Cass. soc., 18 mai 2005, n° 03-41.799
COUR DE CASSATION
Arrêt
Rejet
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Chagny
Sur le moyen unique :
Attendu que M. X..., salarié depuis 1986 de la société Lehec, a été désigné au mois d'octobre 1991 en qualité d'administrateur et de président du conseil d'administration d'une société Normagri, constituée par le personnel de la société Lehec et cessionnaire du fonds de cette dernière, après son placement en liquidation judiciaire, prononcée le 13 septembre 1991 ; que le 6 avril 2000, il a conclu une promesse de cession de la majorité des actions qu'il détenait dans la société Normagri, cet accord prévoyant la démission de ses mandats sociaux, puis son engagement en qualité de directeur salarié, avant une nouvelle désignation comme mandataire social ; qu'une assemblée générale ayant accepté sa démission des mandats sociaux le 22 mai 2000, M. X... a été aussitôt engagé comme directeur salarié, puis nommé administrateur le 20 juin 2000 ; qu'il a été licencié le 20 octobre 2000, pour fautes graves ;
Attendu que M. X... fait grief à l'arrêt attaqué (Caen, 14 février 2003) de l'avoir débouté de ses demandes fondées sur l'existence et la rupture d'un contrat de travail, alors, selon le moyen :
1 / qu'en s'abstenant de rechercher si la conclusion du contrat de travail, le 22 mai 2000, était antérieure ou postérieure à la tenue de l'assemblée générale de la société Normagri, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 225-44, L. 225-45, L. 225-46, L. 225-47 et L. 225-53 du Code de commerce ;
2 / qu'est valable le contrat de travail conclu entre une société anonyme et une personne qui n'a plus la qualité d'administrateur de cette société à la date où le contrat prend effet, de sorte qu'en décidant que le contrat conclu par M. X... le 22 mai 2000 était nul comme concomitant à la démission de ses fonctions d'administrateur, sans rechercher, comme elle y était expressément invitée, la date à laquelle le contrat de travail devait prendre effet, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des dispositions susvisées ;
3 / que rien n'interdit à un directeur salarié, anciennement administrateur, d'être nommé, à nouveau, administrateur, après un changement d'actionnariat provoquant un renouvellement du conseil d'administration et de cumuler ainsi un mandat d'administrateur avec un contrat de travail correspondant à un emploi effectif, de sorte qu'en considérant que l'éventualité d'une nouvelle nomination de M. X... en qualité d'administrateur au sein du nouveau conseil d'administration de la société, après son embauche en qualité de directeur salarié, prévu dans l'acte du 6 avril 2000, caractérisait une fraude aux dispositions de l'article L. 225-22 du Code de commerce, sans même s'interroger sur le caractère effectif de l'emploi occupé dans le cadre du contrat de travail, et, par conséquent, sur l'intérêt à la fraude, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de ces dispositions, ensemble des dispositions susvisées ;
Mais attendu que l'appréciation de l'existence d'une fraude relève du pouvoir souverain des juges du fond ;
Et attendu que la cour d'appel, qui a constaté que, conformément aux prévisions d'une convention conclue alors qu'il exerçait un mandat social, M. X... avait démissionné de ce mandat pour être aussitôt engagé comme salarié, puis être à nouveau désigné en qualité d'administrateur de la société Normagri, a ainsi caractérisé une fraude aux dispositions de l'article L. 225-22 du Code de commerce ; qu'elle a, par ce seul motif et abstraction faite des motifs critiqués dans les deux premières branches du moyen et qui sont surabondants, légalement justifié sa décision ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi.