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Décisions

Cass. 3e civ., 16 juin 2016, n° 15-14.906

COUR DE CASSATION

Arrêt

Rejet

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Jardel

Rapporteur :

Mme Guillaudier

Avocat général :

M. Charpenel

Avocats :

SCP Gaschignard, SCP Capron

Toulouse, du 30 juin 2014

30 juin 2014


Attendu, selon les arrêts attaqués (Toulouse, 30 juin et 17 novembre 2014), que, par convention du 16 décembre 1989, la commune d'Aulus-les-Bains (la commune) a concédé à la société Ingénierie gestion industrie commerce (la société IGIC) la construction des ouvrages nécessaires à la production d'énergie électrique et la gestion et l'exploitation de ces ouvrages pour une durée de vingt-neuf ans ; que, par acte authentique du 16 novembre 2000, la commune a vendu à la société IGIC deux parcelles sur lesquelles étaient partiellement assises les installations hydroélectriques ; que, par jugement du 23 juin 2005, le tribunal administratif a autorisé M. X..., Mme Y... et Mme Z..., contribuables de la commune, à intenter en justice, sur le fondement de l'article L. 2132-5 du code général des collectivités territoriales, l'action en nullité de la vente du 16 novembre 2000 que la commune refusait d'exercer ; que, la commune, représentée par M. X..., Mme Y... et Mme Z..., a assigné la société IGIC en nullité de l'acte de vente du 16 novembre 2000 ;

Sur le premier moyen :

Attendu que la société IGIC fait grief à l'arrêt de rejeter les exceptions d'irrecevabilité de la commune, alors, selon le moyen :

1°/ que l'autorisation que le tribunal administratif accorde, sur le fondement des dispositions de l'article L. 2132-5 du code général des collectivités territoriales, à un contribuable inscrit au rôle de la commune d'exercer les actions qu'il croit appartenir à la commune et que celle-ci, préalablement appelée à en délibérer, a refusé ou négligé d'exercer est circonscrite non seulement à l'action visée par la décision d'autorisation du tribunal administratif, mais également au moyen que le tribunal administratif a retenu, dans sa décision d'autorisation, comme justifiant l'autorisation qu'il a accordée, et ceci quelle que soit la partie de la décision d'autorisation où figure l'énoncé de l'action autorisée et du moyen retenu par le tribunal administratif comme justifiant l'autorisation accordée ; qu'en énonçant, par conséquent, pour rejeter l'exception d'irrecevabilité présentée par la société Ingénierie gestion industrie commerce, tirée de ce que, par sa décision du 23 juin 2005, le tribunal administratif de Toulouse n'avait autorisé M. Michel X..., Mme Martine Y... et Mme Bernadette Z... à exercer, au nom et pour le compte de la commune d'Aulus-les-Bains, l'action en nullité de la vente conclue, le 16 novembre 2000, entre la commune d'Aulus-les-Bains et la société Ingénierie gestion industrie commerce que pour le motif qu'une des parcelles de terrain ayant fait l'objet de cette vente faisait partie du domaine public, après avoir pourtant relevé que cette décision du tribunal administratif de Toulouse du 23 juin 2005 était motivée par l'intérêt de l'action en annulation de la vente eu égard au principe d'inaliénabilité du domaine public, que ladite décision du tribunal administratif de Toulouse du 23 juin 2005 ne contenait dans son dispositif aucune restriction relative aux moyens susceptibles d'être invoqués au soutien de la prétention, la cour d'appel a violé les dispositions de l'article L. 2132-5 du code général des collectivités territoriales ;

2°/ qu'en énonçant qu'aux termes de sa décision du 23 juin 2005, le tribunal administratif de Toulouse a expressément et inconditionnellement autorisé M. X..., Mme Y... et Mme Z... à « intenter en justice à leurs frais et risques l'action en nullité de la vente du 16 novembre 2000 que la commune d'Aulus-les-Bains refuse d'exercer », que cette autorisation de plaider au nom de la commune sur le fondement de l'article L. 2132-5 du code général des collectivités territoriales a été accordée en vue de demander la nullité de la vente litigieuse sans limitation quant aux moyens de fait ou de droit fondant cette demande » et qu'en particulier, le tribunal administratif de Toulouse n'a pas entendu circonscrire son autorisation de plaider au nom de la commune à l'usage exclusif du moyen d'annulation relatif à la domanialité publique, quand il résultait des termes clairs et précis de la décision du tribunal administratif de Toulouse du 23 juin 2005 que le tribunal administratif de Toulouse n'avait autorisé M. Michel X..., Mme Martine Y... et Mme Bernadette Z... à exercer, au nom et pour le compte de la commune d'Aulus-les-Bains, l'action en nullité de la vente conclue, le 16 novembre 2000, entre la commune d'Aulus-les-Bains et la société Ingénierie gestion industrie commerce que pour le motif qu'une des parcelles de terrain ayant fait l'objet de cette vente faisait partie du domaine public, la cour d'appel a dénaturé les termes clairs et précis de la décision du tribunal administratif de Toulouse du 23 juin 2005, en violation des dispositions de l'article 4 du code de procédure civile ;

