Cass. 3e civ., 8 juillet 1969, n° 67-14.166
COUR DE CASSATION
Arrêt
Rejet
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. De Montera
Avocat général :
M. Tunc
Avocats :
Me Tetreau, Me Martin-Martiniere
SUR LE PREMIER MOYEN PRIS EN SES DEUX BRANCHES :
ATTENDU QU'IL RESULTE DE L'ARRET INFIRMATIF ATTAQUE (BORDEAUX, 10 JUILLET 1967) QUE LA SOCIETE LEGLISE ET CIE, LOCATAIRE DE LOCAUX COMMERCIAUX QUI LUI AVAIENT ETE LOUES PAR LA DAME PHILIPPE Y..., PROPRIETAIRE, FUT MIS EN FAILLITE LE 10 AVRIL 1961 ET RECUT CONGE LE 13 JUILLET 1961 POUR PRENDRE EFFET LE 13 JANVIER 1962, AUX MOTIFS QU'AUCUN COMMERCE N'ETAIT PLUS EXERCE DANS LES LIEUX ET QU'EN OUTRE, IL ETAIT PRATIQUE DES SOUS-LOCATIONS INTERDITES PAR UNE CLAUSE DU BAIL ;
QUE, LE 13 FEVRIER 1964, LA PROPRIETAIRE SOMMAIT LES SYNDICS DE LA FAILLITE, BAUFUME ET DELPECH, DE REPRENDRE L'EXPLOITATION DU COMMERCE DANS LE DELAI D'UN MOIS, ET CE, EN APPLICATION DE L'ARTICLE 9 DU DECRET DU 30 SEPTEMBRE 1963 ;
QUE PAR ACTE DU 26 MARS 1964, LA SOCIETE LEGLISE ET CIE PROCEDAIT A LA CESSION DU FONDS DE COMMERCE ET DU DROIT AU BAIL EN FAVEUR DE LA SOCIETE GLAUDONNE ;
QUE LA COUR D'APPEL DECIDE QUE CETTE CESSION N'EST PAS OPPOSABLE A LA DAME Y..., PARCE QU'ELLE EST INTERVENUE APRES LA DATE D'EXPIRATION DE LA LOCATION, VALIDE LE CONGE ET DECLARE QUE LA SOCIETE LEGLISE N'A PAS DROIT AU RENOUVELLEMENT DU BAIL, ENFIN, CONDAMNE CETTE SOCIETE A VERSER UNE INDEMNITE D'OCCUPATION DE 8.000 FRANCS PAR AN A PARTIR DU 13 JANVIER 1962 ;
ATTENDU QU'IL EST REPROCHE A LA COUR D'APPEL D'AVOIR REFUSE LE DROIT AU RENOUVELLEMENT DU BAIL A LA SOCIETE LEGLISE ET CIE, AU MOTIF QU'ELLE AVAIT VIOLE DES CLAUSES DU BAIL EN PRATIQUANT DES SOUS-LOCATIONS, ALORS, SELON LE POURVOI, QUE D'UNE PART, LA MISE DES CHAIS A LA DISPOSITION D'UN TIERS N'ETAIT PAS UNE SOUS-LOCATION MAIS L'EXERCICE NORMAL DE LA PROFESSION EN VUE DE LAQUELLE LE BAIL AVAIT ETE CONSENTI, ET QUE, D'AUTRE PART ET SUBSIDIAIREMENT, IL S'AGIT D'UNE SOUS-LOCATION ET CETTE INFRACTION NE PEUT ETRE INVOQUEE QUE SI ELLE S'EST POURSUIVIE OU RENOUVELEE PLUS D'UN MOIS APRES LA MISE EN DEMEURE DU BAILLEUR D'AVOIR A LA FAIRE CESSER ;
MAIS ATTENDU D'ABORD QUE DES FAITS DE LA CAUSE, SOUVERAINEMENT APPRECIES, LA COUR D'APPEL A PU DEDUIRE QUE LE CONTRAT D'ENTREPOSAGE, TEL QUE PRATIQUE PAR LA SUSDITE SOCIETE, EN FAVEUR D'UN TIERS PAYANT UNE REDEVANCE, EQUIVAUT A UNE SOUS-LOCATION, ALORS QUE CELLE-CI ETAIT INTERDITE TANT PAR LE BAIL QUE PAR LA LOI ;
QU'EN SECOND LIEU, IL NE RESSORT PAS DES CONCLUSIONS D'APPEL REGULIEREMENT PRODUITES, QUE LADITE SOCIETE AIT SOULEVE LE MOYEN DE LA SECONDE BRANCHE RELATIF A L'APPLICATION DE L'ARTICLE 9 DU DECRET DU 30 SEPTEMBRE 1953 ;
QUE LE MOYEN, MAL FONDE EN SA PREMIERE BRANCHE, EST IRRECEVABLE COMME NOUVEAU EN SA SECONDE, MELANGEE DE FAIT ET DE DROIT ;
SUR LE DEUXIEME MOYEN PRIS EN SES DEUX BRANCHES :
ATTENDU QU'IL EST AUSSI FAIT GRIEF A L'ARRET D'AVOIR RETENU QUE LA SOCIETE GLAUDONNE N'AVAIT PU ACQUERIR LE DROIT AU BAIL, CELUI-CI AYANT PRIS FIN LE 13 JUILLET 1961 PAR L'EFFET DU CONGE, ALORS, D'APRES LES DEMANDEURS EN CASSATION, QUE CE CONGE ETAIT NUL COMME N'AYANT PAS ETE PRECEDE D'UNE MISE EN DEMEURE ET QUE SURTOUT EN SIGNIFIANT A LA SOCIETE CEDANTE LE 13 FEVRIER 1964 UNE MISE EN DEMEURE ET EN RAPPELANT DANS CETTE MISE EN DEMEURE QUE LE BAIL S'ETAIT CONTINUE PAR TACITE RECONDUCTION, LA BAILLERESSE MANIFESTAIT BIEN SON INTENTION DE RENONCER AUDIT CONGE ;
MAIS ATTENDU QUE, D'UNE PART, LE PROPRIETAIRE, AU RISQUE DE PAYER UNE INDEMNITE D'EVICTION, PEUT DONNER CONGE A UN LOCATAIRE COMMERCANT, MEME SI CELUI-CI N'A PAS COMMIS D'INFRACTION DE NATURE A LUI FAIRE PERDRE LE DROIT A RENOUVELLEMENT ;
QUE, D'AUTRE PART, LES JUGES D'APPEL ONT RETENU QUE LA MISE EN DEMEURE DU 13 FEVRIER 1964 NE COMPORTE AUCUNEMENT RENONCIATION AU CONGE, NI RECONNAISSANCE D'UNE TACITE RECONDUCTION POSTERIEURE A CE CONGE ET ONT DECLARE, PAR UNE INTERPRETATION SOUVERAINE DE LA PORTEE DE CET EXPLOIT, QU'IL "SERAIT ABSURDE" DE LUI FAIRE DIRE LE CONTRAIRE PUISQUE CET ACTE AVAIT POUR OBJET DE "CONFIRMER ET DE RENFORCER LES EFFETS DU CONGE" ;
QUE LE MOYEN N'EST DONC FONDE EN AUCUNE DE SES BRANCHES ;
SUR LE TROISIEME MOYEN :
ATTENDU QUE LES DEMANDEURS AU POURVOI FONT ENCORE REPROCHE A L'ARRET D'AVOIR FIXE A 8.000 FRANCS LE MONTANT DE L'INDEMNITE D'OCCUPATION EN TENANT COMPTE DES OPERATIONS DE SOUS-LOCATIONS DES CUVES, QUALIFIEES "D'ILLICITES ET DE REPREHENSIBLES", ALORS QUE, "SI L'INDEMNITE D'OCCUPATION DE DROIT COMMUN SE DISTINGUE DE L'INDEMNITE D'OCCUPATION DE L'ARTICLE 20 DU DECRET DU 30 SEPTEMBRE 1953 PAR SON CARACTERE INDEMNITAIRE, ELLE NE PEUT PAS REVETIR UN CARACTERE PUNITIF", ET SURTOUT "QUE LES SYNDICS, EN EFFECTUANT UNE OPERATION DANS LE CADRE DE L'OBJET DE L'ACTIVITE DE L'ENTREPRISE, N'ONT FAIT QUE POURSUIVRE L'EXPLOITATION DANS L'INTERET DE LA MASSE ET N'ONT, PAR CONSEQUENT, COMMIS AUCUNE INFRACTION" ;
MAIS ATTENDU QUE C'EST EN LA PLENITUDE DE LEUR POUVOIR QU'APRES AVOIR RELEVE QUE LA LEGISLATION DES BAUX COMMERCIAUX A POUR OBJET "DE PROTEGER LES FONDS DE COMMERCE ET NON PAS DE PERMETTRE DES SPECULATIONS PAR LE MOYEN DE SOUS-LOCATION PROHIBEES OU DE CONVENTIONS ASSIMILABLES A DES SOUS-LOCATIONS, SURTOUT COMME C'EST LE CAS, LORSQUE DE TELLES OPERATIONS SONT FAITE DANS LE CADRE DE L'ADMINISTRATION D'UNE FAILLITE ET ALORS QU'ELLES SONT LA CONSEQUENCE D'UNE CESSATION DE L'EXPLOITATION DU FONDS SANS LAQUELLE LES CUVES SOUS-LOUEES A LA SOCIETE ESCHENAUER N'AURAIENT PAS ETE LIBEREES...", LES JUGES D'APPEL ONT APPRECIE LE MONTANT DE L'INDEMNITE D'OCCUPATION EN CONSIDERATION DES CIRCONSTANCES DE L'ESPECE, SELON LA VALEUR DE DIVERS ELEMENTS DE FAIT ECHAPPANT AU CONTROLE DE LA COUR DE CASSATION, NOTAMMENT PARCE QUE LE PRIX DU LOYER ETAIT RESTE LE MEME (5.700 F) DEPUIS AVRIL 1958 ;
QU'IL S'EN SUIT QUE LE MOYEN N'EST FONDE EN AUCUN DE SES GRIEFS ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE LE POURVOI FORME CONTRE L'ARRET RENDU LE 10 JUILLET 1967 PAR LA COUR D'APPEL DE BORDEAUX.