TUE, 2e ch. élargie, 20 septembre 2023, n° T-373/16
TRIBUNAL DE L'UNION EUROPÉENNE
Arrêt
Rejet
PARTIES
Demandeur :
Victaulic Europe
Défendeur :
Commission européenne
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
Mme Marcoulli
Avocats :
Me Baeten, Me Selwyn Sharpe, Me Motta
1 Par son recours fondé sur l’article 263 TFUE, la requérante, Victaulic Europe, demande l’annulation de la décision (UE) 2016/1699 de la Commission, du 11 janvier 2016, relative au régime d’aides d’État concernant l’exonération des bénéfices excédentaires SA.37667 (2015/C) (ex 2015/NN) mis en œuvre par la Belgique (JO 2016, L 260, p. 61, ci-après la « décision attaquée »).
Antécédents du litige
2 Les faits à l’origine du litige ainsi que le cadre juridique qui y est afférent ont été exposés par le Tribunal aux points 1 à 28 de l’arrêt du 14 février 2019, Belgique et Magnetrol International/Commission (T131/16 et T263/16, EU:T:2019:91), ainsi que par la Cour, aux points 1 à 24 de l’arrêt du 16 septembre 2021, Commission/Belgique et Magnetrol International (C337/19 P, ci-après l’« arrêt sur pourvoi », EU:C:2021:741). Pour les besoins de la présente procédure, ils peuvent être résumés de la manière suivante.
3 Moyennant une décision anticipée adoptée par le « service des décisions anticipées » du service public fédéral des finances belge, sur le fondement de l’article 185, paragraphe 2, sous b), du code des impôts sur les revenus 1992 (ci-après le « CIR 92 »), lu conjointement avec l’article 20 de la loi du 24 décembre 2002 modifiant le régime des sociétés en matière d’impôts sur les revenus et instituant un système de décision anticipée en matière fiscale (Moniteur belge du 31 décembre 2002, p. 58817, ci-après la « loi du 24 décembre 2002 »), les sociétés résidentes belges faisant partie d’un groupe multinational et les établissements stables belges de sociétés résidentes étrangères faisant partie d’un groupe multinational pouvaient réduire leur base imposable en Belgique en déduisant les bénéfices, considérés comme « excédentaires », des bénéfices qu’ils avaient enregistrés. Par ce système, une partie des bénéfices réalisés par les entités belges bénéficiant d’une décision anticipée n’était pas imposée en Belgique. Selon les autorités fiscales belges, ces bénéfices excédentaires découlaient des synergies, des économies d’échelle ou d’autres avantages résultant du fait de l’appartenance à un groupe multinational et, partant, n’étaient pas imputables aux entités belges en question.
4 La requérante dans la présente affaire est une société établie en Belgique et intégrée à un groupe multinational d’entreprises. Elle effectue des transactions avec d’autres sociétés au sein de ce groupe.
5 Il ressort de l’annexe de la décision attaquée ainsi que des pièces qui figurent dans le dossier que, le 13 mai 2014, le service des décisions anticipées a adopté une décision anticipée à l’égard de la requérante, qui en avait fait la demande à la suite d’une restructuration au sein de son groupe visant à centraliser un certain nombre de fonctions et de services auprès de la requérante établie en Belgique. Cette décision anticipée avait une validité de cinq ans à compter du 1er janvier 2012.
6 À la suite d’une procédure administrative qui a commencé le 19 décembre 2013, par une lettre par laquelle la Commission européenne a demandé au Royaume de Belgique de lui fournir des renseignements concernant le système des décisions anticipées, relatives aux bénéfices excédentaires, qui se fondaient sur l’article 185, paragraphe 2, sous b), du CIR 92, la Commission a adopté la décision attaquée le 11 janvier 2016.
7 Par la décision attaquée, la Commission a constaté que le régime d’exonération des bénéfices excédentaires, qui se fondait sur l’article 185, paragraphe 2, sous b), du CIR 92, en vertu duquel le Royaume de Belgique avait émis des décisions anticipées en faveur d’entités belges de groupes multinationaux d’entreprises, accordant auxdites entités une exonération pour une partie des bénéfices qu’elles réalisaient, constituait un régime d’aides d’État, accordant un avantage sélectif à ses bénéficiaires, au sens de l’article 107, paragraphe 1, TFUE, qui était incompatible avec le marché intérieur.
8 Ainsi, la Commission a soutenu, à titre principal, que le régime en cause octroyait un avantage sélectif aux bénéficiaires des décisions anticipées, dans la mesure où l’exonération de leurs bénéfices excédentaires appliquée par les autorités fiscales belges dérogeait au système commun de l’impôt sur les sociétés en Belgique. À titre subsidiaire, la Commission a considéré que l’exonération des bénéfices excédentaires pouvait procurer un avantage sélectif aux bénéficiaires des décisions anticipées, dans la mesure où une telle exonération s’écartait du principe de pleine concurrence.
9 Ayant constaté que le régime en cause avait été mis à exécution en violation de l’article 108, paragraphe 3, TFUE, la Commission a ordonné la récupération des aides ainsi octroyées auprès de leurs bénéficiaires, dont la liste définitive devait être ultérieurement établie par le Royaume de Belgique.
Conclusions des parties
10 La requérante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :
– déclarer le recours en annulation recevable ;
– annuler la décision attaquée ;
– condamner la Commission aux dépens.
11 La Commission conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :
– rejeter le recours ;
– condamner la requérante aux dépens.
En droit
12 À l’appui de son recours, la requérante soulève quatre moyens. Le premier moyen est tiré d’erreurs de droit et d’erreurs manifestes d’appréciation ainsi que d’un défaut de motivation dans la mesure où la décision attaquée a constaté l’existence d’un régime d’aides. Le deuxième moyen est tiré d’une violation de l’article 107 TFUE et d’un défaut de motivation en ce que la Commission a omis d’examiner l’existence d’un avantage. Le troisième moyen est tiré d’une violation de l’article 107 TFUE dans la mesure où la Commission a constaté le caractère sélectif de la mesure en cause. Le quatrième moyen est tiré d’une violation de l’article 16 du règlement (UE) 2015/1589 du Conseil, du 13 juillet 2015, portant modalités d’application de l’article 108 TFUE (JO 2015, L 248, p. 9), et du principe de sécurité juridique en ce que la décision attaquée ne permet pas de déterminer le montant de l’aide aux fins de la récupération.
Sur la qualification des mesures en cause de régime d’aides
13 Le premier moyen est tiré d’erreurs de droit et d’erreurs manifestes d’appréciation ainsi que d’un défaut de motivation en ce que la Commission a qualifié le régime en cause de régime d’aides. En substance, la requérante conteste, premièrement, l’identification des actes sur la base desquels aurait été octroyé le régime en cause. Deuxièmement, elle conteste la conclusion selon laquelle l’octroi de l’exonération des bénéfices excédentaires ne nécessite pas « de mesures d’application », au sens de l’article 1er, sous d), du règlement 2015/1589, ainsi que le constat selon lequel le service des décisions anticipées ne disposait que d’un pouvoir d’appréciation limité. Troisièmement, la requérante critique l’utilisation d’un échantillon de 22 décisions anticipées ainsi que l’absence de motivation quant à la représentativité de cet échantillon.
14 La Commission estime qu’il convient d’écarter l’argumentation de la requérante.
15 À cet égard, il convient de rappeler que, dans l’arrêt sur pourvoi, la Cour a indiqué que la décision attaquée avait établi l’existence d’un régime d’aides, au sens de l’article 1er, sous d), du règlement 2015/1589, ressortant d’une ligne systématique de conduite des autorités fiscales belges, et a ainsi rejeté comme étant non fondé le moyen invoqué par le Royaume de Belgique et par Magnetrol International, qui était tiré d’un défaut de motivation et de la conclusion erronée relative à l’existence d’un régime d’aides.
16 Il s’ensuit qu’il y a lieu d’écarter le premier moyen de la requérante tiré d’un défaut de motivation et de la prétendue qualification erronée du régime en cause de régime d’aides d’État, au sens de l’article 107, paragraphe 1, TFUE, celui-ci étant en substance analogue à ceux du Royaume de Belgique et de Magnetrol International, écartés par la Cour dans l’arrêt sur pourvoi.
Sur l’avantage économique accordé par le régime en cause
17 Le deuxième moyen est tiré d’une violation de l’article 107 TFUE et d’un défaut de motivation en ce que la Commission a omis d’apprécier si le régime des bénéfices excédentaires conférait effectivement un avantage. La requérante fait valoir que la Commission ne pouvait se borner à la seule identification de la sélectivité.
18 La Commission estime qu’il convient d’écarter l’argumentation de la requérante.
19 D’emblée, il y a lieu de rappeler que la motivation d’un acte adopté par la Commission doit permettre aux intéressés de connaître les justifications de la mesure prise afin, d’une part, de pouvoir défendre leurs droits et de vérifier si la décision est ou non bien fondée et, d’autre part, de permettre au juge de l’Union européenne d’exercer son contrôle de légalité. Il n’est pas exigé que la motivation spécifie tous les éléments de fait et de droit pertinents, dans la mesure où la question de savoir si la motivation d’un acte satisfait aux exigences de l’article 296 TFUE doit être appréciée au regard non seulement de son libellé, mais aussi de son contexte ainsi que de l’ensemble des règles juridiques régissant la matière concernée (arrêts du 15 juin 2005, Corsica Ferries France/Commission, T349/03, EU:T:2005:221, points 62 à 63 ; du 16 octobre 2014, Eurallumina/Commission, T308/11, non publié, EU:T:2014:894, point 44, et du 6 mai 2019, Scor/Commission, T135/17, non publié, EU:T:2019:287, point 80).
20 En outre, il y a lieu de relever que, dans l’analyse des conditions énumérées à l’article 107, paragraphe 1, TFUE pour qu’une mesure constitue une aide d’État, dont celle afférente à l’existence d’un avantage sélectif, la notion d’« avantage » et celle de sa « sélectivité » constituent deux critères distincts. Pour ce qui est de l’avantage, la Commission doit démontrer que la mesure améliore la situation financière du bénéficiaire (voir, en ce sens, arrêt du 2 juillet 1974, Italie/Commission, 173/73, EU:C:1974:71, point 33). En particulier, dans le cas de mesures fiscales, l’existence d’un avantage économique, au sens de l’article 107, paragraphe 1, TFUE, ne peut être établie que par rapport à une imposition dite « normale » (voir, en ce sens, arrêt du 8 novembre 2022, Fiat Chrysler Finance Europe/Commission, C885/19 P et C898/19 P, EU:C:2022:859, point 69). En revanche, pour ce qui est de la sélectivité, la Commission doit démontrer que l’avantage ne bénéficie pas à d’autres entreprises dans une situation juridique et factuelle comparable à celle du bénéficiaire au regard de l’objectif du système de référence (voir, en ce sens, arrêt du 8 septembre 2011, Paint Graphos e.a., C78/08 à C80/08, EU:C:2011:550, point 49).
21 À cet égard, il convient de rappeler que, selon la jurisprudence, l’exigence de sélectivité découlant de l’article 107, paragraphe 1, TFUE doit être clairement distinguée de la détection concomitante d’un avantage économique, en ce que, lorsque la Commission a décelé la présence d’un avantage, pris au sens large, découlant directement ou indirectement d’une mesure donnée, elle est tenue d’établir, en outre, que cet avantage profite spécifiquement à une ou à plusieurs entreprises (arrêt du 4 juin 2015, Commission/MOL, C15/14 P, EU:C:2015:362, point 59).
22 Il importe néanmoins de préciser qu’il ressort de la jurisprudence de la Cour que ces deux critères peuvent être examinés conjointement, en tant que « troisième condition », prévue par l’article 107, paragraphe 1, TFUE, portant sur l’existence d’un « avantage sélectif » (voir, en ce sens, arrêt du 30 juin 2016, Belgique/Commission, C270/15 P, EU:C:2016:489, point 32).
23 Dans la décision attaquée, le raisonnement de la Commission concernant l’avantage figure dans le cadre de l’analyse sur l’existence d’un avantage sélectif, à savoir le point 6.3, intitulé « Existence d’un avantage sélectif ». Dans ce cadre, contrairement à ce que soutient la requérante, la Commission a effectivement examiné le critère de l’avantage.
24 À titre préalable, au considérant 125 de la décision attaquée, la Commission a indiqué que l’exonération des bénéfices excédentaires appliquée par les autorités fiscales belges n’était pas prévue par le système de l’impôt sur les sociétés en Belgique. En outre, au considérant 126 de la décision attaquée, la Commission a mis en exergue le fait que cette exonération était calculée en faisant abstraction des bénéfices totaux réellement enregistrés par l’entité belge et des ajustements légalement prévus. Au considérant 127 de la décision attaquée, elle a souligné que, bien que le système belge ait prévu des dispositions particulières applicables aux groupes, celles-ci visaient plutôt à mettre sur un pied d’égalité les entités intégrées à des groupes multinationaux et les entités autonomes.
25 Dans ce cadre, au considérant 133 de la décision attaquée, la Commission a signalé que, en vertu du système de l’impôt sur les sociétés en Belgique, les entités des sociétés résidentes ou actives par l’intermédiaire d’un établissement stable en Belgique étaient imposées sur la base de leurs bénéfices réellement enregistrés, et non sur la base d’un niveau hypothétique de bénéfices, raison pour laquelle l’exonération des bénéfices excédentaires conférait un avantage aux entités belges d’un groupe bénéficiant du régime en cause.
26 Au considérant 135 de la décision attaquée, la Commission a rappelé la jurisprudence selon laquelle un avantage économique peut être conféré en réduisant la charge fiscale d’une entreprise et, en particulier, en réduisant la base imposable ou le montant de l’impôt dû. Ainsi, la Commission a considéré que, en l’espèce, le régime en cause permettait aux sociétés bénéficiaires des décisions anticipées de réduire l’impôt dû en déduisant de leur bénéfice réellement enregistré un bénéfice dit « excédentaire ». Ce dernier était calculé en estimant le bénéfice moyen hypothétique d’entreprises autonomes comparables, de sorte que la différence entre le bénéfice réellement enregistré et ce bénéfice moyen hypothétique se traduisait en un pourcentage d’exonération qui fondait le calcul de la base imposable accordée pour les cinq années pendant lesquelles la décision anticipée était d’application. Dans la mesure où cette base imposable, ainsi calculée au titre des décisions anticipées accordées en vertu du régime en cause, était inférieure à la base imposable en l’absence desdites décisions, un avantage en aurait découlé.
27 Partant, il ressort des considérants de la décision attaquée mis en exergue aux points 24 à 26 ci-dessus que l’avantage retenu par la Commission consistait en la non-imposition des bénéfices excédentaires des sociétés bénéficiaires et en l’imposition des bénéfices de ces dernières calculés à partir d’un bénéfice moyen hypothétique faisant abstraction du bénéfice total réalisé par ces sociétés et des ajustements légalement prévus, en vertu des décisions anticipées, au titre du régime en cause. Selon la Commission, une telle imposition représentait un allégement de la charge fiscale supportée par les bénéficiaires du régime, par rapport à celle qui aurait découlé d’une imposition normale, au titre du système de l’impôt sur les sociétés en Belgique, laquelle aurait visé la totalité des bénéfices réellement enregistrés, après application des ajustements légalement prévus.
28 Ensuite, l’analyse proprement dite de la sélectivité de cet avantage se trouve, d’une part, aux considérants 136 à 141 de la décision attaquée, au sein du point 6.3.2.1 de ladite décision, en ce qui concerne le raisonnement à titre principal de la Commission sur la sélectivité, fondé sur l’existence d’une dérogation au système commun de l’impôt sur les sociétés en Belgique. D’autre part, la sélectivité de l’avantage, représenté par l’exonération des bénéfices excédentaires, est analysée également aux considérants 152 à 170 de la décision attaquée, au sein du point 6.3.2.2 de ladite décision, en ce qui concerne le raisonnement sur la sélectivité, avancé par la Commission à titre subsidiaire, fondé sur l’existence d’une dérogation au principe de pleine concurrence.
29 Il ressort de ce qui précède que les justifications avancées par la Commission pour étayer ses constatations quant à l’existence d’un avantage satisfont aux exigences de l’obligation de motivation telles qu’elles sont énoncées au point 19 ci-dessus.
30 En outre, le fait que, d’un point de vue formel, l’analyse de l’avantage ait été insérée dans une section qui couvre également l’examen de la sélectivité ne révèle pas l’absence d’un examen au fond des deux notions, dans la mesure où l’existence d’un avantage, d’une part, et celle de son caractère sélectif, d’autre part, sont effectivement analysées (arrêt du 24 septembre 2019, Pays-Bas e.a./Commission, T760/15 et T636/16, EU:T:2019:669, point 129).
31 Partant, il y a lieu d’écarter les griefs de la requérante tirés d’un défaut de motivation et d’une erreur de droit en ce que la Commission se serait bornée à la seule identification de la sélectivité sans établir, au préalable, l’existence d’un avantage.
32 Par ailleurs, dans la réplique, la requérante fait valoir, premièrement, que la Commission n’aurait tenu compte que d’une partie du fonctionnement du régime en cause pour constater que ce dernier améliorait la position financière de ses bénéficiaires et ainsi conclure à l’existence d’un avantage. La requérante souligne que la Commission a constaté que le régime en cause suivait une procédure en deux étapes consistant, dans un premier temps, à calculer le prix des transactions entre l’entité belge et ses associés et à imputer le bénéfice résiduel à l’entité belge, puis, dans un second temps, à corriger le bénéfice résiduel. À cet égard, la requérante fait valoir que la Commission aurait erronément considéré que le bénéfice résiduel du groupe, évalué lors de la première étape, aurait dû nécessairement être intégralement imposé en Belgique. Cet argument manque en fait.
33 D’une part, il y a lieu de relever que, ainsi que l’a constaté la Cour au point 151 de l’arrêt sur pourvoi, dans la décision attaquée, la Commission n’a pas retenu l’application d’une méthode en deux étapes comme étant un élément essentiel du régime en cause, mais, en substance, le fait que le montant de l’exonération des bénéfices excédentaires correspondait systématiquement à la différence entre les bénéfices réellement enregistrés par le bénéficiaire concerné et un bénéfice, hypothétique, généré si ce dernier avait opéré indépendamment de son groupe, et ce indépendamment de la méthode utilisée pour aboutir à ce constat.
34 À cet égard, il y a lieu d’ajouter que, ainsi qu’il ressort du point 26 ci-dessus, au considérant 135 de la décision attaquée, la Commission a considéré que le régime en cause permettait aux sociétés bénéficiaires des décisions anticipées de réduire l’impôt dû en déduisant de leur bénéfice réellement enregistré un bénéfice dit « excédentaire », ce dernier étant calculé en estimant le bénéfice moyen hypothétique d’entreprises autonomes comparables, de sorte que la différence entre le bénéfice réellement enregistré et ce bénéfice moyen hypothétique se traduisait en un pourcentage d’exonération. Ainsi, contrairement à ce que soutient la requérante, aux fins de son analyse de l’existence d’un avantage, la Commission a tenu compte du régime en cause dans son ensemble ainsi que du fait que, à l’issue de l’application de ce régime, les entités belges n’étaient pas imposées sur leur bénéfice réellement enregistré, mais sur un bénéfice calculé à partir d’un bénéfice moyen hypothétique.
35 D’autre part, ainsi que cela est constaté au point 27 ci-dessus, la Commission a considéré que le régime des bénéfices excédentaires représentait un allégement de la charge fiscale supportée par ses bénéficiaires, par rapport à celle qui découlerait d’une imposition normale, au titre du système de l’impôt des sociétés en Belgique, laquelle aurait visé la totalité des bénéfices réellement enregistrés, après application des ajustements légalement prévus.
36 Deuxièmement, la requérante fait valoir que la Commission n’a pas examiné si le régime en cause octroyait effectivement un avantage à ses bénéficiaires et soutient, à cet égard, que la Commission n’a pas tenu compte du fait que l’imputation des bénéfices au sein d’un groupe dépendait des rapports entre les entités du groupe, et notamment des fonctions de l’entité belge concernée.
37 À cet égard, il suffit de rappeler que, dans une décision qui porte sur un régime d’aides, la Commission n’est pas tenue d’effectuer une analyse de l’aide octroyée dans chaque cas individuel sur le fondement d’un tel régime. Ce n’est qu’au stade de la récupération des aides qu’il sera nécessaire de vérifier la situation individuelle de chaque entreprise concernée (voir, en ce sens, arrêts du 7 mars 2002, Italie/Commission, C310/99, EU:C:2002:143, points 89 et 91 ; du 9 juin 2011, Comitato « Venezia vuole vivere » e.a./Commission, C71/09 P, C73/09 P et C76/09 P, EU:C:2011:368, point 63, et du 13 juin 2019, Copebi, C505/18, EU:C:2019:500, points 28 à 33).
38 Dans ces circonstances, il ne saurait être reproché à la Commission d’avoir constaté que l’exonération des bénéfices dits excédentaires, en vertu des décisions anticipées adoptées au titre du régime en cause, introduisait un allégement de l’impôt que les entités ayant demandé ces décisions auraient autrement dû payer, en application des règles relatives à l’impôt sur les sociétés en Belgique, et d’avoir conclu à l’existence d’un avantage économique en faveur de ces entités.
39 Partant, il convient d’écarter le deuxième moyen.
Sur la sélectivité du régime en cause
40 Le troisième moyen est tiré de la violation de l’article 107, paragraphe 1, TFUE, d’erreurs manifestes d’appréciation et d’un défaut de motivation en ce que la Commission a qualifié le régime en cause de mesure sélective. En substance, la requérante conteste l’existence d’une dérogation au système de référence, telle qu’elle ressort tant du raisonnement à titre principal de la Commission sur la sélectivité (première branche du troisième moyen) que du raisonnement à titre subsidiaire de la Commission sur la sélectivité (seconde branche du troisième moyen).
Observations liminaires sur l’identification du système de référence
41 À titre liminaire, il convient de rappeler que la qualification d’une mesure fiscale nationale de « sélective » suppose, tout d’abord, l’identification et l’examen préalable du régime fiscal commun ou « normal » applicable dans l’État membre concerné, c’està-dire la détermination du « système de référence ». Ainsi, cette détermination revêt une importance accrue dans le cas de mesures fiscales, puisque l’existence d’un avantage économique, au sens de l’article 107, paragraphe 1, TFUE, ne peut être établie que par rapport à une imposition dite « normale ». En outre, la détermination de l’ensemble des entreprises se trouvant dans une situation factuelle et juridique comparable dépend de la définition préalable du régime juridique au regard de l’objectif duquel doit, le cas échéant, être examinée la comparabilité de la situation factuelle et juridique respective des entreprises favorisées par la mesure en cause et de celles qui ne le sont pas (voir arrêt du 8 novembre 2022, Fiat Chrysler Finance Europe/Commission, C885/19 P et C898/19 P, EU:C:2022:859, point 69 et jurisprudence citée).
42 En l’espèce, aux considérants 121 à 129 de la décision attaquée, la Commission a exposé sa position concernant le système de référence.
43 Ainsi, aux considérants 121 et 122 de la décision attaquée, la Commission a indiqué que le système de référence était le système de droit commun d’imposition des bénéfices des sociétés, prévu par le régime de l’impôt sur le revenu des sociétés en Belgique, dont l’objectif était l’imposition des bénéfices de toutes les sociétés soumises à l’impôt en Belgique. La Commission a relevé que le système de l’impôt sur les sociétés en Belgique s’appliquait aux sociétés résidentes en Belgique ainsi qu’aux succursales belges de sociétés non résidentes. En vertu de l’article 185, paragraphe 1, du CIR 92, les sociétés résidentes en Belgique étaient tenues de payer l’impôt sur le revenu des sociétés sur le montant total des bénéfices qu’elles réalisaient, sauf lorsqu’une convention contre les doubles impositions s’appliquait. En outre, en vertu des articles 227 et 229 du CIR 92, les sociétés non résidentes n’étaient soumises à l’impôt sur le revenu des sociétés que pour certains types de revenus spécifiques de source belge. Par ailleurs, la Commission a souligné que, dans les deux cas, l’impôt belge sur les sociétés était dû sur le bénéfice total, lequel était fixé selon les règles relatives au calcul des bénéfices tels qu’ils étaient définis à l’article 24 du CIR 92. En vertu de l’article 185, paragraphe 1, du CIR 92, lu en liaison avec les articles 1er, 24, 183, 227 et 229 du CIR 92, le bénéfice total correspondait aux revenus des sociétés, dont étaient soustraites les dépenses déductibles qui étaient généralement enregistrées dans la comptabilité, de sorte que le bénéfice réellement enregistré constituait le point de départ du calcul du bénéfice total imposable, sans préjudice de l’application dans un second temps des ajustements positifs et négatifs prévus par le système de l’impôt sur le revenu des sociétés en Belgique.
44 Aux considérants 123 à 128 de la décision attaquée, la Commission a expliqué que le régime d’exonération des bénéfices excédentaires appliqué par les autorités fiscales belges ne faisait pas partie intégrante du système de référence.
45 Plus précisément, au considérant 125 de la décision attaquée, la Commission a considéré qu’une telle exonération n’était prescrite par aucune disposition du CIR 92. En effet, l’article 185, paragraphe 2, sous a), du CIR 92 permettait à l’administration fiscale belge de procéder à un ajustement unilatéral primaire des bénéfices d’une société, pour le cas où des transactions ou des arrangements avec des sociétés liées étaient effectués dans des conditions qui s’écartaient de celles de pleine concurrence. En revanche, l’article 185, paragraphe 2, sous b), du CIR 92 prévoyait la possibilité d’effectuer des ajustements négatifs des bénéfices d’une société, générés par une transaction ou un arrangement intragroupe, à la condition supplémentaire que le bénéfice à ajuster eût été inclus dans le bénéfice de la contrepartie étrangère à cette transaction ou à cet arrangement.
46 En outre, au considérant 126 de la décision attaquée, la Commission a rappelé que le système de l’impôt sur les sociétés en Belgique visait à imposer les entreprises soumises à l’impôt, sur leurs bénéfices réels, indépendamment de leur forme juridique, de leur taille ou de leur appartenance ou non à un groupe multinational d’entreprises.
47 Par ailleurs, au considérant 127 de la décision attaquée, la Commission a relevé que, aux fins du calcul des bénéfices imposables, les sociétés intégrées d’un groupe multinational étaient tenues de fixer les prix à appliquer à leurs transactions intragroupes au lieu d’utiliser des prix dictés directement par le marché, raison pour laquelle la législation fiscale belge prévoyait des dispositions particulières applicables aux groupes, qui visaient généralement à mettre sur un pied d’égalité les sociétés non intégrées et les entités économiques structurées sous la forme de groupes.
48 Au considérant 129 de la décision attaquée, la Commission a conclu que le système de référence à prendre en considération était le système de l’impôt sur le revenu des sociétés en Belgique, dont l’objectif était d’imposer de la même manière les bénéfices de toutes les sociétés résidentes ou actives par l’intermédiaire d’un établissement stable en Belgique. Ce système comprenait les ajustements applicables, conformément au système de l’impôt sur le revenu des sociétés en Belgique, qui déterminaient le bénéfice imposable de la société aux fins de la perception de l’impôt sur le revenu des sociétés en Belgique.
49 Dans la requête, la requérante indique expressément qu’elle ne conteste pas l’identification du système de référence pertinent pour l’examen du régime en cause retenu par la Commission dans la décision attaquée.
50 Dans sa réponse à la question du Tribunal sur la jurisprudence postérieure à la clôture de la phase écrite de la procédure, la requérante fait valoir que la Commission n’a pas correctement identifié le système de référence et, notamment, que l’article 185, paragraphe 2, du CIR 92, tel qu’il est appliqué par les autorités belges, devait être inclus dans ce système de référence.
51 À cet égard, il convient de rappeler que, en vertu de l’article 84, paragraphe 1, du règlement de procédure du Tribunal, la production de moyens nouveaux en cours d’instance est interdite, à moins que ces moyens ne se fondent sur des éléments de droit et de fait qui se sont révélés pendant la procédure. À cet égard, un arrêt qui ne fait que confirmer une situation juridique connue du requérant au moment de l’introduction de son pourvoi ne saurait être considéré comme un élément qui permet d’invoquer un moyen nouveau (voir, en ce sens, arrêt du 20 septembre 2018, Espagne/Commission, C114/17 P, EU:C:2018:753, point 39). Cependant, un moyen, ou un argument, qui constitue l’ampliation d’un moyen énoncé antérieurement, directement ou implicitement, dans la requête introductive d’instance et présentant un lien étroit avec celui-ci doit être déclaré recevable (arrêt du 11 juillet 2013, Ziegler/Commission, C439/11 P, EU:C:2013:513, point 46). De plus, pour pouvoir être considéré comme une ampliation d’un moyen antérieurement énoncé, un nouvel argument doit présenter, avec les moyens initialement exposés dans la requête, un lien suffisamment étroit pour pouvoir être considéré comme résultant de l’évolution normale du débat au sein d’une procédure contentieuse (voir, en ce sens, arrêt du 26 novembre 2013, Groupe Gascogne/Commission, C58/12 P, EU:C:2013:770, point 31).
52 En l’espèce, la requérante se fonde sur la jurisprudence postérieure à la clôture de la phase écrite de la procédure pour contester l’identification du système de référence tel que retenu par la Commission au considérant 129 de la décision attaquée, alors que, d’une part, dans la requête, elle avait expressément indiqué ne pas contester ces appréciations et, d’autre part, ladite jurisprudence ne saurait être considérée comme un élément de droit qui s’est révélé pendant la procédure. En effet, les éléments de jurisprudence liés à l’identification du système de référence visés par la requérante, dans la section de sa réponse à la question du Tribunal relative à l’imposition des bénéfices du système de l’impôt sur les sociétés en Belgique, ne font que confirmer les exigences relatives à l’examen par la Commission du système d’imposition national afin d’établir le système de référence dans l’examen d’un régime d’aides. Dans ces circonstances, les griefs soulevés par la requérante dans sa réponse à la question du Tribunal ne peuvent être regardés comme l’ampliation de son troisième moyen, ni comme se fondant sur des éléments de droit nouveaux. Dès lors, il y a lieu de conclure que ces griefs sont irrecevables.
Sur le caractère sélectif de l’avantage du fait de l’existence d’une dérogation au système de référence introduisant des différenciations entre opérateurs économiques se trouvant dans une situation comparable
53 Il importe de rappeler la jurisprudence selon laquelle, dans le cadre de l’examen de la sélectivité d’une mesure fiscale, après avoir identifié et examiné, dans un premier temps, le régime fiscal commun ou « normal », applicable dans l’État membre concerné, à savoir le système de référence, il convient, dans un second temps, d’apprécier et d’établir l’éventuel caractère sélectif de l’avantage octroyé par la mesure fiscale en cause en démontrant que celle-ci déroge audit système commun, dans la mesure où elle introduit des différenciations entre opérateurs se trouvant, au regard de l’objectif assigné au système fiscal de cet État membre, dans une situation factuelle et juridique comparable (voir arrêt du 8 septembre 2011, Paint Graphos e.a., C78/08 à C80/08, EU:C:2011:550, point 49 et jurisprudence citée).
54 Dans la décision attaquée, au point 6.3.2.1, la Commission a considéré, à titre principal, que le régime belge d’exonération des bénéfices excédentaires dérogeait au système commun de l’impôt sur les sociétés en Belgique, dans la mesure où celui-ci prévoyait que les sociétés soient imposées sur la base de leur bénéfice total, à savoir leur bénéfice réellement enregistré, et non sur la base d’un bénéfice moyen hypothétique faisant abstraction du bénéfice total réalisé par ces sociétés et des ajustements légalement prévus.
55 Ainsi, la Commission a conclu, au considérant 136 de la décision attaquée, que l’article 185, paragraphe 2, sous b), du CIR 92, invoqué par le Royaume de Belgique comme fondement pour le régime en cause, n’avait ni le sens ni l’effet préconisé par ledit régime et, partant, que ce régime constituait plutôt une dérogation à la règle générale prévue par le droit fiscal belge selon laquelle le bénéfice réellement enregistré était imposé. En outre, la Commission a souligné qu’un tel régime n’était pas accessible à toutes les entités se trouvant dans une situation juridique et factuelle similaire, au vu de l’objectif du système de l’impôt sur le revenu des sociétés en Belgique, qui était d’imposer les bénéfices de toutes les sociétés soumises à l’impôt en Belgique.
56 Par la suite, aux considérants 137 à 141 de la décision attaquée, la Commission a développé les raisons pour lesquelles elle considérait que le régime en cause introduisait des différenciations entre opérateurs se trouvant, au regard de l’objectif assigné au système fiscal belge, dans une situation factuelle et juridique comparable.
57 Dans le cadre de la première branche de son troisième moyen, visant le raisonnement à titre principal de la Commission selon lequel le régime en cause dérogeait au système de référence, la requérante conteste concrètement le constat selon lequel ledit système a introduit une différenciation entre les bénéficiaires des exonérations et les autres opérateurs se trouvant dans une situation juridique et factuelle comparable. Il convient de relever, à cet égard, que la Commission a avancé, aux considérants 138 à 140 de la décision attaquée, trois motifs alternatifs pour étayer sa conclusion, qu’il convient d’examiner successivement aux fins d’exhaustivité.
– Sur le traitement différencié des bénéficiaires intégrés à un groupe multinational d’entreprises
58 La requérante soutient que la Commission a erronément considéré que les bénéficiaires des décisions anticipées étaient dans une situation juridique et factuelle comparable à toutes les sociétés soumises à l’impôt sur les sociétés en Belgique, dont les sociétés autonomes et les sociétés intégrées faisant partie d’un groupe national. Elle fait valoir, en substance, que l’article 185, paragraphe 2, du CIR 92 ne s’applique qu’aux sociétés appartenant à un groupe multinational impliqué dans des transactions transfrontalières et que seules ces entreprises sont dans une situation juridique et factuelle comparable à celle des bénéficiaires du régime en cause.
59 Au considérant 138 de la décision attaquée, la Commission a affirmé que le régime était sélectif, parce qu’il était ouvert uniquement aux entités faisant partie d’un groupe multinational d’entreprises.
60 La requérante conteste seulement le constat selon lequel les groupes multinationaux se trouvent dans une situation juridique et factuelle comparable à celle des sociétés autonomes et des groupes exclusivement nationaux.
61 À cet égard, d’une part, il y a lieu de rappeler que, ainsi qu’il a été indiqué au point 48 ci-dessus, l’objectif du système de droit commun de l’impôt sur le revenu des sociétés en Belgique, tel qu’il ressort du considérant 129 de la décision attaquée, est d’imposer tous les bénéfices imposables des entités soumises à l’impôt sur le revenu des sociétés en Belgique, qu’elles soient autonomes ou intégrées dans un groupe multinational ou national d’entreprises.
62 Or, ainsi qu’il ressort de la jurisprudence constante citée aux points 41 et 53 ci-dessus, c’est bien l’objectif du système de référence qui est pertinent aux fins de la comparaison de la situation des opérateurs visés par la mesure contestée avec celle des autres opérateurs. Partant, la Commission a correctement pu se fonder, aux considérants 129, 136 et 138 de la décision attaquée, sur l’objectif du régime de l’impôt sur le revenu des sociétés en Belgique, à savoir l’imposition des bénéfices de toutes les sociétés soumises à l’impôt en Belgique, aux fins de constater que les entités appartenant à un groupe multinational étaient dans une situation juridique et factuelle comparable à celles des sociétés autonomes et des entités appartenant à un groupe national.
63 En outre, ainsi qu’il a été indiqué au point 43 ci-dessus, la Commission a constaté que, selon les règles normales d’imposition en Belgique, les bénéfices imposables des entreprises étaient, à la base, tous les bénéfices qui avaient été réalisés ou exprimés dans la comptabilité ou les comptes annuels de celles-ci.
64 D’autre part, il y a lieu de relever que, certes, l’article 185, paragraphe 2, sous b), du CIR 92 a vocation à s’appliquer à des sociétés intégrées à un groupe multinational. Toutefois, contrairement à ce que soutient la requérante, la finalité de cet article vise précisément à placer sur un pied d’égalité les entreprises liées et les entreprises non liées aux fins de l’impôt sur les sociétés.
65 En effet, l’article 185, paragraphe 2, du CIR 92, dans sa version applicable en l’espèce, est libellé comme suit :
« Sans préjudice de l’alinéa 2, pour deux sociétés faisant partie d’un groupe multinational de sociétés liées et en ce qui concerne leurs relations transfrontalières réciproques :
[…]
b) lorsque, dans les bénéfices d’une société sont repris des bénéfices qui sont également repris dans les bénéfices d’une autre société, et que les bénéfices ainsi inclus sont des bénéfices qui auraient été réalisés par cette autre société si les conditions convenues entre les deux sociétés avaient été celles qui auraient été convenues entre des sociétés indépendantes, les bénéfices de la première société sont ajustés d’une manière appropriée.
L’alinéa 1er s’applique par décision anticipée sans préjudice de l’application de la Convention relative à l’élimination des doubles impositions en cas de corrections des bénéfices des entreprises associées (90/436) du 23 juillet 1990 et des conventions internationales préventives de la double imposition. »
66 Il ressort ainsi du libellé même de l’article 185, paragraphe 2, sous b), du CIR 92 que l’ajustement négatif n’est applicable qu’à la condition que les bénéfices faisant l’objet de l’ajustement soient également repris dans les bénéfices de l’autre société et que ces bénéfices soient des bénéfices qui auraient été réalisés par cette autre société si les conditions convenues entre les deux sociétés avaient été celles qui auraient été convenues entre sociétés indépendantes et, partant, qu’il tend à placer les entités intégrées à un groupe multinational dans la même situation que les entités non liées.
67 Une telle lecture est confirmée par la circulaire administrative du 4 juillet 2006 concernant l’article 185, paragraphe 2, du CIR 92, à laquelle il est fait référence au considérant 38 de la décision attaquée et qui rappelle que l’ajustement négatif corrélatif, prévu par cet article, trouve son sens dans le principe de pleine concurrence, qu’il a pour objectif d’éviter ou de supprimer une double imposition (possible) et qu’il doit s’effectuer de manière appropriée, à savoir que les autorités fiscales belges ne peuvent procéder à cet ajustement que si ce dernier est justifié en son principe et en son montant.
68 Dans ce contexte, l’argument de la requérante selon lequel l’article 185, paragraphe 2, sous b), du CIR 92 ne saurait, par définition, produire ses effets sur les entités autonomes et les entités intégrées à un groupe national, lesquelles ne sont pas impliquées dans des transactions intragroupes transfrontalières, ne permet pas de considérer que celles-ci sont dans une situation différente au regard de l’objectif poursuivi par le système de référence.
69 Ainsi, il ne saurait être reproché à la Commission d’avoir soutenu que les entités faisant partie d’un groupe multinational ayant bénéficié de l’exonération des bénéfices excédentaires au titre du régime en cause, qui constitue un ajustement qui n’est pas en tant que tel prévu par la loi, auraient reçu un traitement différencié par rapport à d’autres entités en Belgique n’en ayant pas bénéficié, alors que ces entités se trouvaient dans une situation factuelle et juridique comparable, au regard de l’objectif du système de droit commun de l’impôt sur le revenu des sociétés en Belgique, à savoir imposer tous les bénéfices imposables de toutes les sociétés résidentes ou actives par l’intermédiaire d’un établissement stable en Belgique.
– Sur le traitement différencié par rapport aux entreprises n’ayant pas procédé à des investissements, à la création d’emplois ou à la centralisation d’activités en Belgique
70 La requérante fait valoir que la Commission a erronément considéré que le système de l’exonération des bénéfices était conditionné à l’existence d’une « situation nouvelle », consistant en des investissements, en un accroissement d’activités ou en une relocalisation en Belgique. Cette condition ne ressortirait aucunement de l’article 185, paragraphe 2, du CIR 92 et la Commission l’aurait erronément extrapolée à partir d’un échantillon de 22 décisions anticipées. Par ailleurs, l’essence même d’une décision anticipée est de déterminer les effets futurs d’opérations sur le plan fiscal, et ce sans que soit exigée une situation nouvelle.
71 Au considérant 139 de la décision attaquée, la Commission a soutenu que le régime en cause était sélectif dans la mesure où il n’était pas ouvert à des sociétés qui auraient décidé de ne pas effectuer des investissements, de ne pas créer des emplois ou de ne pas centraliser des activités en Belgique. La Commission a relevé que l’article 20 de la loi du 24 décembre 2002 subordonnait l’adoption des décisions anticipées à l’existence d’une situation ou d’une opération n’ayant pas produit d’effets sur le plan fiscal et qu’une décision anticipée était nécessaire pour bénéficier de l’exonération des bénéfices excédentaires.
72 La Commission a également relevé que, dans l’échantillon des décisions anticipées, accordant une exonération des bénéfices excédentaires, qu’elle a analysé, chaque décision anticipée mentionnait des investissements importants, la centralisation d’activités ou la création d’emplois en Belgique. De ce fait, elle a considéré que l’obligation relative à la « situation nouvelle », à laquelle étaient soumises les demandes de décisions anticipées afin de bénéficier de l’exonération des bénéfices excédentaires, donnait lieu à un traitement différencié des groupes multinationaux qui modifiaient leur modèle d’entreprise en mettant en place de nouvelles activités en Belgique par rapport à tous les autres opérateurs économiques, y compris les groupes multinationaux qui continuaient de suivre leur modèle d’entreprise existant en Belgique.
73 À cet égard, il convient de rappeler que, aux points 142 à 144 de l’arrêt sur pourvoi, la Cour a confirmé que le choix d’un échantillon constitué de 22 décisions anticipées adoptées au cours des années 2005, 2007, 2010 et 2013 était approprié et suffisamment représentatif.
74 En outre, il convient de relever que l’article 20 de la loi du 24 décembre 2002 définit la décision anticipée comme étant l’acte juridique par lequel le service public fédéral des finances détermine, conformément aux dispositions en vigueur, comment la loi s’appliquera à une situation ou à une opération particulière qui n’a pas encore produit d’effets sur le plan fiscal. Par ailleurs, l’article 22 de cette même loi précise qu’une décision anticipée ne peut être adoptée, notamment, lorsque la demande a trait à des situations ou à des opérations identiques à celles ayant déjà produit des effets sur le plan fiscal à l’égard du demandeur.
75 Certes, de la lecture des dispositions indiquées au point 74 ci-dessus, il ne saurait être déduit que la réalisation d’investissements, la création d’emplois ou la centralisation d’activités en Belgique constituent des conditions explicitement exigées pour l’obtention d’une décision anticipée.
76 Toutefois, il ressort de l’échantillon des décisions anticipées analysé par la Commission dans la décision attaquée que ces décisions ont effectivement été accordées à la suite de propositions des demandeurs de réaliser des investissements en Belgique, d’y relocaliser certaines fonctions ou d’y créer un certain nombre d’emplois. En effet, les trois exemples décrits dans la note en bas de page no 80 de la décision attaquée, dans lesquels les demandeurs des décisions anticipées en question ont décrit leurs plans d’investissements et de recentralisation d’activités en Belgique, révèlent que, dans la pratique, la condition pour l’adoption d’une décision anticipée, relative à l’existence d’une situation n’ayant pas produit des effets fiscaux, a été remplie par des investissements, la centralisation d’activités ou la création d’emplois en Belgique.
77 À cet égard, il convient de rappeler que, en l’espèce, c’est précisément la pratique administrative des autorités fiscales belges, consistant à exonérer des bénéfices par des décisions anticipées, qui a été considérée comme étant dérogatoire à ce qui est prévu à l’article 185, paragraphe 2, sous b), du CIR 92. Or, en vertu desdites décisions anticipées, leurs bénéficiaires ont obtenu un avantage consistant en l’allégement de leur assiette imposable, du fait de l’exonération des bénéfices dits « excédentaires ». En revanche, les entités n’ayant pas procédé à une modification de leur modèle d’entreprise, afin de créer des situations fiscales nouvelles qui, au regard d’une telle pratique, consistaient systématiquement en des investissements, en la centralisation d’activités ou en la création d’emplois en Belgique, et, partant, n’ayant pas demandé de décision anticipée, ont été imposées sur l’ensemble de leurs bénéfices imposables. Partant, le régime en cause a donné lieu à un traitement différencié de sociétés se trouvant dans une situation factuelle et juridique comparable, au regard de l’objectif du système de droit commun de l’impôt sur le revenu des sociétés en Belgique.
78 Par ailleurs, l’argument de la requérante selon lequel la Commission aurait méconnu le fait que l’octroi de décisions anticipées n’était pas conditionné à l’existence d’une « situation nouvelle », mais concernait seulement une opération n’ayant pas encore produit d’effets sur le plan fiscal, ce qui inclurait également les opérations en cours, doit être écarté. En effet, ainsi qu’il ressort du point 77 ci-dessus, l’analyse de la Commission repose sur le constat que, dans la pratique, l’octroi du bénéfice du régime en cause était systématiquement conditionné à l’existence d’une situation liée à la réalisation d’investissements, à la centralisation d’activités ou à la création d’emplois en Belgique, laquelle était prise en compte dans les décisions anticipées, dont les bénéficiaires pouvaient se prévaloir pour chaque exercice fiscal à partir de l’entrée en vigueur desdites décisions et durant leur période de validité.
79 Dans ces circonstances, il ne saurait être reproché à la Commission, d’une part, d’avoir soutenu, au considérant 139 de la décision attaquée, que le système en cause était sélectif, parce qu’il n’était pas ouvert à des sociétés qui avaient décidé de ne pas effectuer des investissements en Belgique, de ne pas y centraliser des activités et de ne pas y créer des emplois et, d’autre part, d’avoir méconnu la nature des décisions anticipées.
– Sur le traitement différencié par rapport aux entreprises faisant partie d’un groupe de petite taille
80 La requérante conteste l’affirmation de la Commission selon laquelle seules les entités appartenant à un groupe multinational de grande taille seraient incitées à demander des décisions anticipées et fait valoir que la Commission n’apporte aucun élément de preuve au soutien de cette allégation.
81 En l’espèce, au considérant 140 de la décision attaquée, la Commission a soutenu que le régime en cause était sélectif dans la mesure où seules les entités belges faisant partie d’un groupe multinational de grande taille ou de taille moyenne pouvaient effectivement bénéficier de l’exonération des bénéfices excédentaires.
82 En effet, au considérant 140 de la décision attaquée, la Commission a indiqué que seules les entités appartenant à un groupe multinational suffisamment grand étaient incitées à obtenir une décision anticipée, étant donné que c’était uniquement au sein de grands groupes d’entreprises qu’étaient susceptibles d’être générés des bénéfices tirés de synergies, d’économies d’échelle et d’autres avantages, d’une hauteur significative justifiant la demande de décision anticipée. En outre, la Commission a relevé que le processus d’obtention d’une telle décision nécessitait une demande détaillée présentant la situation nouvelle qui justifiait l’exonération ainsi que des études sur les bénéfices excédentaires, ce qui aurait été plus contraignant pour les petits groupes de sociétés que pour les grands.
83 À cet égard, il n’est pas contesté que, au sein de l’échantillon de 22 décisions anticipées au titre du régime en cause examiné par la Commission, tel que décrit au considérant 65 de la décision attaquée et qui a été qualifié d’appropriéet de représentatif, aux points 142 à 144 de l’arrêt sur pourvoi, aucune de ces décisions ne concernait des entités appartenant à des groupes d’entreprises de petite taille.
84 En outre, ainsi qu’il est indiqué au considérant 66 de la décision attaquée, il n’est pas contesté que, au cours de la procédure administrative, à la suite d’un tel constat par la Commission sur la base de l’échantillon de 22 décisions anticipées et en réponse à une demande formulée par celle-ci à cet égard, le Royaume de Belgique n’est pas parvenu à étayer son allégation selon laquelle l’exonération avait été accordée aussi à des entreprises appartenant à des groupes d’entreprises de petite taille.
85 Partant, au regard de la pratique administrative visée par la Commission, ce sont des entreprises faisant partie de groupes de grande et de moyenne taille qui se sont prévalues du régime d’exonération des bénéfices excédentaires, à l’exclusion des entreprises faisant partie d’un groupe d’entreprises de petite taille.
86 Cette conclusion ne saurait être remise en cause par les arguments de la requérante selon lesquels la Commission n’aurait pas établi que les groupes de petite taille n’étaient pas en mesure de bénéficier du régime en cause, mais se serait limitée à confirmer, tout au plus, que de tels groupes de petite taille n’en avaient pas bénéficié.
87 À cet égard, il y a lieu de relever que la sélectivité peut être établie dans des situations où, bien que les critères formels pour l’application de la mesure en cause soient formulés en termes généraux et objectifs, ladite mesure est agencée d’une manière telle que ses effets favorisent sensiblement un groupe particulier d’entreprises [voir, en ce sens, arrêt du 15 novembre 2011, Commission et Espagne/Government of Gibraltar et Royaume-Uni, C106/09 P et C107/09 P, EU:C:2011:732, points 101 à 107].
88 De plus, la sélectivité d’une mesure peut être établie lorsque les termes de cette mesure ont été proposés sélectivement par l’État à un ou à plusieurs opérateurs et non sur le fondement de critères objectifs ressortant d’un texte de portée générale et applicables à tout opérateur (voir, en ce sens, arrêt du 12 novembre 2013, MOL/Commission, T499/10, EU:T:2013:592, point 66).
89 Or, en l’espèce, les éléments visés aux points 82 à 84 ci-dessus sont de nature à établir que, dans la pratique, les autorités fiscales belges n’ont octroyé des décisions anticipées relatives à l’exonération des bénéfices qu’à des entreprises appartenant à un groupe de grande et moyenne taille, de sorte que seules ces entreprises ont effectivement bénéficié du régime en cause.
90 Dans ces circonstances, il ne saurait être reproché à la Commission d’avoir soutenu, au considérant 140 de la décision attaquée, que le système en cause était sélectif parce qu’il n’était pas ouvert aux entreprises faisant partie d’un groupe de petite taille.
91 En tout état de cause, à supposer même que la Commission ait retenu à tort un tel motif relatif au traitement différencié par rapport aux entreprises faisant partie d’un groupe de petite taille, cela n’affecterait pas la validité des deux autres motifs avancés par la Commission et examinés, respectivement, aux points 59 à 69 et aux points 70 à 79 ci-dessus.
Conclusions sur la sélectivité du régime en cause
92 Il ressort des considérations qui précèdent que, dans le cadre de son raisonnement principal, la Commission a correctement identifié le système de référence comme étant le système de droit commun d’imposition des bénéfices des sociétés, prévu par le régime de l’impôt sur le revenu des sociétés en Belgique, dont l’objectif est l’imposition des bénéfices de toutes les sociétés soumises à l’impôt en Belgique, au sein duquel s’intègre l’article 185, paragraphe 2, sous b), du CIR 92. Par ailleurs, c’est à juste titre que la Commission a conclu que le régime d’exonération des bénéfices excédentaires, sans exiger que ceux-ci soient repris dans les bénéfices d’une autre société, dérogeait au système de référence et accordait un traitement différencié aux bénéficiaires par rapport à d’autres entités se trouvant dans une situation juridique et factuelle similaire, au vu de l’objectif dudit système.
93 Partant, il y a lieu de rejeter le présent moyen en ce qu’il conteste la conclusion de la Commission, au titre de son raisonnement principal, selon laquelle le régime en cause a accordé à ces bénéficiaires un avantage sélectif, au sens de l’article 107 TFUE.
94 Dans ces circonstances, il n’est pas nécessaire d’examiner le bien-fondé des arguments soulevés par la requérante, dans le cadre de la seconde branche du troisième moyen et dans le cadre de sa réponse à la question du Tribunal sur la jurisprudence postérieure à la clôture de la phase écrite de la procédure, à l’encontre de la conclusion de la Commission relative à l’existence d’un avantage sélectif, au titre de son raisonnement subsidiaire sur la sélectivité, développé au point 6.3.2.2 de la décision attaquée.
Sur la violation de l’article 16 du règlement 2015/1589 ainsi que du principe de sécurité juridique du fait de la récupération ordonnée par la décision attaquée
95 Le quatrième moyen est tiré d’une violation de l’article 16 du règlement 2015/1589 et du principe de sécurité juridique en ce que la Commission a ordonné la récupération de l’aide auprès des bénéficiaires de celle-ci. En substance, la requérante fait valoir, d’une part, que la décision attaquée n’indique pas quel est l’avantage octroyé aux bénéficiaires du régime en cause et, d’autre part, qu’elle ne permet pas de déterminer le montant de l’aide.
96 La Commission estime qu’il convient d’écarter l’argumentation de la requérante.
97 En vertu de l’article 16 du règlement 2015/1589, lorsque la Commission constate l’existence d’une aide d’État incompatible avec le marché intérieur et illégale, elle décide que l’État membre concerné prend toutes les mesures nécessaires pour récupérer l’aide auprès de son bénéficiaire, à moins que, ce faisant, elle aille à l’encontre d’un principe général du droit de l’Union.
98 Selon une jurisprudence constante, le principe de sécurité juridique implique que la législation de l’Union soit certaine et que son application soit prévisible pour les justiciables (voir arrêt du 21 juillet 2011, Alcoa Trasformazioni/Commission, C194/09 P, EU:C:2011:497, point 71 et jurisprudence citée).
99 En l’espèce, la requérante se limite à affirmer que la Commission n’indique pas quel avantage est supposé être obtenu par les bénéficiaires concernés.
100 À cet égard, force est de constater, d’une part, ainsi qu’il ressort des points 26 et 27 ci-dessus, que la Commission a bien identifié quel était l’avantage au considérant 135 de la décision attaquée. Plus précisément, il ressort de ce considérant que l’avantage consiste en la possibilité pour les sociétés bénéficiaires du régime en cause de réduire l’impôt dû, en déduisant de leur bénéfice réellement enregistré un bénéfice dit « excédentaire ». Ce dernier était calculé en estimant le bénéfice moyen hypothétique d’entreprises autonomes comparables, de sorte que la différence entre le bénéfice réellement enregistré et ce bénéfice moyen hypothétique se traduisait en un pourcentage d’exonération qui fondait le calcul de la base imposable accordée pour les cinq années pendant lesquelles la décision anticipée était d’application.
101 D’autre part, il importe de rappeler que, selon une jurisprudence constante, aucune disposition du droit de l’Union n’exige que la Commission, lorsqu’elle ordonne la restitution d’une aide déclarée incompatible avec le marché intérieur, fixe le montant exact de l’aide à restituer. Il suffit que la décision de la Commission comporte des indications permettant à son destinataire de déterminer lui-même, sans difficulté excessive, ce montant (arrêts du 12 octobre 2000, Espagne/Commission, C480/98, EU:C:2000:559, point 25, et du 24 septembre 2019, Fortischem/Commission, T121/15, EU:T:2019:684, point 167).
102 Par ailleurs, ainsi qu’il ressort de la jurisprudence rappelée au point 37 ci-dessus, dans une décision qui porte sur un régime d’aides, la Commission n’est pas tenue d’effectuer une analyse de l’aide octroyée dans chaque cas individuel sur le fondement d’un tel régime.
103 En l’espèce, la décision attaquée satisfait à ces exigences, puisque, aux considérants 207 à 211 de la décision attaquée, la Commission a bien fourni des explications relatives à la méthode de calcul des aides à récupérer. Ainsi, la Commission a indiqué qu’il y avait lieu de calculer le montant de l’impôt qui aurait dû être payé si l’exonération des bénéfices excédentaires n’avait pas été accordée, en tenant compte du montant de l’impôt épargné du fait de l’ensemble des décisions anticipées adoptées en faveur du bénéficiaire concerné et de l’intérêt cumulé sur ce montant, calculé à compter de la date d’octroi de l’aide, à savoir la date à laquelle le montant épargné aurait dû être acquitté, pour chaque exercice fiscal, en l’absence de décision anticipée. En outre, des précisions étaient incluses pour effectuer les ajustements correspondant aux différentes déductions applicables. Enfin, il y était fait état du fait que le montant à récupérer pouvait encore être précisé, par la suite, lors des échanges entre le Royaume de Belgique et la Commission.
104 Par ailleurs, contrairement à ce qu’affirme la Commission dans la duplique, au regard de la jurisprudence exposée au point 51 ci-dessus, l’argument de la requérante selon lequel la Commission n’identifierait pas l’avantage, puisqu’elle n’aurait examiné que la seconde étape du calcul des bénéfices excédentaires, ne constitue pas un moyen nouveau, mais tout au plus l’ampliation du quatrième moyen, tel qu’il est énoncé dans la requête introductive d’instance, présentant un lien étroit avec celui-ci. Néanmoins, un tel argument doit être écarté comme étant non fondé, dès lors que, ainsi qu’il a déjà été constaté au point 33 cidessus, aux fins de son analyse de l’existence d’un avantage, la Commission a tenu compte du régime en cause dans son ensemble ainsi que du fait que, à l’issue de l’application de ce régime, les entités belges étaient imposées sur un bénéfice moyen hypothétique.
105 Pour ces motifs, il y a lieu d’écarter le quatrième moyen.
106 Tous les moyens soulevés par la requérante ayant été écartés, il y a lieu de rejeter le recours dans son ensemble.
Sur les dépens
107 Aux termes de l’article 134, paragraphe 1, du règlement de procédure, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens. La requérante ayant succombé, il y a lieu de la condamner à supporter, outre ses propres dépens, ceux exposés par la Commission, conformément aux conclusions de cette dernière.
Par ces motifs,
LE TRIBUNAL (deuxième chambre élargie)
déclare et arrête :
1) Le recours est rejeté.
2) Victaulic Europe supportera, outre ses propres dépens, ceux exposés par la Commission européenne.