvres, un bouc, un bélier, six brebis et trois agneaux, tous recensés selon procès-verbal d'expulsion établi par huissier de justice en date du 1er octobre 2019. Ces animaux étaient confiés à Roger D., lequel restituait par la suite les chèvres et le bouc et conservait les autres animaux en dépit d'une sommation interpellative délivrée à cet effet, les époux B. ayant refusé de régler les frais de pension sollicités.
Par ordonnance en date du 22 novembre 2018, le Premier Président de la Cour d'appel de Poitiers statuant en référé a débouté les époux B. de leur demande tendant à la suspension de l'exécution provisoire assortissant le jugement ordonnant leur expulsion.
Les époux B. ont sollicité un délai pour reprendre possession de leurs biens et des bêtes confiés à Roger D.. Le juge de l'exécution du tribunal de grande instance de Saintes rejetait cette demande par jugement daté du 14 août 2019.
Dans le cadre des opérations d'expulsion mises en œuvre le 1er octobre 2019, les consorts H. ont saisi le juge de l'exécution du tribunal de grande instance de Saintes fin qu'il soit statué sur les meubles qui n'auraient pas été retirés par les époux B. des biens immobiliers dont ils auraient été expulsés et ont sollicité en outre, la somme de 2.000 ' sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile.
L'affaire était appelée et évoquée à l'audience du 06 novembre 2019 au cours de laquelle les époux B. sollicitaient un délai de trois mois pour reprendre possession de leurs biens et des bêtes confiées à Roger D., demande à laquelle les consorts H. se sont opposés.
Par le biais d'une note transmise en cours de délibéré au juge de l'exécution le 13 novembre 2019, les consorts H. ont précisé qu'à défaut de reprise des animaux remis à Roger D., ce dernier serait alors à même d'en disposer faute pour lui de pouvoir plus longtemps entretenir à ses frais le cheptel. Les époux B. ont conclu au rejet de cette note ou, subsidiairement, sollicité la réouverture des débats pour y répondre.
Par jugement daté du 27 février 2020, le juge de l'exécution a :
• Ordonné la vente aux enchères publiques des biens ayant une valeur marchande y compris ceux par nature insaisissables, laissés sur [...] dans les lieux situés à BOISREDON (17150) 1, Les Grands Champs, ou qui seraient entreposés en un lieu approprié suite à l'expulsion,
• Constaté que les bêtes délaissées confiées en urgence à Monsieur Roger-Ian D. le jour des opérations d'expulsion n'ont pas été repris par Monsieur et Madame B. et que ces animaux suivent le sort des biens meubles, permettant au tiers détenteur d'en disposer, dans le respect dû à leurs conditions,
• Dit qu'après inventaire, il sera procédé à leur vente forcée et que le produit de la vente après déduction des frais et de la créance de Messieurs M. et Alix H. sera consignée au profit des personnes expulsées qui en seront informées par l'officier ministériel chargé de la vente à leur adresse actuelle ou à défaut à la dernière adresse connue,
• Dit que les biens dépourvus de valeur marchande sont déclarés abandonnés et que le propriétaire des lieux pourra en disposer librement, les faire enlever ou les détruire afin de libérer les lieux,
• Dit que les papiers et documents de nature personnelle seront placés sous enveloppe scellée et conservés pendant deux ans par l'huissier de justice chargé de la mesure d'expulsion qui en donnera avis aux personnes expulsées,
• Dit qu'à l'expiration de ce délai, l'huissier de justice pourra détruire ces documents non réclamés après avoir dressé procès-verbal de ses opérations,
• Condamne in solidum Monsieur et Madame B. aux dépens de l'instance et les condamne in solidum à verser à Messieurs M. et Alix H. la somme de Mille Cinq Cents Euros (1500 ') au titre des frais non compris dans les dépens.
Les époux B. ont interjeté appel à l'encontre de cette décision par déclaration en date du 27 janvier 2021 visant l'ensemble des dispositions du jugement.
Dans leurs dernières conclusions RPVA datées du 04 mars 2021, les époux B. sollicitent de la cour de :
• Dire et juger recevable et bien fondé l'appel interjeté par eux,
• Y faisant droit, réformer et statuer à nouveau,
• Débouter Messieurs Alix et Marcel H. de toutes leurs demandes,
• Décharger les époux B. de toutes condamnations,
• Condamner Messieurs Alix et Marcel H. aux dépens.
Au soutien de leurs prétentions, ils expliquent que la partie du dispositif du jugement ordonnant « la vente aux enchères publiques des biens ayant une valeur marchande, y compris ceux par nature insaisissables laissés sur place par eux dans les lieux situés à BOISREDON est inapplicable dès lors que le procès-verbal d'expulsion indique très clairement qu'hormis les animaux, les meubles listés sont tous présentés par l'huissier comme n'ayant aucune valeur marchande.
En second lieu, ils indiquent que les motifs de ce même jugement aux termes desquels « les bêtes délaissées, confiées en urgence à Monsieur Roger-Ian D. le jour des opérations d'expulsion, n'ont pas été repris par Monsieur et Madame B. et que ces animaux suivent le sort des biens meubles, permettant au tiers détenteur d'en disposer, dans le respect dû à leurs conditions» sont totalement erronés à l'aune des motifs et du dispositif d'un jugement rendu le 18 novembre 2020 par le juge des contentieux de la protection du Tribunal de proximité de Jonzac saisi par Jérôme B., leur fils.
Ils indiquent à cet égard que ce dernier jugement a entériné, en effet, que la rétention des animaux était due à la résistance injustifiée de Roger D. qui souhaitaient appliquer aux animaux de leur fils des frais de pension prohibitifs et qu'il a été condamné à lui payer indemnité à ce titre.
Les époux H. n'ont pas constitués.
L'ordonnance de clôture a été prononcée le 28 avril 2021.
MOTIFS
L'appel des époux B. interjeté dans les délais et dans les formes sera déclaré recevable.
• Sur la réformation du jugement déféré
l'article L. 433-1 du Code des procédures civiles d'exécution dispose que les meubles se trouvant sur les lieux sont remis, aux frais de la personne expulsée, en un lieu que celle-ci désigne. A défaut, ils sont laissés sur place ou entreposés en un autre lieu approprié et décrits avec précision par l'huissier de justice chargé de l'exécution avec sommation à la personne expulsée d'avoir à les retirer dans un délai fixé par voie réglementaire.
L'article R. 433-2 du Code des procédures civiles d'exécution énonce que si des biens ont été laissés sur place ou déposés par l'huissier de justice en un lieu approprié, le procès-verbal d'expulsion contient, en outre, à peine de nullité :
1° Inventaire de ces biens, avec l'indication qu'ils paraissent avoir ou non une valeur marchande;
2° Mention du lieu et des conditions d'accès au local où ils ont été déposés ;
3° Sommation à la personne expulsée, en caractères très apparents, d'avoir à les retirer dans le délai de deux mois non renouvelable à compter de la remise ou de la signification de l'acte, faute de quoi les biens qui n'auront pas été retirés seront vendus aux enchères publiques dans le cas où l'inventaire indique qu'ils paraissent avoir une valeur marchande ; dans le cas contraire, les biens seront réputés abandonnés, à l'exception des papiers et documents de nature personnelle qui seront placés sous enveloppe scellée et conservés pendant deux ans par l'huissier de justice ;
4° Mention de la possibilité, pour la personne expulsée, de contester l'absence de valeur marchande des biens, à peine d'irrecevabilité dans le délai d'un mois à compter de la remise ou de la signification de l'acte ;
5° L'indication du juge de l'exécution territorialement compétent pour connaître de la contestation;
6° La reproduction des dispositions des articles R. 121-6 à R. 121-10, R. 442-2 et R. 442-3.
Le procès-verbal d'expulsion en date du 1er octobre 2019 produit aux débats portent très exactement mention de ce qu'il revient à l'expulsé de retirer les meubles dans le délai d'un mois à compter de ce jour, faute de quoi les biens qui n'auront pas été retirées seront, sur décision du juge, vendus aux enchères publiques ou déclarés abandonnés. Les autres mentions, telles que précisées, par les textes précités sont par ailleurs reproduites.
Les appelants ont sollicité, à maintes reprises des délais pour récupérer les animaux inventoriés dans ce procès-verbal d'expulsion mais sans jamais les récupérer. Ce fait établi a d'ailleurs été constaté par le juge de l'exécution, dans son jugement contesté du 27 février 2020 qui a ordonné la vente judiciaire de ces animaux.
La situation décrite par les appelants à la cour n'a pas évolué. En effet, les époux B. en dépit d'un jugement du tribunal de proximité de Jonzac en date du 18 novembre 2020 n'apportent pas la preuve à la cour, pourtant à leur charge, de ce qu'ils ont récupéré les animaux ainsi que les meubles inventoriés dans le procès-verbal d'expulsion.
En conséquence, le jugement querellé sera confirmé en toutes ses dispositions.
• Sur les autres dispositions
Les époux B. qui échouent en leurs prétentions supporteront les dépens générés par l'instance devant la cour.
PAR CES MOTIFS
La Cour,
Déclare recevable l'appel formé par de Noël B. et de Jeanine B., née D. le 27 janvier 2021,
Confirme en toutes ses dispositions le jugement du juge de l'exécution du Tribunal Judiciaire de Saintes en date du 27 février 2020,
Laissons les dépens à la charge de Noël B. et de Jeanine B., née D..