Livv
Décisions

Cass. 1re civ., 13 avril 2023, n° 22-16.060

COUR DE CASSATION

Arrêt

Cassation

PARTIES

Défendeur :

Crédit logement (SA)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Chauvin

Rapporteur :

Mme Dumas

Avocat général :

M. Salomon

Avocats :

SARL Cabinet Briard, SARL Matuchansky, Poupot et Valdelièvre

Aix-en-Provence, ch. 1-9, du 27 janv. 20…

27 janvier 2022

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 27 janvier 2022), la société Crédit commercial de France (la banque) a consenti à M. [W] et à Mme [V], son épouse, un prêt garanti par le cautionnement solidaire de la société Crédit logement (la caution).

2. M. [W] ayant été placé en liquidation judiciaire, la banque a déclaré sa créance au passif, prononcé la déchéance du terme et assigné Mme [V] en paiement du solde. Un jugement réputé contradictoire du 20 février 2003, signifié le 28 mars 2003, a accueilli sa demande.

3. La caution, qui a réglé à la banque une première somme, selon quittance subrogatoire du 26 novembre 2002, et une seconde somme le 15 juillet 2003, a engagé une procédure de saisie des rémunérations de Mme [V] en se prévalant de la quittance subrogatoire et du jugement du 20 février 2003.

4. Mme [V] a saisi un tribunal d'instance en mainlevée de la saisie et en restitution des sommes perçues en invoquant l'absence de titre exécutoire.

Examen du moyen

Enoncé du moyen

5. Mme [W] fait grief à l'arrêt de confirmer le jugement ayant rejeté ses demandes, alors « que la subrogation transmet, à la date du paiement qu'elle implique et dans la mesure de la somme ainsi versée, la créance et ses accessoires au subrogé ; que pour débouter Mme [W], qui faisait valoir le défaut de titre exécutoire, de ses demandes tendant à obtenir la mainlevée de la saisie de ses rémunérations et la restitution des sommes prélevées, l'arrêt retient que le jugement du tribunal de grande instance d'Aix-en-Provence du 20 février 2003, signifié le 28 mars 2003, constitue un titre de créance exécutoire au profit de la banque qui, n'ayant pas été remis en cause en temps utile, est aujourd'hui définitif, de sorte que la caution qui n'avait pas été associée au débat judiciaire à l'époque, est, "par l'effet d'une subrogation légale dans laquelle la chronologie des paiements n'a pas lieu d'être invoquée, [...] en tant que subrogataire, à même d'exercer les droits et actions du subrogé qu'il a désintéressé au titre d'une créance titrée en justice" ; qu'en statuant ainsi quand, à la date du premier paiement partiel avec subrogation, intervenu le 26 novembre 2002 à hauteur de 153 536,82 euros, la société Crédit commercial de France ne pouvait transmettre à la caution subrogée un titre dont elle n'était pas encore titulaire, le jugement invoqué n'ayant été rendu en faveur du subrogeant que le 20 février 2003, la cour d'appel a violé l'article 2029 du code civil dans sa version antérieure à l'ordonnance n° 2006-346 du 23 mars 2006 relative aux sûretés applicable en la cause, ensemble les articles 1251 et 1252 du même code, dans leur version antérieure, respectivement, à la loi n° 2006-728 du 23 juin 2006 portant réforme des successions et des libéralités et à l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016 portant réforme du droit des contrats, du régime général et de la preuve des obligations. »

Réponse de la Cour

Vu les articles 1251 du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de la loi n° 2006-728 du 23 juin 2006, et 2029 du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance n° 2006-346 du 23 mars 2006 :

6. Selon le premier de ces textes, la subrogation a lieu de plein droit au profit de celui qui, étant tenu avec d'autres au paiement de la dette, avait intérêt de l'acquitter.

7. Selon le second, la caution qui a payé la dette est subrogée à tous les droits qu'avait le créancier contre le débiteur.

8. Il en résulte que la subrogation investit le subrogé de la créance primitive, avec tous ses avantages et accessoires existant à la date du paiement.

9. Pour rejeter la demande en mainlevée de la saisie, l'arrêt retient que le jugement du 20 février 2003 signifié le 28 mars 2003 constitue un titre de créance exécutoire au profit de la banque, qui ne l'a pas remis en cause en temps utile, de sorte que la caution, qui n'avait pas été associée au débat judiciaire, par l'effet d'une subrogation légale dans laquelle la chronologie des paiements n'a pas lieu d'être invoquée, est, sur le fondement de l'article 2309 du code civil, à même d'exercer les droits et actions du subrogeant qu'elle a désintéressé au titre d'une créance titrée en justice.

10. En statuant ainsi, alors qu'elle constatait que le premier paiement subrogatoire avait eu lieu antérieurement au prononcé du jugement constitutif du titre exécutoire dont la caution se prévalait, de sorte qu'il ne pouvait avoir eu pour effet d'investir le subrogé du bénéfice de ce titre, la cour d'appel a violé les textes susvisés.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 27 janvier 2022, entre les parties, par la cour d'appel d'Aix-en-Provence ;

Remet l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel d'Aix-en-Provence autrement composée.