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Décisions

Cass. 3e civ., 10 mars 2010, n° 09-10.793

COUR DE CASSATION

Arrêt

Rejet

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Lacabarats

Rapporteur :

Mme Proust

Avocat général :

M. Petit

Avocats :

SCP Defrenois et Levis, SCP Gadiou et Chevallier

Paris, du 29 oct. 2008

29 octobre 2008

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 29 octobre 2008), que la SCI Vendôme Tridor (la SCI), propriétaire de locaux à usage commercial donnés à bail à la société Galerie Enrico X... (la galerie Enrico X...), a refusé, par acte du 22 juillet 2004, la demande de renouvellement notifiée par la preneuse, sans offrir d'indemnité d'éviction, pour motif grave et légitime tiré du défaut réitéré du paiement du prix du bail ; que la SCI a assigné la Galerie Enrico X... en expulsion devant le tribunal de grande instance puis lui a notifié le 9 juin 2005 qu'elle exerçait son droit de repentir ; que la Galerie Enrico X... a restitué les clefs des locaux loués le 5 juillet 2005 et reconventionnellement sollicité le paiement d'une indemnité d'éviction ;

Attendu que la SCI fait grief à l'arrêt attaqué de constater la nullité du droit de repentir exercé, alors, selon le moyen, que le propriétaire peut, jusqu'à l'expiration d'un délai de quinze jours à compter de la date à laquelle la décision est passée en force de chose jugée, se soustraire au paiement de l'indemnité d'éviction à charge de consentir au renouvellement du bail ; que ce droit peut être exercé tant que le locataire est encore dans les lieux ou n'a pas déjà loué ou acheté un autre immeuble destiné à sa réinstallation ; qu'en statuant comme elle l'a fait, après avoir expressément relevé que, à la date du 9 juin 2005 à laquelle la SCI Vendôme Tridoravait usé de son droit de repentir et offert le renouvellement du bail, la libération des lieux loués par la société Galerie Enrico X... n'était pas complète et que les clés n'étaient pas restituées, de sorte que l'exercice du droit de repentir exercé par la société bailleresse pour se soustraire au paiement d'une indemnité d'éviction ne pouvait être qualifié de fautif, nonobstant le degré d'avancement des opérations de déménagement entreprises par la société locataire, la cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations, a violé l'article L. 145-58 du code de commerce ;

Mais attendu qu'ayant constaté, par motifs propres et adoptés, que la Galerie Enrico X... établissait avoir pris des mesures pour libérer les lieux, suite à la délivrance du refus de renouvellement, notamment en renvoyant 130 oeuvres d'art aux artistes entre le 16 février et le 10 juin 2005, en expédiant des oeuvres d'art, des archives et du mobilier dans une propriété du gérant de la Galerie au Muy en décembre 2004, avril et mai 2005, et en aménageant ces locaux pour stocker et recevoir des oeuvres d'art et en y embauchant des salariés, qu'un processus irréversible de départ des lieux, rendant impossible la continuation de l'exploitation du fonds dans les lieux, s'était donc déjà engagé de longue date lors de la notification du droit de repentir, que la SCI en était parfaitement informée par les conclusions déposées par la société preneuse devant le tribunal en mai 2005 et par le courrier reçu le 2 juin 2005 dans lequel la Galerie Enrico X... lui indiquait avoir procédé au déménagement, demandait réparation de son préjudice et sollicitait un rendez-vous pour un état des lieux contradictoire, que la SCI avait au surplus, en écartant la société preneuse de la réunion des locataires de l'ensemble immobilier en avril 2005, confirmé sa volonté de mettre fin à leurs relations, la cour d'appel, qui a retenu que ces circonstances traduisaient la volonté manifeste de la SCI de mettre sa locataire en difficulté, et que le but poursuivi était de faire échec à tout risque de paiement d'une indemnité d'éviction, a pu en déduire que l'exercice de son droit de repentir par la SCI était fautif ;

D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi.