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Décisions

Cass. 3e civ., 6 juillet 2022, n° 21-12.024

COUR DE CASSATION

Arrêt

Rejet

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Teiller

Avocats :

SCP Duhamel-Rameix-Gury-Maitre, SCP Richard

Basse-Terre, du 8 avr. 2019

8 avril 2019

1. Selon l'arrêt attaqué (Basse-Terre, 8 avril 2019), la société Eponine (la locataire) est bénéficiaire d'un bail commercial à effet du 1er septembre 2006, portant sur des locaux appartenant à la société civile immobilière Marie (la bailleresse).

2. La bailleresse, qui a délivré, le 7 novembre 2014, un congé à effet du 31 août 2015, avec refus de renouvellement du bail commercial, sans offre d'une indemnité d'éviction, a notifié, le 31 août 2015, qu'elle entendait exercer son droit de repentir.

3. La locataire, invoquant être engagée dans un processus irréversible de départ lors de la renonciation de la bailleresse, a assigné celle-ci en contestation de l'exercice du droit de repentir.

Examen du moyen

Enoncé du moyen

4. La bailleresse fait grief à l'arrêt de déclarer nul et de nul effet le droit de repentir qu'elle a exercé et notifié à la locataire, le 31 août 2015, et de la condamner à payer une somme à titre de dommages-intérêts, alors « que le bailleur commercial peut exercer son droit de repentir lorsque le locataire se trouve encore dans les locaux commerciaux et qu'il n'est pas personnellement engagé dans un processus irréversible de libération de ces derniers ; que l'existence d'un tel processus ne peut être caractérisée qu'au regard des démarches personnellement effectuées par le locataire en vue de sa réinstallation ; qu'en l'espèce, la société Marie a consenti un bail commercial à la société Eponine avant l'échéance duquel elle a fait délivrer, le 7 novembre 2014, un congé sans offre de renouvellement et sans offre d'indemnité d'éviction ; que le 31 août 2015, dernier jour du bail, la société Marie a exercé son droit de repentir tandis que la société Eponine occupait encore les locaux commerciaux ; qu'en jugeant que la notification de ce repentir à la société Eponine était nul et de nul effet, au motif qu'une associée et un employé de cette dernière avaient créé une autre société, la société Hugo, laquelle avait procédé à l'acquisition d'un terrain en vue de faire construire des locaux commerciaux, caractérisant ainsi l'existence d'un processus irréversible de libération des locaux commerciaux loués, tandis que les sociétés Eponine et Hugo sont des personnes morales distinctes dépourvues de tout lien juridique ou capitalistique et que le locataire n'avait entrepris aucune démarche personnelle en vue de sa réinstallation, la cour d'appel a violé l'article L. 145-58 du code de commerce. »

Réponse de la Cour

5. La cour d'appel a constaté que, pour permettre à la locataire de continuer son activité d'enseignement, la gérante et un associé de la société locataire évincée ont créé, le 19 août 2014, une société civile immobilière qui a acquis un terrain, obtenu, le 8 octobre 2014, un prêt en vue de réaliser une construction pour laquelle un permis de construire a été délivré le 5 mai 2015, et que, malgré un recours en suspension du permis de construire introduit par une société tierce avec laquelle la bailleresse partageait des intérêts stratégiques, la construction avait pu débuter le 6 juillet 2015.

6. Ayant souverainement retenu que le projet immobilier avait pour but de permettre le relogement de la locataire évincée, peu important que les démarches aient été effectuées par une personne morale distincte, dès lors que celles-ci avaient été menées dans l'intérêt de la locataire, elle a pu en déduire que le droit de repentir n'avait pas été exercé valablement.

7. Le moyen n'est donc pas fondé.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

REJETTE le pourvoi.