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Décisions

CA Nîmes, 5e ch. soc., 16 mai 2023, n° 21/00787

NÎMES

Arrêt

Infirmation

PARTIES

Défendeur :

Concept Fruits (SAS)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Rouquette-Dugaret

Conseillers :

Mme Reyter Levis, Mme Martin

Avocats :

Me Expert, Me Meyer, Me Pomies Richaud, Me Chauvin

Cons. Pruh’d. D’Annonay, du 27 janv. 202…

27 janvier 2021

FAITS, PROCEDURE ET PRETENTIONS DES PARTIES :

Mme [E] [O] a été engagée à compter du 6 août 2007, suivant contrat à durée déterminée, dont le terme était fixé au 31 octobre 2007, en qualité de contrôleuse de la gestion industrielle et de la qualité par la société Ardèche Marrons, devenue la SAS Concept fruits.

Suivant contrat à durée indéterminée du 19 novembre 2007, Mme [E] [O] a été engagée par la SAS Concept fruits.

Par avenant du 1er septembre 2016, Mme [E] [O] a été promue directrice d'usine.

La convention collective applicable est celle des produits alimentaires élaborés : industries.

Mme [E] [O] a été en congé maternité du 29 janvier au 21 mai 2018, en congés payés du 20 août au 7 septembre 2018, puis en arrêt de travail à compter du 11 septembre 2018.

Le 30 avril 2019 , lors de la seconde visite de reprise, le médecin du travail a constaté que 'pas de reclassement possible dans l'entreprise (groupe [S])', et estimé que 'tout maintien du salarié dans un emploi serait gravement préjudiciable à sa santé'.

Par courrier du 3 mai 2019 , Mme [E] [O] a été convoquée à un entretien préalable.

Par courrier du 23 mai 2019 , Mme [E] [O] a été licenciée pour inaptitude et impossibilité de reclassement.

Par requête du 23 octobre 2019 , Mme [E] [O] a saisi le conseil de prud'hommes d'Annonay aux fins de dire et juger qu'elle bénéficie du statut de lanceur d'alerte ; dire et juger que son exercice d'une alerte est à l'origine des pressions subies et, subséquemment, de son inaptitude physique ; dire et juger que son licenciement est nul ainsi que de condamner la SAS Concept fruits au paiement de diverses sommes indemnitaires.

Par jugement 27 janvier 2021, le conseil de prud'hommes d'Annonay a :

- déclaré recevable la saisine de Mme [E] [O],

- débouté Mme [E] [O] de l'ensemble de ses demandes avant dire droit,

- dit que Mme [E] [O] ne bénéficie pas du statut de lanceur d'alerte et l'a déboutée de sa demande de nullité de son licenciement ainsi que des indemnités subséquentes,

- débouté Mme [E] [O] de sa demande de déclarer son licenciement sans cause réelle et sérieuse pour le motif de non consultation du CSE ainsi que de ses demandes associées avec les indemnités subséquentes,

- dit que l'inaptitude de Mme [E] [O] est imputable aux agissements fautifs de l'employeur,

- dit que le licenciement de Mme [E] [O] est sans cause réelle et sérieuse,

- condamné la SAS concept fruits à verser à Mme [E] [O] la somme de 16.695 euros nets de CSG-CRDS a titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

- condamné la SAS concept fruits à verser à Mme [E] [O] les sommes de 16.692,96 euros d'indemnité compensatrice de préavis, de 1.669,30 euros d'indemnité compensatrice de congés payés associée et de 570,05 euros au titre du solde de l'indemnité de licenciement,

- ordonné à la SAS concept fruits de fournir l'ensemble de documents rectifiés : certificat de travail, reçu pour solde de tout compte, attestation destinée à Pole Emploi,

- fixé la moyenne des trois derniers mois de salaire à 5 564, 32 euros,

- condamné la SAS concept fruits à payer la somme de 1.500 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile à Mme [E] [O],

- débouté les parties du surplus de leurs demandes.

- mis à la charge de la SAS Concept fruits les entiers dépens de l'instance.

Par acte du 24 février 2021, Mme [E] [O] a régulièrement interjeté appel de cette décision.

Par ordonnance en date du 28 novembre 2022, le conseiller de la mise en état a prononcé la clôture de la procédure à effet au 14 février 2023 à 16 heures et fixé l'examen de l'affaire à l'audience du 28 février 2023.

Aux termes de ses dernières conclusions en date du 26 octobre 2021, Mme [E] [O] demande à la cour de :

- la recevoir en son appel et ses demandes,

- infirmer le jugement en ce qu'il a:

- dit que Mme [E] [O] ne bénéficiait pas du statut de lanceur d'alerte et l'a débouté de sa demande de nullité de son licenciement ainsi que des indemnités subséquentes,

- débouté Mme [E] [O] de sa demande de déclarer son licenciement sans cause réelle et sérieuse pour le motif de non consultation du CSE ainsi que de ses demandes associées avec les indemnités subséquentes,

- condamné la SAS Concept fruits à verser à Mme [E] [O] la somme de 16.695 euros nets de CSG-CRDS a titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

- débouté les parties du surplus de leurs demandes,

- confirmer le jugement en ce qu'il a :

- dit que l'inaptitude de Mme [E] [O] est imputable aux agissements fautifs de l'employeur,

- dit que le licenciement de Mme [E] [O] est sans cause réelle et sérieuse,

- condamner la SAS Concept fruits à payer la somme de 1 500 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile à Mme [E] [O],

Statuant à nouveau,

A titre principal,

- juger qu'elle bénéficie du statut de lanceur d'alerte,

- juger que l'exercice par elle d'une alerte est à l'origine des pressions subies et, subséquemment, de son inaptitude physique,

En conséquence,

- juger que son licenciement est nul,

- condamner la SAS Concept fruits à lui verser la somme de 66.771 euros nets de CSG CRDS au titre de dommages et intérêts pour licenciement nul,

A titre subsidiaire,

- juger que la SAS Concept fruits a manqué à son obligation de consultation des délégués du personnel ou des membres du CSE,

En conséquence,

- juger que son licenciement est sans cause réelle et sérieuse,

- condamner la SAS Concept fruits à lui verser la somme de 66.771 euros nets de CSG CRDS à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

A titre infiniment subsidiaire,

- juger que son inaptitude est imputable aux agissements fautifs de l'employeur,

En conséquence,

- juger que son licenciement est sans cause réelle et sérieuse,

- condamner la SAS Concept fruits à lui verser à la somme de 61.207,52 euros nets de CSG CRDS au titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

- condamner la SAS Concept fruits à lui verser la somme de 61.207,52 euros nets de CSG CRDS à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, (sic)

En tout état de cause,

- juger que son inaptitude est d'origine professionnelle,

- condamner la SAS Concept fruits à lui verser la somme de 17.156,65 euros à titre de reliquat d'indemnité spéciale de licenciement,

- juger que l'ensemble des demandes portera intérêts de droit au taux légal à compter de la demande en justice,

- fixer à 5.564,32 euros le salaire moyen de référence,

- débouter la SAS Concept fruits de toutes demandes, fins et conclusions contraires,

- condamner la SAS Concept fruits à lui verser la somme de 3.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner la même aux entiers dépens.

Mme [E] [O] soutient que :

- à son retour de congés payés le 10 septembre 2018, elle a eu une altercation verbale avec M. [M] sur son lieu de travail, ce dernier lui indiquant qu'elle devait accepter une rupture conventionnelle de son contrat de travail à défaut de quoi elle serait licenciée pour faute, et lui demandait de remettre ses clés et son téléphone portable et de quitter immédiatement l'entreprise,

- cette altercation est à l'origine de son arrêt de travail et de son inaptitude,

- son licenciement est nul puisque son inaptitude trouve sa cause directe dans les représailles dont elle a fait l'objet en raison de son statut de lanceur d'alerte,

- elle a lancé une alerte qualité en raison de la présence d'un morceau de plastique dans une boîte de marrons, trouvé par un opérateur qui en atteste, et le contrôle produit n'a été effectué que plusieurs mois après son alerte,

- fin 2017, elle s'est opposée à produire des marrons à sec sous vide avec des adjonctions d'eau supérieures à 15%, cette pratique trompeuse envers le consommateur a été remise en cause par le comité technique agro-alimentaire auquel elle participait qui a créé la dénomination ' marrons entiers à l'étuvée' pour les distinguer de celle de 'marrons entiers à sec',

- dans l'unique but de veiller à la protection de l'intérêt général, elle tentait de s'opposer à cette pratique et a alerté son supérieur hiérarchique, M. [M], puis par courrier du 18 septembre 2018 le président de la société,

- les dysfonctionnements qu'elle a ainsi signalés constituent des délits qui font peser une menace grave sur l'intérêt général,

- le conseil de prud'hommes a commis une erreur d'appréciation en considérant que les alertes qu'elle avait lancées relevaient de sa compétence de directeur d'usine et en lui refusant le statut de lanceur d'alerte,

- bien qu'étant directrice d'usine, elle ne disposait d'aucune délégation de compétence et n'était pas représentante légale de la société, il n'entrait pas dans son champ de compétence de dénoncer les délits commis par son employeur,

- ses fonctions ne lui permettaient ni de retirer de la vente un stock de produits en raison de la présence d'un morceau de plastique, ni de modifier seule la composition des produits vendus,

- suite à ses alertes, son employeur a exercé sur elle des pressions destinées à l'écarter de la société, puisqu'à son retour de congé maternité, elle a été privée d'une partie de ses outils de travail, notamment de son ordinateur, ne bénéficiait d'aucun entretien de reprise de travail et subissait une charge de travail conséquente la conduisant à renoncer sur demande de son supérieur hiérarchique à des jours de congés,

- au surplus, son supérieur hiérarchique lui faisait des reproches injustifiés, allant jusqu'à exiger d'elle qu'elle accepte une rupture conventionnelle,

- le courrier adressé par la SAS Concept fruits à la Caisse Primaire d'assurance maladie suite à son agression vient confirmer les pressions qu'elle a subies pour qu'elle quitte l'entreprise,

- subsidiairement, son licenciement doit être considéré comme étant dépourvu de cause réelle et sérieuse puisqu'aucune consultation des représentants du personnel, en l'espèce du comité économique et social, n'a été organisée par l'employeur préalablement à son licenciement, alors même qu'elle est obligatoire même en cas d'impossibilité de reclassement,

- à titre infiniment subsidiaire, son licenciement est dénué de cause réelle et sérieuse en raison du comportement fautif de l'employeur, son agression par M. [M] ayant été reconnue comme étant un accident du travail par le tribunal judiciaire de Valence selon jugement du 29 avril 2021,

- même s'il a contesté le caractère professionnel de son agression, la SAS Concept fruits n'en a jamais contesté les circonstances, soit les pressions, les reproches et l'agression verbale,

- les attestations produites par la SAS Concept fruits, la prétendue pétition et les écritures de la SAS Concept fruits démontrent son animosité à son égard, et sa volonté de nuisance,

- elle est par suite en droit de percevoir des dommages et intérêts pour licenciement nul ou à tout le moins pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et en tout état de cause l'indemnité spéciale de licenciement.

En l'état de ses dernières écritures en date du 27 juillet 2021, la SAS Concept fruits demande à la cour de :

- dénier à Mme [E] [O] le statut de lanceur d'alerte et les conséquences de droit qui y sont attachées,

- en conséquence, confirmer le jugement du conseil de prud'hommes d'Annonay du 27 janvier 2021 sur ce point,

- réformer le jugement du conseil de prud'hommes d'Annonay du 27 janvier 2021 en ce qu'il a dit et jugé que le licenciement de Mme [E] [O] était sans cause réelle et sérieuse,

- au contraire, dire et juger que Mme [E] [O] succombe à établir un comportement fautif de la part de l'employeur susceptible d'être à l'origine de son inaptitude physique,

- en conséquence, dire et juger que le licenciement de Mme [E] [O] repose bien sur une cause réelle et sérieuse et la débouter de ses chefs de demandes subséquents,

- réformer le jugement du conseil de prud'hommes d'Annonay du 27 janvier 2021 en ce qu'il a accordé à Mme [E] [O] la somme de 570,05 euros au titre du solde de l'indemnité de licenciement,

- réformer le jugement du conseil de prud'hommes d'Annonay du 27 janvier 2021 en ce qu'il a accordé à Mme [E] [O] la somme de 1.500 euros au visa de l'article 700 du code de procédure civile,

- confirmer le jugement du conseil de prud'hommes d'Annonay du 27 janvier 2021 pour le surplus,

- reconventionnellement, condamner Mme [E] [O] à lui payer la somme de 3.000 euros au visa de l'article 700 du code de procédure civile au titre de ses frais irrépétibles en cause d'appel,

- condamner la même aux dépens éventuels de l'instance.

La SAS Concept fruits fait valoir que :

- Mme [E] [O] ne peut se prévaloir du statut de lanceur d'alerte,

- s'agissant de la présence de plastique dans une boîte de marron, soit un morceau trouvé dans une boîte par un opérateur, Mme [E] [O] a fait sur un simple soupçon bloquer 92.000 boites, les contrôles qualité opérés par sondage sur chaque palette des lots bloqués n'ont donné lieu à aucune découverte d'un autre morceau de plastique, et les ventes des boites restantes, suite au contrôle par sondage, n'ont donné lieu à aucun retour clientèle,

- la réaction de Mme [E] [O] était donc sur cette problématique totalement disproportionnée,

- sur le second point, Mme [E] [O] invoque le non-respect d'une réglementation dont elle ne justifie pas, la seule disposition relative aux conserves de fruits appertisés ( décision 91 du centre technique agro-alimentaire d'août 2016 ) évoque au contraire la notion de masse nette égouttée, ce qui suppose que le reste de la masse est de l'eau,

- le fait que la marque soit commercialisée par des enseignes nationales et qu'elle obtienne dans les tests comparatifs des résultats élogieux démontre au contraire de ce que soutient Mme [E] [O] qu'elle respecte les normes et ne procède à aucune tromperie envers les consommateurs,

- par décision n°99 le centre technique agro-alimentaire a explicité les différentes dénominations en matière de conservation de marrons, et est venu clarifier pour toute les filières les pratiques,

- c'est donc logiquement que le conseil de prud'hommes a refusé à Mme [E] [O] le statut de lanceur d'alerte,

- s'agissant de la consultation des représentants du personnel, elle ne s'impose que lorsque l'employeur a l'obligation de rechercher une solution de reclassement au salarié déclaré inapte, ce qui n'était pas le cas en l'espèce eu égard à la formulation de l'avis d'inaptitude, la jurisprudence invoquée par Mme [E] [O] étant rendue dans une situation régie par les dispositions antérieures à la réforme issue de la loi du 8 août 2016,

- s'agissant de son manquement à l'obligation de sécurité comme étant à l'origine de l'inaptitude de Mme [E] [O], cette accusation intervient dans un contexte où elle n'a pas donné suite aux allégations mensongères de Mme [E] [O] qui a ensuite décidé de suspendre son contrat de travail par un arrêt maladie,

- aucune altercation n'a eu lieu avec M. [M], lequel lui a au contraire demandé de prendre le temps de la réflexion, ainsi qu'elle l'a rappelé dans le questionnaire employeur adressé à la Caisse Primaire d'assurance maladie, qui lui a ensuite dénié le bénéfice de la législation relative aux risques professionnels,

- au surplus, Mme [E] [O] ne produit pas son dossier médical auprès de la médecine du travail qui pourrait seul établir le lien entre son travail et son état de santé, ni aucun élément qui permettrait d'établir la réalité de l'agression verbale qu'elle allègue,

- avant la reprise du travail par Mme [E] [O] et l'avis du médecin du travail, elle a été destinataire d'un courrier émanant de 29 de ses salariés qui dénonçaient les méthodes managériales autoritaires de Mme [E] [O] et menaçaient de démissionner si elle devait reprendre ses fonctions.

Pour un plus ample exposé des faits et de la procédure, ainsi que des prétentions et moyens des parties, il convient de se référer à leurs écritures déposées et soutenues à l'audience.

MOTIFS

Mme [E] [O] a été licenciée pour inaptitude par courrier en date du 23 mai 2019 rédigé dans les termes suivants:

"Madame,

Par lettre en date du 3 mai 2019 , nous vous avons convoqué a un entretien préalable afin de vous exposer les raisons pour lesquelles nous envisagions de procéder de votre licenciement.

Par lettre du 6 mai 2019 , vous nous avez indiqué que votre état de santé ne vous permettait pas de vous présenter à cet entretien.

Nous le regrettons mais, pour autant, la procédure suit son cours.

Après réflexion, nous sommes au regret de vous notifier, par la présente lettre, la rupture de votre contrat de travail pour cause réelle et sérieuse.

Les raisons de cette décision sont les suivantes ,

Par un avis médical rendu le 30 avril 2019 , le médecin du travail a estimé que vous étiez inapte à votre poste de travail en précisant que tout maintien dans un emploi serait gravement préjudiciable a votre santé.

En indiquant expressément cette mention dans son avis médical, le médecin du travail, après avoir réalisé une étude de votre poste de travail le 24 avril 2019 , considère que votre état de santé actuel ne vous permet pas d'être reclassée dans notre société et nous dispense donc de toute obligation de recherche de reclassement y compris au sein du Groupe Roger [S].

Par conséquent, votre inaptitude physique telle qu'appréciée par le médecin du travail nous met dans l'impossibilité totale de procéder a votre reclassement et nous n 'avons d'autre solution que de procéder à la rupture de votre contrat de travail.

La date de notification de cette lettre marque la rupture définitive de votre contrat de travail.

En conséquence, vous ne bénéficiez d'aucun préavis ni d'aucune indemnité compensatrice de préavis considérant que votre inaptitude ne relève pas de la législation professionnelle.

En revanche, vous percevrez l'indemnité légale de licenciement calculée en fonction de votre ancienneté et de votre rémunération brute ainsi que l'indemnité compensatrice au titre des congés payés restant dus.

D'ores et déjà, nous tenons à votre disposition ces sommes qui vous reviennent et votre solde de tout compte ainsi que les documents légaux relatifs à votre départ.

Si vous souhaitez les recevoir par la voie postale, nous vous invitons à nous le préciser par tout moyen qu 'il vous plaira.

Enfin, nous vous informons que vous disposez de la possibilité d'user du dispositif de portabilité selon lequel vous pouvez conserver, sous réserve de prise en charge par le régime d 'assurance chômage, le bénéfice du régime de prévoyance et de frais de santé en vigueur au sein de notre société par lesquels vous bénéficiez gratuitement du maintien de ces régimes pendant une durée égale a la durée de vos derniers contrats de travail consécutifs au sein de l'entreprise.

Cette durée, est, cependant, retenue dans la limite de 12 mois et sous réserve de votre prise en charge par le régime d 'assurance chômage.

Si vous souhaitez bénéficier de votre droit à portabilité, il vous appartient de nous faire parvenir au plus vite le justificatif de votre prise en charge par le régime d'assurance chômage.

Nous attirons également votre attention sur le fait que les garanties qui vous sont maintenues sont celles dont bénéficieront les salariés de l'entreprise pendant votre période de chômage, de telle sorte que toute évolution collective de ces garanties à compter de votre départ vous sera opposable.

Si vous ne souhaitez pas bénéficier de la portabilité ou si vous ne vous inscrivez pas à Pôle Emploi vous bénéficierez d 'un délai de 10 jours à compter de la date de fin de votre contrat de travail, au cours duquel vous pourrez nous signifier votre refus.

Sans courrier de votre part manifestant votre refus, vous serez réputée avoir accepté le bénéfice de la portabilité et vous avez à nous faire parvenir le justificatif de votre prise en charge par le régime d'assurance chômage.

A défaut, nous serons libérés de notre obligation et vous perdrez le bénéfice des droits à portabilité.

Autant que de besoin, nous vous libérons de toute obligation au titre d'un éventuel engagement de non concurrence que vous auriez pu souscrire au profit de notre société que vous quittez donc libre de tout engagement. »

* Sur la nullité du licenciement en raison du statut de lanceur d'alerte de la salariée

L'article L. 1132-3-3 du code du travail, dans sa rédaction issue de la loi du 9 décembre 2016, applicable au présent litige, dispose qu'aucune personne ne peut être écartée d'une procédure de recrutement ou de l'accès à un stage ou à une période de formation en entreprise, aucun salarié ne peut être sanctionné, licencié ou faire l'objet d'une mesure discriminatoire, directe ou indirecte, notamment en matière de rémunération, au sens de l'article L. 3221-3, de mesures d'intéressement ou de distribution d'actions, de formation, de reclassement, d'affectation, de qualification, de classification, de promotion professionnelle, de mutation ou de renouvellement de contrat, pour avoir relaté ou témoigné, de bonne foi, de faits constitutifs d'un délit ou d'un crime dont il aurait eu connaissance dans l'exercice de ses fonctions.

Aucune personne ne peut être écartée d'une procédure de recrutement ou de l'accès à un stage ou à une période de formation professionnelle, aucun salarié ne peut être sanctionné, licencié ou faire l'objet d'une mesure discriminatoire, directe ou indirecte, notamment en matière de rémunération, au sens de l'article L. 3221-3, de mesures d'intéressement ou de distribution d'actions, de formation, de reclassement, d'affectation, de qualification, de classification, de promotion professionnelle, de mutation ou de renouvellement de contrat, pour avoir signalé une alerte dans le respect des articles 6 à 8 de la loi n 2016-1691 du 9 décembre 2016 relative à la transparence, à la lutte contre la corruption et à la modernisation de la vie économique.

En cas de litige relatif à l'application des premier et deuxième alinéas, dès lors que la personne présente des éléments de fait qui permettent de présumer qu'elle a relaté ou témoigné de bonne foi de faits constitutifs d'un délit ou d'un crime, ou qu'elle a signalé une alerte dans le respect des articles 6 à 8 de la loi n 2016-1691 du 9 décembre 2016 précitée, il incombe à la partie défenderesse, au vu des éléments, de prouver que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à la déclaration ou au témoignage de l'intéressé.

Le juge forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles.

L'article L. 1132-4 du même code prévoit expressément la nullité de toute disposition ou de tout acte pris à l'égard d'un salarié en méconnaissance de ces dispositions.

L'article 6 de la loi du 9 décembre 2016 précitée définit le lanceur d'alerte de la manière suivante : Un lanceur d'alerte est une personne physique qui révèle ou signale, de manière désintéressée et de bonne foi, un crime ou un délit, une violation grave et manifeste d'un engagement international régulièrement ratifié ou approuvé par la France, d'un acte unilatéral d'une organisation internationale pris sur le fondement d'un tel engagement, de la loi ou du règlement, ou une menace ou un préjudice graves pour l'intérêt général, dont elle a eu personnellement connaissance.

Les faits, informations ou documents, quel que soit leur forme ou leur support, couverts par le secret de la défense nationale, le secret médical ou le secret des relations entre un avocat et son client sont exclus du régime de l'alerte défini par le présent chapitre.

Et l'article 8 dispose :

« I. - Le signalement d'une alerte est porté à la connaissance du supérieur hiérarchique, direct ou indirect, de l'employeur ou d'un référent désigné par celui-ci.

En l'absence de diligences de la personne destinataire de l'alerte mentionnée au premier alinéa du présent I à vérifier, dans un délai raisonnable, la recevabilité du signalement, celui-ci est adressé à l'autorité judiciaire, à l'autorité administrative ou aux ordres professionnels.

En dernier ressort, à défaut de traitement par l'un des organismes mentionnés au deuxième alinéa du présent I dans un délai de trois mois, le signalement peut être rendu public.

II. - En cas de danger grave et imminent ou en présence d'un risque de dommages irréversibles, le signalement peut être porté directement à la connaissance des organismes mentionnés au deuxième alinéa du I. Il peut être rendu public.»

L'article 12 de cette même loi ajoute :

"En cas de rupture du contrat de travail consécutive au signalement d'une alerte au sens de l'article 6, le salarié peut saisir le conseil des prud'hommes dans les conditions prévues au chapitre V du titre V du livre IV de la première partie du code du travail."

L'article 21.6 de la directive UE no 2019 /1937 prévoit que les lanceurs d'alerte « ont accès, lorsque cela est approprié, à des mesures correctives contre les représailles, y compris des mesures provisoires dans l'attente du règlement des procédures judiciaires, conformément au droit national ».

La protection du lanceur d'alerte a été conçue par le législateur de 2016 sur le modèle de la protection contre les discriminations pour lesquelles l'article L. 1134-1 du code du travail prévoit un mécanisme spécifique d'aménagement de la preuve

La mauvaise foi ne peut résulter que de la connaissance par le salarié de la fausseté des faits qu'il dénonce et non de la seule circonstance que les faits dénoncés ne sont pas établis », qu'il s'agisse, par exemple, de la dénonciation d'une discrimination ou de la rédaction d'une attestation destinée à être produite en justice.

La bonne foi étant présumée, la preuve de la mauvaise foi incombe à l'employeur et l'appréciation des faits avancés à cette fin par les parties, qu'il s'agisse de la fausseté des faits dénoncés ou de la croyance qu'a pu avoir le salarié, relève du pouvoir souverain des juges du fond

Il appartient donc au salarié, objet d'un licenciement qu'il estime en lien direct avec l'alerte qu'il a lancée, de présenter des éléments de fait permettant de présumer qu'il a relaté ou témoigné de bonne foi de faits constitutifs d'un délit ou d'un crime, d'une violation grave et manifeste d'un engagement international régulièrement ratifié ou approuvé par la France, d'un acte unilatéral d'une organisation internationale pris sur le fondement d'un tel engagement, de la loi ou du règlement, ou d'une menace ou d'un préjudice graves pour l'intérêt général, dont elle a eu personnellement connaissance ; au juge de vérifier souverainement la matérialité de ces éléments ; dans l'affirmative, à l'employeur de prouver que le licenciement est justifié par des éléments objectifs étrangers à la relation ou au témoignage de son salarié et, enfin, au juge d'apprécier souverainement ces éléments objectifs.

Pour établir la présomption de son statut de lanceur d'alerte, Mme [E] [O] expose qu'elle a dénoncé deux manquements graves de son employeur, au nom de l'intérêt général des consommateurs, soit en mai 2018 la commercialisation de boites de conserves de marrons contaminés par des matières plastiques et fin 2017 la production de marrons à sec, sous vide, en boîte de conserves, avec une adjonction de plus de 15% d'eau contraire à la réglementation et non mentionnée sur l'étiquetage, et verse aux débats :

- un courrier daté du 18 septembre 2018 qu'elle a adressé à M. [S] dans lequel elle relate l'agression du 10 septembre 2018 qu'elle dénonce, retrace son parcours professionnel au sein de l'entreprise et son incompréhension face aux pressions pour qu'elle quitte son emploi et précise ' je n'ai jamais remis en cause vos décisions ou celles de M. [M]. Si j'ai pu me montrer en désaccord avec les récentes pratiques de production qui pourraient s'apparenter à de la triche ou à de la tromperie, c'est par loyauté envers l'entreprise, ses clients, les consommateurs et par éthique professionnelle ( j'ai des exemples précis à vous donner si nécessaire)',

- une attestation de M. [V] [C], commercial qui indique que Mme [E] [O] s'est toujours 'opposée à la commercialisation de produits non conformes. Elle avait lors d'une réunion où était présent la direction et le service commercial alerter et démontrer par une projection des photos de produits où étaient visible des morceaux de plastiques dans la matière première' et renvoie également aux pièces produites par la SAS Concept fruits :

- des échanges de courriels entre le 12 septembre et le 10 octobre 2018 concernant les prélèvement d'échantillon par sondage sur différents lots de production, pour un total de près de 500 échantillons, lesquels n'ont révélé la présence d'aucun corps étranger,

- un compte-rendu d'une réunion du comité de direction en date du 17 juin 2019 dans lequel est indiqué au paragraphe relatif au 'processus qualité' : 'nombre de réclamation pour corps étranger : 0 en 2018, 2 en 2019 ( tige métallique dans un MA.SV.1.300.MB en mars, embout de NEP tête de dosage aseptique dans un container de crème en LPB en juin)',

- la décision n°91 du Centre technique agro-alimentaire en date d'août 2016, relative aux conserves de fruits appertisés, qui dans son annexe IV relative aux conserves de marrons, précise notamment pour chaque type d'appellation : marrons entiers, marrons à sec - marrons sous vide, marrons brisés pour garniture et marrons brisés à sec pour garniture, la masse nette de produit par rapport à la capacité du récipient, et pour les marrons à sec le pourcentage de marrons brisés et de marrons mal écotés lesquels ne doivent pas dépasser 10% de la masse nette égouttée,

- la décision n°99 du Centre technique agro-alimentaire en date de mars 2019 , relative aux conserves de fruits appertisés, qui vient distinguer 8 appellations différentes pour les conserves alimentaires de marrons dont les ' marrons entiers à sec' qui sont sans addition de liquide et les 'marrons entiers à l'étuvée' qui peuvent contenir jusqu'à 20% d'adjonction de liquide.

Mme [E] [O] en sa qualité de directrice d'usine avait pour fonctions notamment de ( article 2 de son contrat de travail ) 'diriger, organiser et optimiser les moyens et les procédés de fabrication, dans un objectif de production de biens ou de produits, selon des impératifs de sécurité, environnement, qualité, coûts, délais et quantité, (....) Mme [E] [O] aura sous sa responsabilité les services production, qualité-hygiène-sécurité-environnement, maintenance et logistique-environnement et pilotera l'équipe de crise'.

Le premier fait qu'elle dit avoir dénoncé concerne la présence d'un corps étranger ( morceau de plastique dans une boîte de conserve vu par un opérateur ) va donner lieu au blocage des lots en production concernés, à des contrôles qualité par sondage qui ne révéleront aucune autre présence de corps étranger.

Cet événement concerne et décrit le fonctionnement normal d'un service qualité, et le comportement de Mme [E] [O] est celui du responsable qualité confronté à un risque qualité.

Le second fait dénoncé est une adjonction d'eau dans des conserves à sec de marrons, que Mme [E] [O] qualifie de tromperie et de non-respect de dispositions réglementaires.

De fait, elle ne justifie ni de la pratique qu'elle dénonce, ne serait-ce que par la production d'une copie des ingrédients mentionnés sur le conditionnement qu'elle vise dans sa dénonciation, ni de la réglementation applicable à la date de la dénonciation qu'elle dit avoir faite mais dont elle ne justifie pas.

Les décisions du centre technique agro-alimentaires établissent qu'en 2016, y compris pour les marrons ' à sec', il est fait référence à une masse nette égouttée, ce qui suppose la présence de liquide, et que ce n'est qu'en mars 2019 , soit postérieurement au licenciement de Mme [E] [O], qu'une normalisation des appellations n'est intervenue, distinguant les conserves de marrons à sec ( sans adjonction de liquide) des marrons à l'étuvée ( avec adjonction de liquide jusqu'à 20% ).

Au surplus, alors qu'elle reproche une inertie de son employeur sur ce second fait, elle ne justifie pas de l'avoir 'adressé à l'autorité judiciaire, à l'autorité administrative ou aux ordres professionnels', soit la DIRECCTE s'agissant d'une dénonciation de fraude.

Par suite, les éléments ainsi produits par Mme [E] [O] ne permettent pas d'établir une présomption de statut de lanceur d'alerte et c'est à juste titre que les premiers juges ont considéré qu'elle ne pouvait bénéficier du statut de lanceur d'alerte.

* sur l'absence de cause réelle et sérieuse du licenciement en raison du défaut de consultation des délégués du personnel ou des membres du comité social et économique

Par application des dispositions de l'article L 1226-2 du code du travail et L 1226-10 du code du travail dans leur version applicable à la date du licenciement, lorsque le salarié est déclaré inapte par le médecin du travail, en application de l'article L. 4624-4, à reprendre l'emploi qu'il occupait précédemment, l'employeur lui propose un autre emploi approprié à ses capacités, au sein de l'entreprise ou des entreprises du groupe auquel elle appartient le cas échéant, situées sur le territoire national et dont l'organisation, les activités ou le lieu d'exploitation assurent la permutation de tout ou partie du personnel.

Cette proposition prend en compte, après avis du comité économique et social, les conclusions écrites du médecin du travail et les indications qu'il formule sur les capacités du salarié à exercer l'une des tâches existant dans l'entreprise. Le médecin du travail formule également des indications sur l'aptitude du salarié à bénéficier d'une formation le préparant à occuper un poste adapté.

Le médecin du travail a la possibilité de « dispenser » l'employeur de rechercher un reclassement par une mention expresse dans l'avis d'inaptitude, quelle que soit l'origine de l'inaptitude et quelle que soit la nature du contrat de travail dans l'hypothèse où « le maintien du salarié dans l'entreprise serait gravement préjudiciable à sa santé » et dans l'hypothèse où « l'état de santé du salarié fait obstacle à tout reclassement dans un emploi »

En l'espèce, dans l'avis d'inaptitude en date du 30 avril 2019 , le médecin du travail mentionne 'pas de reclassement possible dans l'entreprise (groupe [S])', et a estimé que 'tout maintien du salarié dans un emploi serait gravement préjudiciable à sa santé'.

Ensuite de cet avis, l'employeur était dispensé d'une recherche de reclassement non seulement dans l'entreprise mais également dans le 'groupe [S]'.

Du fait de cette dispense, aucune recherche de reclassement, aboutissant ou non à une proposition concrète de reclassement n'était à la charge de l'employeur, lequel n'avait donc à justifier devant les représentants du personnel des démarches entreprises au titre de la recherche de reclassement.

En conséquence, l'absence de consultation du comité économique et social n'encourt aucune sanction au profit du salarié.

* sur l'absence de cause réelle et sérieuse du licenciement en raison d'un manquement fautif de l'employeur comme étant à l'origine de l'inaptitude

Le licenciement pour inaptitude physique est dépourvu de cause réelle et sérieuse lorsqu'il est démontré que l'inaptitude est consécutive à un manquement préalable de l'employeur qui l'a provoquée.

Mme [E] [O] soutient que son inaptitude résulte du comportement fautif de son employeur en raison de :

- pressions répétées se manifestant par le retrait des outils de travail, l'absence d'entretien professionnel à l'issue du congé maternité et une surcharge de travail l'ayant conduit à renoncer à des jours de congés payés sur demande de son supérieur hiérarchique;

- reproches insidieux mais non étayés destinés à la déstabiliser ;

- l'agression verbale de la part de M. [M] et des pressions pour quitter l'entreprise le 10 septembre 2018 dans l'enceinte de l'entreprise ayant abouti à un état de choc et à un arrêt de travail, reconnu comme accident du travail par le tribunal judiciaire.

Elle renvoie aux déclarations de l'employeur et aux éléments recueillis dans le cadre de l'enquête par la Caisse Primaire d'assurance maladie suite à la déclaration d'accident du travail qui démontrent que l'employeur ne conteste pas la réalité de l'entretien auquel elle n'a pas été convoquée et qui a eu lieu le 10 septembre 2018 et le fait qu'il lui ait été demandé de rentrer chez elle.

Elle verse au soutien de ses affirmations :

- un courrier établi le 31 mai 2018 dans lequel elle indique ' suite à notre entretien du 22 mai dernier et à votre demande, je vous atteste par la présente que je renonce à mes 9,5 jours de RTT ( solde des années précédentes)',

- un certificat médical du Dr [Z], psychiatre, établi le 19 avril 2019 à destination du médecin du travail sous forme d'un avis spécialisé, dans lequel sont repris les éléments de biographie, de contexte professionnel et d'antécédents médicaux tels que décrits par Mme [E] [O], le médecin concluant à une aptitude à reprendre le travail mais en dehors de l'entreprise en raison du risque psychosocial que cela représenterait,

- une attestation de suivi établie par Mme [P], psychologue qui mentionne que Mme [E] [O] présente des 'troubles anxieux en lien avec son poste de directrice d'usine chez Concept'Fruits',

- le questionnaire employeur renseigné à la demande de la Caisse Primaire d'assurance maladie dans le cadre de la déclaration d'accident du travail du 10 septembre 2018 dans lequel la SAS Concept fruits indique ' la salariée était reçue par la direction à sa prise de poste de travail au retour de ses congés. Constat dressé par sa direction de ses difficultés managériales et relationnelles avec le personnel de la production dont elle a la responsabilité', 'l'entretien a eu lieu alors que d'autres salariés étaient présents dans les locaux. Aucun d'entre eux n'a entendu d'éclat de voix que ce soit au bureau ou sur le parking',

- un compte-rendu hospitalier en date du 31 octobre 2018 qui mentionne ' notion de perte d'emploi récente, patiente anxieuse ++ faisant des crises d'angoisse avec vomissements alimentaires à répétition depuis plusieurs mois',

- le jugement du Pôle social du tribunal judiciaire de Valence en date du 29 avril 2021, l'opposant à la Caisse Primaire d'assurance maladie de la Drome qui a infirmé la décision de la Commission de Recours Amiable de l'organisme social qui avait elle-même confirmé la décision de la Caisse Primaire d'assurance maladie de la Drome refusant la prise en charge des faits du 10 septembre 2018 au titre de la législation relative aux risques professionnels.

L'employeur nie toute forme de responsabilité dans la dégradation de l'état de santé de Mme [E] [O] à l'origine de son inaptitude et rappelle que la décision du Pôle social de Valence ne lui est pas opposable . Elle soutient que si un entretien a effectivement eu lieu le 10 septembre 2018 en raison des difficultés managériales rencontrées par la salariée, M. [M] lui a, à cette occasion, demandé de ' prendre le temps de réfléchir au calme, chez elle, à la posture qu'elle défendait', et ne l'a en aucun cas agressée.

La SAS Concept fruits observe que Mme [E] [O] ne produit aucune attestation au soutien de ses accusations alors que plusieurs salariés étaient présents, ni son dossier médical détenu par la médecine du travail seul habilité à établir le lien entre la dégradation de l'état de santé et le travail. Elle réfute la déduction faite par Mme [E] [O] que c'est son travail qui est à l'origine de son inaptitude dès lors que son inaptitude a été prononcée pour l'ensemble du groupe qui l'emploie.

Elle explique que la suppression de l'ordinateur de Mme [E] [O] à son retour de congés s'explique par les problèmes informatiques rencontrés quelques semaines auparavant et verse une attestation en ce sens de la société Cyberg.

De fait, Mme [E] [O] ne produit aucun élément en dehors de ses propres affirmations pour soutenir qu'elle a été victime de pressions répétées ou d'une surcharge de travail.

Concernant la renonciation à ses jours de congés, l'attestation qu'elle produit a été établie à son retour de congés maternité, et ne concerne pas, contrairement à ce qu'elle soutient, ses congés payés mais 9,5 journées de RTT correspondant au solde des années précédentes, sans qu'il soit précisé si l'absence de possibilité de prendre les dits jours de congés s'explique par son absence en raison de son congés maternité ou par un autre motif.

Ce document rédigé le 31 mai 2018 fait référence à 'notre entretien du 22 mai dernier', soit le jour de retour de congé maternité de Mme [E] [O], ce qui contredit l'affirmation de Mme [E] [O] selon laquelle elle n'aurait pas eu d'entretien à son retour de congés maternité.

Les documents médicaux qu'elle produit reprennent ses propres déclarations et ne sauraient établir le lien entre le contexte de travail et la dégradation de son état de santé, seul le médecin du travail pouvant établir un tel lien. Au surplus, les éléments médicaux décrivent des antécédents médicaux multiples dont un épisode dépressif en 2008 et des crises d'angoisses depuis plusieurs mois selon le compte-rendu hospitalier d' octobre 2018.

S'agissant de la journée du 10 septembre 2018, la décision du tribunal judiciaire dont se prévaut Mme [E] [O] ne retient pas l'existence d'une agression mais d'un entretien entre Mme [E] [O] et son supérieur hiérarchique et le fait qu'elle ait consulté son médecin qui l' a placée en arrêt de travail pour traumatisme psychologique pour en déduire que dans les relations entre la salariée et la Caisse Primaire d'assurance maladie devaient s'appliquer les règles de la législation relative aux risques professionnels.

Aucun autre élément en dehors des accusations portées par Mme [E] [O] ne vient établir la réalité d'une agression par son supérieur hiérarchique, le fait qu'elle ait vécu l'entretien avec M. [M] comme une agression ne permettant pas de retenir un comportement fautif de l'employeur.

En conséquence, Mme [E] [O] ne rapporte pas d'élément permettant de considérer que son inaptitude trouve son origine dans le comportement fautif de son employeur.

Le licenciement pour inaptitude notifié le 23 mai 2019 repose par suite sur une cause réelle et sérieuse et Mme [E] [O] sera déboutée de ses demandes indemnitaires.

La décision déférée sera infirmée en ce sens.

PAR CES MOTIFS

La Cour, statuant publiquement, par arrêt contradictoire et en dernier ressort ;

Infirme le jugement rendu le 21 janvier 2021 par le conseil de prud'hommes d'Annonay sauf en ce qu'il a :

- déclaré recevable la saisine de Mme [E] [O],

- débouté Mme [E] [O] de l'ensemble de ses demandes avant dire droit,

- dit que Mme [E] [O] ne bénéficie pas du statut de lanceur d'alerte et l'a déboutée de sa demande de nullité de son licenciement ainsi que des indemnités subséquentes,

- débouté Mme [E] [O] de sa demande de déclarer son licenciement sans cause réelle et sérieuse pour le motif de non consultation du CSE ainsi que de ses demandes associées avec les indemnités subséquentes,

- débouté les parties du surplus de leurs demandes,

Et statuant à nouveau sur les éléments infirmés et y ajoutant,

Juge que le licenciement de Mme [E] [O] est fondé sur une cause réelle et sérieuse, son inaptitude n'étant pas imputable aux agissements de l'employeur,

Déboute Mme [E] [O] de ses demandes indemnitaires,

Condamne Mme [E] [O] à verser à la SAS Concept fruits la somme de 800 euros par application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

Rejette les demandes plus amples ou contraires,

Rappelle en tant que de besoin que le présent arrêt infirmatif tient lieu de titre afin d'obtenir le remboursement des sommes versées en vertu de la décision de première instance assortie de l'exécution provisoire,

Condamne Mme [E] [O] aux dépens de la procédure de première instance et d'appel.