Cass. com., 18 décembre 2012, n° 11-16.224
COUR DE CASSATION
Arrêt
Cassation
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Espel
Avocats :
SCP Gadiou et Chevallier, SCP Waquet, Farge et Hazan
Sur le moyen unique, pris en ses première et deuxième branches :
Vu les articles 1992 et 1999 du code civil ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que la société Kontinent 6 a chargé la société Moiroud, commissionnaire en douane, du dédouanement de briquets rechargeables importés de la République populaire de Chine ; que la société Moiroud a confié l'accomplissement des formalités de dédouanement à un autre commissionnaire en douane, la société Tramar ; qu'à la suite d'un contrôle a posterori, l'administration des douanes a constaté que ces importations, réalisées en septembre 1999 et en janvier 2000, auraient dû acquitter les droits antidumping prévus par le règlement CE n° 192/1999 du 25 janvier 1999, la facture ayant été émise par un opérateur établi à Hong-Kong, territoire douanier distinct de celui de la République populaire de Chine au regard de la législation communautaire ; que la société Tramar et ses assureurs ont fait assigner la société Moiroud afin d'obtenir le remboursement des sommes qu'elle a été condamnée à payer à l'administration des douanes au titre des droits éludés ;
Attendu que pour condamner la société Moiroud à payer aux assureurs de la société Tramar une certaine somme, l'arrêt retient que si, par application du l'article 201 du code des douanes communautaire, le commissionnaire en douane est redevable avec l'importateur du paiement de la dette douanière résultant des déclarations souscrites par son intermédiaire, cette règle douanière est sans effet sur les règles de nature civile devant s'appliquer entre mandataire et mandant , que selon l'article 1999 du code civil, le mandant doit rembourser au mandataire les avances et frais que celui-ci a faits pour l'exécution du mandat , qu'en l'espèce, la société Moiroud, ne disposant pas de crédit d'enlèvement auprès de la recette des douanes du Havre, a donné mandat à un autre commissionnaire en douane, la société Tramar, d'accomplir les formalités de dédouanement , que ces formalités ont été effectuées sur instructions de la société Moiroud qui s'était ainsi simplement substitué un commissionnaire exécutant chargé de "faire les opérations de douane pour son compte", que cette société ne saurait faire valoir qu'elle n'a joué qu'un simple rôle d'agent de transmission, au mépris de ses obligations professionnelles, étant parfaitement au courant, pour avoir organisé le transport en qualité de commissionnaire de transport, que l'expéditeur était une société établie à Hong-Kong , qu'elle n'a pas attiré l'attention de son mandataire, la société Kontinent 6, sur le fait que la mention de Hong-Kong était susceptible de relever d'un régime douanier différent de celui de la République populaire de Chine d'où avait été effectuée l'expédition par voie maritime sans escale de Shanghai au Havre, que le mandat confié par la société Moiroud à la société Tramar consistait à faire les diligences nécessaires au dédouanement des marchandises et que cette dernière n'était pas tenue au titre de son devoir de conseil de suggérer à l'importateur, donneur d'ordre indirect, d'apporter des modifications aux documents de la marchandise, en l'espèce à la facture originale que l'importateur avait fait établir par un agent à Hong-Kong pour des raisons qui lui étaient propres, alors qu'elle n'était pas en relation directe avec cet importateur mais avec la société Moiroud qui n'avait elle-même détecté aucun problème dans l'opération de dédouanement envisagée ;
Attendu qu'en statuant ainsi, alors qu'un commissionnaire en douane, en sa qualité de mandataire salarié spécialisé, doit veiller à ce que la déclaration qu'il effectue soit conforme à la réglementation douanière en vigueur et, le cas échéant, conseiller à son mandant, quand bien même celui-ci serait également agréé en qualité de commissionnaire en douane et aurait-il manqué à ses propres obligations, de faire modifier un document afin que l'importateur puisse bénéficier d'un avantage prévu par cette réglementation, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs :
CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 2 septembre 2010, entre les parties, par la cour d'appel de Versailles ; remet en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Versailles autrement composée.