Cass. soc., 13 janvier 2021, n° 19-21.138
COUR DE CASSATION
Arrêt
Rejet
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Huglo
Rapporteur :
Mme Ott
Avocats :
SCP Boré, Salve de Bruneton et Mégret, SCP Gatineau, Fattaccini et Rebeyrol
Faits et procédure
1. Selon l'arrêt attaqué (Toulouse, 7 juin 2019), M. T... a été engagé le 19 mai 2008 en qualité d'ingénieur électronique par la société Serma ingénierie (la société).
2. Le 27 février 2012, il a adressé un courrier au président du groupe ainsi qu'à son supérieur hiérarchique pour dénoncer des faits de discrimination en raison de son origine à son encontre de la part du directeur commercial. Il a également saisi le Défenseur des droits, lequel a classé l'affaire le 22 décembre 2014.
3. Le 22 mars 2012, il a été licencié pour faute grave, l'employeur lui reprochant de proférer des accusations de discrimination en raison de son origine dont il avait conscience du caractère fallacieux.
4. Le 11 décembre 2014, le salarié a saisi la juridiction prud'homale de la contestation de son licenciement.
Examen du moyen
Sur le moyen, pris en sa troisième branche, ci-après annexé
5. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce grief qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation.
Sur le moyen, pris en ses première et deuxième branches
Enoncé du moyen
6. Le salarié fait grief à l'arrêt de dire que son licenciement repose sur une faute grave, de le débouter de l'intégralité de ses demandes, alors :
« 1°/ que la seule fausseté des faits dénoncés ne peut justifier le licenciement d'un salarié qui dénonce des faits discriminatoires ; qu'en retenant, pour dire que le licenciement de M. T... était fondé, que la dénonciation de discrimination avait été faite de mauvaise foi, les juges ont retenu que la mission proposée à Pessac n'était pas déloyale, que l'employeur avait adressé le curriculum du salarié à différentes entreprises, que la situation d'inter-contrat était commune à des nombreux salariés et que le courrier de M. E... était justifié au regard des horaires effectués par le salarié, la cour d'appel s'est fondée sur la seule fausseté de la déclaration, et a ainsi violé les articles L. 1132-3, L. 1132-4 et L. 1234-5 du code du travail ;
2°/ que le salarié qui relate des faits de discrimination ne peut être licencié pour ce motif sauf mauvaise foi, laquelle résulte de la connaissance par le salarié de la fausseté des faits qu'il dénonce ; qu'en retenant que la société était lauréate d'un prix contre les discrimination, que le salarié avait voulu obtenir une rupture conventionnelle, ou encore que le salarié avait créé son entreprise peu de temps après son licenciement, la cour d'appel s'est fondée sur des motifs impropres à établir la mauvaise foi de M. T..., et a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 1132-3, L. 1132-4 et L. 1234-5 du code du travail. »
Réponse de la Cour
7. Aux termes de l'article L. 1132-3 du code du travail, aucun salarié ne peut être sanctionné, licencié ou faire l'objet d'une mesure discriminatoire pour avoir témoigné des agissements définis aux articles L. 1132-1 et L. 1132-2 ou pour les avoir relatés. En vertu de l'article L. 1132-4 du même code, toute disposition ou tout acte pris à l'égard d'un salarié en méconnaissance des dispositions du présent chapitre est nul. Il s'en déduit que le salarié qui relate des faits de discrimination ne peut être licencié pour ce motif, sauf mauvaise foi, laquelle ne peut résulter que de la connaissance par le salarié de la fausseté des faits qu'il dénonce et non de la seule circonstance que les faits dénoncés ne sont pas établis.
8. Après avoir retenu que la discrimination alléguée n'était pas établie, la cour d'appel, par motifs propres et adoptés, a relevé que l'employeur démontrait que plusieurs propositions de missions avaient été faites au salarié qui se trouvait en inter-contrat, que celui-ci avait refusé en février 2012 d'effectuer une mission à Pessac, et que, dans le même temps, il alléguait auprès du Défenseur des droits et de ses supérieurs hiérarchiques pour la première fois une situation de discrimination en raison de ses origines, que l'allégation a été faite par le salarié en des termes très généraux sans invoquer de faits circonstanciés, que le salarié était dès le mois de décembre 2011 déterminé à quitter l'entreprise, son désengagement professionnel durant la période d'inter-contrat montrant sa volonté d'obtenir une rupture conventionnelle du contrat de travail en cherchant à imposer ses conditions financières, qu'aucune alerte n'avait été faite durant la relation de travail auprès des délégués du personnel, de la médecine du travail ou de l'inspection du travail et que le salarié n'avait fait aucun lien avec ses origines avant les emails adressés à ses supérieurs hiérarchiques et au Défenseur des droits en février 2012.
9. La cour d'appel a pu en déduire que le salarié connaissait la fausseté des faits allégués de discrimination en raison de son origine.
10. Le moyen n'est donc pas fondé.
PAR CES MOTIFS, la Cour :
REJETTE le pourvoi.