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Décisions

Cass. soc., 6 juin 2012, n° 10-28.345

COUR DE CASSATION

Arrêt

Rejet

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Lacabarats

Rapporteur :

M. Contamine

Avocat général :

M. Lalande

Avocats :

Me Blondel, SCP Gadiou et Chevallier

Paris, du 25 mars 2010

25 mars 2010

Sur le moyen unique :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 25 mars 2010), que Mme X..., engagée par la société Sogep en qualité d'aide-comptable à partir du 1er février 1985, a été licenciée pour faute grave par lettre du 28 août 2006 ;

Attendu que la salariée fait grief à l'arrêt de dire son licenciement fondé sur une faute grave et de la débouter de l'ensemble de ses demandes alors, selon le moyen :

1°/ qu'aux termes des l'article L. 1152-1, L. 1152-2 et L. 1152-3 du code du travail aucun salarié ne peut être sanctionné, licencié notamment pour avoir subi ou refusé de subir des agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation des conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel ; qu'après avoir relevé qu'il n'est nullement inconcevable que la salariée ait pu être effectivement victime, fût-ce sur quelques semaines seulement, de faits ayant pu caractériser une situation de harcèlement moral, la cour n'a pu légalement retenir à l'encontre de ladite salariée en l'état de cette donnée une faute grave justifiant un licenciement sans préciser ce qu'il en était de la période de harcèlement moral et ce d'autant que la salariée a connu une longue période d'arrêt de maladie et qu'un mois après avoir repris elle eut une rechute puis fut licenciée ; qu'ainsi l'arrêt n'est pas légalement justifié au regard de l'article précité, ensemble de l'article L. 1234-1 du code du travail ;

2°/ qu'en toute hypothèse ainsi qu'en avait jugé les premiers juges la salariée qui avait 21 ans d'ancienneté au sein de la structure n'avait fait qu'exprimer un ressentiment au regard du comportement de M. Y... à son endroit et était de plus confrontée à des instructions différentes voire contradictoires, de ce dernier et de M. Z... qui était susceptible de causer à la salariée un trouble légitime dans la perception qu'elle pouvait avoir des tâches qu'elle devait accomplir en sorte que dans un tel contexte la salariée n'avait fait qu'exprimer par écrit, certes de façon maladroite, une incompréhension étant de plus observé que le courrier du 12 juillet 2006 constituait la réponse que la salariée a faite à un courrier du 3 juillet 2006 de M. A... ; qu'en ayant demandé à la cour de confirmer le jugement sur le motif de la rupture et donc en ne tenant pas compte de ces données convergentes tout en relevant qu'il n'est nullement inconcevable que la salariée ait pu être effectivement victime – fût-ce sur quelques semaines – de faits ayant pu caractériser une situation de harcèlement moral et qu'il est également plausible que la salariée, habituée à un mode d'exercice de ses fonctions depuis quelques 21 ans, ait été en proie à des difficultés personnelles en étant confrontée à son retour d'un long arrêt de maladie à un nouvel interlocuteur, en la personne de M. Y... et aux méthodes de ménagement distinctes mises en oeuvre par celui-ci, la cour qui retient dans un tel contexte une faute grave à l'encontre de la salariée résultant de propos prétendument calomnieux tenus à l'égard de M. Y... avec dépôt d'une main courante au commissariat et une attitude non conforme aux pratiques de la société, ne justifie pas légalement son arrêt au regard des textes cités au précédent élément de moyen ;

3°/ que la cour n'a pu sans se contredire relever qu'il n'est nullement inconcevable que la salariée ait été effectivement victime fût-ce sur quelques semaines seulement, de faits ayant pu caractériser une situation de harcèlement moral et relever par ailleurs que la salariée n'a pu caractériser une situation de harcèlement moral ce qui révèle une méconnaissance des exigences de l'article 455 du code de procédure civile ;

4°/ que la cour n'a pu également sans se contredire à nouveau constater à la page 4 de son arrêt qu'il n'est nullement inconcevable que la salariée ait pu être effectivement victime, fût-ce quelques semaines seulement, de faits ayant pu caractériser une situation de harcèlement moral et affirmer par la suite pour retenir une faute grave que la dénonciation de tels faits susceptibles de caractériser un harcèlement moral, faits inexistants, ne consiste en effet jamais qu'en autant d'accusations mensongères, voire calomnieuses, de harcèlement moral, ayant revêtu une particulière gravité et n'ayant donc pu être légitimement portées avec une telle légèreté, voire désinvolture, tant elles étaient effectivement, par leur nature, susceptibles de nuire à leur destinataire, M. Y..., à l'encontre duquel elles étaient formulées ; qu'en retenant de tels motifs radicalement inconciliables la cour méconnait de plus fort ce que postule l'article 455 du code de procédure civile ;

5°/ qu'après avoir constaté que le licenciement de la salariée loin d'être sans cause réelle et sérieuse, voire entaché de nullité, pour n'être prétendument intervenu qu'en réaction à la dénonciation effectuée de bonne foi par la salariée d'une situation de harcèlement moral dont elle aurait été ou se serait même légitimement cru victime –- se fût-elle alors éventuellement méprise et l'existence d'une telle situation de harcèlement n'eut-elle point été finalement consacrée -, repose sur une faute grave ayant comme telle rendu impossible la poursuite de la relation de travail, y compris pendant la durée, même limitée du préavis, la méprise de la salariée était nécessairement exclusive de bonne foi cependant que la salariée avait 21 ans d'ancienneté et était confrontée à des ordres et contrordres après qu'une longue maladie l'ait écartée de l'entreprise et lors de son retour qui n'a duré que quelques semaines, si bien qu'en statuant comme elle l'a fait par une motivation insuffisante, inopérante et contradictoire, la cour ne justifie pas légalement son arrêt au regard des articles L. 1152-1, L. 1152-3 et L. 1234-1 du code du travail ;

Mais attendu que constatant que la salariée avait dénoncé de façon mensongère des faits inexistants de harcèlement moral dans le but de déstabiliser l'entreprise et de se débarrasser du cadre responsable du département comptable, la cour d'appel, caractérisant la mauvaise foi de la salariée au moment de la dénonciation des faits de harcèlement, a pu par ce seul motif décider que ces agissements rendaient impossible son maintien dans l'entreprise et constituaient une faute grave ; que le moyen n'est pas fondé ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi.