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Décisions

Cass. 3e civ., 23 novembre 2011, n° 10-25.493

COUR DE CASSATION

Arrêt

Cassation

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Terrier

Avocats :

SCP Boré et Salve de Bruneton, SCP Potier de La Varde et Buk-Lament

Angers, du 24 févr. 2010

24 février 2010


Sur le premier moyen :

Vu l'article L. 145-28 du code de commerce ;

Attendu qu'aucun locataire pouvant prétendre à une indemnité d'éviction ne peut être obligé de quitter les lieux avant de l'avoir reçue ; que jusqu'au paiement de cette indemnité, il a droit au maintien dans les lieux aux conditions et clauses du contrat de bail expiré ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué, (Angers, 24 février 2010) que la SCI La Trouvillaise, propriétaire de locaux donnés à bail à la société Restaurant du Port, dans l'incapacité de régler à cette dernière l'indemnité d'éviction qu'elle lui avait offerte, a été placée en redressement judiciaire par jugement du 15 décembre 2006 ; qu'elle, et M. X..., ès qualités de commissaire à l'exécution du plan d'apurement de cette société, ont assigné M. Y..., avocat, et l'assureur de ce dernier, la société Covea Risks, en réparation du préjudice causé par différentes fautes professionnelles ; que la SCI La Trouvillaise reprochait notamment à M. Y... de n'avoir pas, après un commandement de payer des loyers et indemnité d'occupation, notifié le 10 septembre 1996 à la locataire qui se maintenait dans les lieux dans l'attente du paiement de l'indemnité d'éviction, assigné cette dernière aux fins de la résiliation du bail ce qui aurait entraîné la déchéance du droit au paiement de l'indemnité d'éviction ;

Attendu que pour limiter à une certaine somme la réparation du préjudice subi par la SCI La Trouvillaise, l'arrêt retient que la bailleresse ayant, en mai 1994, refusé le renouvellement du bail et offert le paiement d'une indemnité d'éviction et s'étant abstenue d'exercer le droit de repentir avant que la locataire ne quitte les locaux en juillet 1998, la faute commise par M. Y..., qui n'a pas poursuivi la résiliation du bail par suite du commandement de payer des loyers et indemnités d'occupation notifié le 10 septembre 1996, est demeurée sans conséquence, une telle action ne pouvant avoir pour effet d'exonérer la bailleresse de l'obligation de régler l'indemnité d'éviction dont le principe était acquis ;

Qu'en statuant ainsi, alors que la faute du locataire, qui se maintient dans les lieux aux clauses et conditions du bail expiré dans l'attente du paiement de l'indemnité d'éviction, peut être sanctionnée par la résiliation du bail et entraîner la déchéance du droit au paiement de l'indemnité d'éviction, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;

PAR CES MOTIFS, sans qu'il y ait lieu de statuer sur le second moyen :

CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 24 février 2010, entre les parties, par la cour d'appel d'Angers ; remet en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit les renvoie devant la cour d'appel de Rennes.