Cass. 3e civ., 21 mars 2007, n° 06-10.780
COUR DE CASSATION
Arrêt
Rejet
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Weber
Rapporteur :
M. Assié
Avocat général :
M. Guérin
Avocats :
Me Bouthors, SCP Piwnica et Molinié
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Reims, 10 octobre 2005), que la société Fineximmo, aux droits de laquelle est venue la société Sophia-GE capital (la société Sophia), propriétaire de locaux à usage commercial pris à bail par la société Champenoise de grands magasins, aux droits de laquelle se trouve la société Monoprix, lui a donné congé pour le 1er septembre 1996 avec offre de renouvellement moyennant un certain loyer ; que, par acte du 3 juin 1997, la société bailleresse, exerçant son droit d'option, a signifié à la locataire un refus de renouvellement avec offre de paiement d'une indemnité d'éviction, puis l'a assignée en fixation du montant de cette indemnité ;
Sur le moyen unique :
Attendu que la société Sophia fait grief à l'arrêt de fixer à un certain montant l'indemnité d'éviction dont elle est redevable, alors, selon le moyen :
1°/ que l'indemnité de remplacement constitue toujours le plafond de l'indemnité d'éviction ; qu'avant de se prononcer sur l'octroi de l'indemnité de déplacement due en cas du transfert de fonds de commerce, il appartient aux juges du fond de déterminer le montant de l'indemnité de remplacement qui aurait été due si le fonds de commerce avait été perdu et de vérifier que l'indemnité de déplacement reste inférieure à l'indemnité de remplacement ; que lors de cette opération de fixation de l'indemnité de remplacement, les juges du fond ne peuvent considérer que les frais de réinstallation engagés par le preneur donnent lieu à une indemnité accessoire venant s'ajouter à l'indemnité principale, puisque celle-ci a déjà pour fonction et pour objet de permettre l'acquisition d'un fonds identique comportant des aménagements semblables ; qu'en décidant l'inverse, la cour d'appel a violé l'article L. 145-14 du code de commerce, ensemble le principe de la réparation intégrale ;
2°/ que seuls les frais normaux de réinstallation peuvent être mis à la charge du bailleur qui n'a pas renouvelé le bail ; que dans l'hypothèse où, comme en l'espèce, le preneur évincé a transféré son fonds de commerce dans un local qui lui appartient, les frais de réinstallation mis à la charge de son ancien bailleur ne peuvent inclure les investissements qu'il a effectués en sa qualité de propriétaire des lieux, et qu'un simple locataire n'aurait pas eu normalement à financer ; qu'en décidant l'inverse, la cour d'appel a violé l'article L. 145-14 du code de commerce, ensemble le principe de la réparation intégrale ;
Mais attendu, d'une part, que la cour d'appel a exactement retenu que le locataire n'avait pas à supporter les frais d'une réinstallation coûteuse à proportion du degré d'amortissement des investissements qu'il abandonnait par la contrainte et qu'il convenait de tenir compte de ces frais de réinstallation pour évaluer le préjudice subi par le locataire évincé tant dans l'hypothèse du remplacement du fonds de commerce que dans celle de son déplacement ;
Attendu, d'autre part, qu'ayant relevé que les nouveaux locaux acquis par la société Monoprix pour transférer son fonds de commerce lui avaient été livrés sans aucun aménagement et qu'il était indispensable pour elle de les adapter à son activité, la cour d'appel en a déduit que la société Sophia devait supporter une partie de ces travaux d'aménagement qu'elle a souverainement fixée ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi.