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Décisions

Cass. 1re civ., 19 mars 1996, n° 94-14.934

COUR DE CASSATION

Arrêt

Rejet

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Lemontey

Rapporteur :

M. Chartier

Avocat général :

M. Sainte-Rose

Avocats :

Me Guinard, Me Hémery

Dijon, du 17 févr. 1994

17 février 1994

Sur le moyen unique, pris en ses deux branches :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Dijon, 17 février 1994) que, par un contrat du 21 juillet 1990, les époux X... ont autorisé la société GP Finance (la société), notamment à exécuter de sa propre initiative, pour leur compte, des opérations de souscription, achat, vente, de valeurs mobilières et titres assimilés ; que, le 17 décembre 1990, à l'époque de la " guerre du Golfe ", M. X... a donné des instructions à la société de vendre certains titres, instructions qu'elle a exécutées ;

Attendu que les époux X... font grief à l'arrêt de les avoir déboutés de leur demande en paiement de dommages-intérêts à la suite de la vente à laquelle il a été procédé en exécution de ces instructions, alors, selon le moyen, que, d'une part, dans le cadre d'un mandat de gestion de portefeuille conférant au mandataire toute liberté pour l'achat et la vente de valeurs mobilières, celui-ci n'est pas tenu de suivre les instructions de son client et il doit s'en abstenir lorsque ces indications sont contraires aux intérêts de celui-ci, et qu'en décidant cependant que la société, qui bénéficiait d'un mandat lui attribuant toute liberté pour gérer le capital que les époux X... lui avaient confié, était tenue d'exécuter l'ordre de vente que ceux-ci lui avaient donné, alors même que cet ordre était contraire à leurs intérêts, la cour d'appel a violé les articles 1991 et 1992 du Code civil ; alors que, d'autre part, le mandataire professionnel qui reçoit un ordre de bourse est tenu d'une obligation de conseil envers son mandant, et qu'en décidant néanmoins que la société, à laquelle les époux X... avaient donné un ordre de vente de valeurs mobilières, devait l'exécuter sans même conseiller ses clients sur son opportunité, la cour d'appel a violé les articles 1991 et 1992 du Code civil ;

Mais attendu qu'en sa première branche, le moyen est nouveau, et que, mélangé de fait et de droit, il est irrecevable ;

Et attendu que la cour d'appel relève que la vente des titres résulte d'un ordre manuscrit, que les termes clairs et précis de cette lettre ne permettaient pas au mandataire de se dérober à l'exécution des instructions reçues, ni même de les discuter avec son mandant, l'urgence étant soulignée par l'emploi, à deux reprises, de la locution adverbiale " au plus tôt ", que M. X... a pris soin, le même jour, de rédiger deux autres lettres à l'adresse d'organismes concernés par ses ordres " comme s'il craignait que (le représentant de la société) ne manifeste une réticence à exécuter ses instructions ", et qu'en matière boursière et particulièrement en cas de conflit armé, tout retard dans l'exécution des ordres réguliers donnés par un mandataire à son mandant peut avoir des conséquences financières graves ; que de ces constatations et énonciations, elle a pu déduire que la société n'a commis aucune faute de nature à engager sa responsabilité à raison des pertes des époux X... ;

D'où il suit que le moyen, pour partie irrecevable, n'est pas fondé pour le surplus ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi.