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Décisions

Cass. com., 5 décembre 2000, n° 97-19.582

COUR DE CASSATION

Arrêt

Rejet

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Dumas

Rapporteur :

M. Leclercq

Avocat général :

M. Jobard

Avocat :

SCP Ancel et Couturier-Heller

Paris, 15e ch. civ., sect. B, du 19 juin…

19 juin 1997

Sur les deux moyens, réunis :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 19 juin 1997), que la SCI Le Douet a été constituée par les ex-époux M. X... et Mme Y..., y associant leur fils mineur ; que Mme Y... a été désignée comme gérante ; que, se présentant comme gérant de la SCI, M. X... a obtenu de la Banque française intercontinentale un crédit de trésorerie versé en compte ; que, par chèques émis par lui, une grande partie du crédit a été utilisée au profit d'une société Lomatrap, dont Mme Y... était gérante ; que, poursuivie en remboursement du crédit, la SCI a invoqué le défaut de qualité de M. X... pour l'engager ; que les juges du fond ont écarté ce moyen, considérant M. X... comme gérant de fait et Mme Y... comme étant informée des opérations menées par lui, qu'elle a implicitement ratifiées ;

Attendu que la SCI fait grief à l'arrêt du rejet de sa prétention, alors, selon les moyens :

1 / que le banquier qui ouvre un compte a l'obligation de vérifier le domicile et l'identité du postulant, qui est tenu de présenter un document officiel ; que la cour d'appel, qui décide que la banque, qui avait négligé de se faire communiquer un extrait du registre du commerce et des sociétés, avait pu légitimement croire que M. X..., associé de la SCI Le Douet qui avait ouvert un compte au nom de cette société, signé un acte de prêt et les chèques disposant du montant du prêt, en était le représentant et condamne la société à rembourser le prêt, statue en violation des articles 30 du décret du 3 octobre 1975, applicable en la cause, 1849 et 1998 du Code civil ;

2 / que la société civile est gérée par un gérant désigné par les associés qui, seul, la représente à l'égard des tiers ; que la cour d'appel, qui décide que l'ouverture de compte au bénéfice de la société Le Douet, l'obtention d'un crédit de trésorerie et la reconnaissance de dette correspondante engagent la société en relevant que ces actes n'ont pu se faire sans l'accord de Mme Y..., gérante, que M. X..., qui les a accomplis apparaît comme le gérant de fait, chargé de la gestion de la société par son ex-épouse, et en déduit que ces actes engagent la société, sans rechercher si, postérieurement à leur accomplissement, ces actes ont été portés à la connaissance de la société et ratifiés par la gérante, en cette qualité, a privé de base légale sa décision au regard des articles 1998, 1846 et 1849 du Code civil ;

3 / qu'il incombe au tiers qui a traité avec le mandataire prétendu d'une société et poursuit, contre cette société, l'exécution des actes nuls, de prouver le mandat apparent ou la ratification par la société des actes accomplis en son nom ; que la cour d'appel, qui déclare la société Le Douet engagée envers la banque par les actes accomplis en son nom par son associé, faute par elle de démontrer la moindre collusion frauduleuse entre l'associé et la banque, a renversé la charge de la preuve, en violation de l'article 1315 du Code civil ;

4 / que, saisie par la société civile immobilière Le Douet de conclusions soutenant que les actes accomplis par son prétendu mandataire, M. X..., consistant à emprunter de l'argent au nom de la SCI avec promesse d'affectation hypothécaire afin de permettre à ce prétendu mandataire de désintéresser la banque, par ailleurs créancière de deux sociétés que M. X... avait été cautionnées, n'entraient pas dans l'objet social de la société Le Douet ; que la cour d'appel, qui décide que cette société civile avait été représentée à l'égard de la banque par M. X... et la condamne à rembourser à la banque la somme empruntée, sans rechercher si l'opération entrait dans son objet social, a privé de base légale sa décision au regard de l'article 1849 du Code civil ;

Mais attendu, d'une part, que l'arrêt relève que la banque a reçu une attestation du notaire habituel de Mme Y... et M. X..., indiquant que celui-ci était le gérant de la SCI ; que la cour d'appel a pu en déduire que la banque n'avait pas commis de faute en le considérant comme tel ;

Attendu, d'autre part, que l'arrêt relève que l'ouverture du compte, l'obtention du crédit et son utilisation au profit d'une société qu'elle dirigeait ont recueilli l'accord de Mme Y..., qui en était exactement informée, et qui a laissé M. X... accomplir, à sa connaissance, divers autres actes de gestion de la SCI, notamment pour les déclarations fiscales ; que la cour d'appel a ainsi procédé aux recherches prétendument omises ;

Attendu, en outre, que pour retenir la qualité de mandataire apparent de M. X..., l'arrêt se réfère à l'attestation notariale, à l'accomplissement par lui de divers actes de gestion au nom de la SCI et à la connaissance de ces pratiques par Mme Y..., puis en déduit que les tiers ont pu croire qu'il était gérant ; qu'ainsi, elle n'a pas inversé la charge de la preuve ;

Attendu, enfin, qu'ayant retenu que les actes de gestion accomplis au nom de la SCI par M. X... avaient été ratifiés par la gérante, sans avoir à considérer s'ils étaient conformes à l'objet social, la cour d'appel n'a pas privé sa décision de base légale à cet égard ;

D'où il suit que le moyen n'est fondé en aucune de ses branches ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi.