Cass. 3e civ., 3 juillet 2013, n° 12-18.819
COUR DE CASSATION
Arrêt
Rejet
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Terrier
Avocats :
SCP Gadiou et Chevallier, SCP Tiffreau, Corlay et Marlange
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Bastia, 7 mars 2012), que la société Ottica, locataire d'un local commercial, appartenant à la SCI Balthazar, a sollicité le renouvellement de son bail ; que la bailleresse a refusé ce renouvellement en offrant une indemnité d'éviction puis a assigné la locataire en fixation de cette indemnité ; que, le 22 février 2008, la société Ottica a signé une promesse de cession du droit au bail d'un nouveau local sous la condition suspensive de l'obtention d'un prêt ; que la condition a été levée le 29 avril 2008 ; que, le 26 mai 2008, la SCI Balthazar a notifié à la société Ottica qu'elle exerçait son droit de repentir ; que l'acte de cession du droit au bail a été signé le 30 mai 2008 ;
Attendu qu'il est fait grief à l'arrêt de déclarer tardif l'exercice du droit de repentir de la SCI Balthazar et de condamner celle-ci à payer une indemnité d'éviction à la société Ottica alors, selon le moyen :
1°/ que les conditions suspensives d'une promesse de cession de bail ne rétroagissent au jour de l'engagement que si l'acte authentique se borne à enregistrer l'accord des parties déjà réalisé sur les éléments essentiels de la cession au jour de la promesse ; qu'invoquant cette règle, la SCI Balthazar avait montré que, lors de la promesse de cession de bail du 22 février 2008, la société civile immobilière propriétaire de l'immeuble s'était bornée par sa gérante statutaire à intervenir à l'acte pour dispenser les parties de la signification prévue par l'article 1690 du code civil ; qu'elle avait ajouté que c'était seulement dans l'acte notarié du 30 mai 2008 que la société propriétaire, par ses deux associées, avait garanti « le cessionnaire du bénéfice du droit au renouvellement de son bail malgré le défaut de durée d'exploitation suffisante conformément à l'article L. 145-8 du code de commerce », renonçant à invoquer ce texte, et acceptant « le cessionnaire comme locataire à compter de ce jour » ; qu'elle avait conclu qu'à défaut d'un accord des parties sur un des éléments essentiels de la cession, celle-ci n'était devenue définitive qu'au 30 mai 2008, soit postérieurement à l'exercice du droit de repentir qui n'était pas ainsi tardif ; qu'en se bornant, en réponse à ce moyen, à énoncer que le bailleur était intervenu à la promesse, que l'ancienne locataire avait pu invoquer son droit au renouvellement et que les éléments essentiels de la cession du droit au bail étaient déjà déterminés, sans opposer aucune réfutation pertinente au moyen soulevé par la SCI Balthazar tiré de ce que la garantie donnée au cessionnaire du droit au bail et l'acceptation du nouveau locataire constituaient des éléments essentiels d'une cession de droit au bail commercial, et que ces éléments n'étaient pas inclus dans la promesse de cession qui mentionnait la seule dispense donnée par la propriétaire de la signification prévue à l'article 1690 du code civil, ce qui ne valait ni garantie du droit au renouvellement, ni acceptation de la nouvelle locataire, la cour d'appel n'a pas justifié légalement sa décision au regard des articles L. 145-8 et L. 145-58 du code de commerce, ensemble l'article 1583 du code civil ;
2°/ qu'en n'opposant aucune réfutation aux conclusions de la SCI Balthazar montrant que les parties avaient expressément donné effet à la cession du bail au 30 mai 2008, ce qui excluait qu'elle puisse être considérée comme acquise au 26 mai 2008, date à laquelle avait été exercé le droit de repentir, la cour d'appel a entaché sa décision d'un défaut de motifs, violant l'article 455 du code de procédure civile ;
3°/ que la reprise des locaux, qui avait été imposée à la SCI Balthazar par la SARL Otica, et qui avait obligé la SCI Balthazar à faire des travaux dans les lieux pour relouer, n'était pas de nature à priver la bailleresse de l'exercice de son droit de repentir, avec toutes conséquences de droit si bien que l'arrêt attaqué est privé de toute base légale au regard de l'article L. 145-58 du code de commerce ;
Mais attendu qu'ayant relevé que les éléments essentiels de la cession du droit au bail étaient déterminés dans la promesse et que la réalisation de la condition suspensive avait rendu la vente parfaite à la date du 29 avril 2008, la cour d'appel en a exactement déduit, sans être tenue de répondre à des conclusions que ses constatations rendaient inopérantes, que l'exercice du droit de repentir par la bailleresse le 26 mai 2008 était tardif et a, par ces seuls motifs, légalement justifié sa décision ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi.