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Décisions

Cass. com., 5 juillet 2023, n° 22-10.104

COUR DE CASSATION

Arrêt

Rejet

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Vigneau

Rapporteur :

M. Riffaud

Avocat général :

Mme Henry

Avocats :

SCP Duhamel-Rameix-Gury-Maitre, SARL Cabinet Briard

Douai, du 4 nov. 2021

4 novembre 2021

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Douai, 4 novembre 2021), la société Capnor Invest a été mise en liquidation judiciaire par un jugement du 7 juillet 2014 qui a désigné M. [C] en qualité de liquidateur.

2. La société Crédit du Nord, aux droits de laquelle est venue la Société générale (la banque), a déclaré une créance à cette procédure collective au titre de la garantie d'achèvement des travaux consentie le 26 juin 2012 à la société Capnor Invest pour un programme immobilier réalisé par la société débitrice sous le régime de la vente d'immeubles à rénover.

3. Le liquidateur a contesté cette créance en soutenant que la garantie d'achèvement n'était plus susceptible d'être engagée par les acquéreurs des différents lots, dès lors qu'il avait réalisé les immeubles dépendant de l'actif de la procédure collective par voie d'adjudication et que l'action susceptible d'être exercée par les acquéreurs des autres lots, en raison de l'inachèvement des travaux, était nécessairement prescrite.

Examen du moyen

Enoncé du moyen

4. Le liquidateur fait grief à l'arrêt d'admettre la créance de la banque au passif de la société Capnor Invest, alors :

« 1° / que le liquidateur judiciaire d'un marchand de biens n'ayant pas mené les travaux de rénovation à leur terme, qui se trouve de ce fait dans l'impossibilité de produire une déclaration d'achèvement des travaux conforme, peut s'opposer à la déclaration de créance de la banque garante de bon achèvement qui exerce le recours avant paiement ouvert à la caution en montrant que cette garantie n'est pas susceptible d'être mise en jeu par les acquéreurs des lots ; qu'en l'espèce, M. [C] ès qualités de liquidateur judiciaire de la société Capnor Invest a attesté que "la totalité des biens immobiliers appartenant à cette société qui existaient à la date du jugement de liquidation judiciaire ont été réalisés par voie de saisie-immobilière", à l'exception d'un immeuble non concerné par la présente procédure ; que le liquidateur judiciaire a produit le cahier des conditions de cette vente mentionnant que seraient vendus sept appartements avec chacun une place de stationnement ainsi qu'une place de stationnement isolée ; qu'il a également produit tous les jugements d'adjudication ; que cette vente par adjudication en liquidation judiciaire était par nature exclue du bénéfice de la garantie d'achèvement ; qu'en affirmant néanmoins que le liquidateur judiciaire n'avait pas suffisamment justifié des lots vendus par adjudication, la cour d'appel a violé les articles 2039 du code civil, L. 262-7 et R. 262-12 du code de la construction et de l'habitation et L. 624-2 du code de commerce ;

2°/ que dans la mesure où le liquidateur judiciaire de la société Capnor Invest a attesté avoir vendu par adjudication tous les lots de l'immeuble litigieux dont cette société était encore propriétaire au jour du jugement de liquidation judiciaire, il en résultait nécessairement que tous les autres lots, quel que soit leur nombre et leur consistance, avaient été vendus auparavant ; que le délai de la prescription quinquennale des acquéreurs de ces lots pour agir contre la banque tenue d'une garantie d'achèvement a commencé à courir le 7 juillet 2014, date du jugement de liquidation judiciaire de la société Capnor Invest, pour se terminer le 7 juillet 2019 ; que le Crédit du Nord n'a pas justifié de poursuites à son encontre dans ce délai, la lettre envoyée par l'avocat de cinq acquéreurs en avril 2013 n'établissant pas l'engagement de telles poursuites ; qu'en jugeant cependant que le liquidateur judiciaire n'avait pas suffisamment justifié des lots vendus de gré à gré avant la procédure collective, ni de déclaration de créances des acquéreurs, ni de l'achèvement ou de la réception des ouvrages, la cour d'appel, qui s'est fondée sur des motifs inopérants, a violé les articles 2224 et 2313 du code civil, L. 262-7, R. 262-12 du code de la construction et de l'habitation et L. 624-2 du code de commerce. »

Réponse de la Cour

5. Il résulte des articles L. 622-24, alinéa 1, et L. 622-25 du code de commerce, qu'au titre des créances antérieures au jugement d'ouverture de la procédure collective, le montant de la créance à admettre est celui existant au jour de ce jugement d'ouverture, date à laquelle le juge-commissaire puis la cour d'appel se prononçant sur la contestation d'une telle créance doivent se placer pour statuer sur son admission, sans tenir compte d'événements postérieurs susceptibles d'influer sur la somme qui sera ultérieurement distribuée par le liquidateur.

6. Il s'ensuit que l'admission de la créance déclarée par la banque au titre de la garantie d'achèvement des travaux en application de l'article 2309 du code civil qui, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance n° 2021-1192 du 15 septembre 2021, applicable au cautionnement consenti par la société Crédit du Nord, permettait à la caution, même avant d'avoir payé, d'agir contre le débiteur pour être indemnisée, lorsque ce dernier était en procédure collective, ne peut être tributaire des conditions de la réalisation des immeubles dépendant de l'actif de la procédure collective pendant le cours de cette procédure ou d'une prescription de l'action en garantie prétendument acquise cinq ans après l'ouverture de cette procédure.

7. Par ce motif de pur droit, substitué à ceux critiqués, dans les conditions prévues par les articles 620, alinéa 1, et 1015 du code de procédure civile, la décision se trouve légalement justifiée.

8. Le moyen ne peut être accueilli.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

REJETTE le pourvoi.