Cass. com., 14 novembre 1977, n° 76-11.431
COUR DE CASSATION
Arrêt
Rejet
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Cénac
Rapporteur :
M. Mérimée
Avocat général :
M. Robin
Avocat :
M. Boré
SUR LES TROIS PREMIERS MOYENS, PRIS EN LEURS DIVERSES BRANCHES, REUNIS : ATTENDU QU'IL RESULTE DES ENONCIATIONS DE L'ARRET ATTAQUE QUE, LE 25 JUIN 1967, LE Z... PETROLIER Y..., APPARTENANT A LA COMPAGNIE D'ARMEMENT MARITIME (CAM) ABORDA LE PETROLIER PETRO-VERDON, APPARTENANT A LA COMPAGNIE PETROMER, QUI SE TROUVAIT DEJA ACCOSTE A L'APPONTEMENT D'AMBES, EN GIRONDE ;
QU'IL EN RESULTA POUR CE SECOND PETROLIER DIVERSES AVARIES ;
QUE LE LENDEMAIN, 26 JUIN, LA COMPAGNIE PETROMER FIT ASSIGNER POUR LE JOUR MEME DEVANT LE TRIBUNAL DE COMMERCE DE BORDEAUX LE CAPITAINE DU Y... ET LA CAM, CELLE-CI PRISE EN LA PERSONNE DU CONSIGNATAIRE DU Z..., LA GIRODAY, EN PAIEMENT DE DOMMAGES ET INTERETS ;
QUE, LE 27 JUIN, LE TRIBUNAL, STATUANT PAR DECISION CONTRADICTOIRE, ORDONNA UNE EXPERTISE, QUE LE RAPPORT FUT DEPOSE LE 30 JUIN 1973 ;
ATTENDU QU'IL EST FAIT GRIEF A LA COUR D'APPEL D'AVOIR REJETE L'EXCEPTION DE NULLITE OPPOSEE PAR LA CAM A L'ASSIGNATION SUSVISEE, ALORS, SELON LE POURVOI, EN PREMIER LIEU, QUE LES EXCEPTIONS DE NULLITE FONDEES SUR L'INOBSERVATION DES REGLES DE FOND RELATIVES AUX ACTES DE A... PEUVENT ETRE PROPOSEES EN TOUT ETAT DE CAUSE ET SANS QUE CELUI QUI LES INVOQUE AIT A JUSTIFIER D'UN GRIEF ;
QUE CONSTITUE UNE IRREGULARITE DE FOND AFFECTANT LA VALIDITE DE L'ACTE LE DEFAUT DE POUVOIR DE CELUI QUI ASSURE LA REPRESENTATION D'UNE PERSONNE EN JUSTICE ;
QUE, DANS SES CONCLUSIONS, LA CAM AVAIT FAIT VALOIR QUE L'ASSIGNATION INTRODUCTIVE D'INSTANCE N'AVAIT PAS ETE DELIVREE AU CAPITAINE DU Z..., MAIS AU CONSIGNATAIRE ;
QUE NI CE DERNIER, NI DAVANTAGE L'AGREE PAR LUI DESIGNE, N'AVAIT RECU LE POUVOIR DE REPRESENTER L'ARMATEUR EN JUSTICE ;
D'OU IL SUIT QU'EN ECARTANT LA RECEVABILITE D'UNE TELLE EXCEPTION PAR SUITE DE SA TARDIVETE, LA COUR D'APPEL A MECONNU LES REGLES LEGALES, EN VIGUEUR ;
EN DEUXIEME LIEU, QUE L'EXCEPTION DE NULLITE, FUT-ELLE PAR HYPOTHESE FONDEE SUR LA SEULE INOBSERVATION D'UNE REGLE DE FORME, EST RECEVABLE DES LORS QU'ELLE A ETE SOULEVEE AVANT TOUT DEBAT AU FOND ;
QUE L'ARRET ATTAQUE CONSTATE QUE L'EXCEPTION A ETE SOULEVEE AU SEUIL DU LITIGE ;
QU'EN SUBORDONNANT LA RECEVABILITE DE L'EXCEPTION A LA CONDITION ARBITRAIRE QUE LE GRIEF RESULTANT DE L'IRREGULARITE ENTACHANT L'ACTE FUT DEMONTRE PAR LE BIAIS D'UNE ACTION EN DESAVEU EXERCEE EN MEME TEMPS QUE L'EXCEPTION, LA COUR D'APPEL A ENTACHE SON ARRET D'UNE VIOLATION DES LOIS DE A... ;
EN TROISIEME LIEU, D'UNE PART, QUE SEUL LE CAPITAINE X... LEGALEMENT INVESTI DU POUVOIR DE REPRESENTER L'ARMATEUR EN JUSTICE ;
QUE LE CONSIGNATAIRE DU Z... N'ETAIT PAS LEGALEMENT INVESTI D'UN TEL POUVOIR ;
QUE, D'AUTRE PART, LE MANDAT NE SE PRESUME PAS ;
QU'IL NE SAURAIT RESULTER DES RAPPORTS AYANT PU PRECEDEMMENT EXISTER ENTRE L'ARMATEUR ET LE CONSIGNATAIRE, DES LORS QUE CE DERNIER N'A PAS POUR MISSION HABITUELLE DE REPRESENTER L'ARMATEUR EN JUSTICE, ENCORE, QUE LE MANDAT NE SAURAIT DAVANTAGE RESULTER D'UNE LETTRE DE PROTESTATION ADRESSEE LE 25 JUIN 1967 PAR LE CAPITAINE DU Y... A L'ENTREPRISE DE REMORQUAGE, QUI EST ETRANGERE AU LITIGE OPPOSANT LES ARMATEURS DES DEUX PETROLIERS ENTRE LESQUELS S'EST PRODUIT L'ABORDAGE ;
QU'AU DEMEURANT, UNE PRESOMPTION DEDUITE D'UN SEUL FAIT INOPERANT NE SAURAIT EN ELLE-MEME ETABLIR LA PREUVE QUI INCOMBAIT A LA COMPAGNIE PETROMER, ENFIN, QUE DANS SES CONCLUSIONS LAISSEES SANS REPONSE, LA CAM AVAIT FAIT VALOIR QUE L'AGREE AVAIT ETE DESIGNE PAR LE CONSIGNATAIRE ;
QUE, FAUTE DE POUVOIRS A LUI CONFERES PAR L'ARMATEUR, CE DERNIER N'A PAS PU VALABLEMENT SE SUBSTITUER UN MANDATAIRE AD LITEM ;
D'OU IL SUIT QUE LE MOTIF TIRE DE LA PRETENDUE TARDIVETE DE L'ACTION EN DESAVEU DE L'AGREE EST INOPERANT ;
MAIS ATTENDU, QUE, CONTRAIREMENT A CE QUE PRETEND LE POURVOI, EN SON TROISIEME MOYEN, LA COUR D'APPEL A DECIDE A BON DROIT QUE, A L'EPOQUE OU L'ASSIGNATION LITIGIEUSE A ETE DELIVREE AU CAPITAINE DU Y..., REPRESENTANT LA CAM ET A LA GIRODAY, PROFESSIONNEL DESIGNE PAR L'ARMATEUR POUR REMPLIR LES FONCTIONS DE CONSIGNATAIRE DU Z..., CE DERNIER DEVAIT ETRE, DE CE SEUL FAIT, REGARDE COMME ETANT AUSSI MANDATAIRE DE CET ARMATEUR, ET, AYANT, COMME TEL, QUALITE POUR RECEVOIR L'EXPLOIT ET POUR DESIGNER UN AGREE, CAPABLE DE REPRESENTER LE MANDANT EN JUSTICE ;
QU'AYANT, PAR CE MOTIF, JUSTIFIE SA DECISION D'ECARTER L'EXCEPTION DE NULLITE APPOSEE EN AVRIL 1974 A UNE ASSIGNATION QUI AVAIT ETE DELIVREE SEPT ANS AUPARAVANT, LES GRIEFS FORMULES PAR LES PREMIER ET DEUXIEME MOYENS DOIVENT ETRE CONSIDERES COMME CRITIQUANT DES MOTIFS SURABONDANTS DE L'ARRET ;
QU'AUCUN DES TROIS PREMIERS MOYENS, EN AUCUNE DE LEURS BRANCHES, NE PEUT ETRE ACCUEILLI ;
SUR LE QUATRIEME MOYEN, PRIS EN SES DEUX BRANCHES : ATTENDU QU'IL EST ENCORE FAIT GRIEF A L'ARRET D'AVOIR REFUSE DE DIRE NULLE L'EXPERTISE A LAQUELLE IL AVAIT ETE PROCEDE EN VERTU D'UN JUGEMENT AVANT DIRE DROIT, ALORS, SELON LE POURVOI, D'UNE PART, QUE L'ARRET ATTAQUE NE JUSTIFIE PAS VALABLEMENT DE L'EXISTENCE D'UN MANDAT CONFERE AU COURTIER MARITIME, QUI, D'APRES L'ARRET, AURAIT SUIVI LES OPERATIONS D'EXPERTISE, D'AUTRE PART, QU'IL RESSORT DU RAPPORT D'EXPERTISE, DENATURE PAR L'ARRET, QUE LE CAPITAINE DU Y... S'EST BORNE A REPONDRE A UN QUESTIONNAIRE ECRIT ;
QUE CE CAPITAINE N'A ETE, NI PRESENT, NI REPRESENTE PAR UN MANDATAIRE DUMENT HABILITE AUX OPERATIONS D'EXPERTISE ;
MAIS ATTENDU QUE, ABSTRACTION FAITE DU MOTIF, SURABONDANT, CRITIQUE PAR LA SECONDE BRANCHE DU MOYEN, LA COUR D'APPEL A JUSTIFIE SA DECISION PAR CELA SEUL QU'ELLE A RETENU QUE, EN FAIT, LA GIRODAY - QUI, COURTIER MARITIME DE PROFESSION, REMPLISSAIT EN L'ESPECE, COMME IL A ETE DIT CI-DESSUS EN REPONSE AUX TROIS PREMIERS MOYENS, LES FONCTIONS D'AGENT ET DE MANDATAIRE DE LA CAM - A COMPLETEMENT SUIVI LES OPERATIONS D'EXPERTISE POUR Y REPRESENTER SA MANDANTE ;
QUE LE MOYEN EST MAL FONDE EN L'UNE ET L'AUTRE DE SES BRANCHES ;
SUR LE CINQUIEME MOYEN, PRIS EN SES DEUX BRANCHES : ATTENDU QU'IL EST AUSSI REPROCHE A LA COUR D'APPEL D'AVOIR RETENU, PARMI LES DOMMAGES DONT ELLE ACCORDE REPARATION A L'ARMATEUR DU PETRO-VERDON, LES FRAIS DU DEGAZAGE AUQUEL IL A ETE PROCEDE SUR CE PETROLIER, ALORS, SELON LE POURVOI, QUE LA PREUVE DU LIEN DE CAUSALITE ENTRE L'ABORDAGE ET LE DOMMAGE ALLEGUE INCOMBAIT AU DEMANDEUR A L'ACTION EN PAIEMENT DE DOMMAGES ET INTERETS ;
QUE, NI L'ARRET ATTAQUE, NI LE RAPPORT D'EXPERTISE AUQUEL IL SE REFERE NE FOURNISSENT DE REPONSE AUX CONCLUSIONS DE LA CAM FAISANT VALOIR QUE LES TRAVAUX DE DEGAZAGE EUSSENT ETE NECESSAIRES EN TOUT ETAT DE CAUSE, S'AGISSANT D'UN Z... PETROLIER QUI DEVAIT NORMALEMENT SUBIR DE TELS TRAVAUX DE NETTOYAGE, IMPOSES PAR LA NATURE DU FRET ;
MAIS ATTENDU QUE LA COUR D'APPEL, PAR REFERENCE AU RAPPORT DES EXPERTS, A D'ABORD RETENU QUE, POUR APPRECIER L'ETAT DU PETRO-VERDON APRES L'ABORDAGE, IL A ETE NECESSAIRE DE FAIRE PASSER IMMEDIATEMENT CE Z... EN CALE-SECHE, ET A ENSUITE OPERE UNE VENTILATION, SUR LE TOTAL DES FRAIS CONCERNANT LE DEGAZAGE EXECUTE APRES L'ABORDAGE, ENTRE CEUX RELEVANT DE L'EXPLOITATION NORMALE DU Z..., ET CEUX, SUPPLEMENTAIRES, EXIGES EN RAISON DES REGLES DE SECURITE APPLICABLES LORSQU'UN Z... DOIT PASSER EN CALE SECHE ;
QUE SEULE LA PART DE FRAIS INCOMBANT A CES PRECAUTIONS EXCEPTIONNELLES A ETE EN L'ESPECE MISE PAR L'ARRET A LA CHARGE DU Z... ABORDEUR ;
D'OU IL SUIT QUE LE MOYEN N'EST PAS DAVANTAGE FONDE ;
MAIS SUR LE SIXIEME MOYEN : VU L'ARTICLE 407 DU CODE DE COMMERCE, APPLICABLE EN LA CAUSE ;
ATTENDU QUE, POUR REPARER LE PREJUDICE SUBI PAR LA SOCIETE PETROMER DU FAIT DE L'ABORDAGE SUBI PAR LE PETRO-VERDON, L'ARRET ATTAQUE A CONDAMNE LA CAM A PAYER A LA COMPAGNIE PETROMER, OUTRE LA SOMME PRINCIPALE DE 395623 FRANCS, LES INTERETS DE CETTE SOMME AU TAUX LEGAL A COMPTER DU 12 JUIN 1973, DATE OU LE RAPPORT D'EXPERTISE AVAIT ETE DEPOSE ;
ATTENDU QU'EN STATUANT AINSI SANS PRECISER SI CES INTERETS AVAIENT AUSSI POUR OBJET DE REPARER UNE PARTIE DU DOMMAGE SUBI PAR LADITE COMPAGNIE PETROMER, ET ALORS QU'EN L'ESPECE L'ARRET NE SE BORNAIT PAS A DECLARER, MAIS CONSTITUAIT LA COMPAGNIE PETROMER CREANCIERE DES DOMMAGES ET INTERETS AUXQUELS ELLE EVALUAIT LE MONTANT DU PREJUDICE SUBI, LA COUR D'APPEL N'A PAS DONNE DE BASE LEGALE A SA DECISION ;
PAR CES MOTIFS : CASSE ET ANNULE, MAIS SEULEMENT DANS LES LIMITES DU SIXIEME MOYEN, L'ARRET RENDU ENTRE LES PARTIES LE 19 JANVIER 1976 PAR LA COUR D'APPEL DE BORDEAUX ;
REMET EN CONSEQUENCE, QUANT A CE, LA CAUSE ET LES PARTIES AU MEME ET SEMBLABLE ETAT OU ELLES ETAIENT AVANT LEDIT ARRET ET, POUR ETRE FAIT DROIT, LES RENVOIE DEVANT LA COUR D'APPEL D'AGEN ;