Mais attendu que tout contribuable inscrit au rôle de la commune a le droit d'exercer, avec l'autorisation du tribunal administratif, les actions qu'il croit appartenir à la commune, et que celle-ci, préalablement appelée à en délibérer, a refusé ou négligé d'exercer ; que la cour d'appel, qui a constaté que, par décision du 23 juin 2005, le tribunal administratif avait autorisé M. X..., Mme Y... et Mme Z... à intenter en justice à leurs frais et risques l'action en nullité de la vente du 16 novembre 2000 que la commune refusait d'exercer, a pu en déduire, sans dénaturation, que leur action en annulation de l'acte de vente devant le juge judiciaire était recevable ;

D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

Sur les deuxième et troisième moyens, réunis :

Attendu que la société IGIC fait grief à l'arrêt de prononcer la nullité de l'acte de vente du 16 novembre 2000, alors, selon le moyen :

1°/ que malgré l'absence de délibération du conseil municipal, une commune peut être engagée par son maire qui a passé un contrat de droit privé au nom de celle-ci, si la croyance du tiers à l'étendue des pouvoirs du mandataire est légitime, ce caractère supposant que les circonstances autorisent le tiers à ne pas vérifier les limites exactes du pouvoir ; qu'en prononçant la nullité de l'acte authentique en date du 16 novembre 2000 portant vente des deux parcelles n° 3122 et 3124 situées sur le territoire de la commune d'Aulus-les-Bains conclue entre la commune d'Aulus-les-Bains et la société Ingénierie gestion industrie commerce, sans rechercher, ainsi qu'elle y avait été invitée par la société Ingénierie gestion industrie commerce, si la commune d'Aulus-les-Bains n'avait pas été valablement engagée par son maire par le contrat de vente conclu le 16 novembre 2000 sur le fondement du mandat apparent, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des dispositions de l'article 1998 du code civil ;

2°/ que malgré l'absence de délibération du conseil municipal, une commune peut être engagée par son maire qui a passé un contrat de droit privé au nom de celle-ci, si la croyance du tiers à l'étendue des pouvoirs du mandataire est légitime, ce caractère supposant que les circonstances autorisent le tiers à ne pas vérifier les limites exactes du pouvoir ; qu'en énonçant le contraire, pour prononcer la nullité de l'acte authentique en date du 16 novembre 2000 portant vente des deux parcelles n° 3122 et 3124 situées sur le territoire de la commune d'Aulus-les-Bains conclue entre la commune d'Aulus-les-Bains et la société Ingénierie gestion industrie commerce, la cour d'appel a violé les dispositions de l'article 1998 du code civil ;

3°/ qu'en prononçant la nullité de l'acte authentique en date du 16 novembre 2000 portant vente des deux parcelles n° 3122 et 3124 situées sur le territoire de la commune d'Aulus-les-Bains conclue entre la commune d'Aulus-les-Bains et la société Ingénierie gestion industrie commerce, sans rechercher, ainsi qu'elle y avait été invitée par la société Ingénierie gestion industrie commerce, si la commune d'Aulus-les-Bains n'avait pas décidé de vendre, au prix prévu par le contrat de vente du 16 novembre 2000, les terrains litigieux par la délibération de son conseil municipal du 12 novembre 1999, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des dispositions de l'article 1108 et de l'article L. 2122-21 du code général des collectivités territoriales, dans sa rédaction applicable à la cause ;

Mais attendu qu'ayant constaté que, par jugement du tribunal administratif du 8 janvier 2010, la délibération du conseil municipal du 20 février 2000 décidant la vente de parcelles à la société IGIC avait été déclarée nulle et de nul effet, la cour d'appel, qui n'était pas tenue de suivre les parties dans le détail de leur argumentation, ni de rechercher si la commune n'avait pas été engagée par le maire, la théorie du mandat apparent n'étant pas applicable, a pu en déduire que la commune n'avait pas consenti à la vente et que l'acte authentique de vente devait être annulé ;

D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi.