Cass. com., 16 janvier 1990, n° 88-16.999
COUR DE CASSATION
Arrêt
Rejet
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Defontaine
Rapporteur :
M. Cordier
Avocat général :
M. Raynaud
Avocat :
Me Choucroy
Sur le moyen unique, pris en ses deux branches :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Versailles, 16 juin 1988), qu'ayant commandé un système informatique à la société AREI, qui n'a pas rempli ses obligations, la Mutuelle Familiale des Travailleurs d'indre-et-Loire (MFTIL) a assigné en réparation du préjudice subi la société Réalisations Etudes informatiques industrielles internationales RE 21 (société RE 21) en invoquant une mention du bon de commande signé par sa cocontractante selon laquelle en cas de défaillance de la société AREI, la société RE 21 s'engageait à assurer la continuité du contrat ainsi que la maintenance de l'équipement ;
Attendu que la société RE 21 fait grief à l'arrêt d'avoir accueilli la demande au motif qu'elle était engagée en vertu d'un mandat apparent, alors, selon le pourvoi, d'une part, qu'il ressortait des données du débat que la société AREI avait été déclaré en liquidation des biens, mesure qui n'aurait pas manqué d'être étendue à la société RE 21 si le patrimoine et les intérêts de ces deux sociétés étaient confondus ; qu'en l'absence d'une telle confusion, l'apparence d'un mandat ne pouvait être caractérisée des seuls faits qu'un document portait la raison sociale des deux sociétés et qu'elles avaient acheté en commun un élément du système informatique ; que l'arrêt a violé l'article 1998 du Code civil ; et alors, d'autre part, que la croyance du tiers à l'existence du mandataire doit être légitime, que tel n'est pas le cas lorsque l'erreur du tiers sur l'existence est grossière et résulte de sa propre négligence à vérifier les pouvoirs du mandataire ; qu'en l'espèce, l'importance de la commande, soulignée par la MFTIL elle-même, et sa qualité de professionnelle des affaires, indiscutable en dépit de sa petite taille, aurait dû inciter la
MFTIL à vérifier si la société AREI avait le pouvoir d'engager la société RE 21 ; d'où il suit qu'en retenant que la croyance de MFTIL en
l'existence d'un mandant était légitime sans s'expliquer sur cette légitimité, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision au regard de l'article 1998 du Code civil ;
Mais attendu, d'une part, qu'il ne résulte ni de ses conclusions ni de l'arrêt qu'en réponse aux écritures de la MFTIL faisant valoir "l'imbrication" des sociétés AREI et RE 21, cette dernière ait soutenu l'argumentation formulée par la première branche ; que, celui-ci, mélangé de fait et de droit, est nouveau ;
Attendu, d'autre part, que l'arrêt constate que la MFTIL avait en sa possession, à la date du contrat litigieux, un document commercial à l'en-tête de la société AREI portant en première page la mention imprimée de la raison sociale de la société RE 21 et qu'elle connaissait avant de s'engager "l'imbrication étroite" des deux sociétés tenant à la fois à l'existence de dirigeants communs et à la poursuite d'objectifs et d'investissements liés ; que la cour d'appel a fait ressortir que l'engagement litigieux, de nature subsidiaire, ne s'étendait pas à la totalité de la commande et a fait apparaître, en relevant que la MFTIL était une petite mutuelle sans service de contentieux propre, qu'elle n'était pas un professionnel averti ; qu'ayant pu déduire de ces constatations qu'elles autorisaient la MFTIL à ne pas vérifier si son cocontractant avait le pouvoir d'engager la société RE 21, la cour d'appel, qui a ainsi retenu le caractère légitime de sa croyance dans l'existence de ce pouvoir, a légalement justifié sa décision ;
D'où il suit que, irrecevable dans sa première branche, le moyen n'est pas fondé pour le surplus ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi.