CA Paris, 16e ch. a, 15 septembre 2004, n° 03/14206
PARIS
Arrêt
Confirmation
PARTIES
Demandeur :
Ritz Hôtel
Défendeur :
Banque SEPAH
La Cour statue sur l'appel interjeté par la société THE RITZ HOTEL d'un jugement du Tribunal de Grande Instance de Paris en date du 10 juin 2003 qui a :
- débouté la société BANQUE SEPAH de sa demande tendant à voir constater que le renouvellement du bail lui est acquis et qu'un bail s'est formé à compter du 1er janvier 1999 en suite de l'offre notifiée par la société CREDIT FONCIER de FRANCE en date du 29 juin 1998,
- rejeté l'exception d'irrecevabilité présentée par la société THE RITZ HOTEL et déclaré recevable la demande subsidiaire en indemnité d'éviction formée par la société BANQUE SEPAH,
- mis hors de cause la société CREDIT FONCIER de FRANCE,
- fixé à 1 107 126,40 € l'indemnité d'éviction due par la société THE RITZ HOTEL à la société BANQUE SEPAH sous réserve, quant aux frais de réinstallation, de la situation comptable exacte au jour du payement de l'indemnité d'éviction, somme à laquelle seront ajouter, sur justificatifs, les frais de licenciement qui seront à la charge de la société locataire,
- fixé à la somme annuelle de 262 004,52 € en principal, avec indexation annuelle sur l'indice INSEE du coût de la construction, l'indemnité d'occupation due par la société BANQUE SEPAH depuis le 1er janvier 1999 jusqu'à la libération effective des lieux dans les conditions fixées par les articles L 145-29 à L 145-30 du Code de commerce,
- dit que cette somme portera intérêts au taux légal à compter du 1er janvier 1999 et capitalisation des intérêts par application des dispositions de l'article 1154 du Code civil
- prononcé la compensation entre les sommes dues de part et d'autre,
- débouté les parties de leurs demandes plus amples ou contraires,
- dit n'y avoir lieu à application des dispositions de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile,
- fait masse des dépens et dit qu'ils seront supportés par moitié par les parties,
- dit n'y avoir lieu à exécution provisoire.
Les faits et la procédure peuvent être résumés comme suit :
Suivant acte notarié en date du 23 décembre 1982, la société CREDIT FONCIER de FRANCE (CFF), a donné à bail à la société BANQUE SEPAH divers locaux lui appartenant, sis à Paris 1er, 17 place Vendôme, pour une durée de 9 ans commençant à courir le 1er janvier 1981. Ce bail a été renouvelé, à effet du 1er janvier 1990, par acte sous seing privé du 2 juillet 1990.
Par acte extrajudiciaire du 29 juin 1998, le CFF a donné congé à la société BANQUE SEPAH avec offre de renouvellement à compter du 1er janvier 1999, moyennant un loyer annuel de 1 500 000 F en principal.
Par acte du 25 novembre 1998, le CFF a notifié à sa locataire la rétractation de son offre de renouvellement et a offert le payement d'une indemnité d'éviction, en application de l'article 31 du décret du 30 septembre 1953, devenu l'article L 145-57 du Code de commerce.
Par acte authentique du 4 février 1999, le CFF a vendu l'immeuble à la société THE RITZ HOTEL LIMITED (la société THE RITZ HOTEL).
A la requête de la société THE RITZ HOTEL M. Moreau, expert, a été désigné par ordonnance de référé du 4 mai 1999, aux fins d'évaluation de l'indemnité d'éviction éventuellement due. Il a déposé son rapport le 18 avril 2000.
La société BANQUE SEPAH a, par acte du 26 juin 2000, assigné la société THE RITZ HOTEL, à titre principal pour demander que soit constaté le renouvellement de son bail, subsidiairement pour avoir payement d'une indemnité d'éviction. Par jugement du 12 février 2002, le tribunal a ordonné la réouverture des débats, en ordonnant, notamment, la mise en cause de la société CREDIT FONCIER de FRANCE. Cette société a été assignée par acte du 25 mars 2002.
C'est dans ces circonstances qu'est intervenu le jugement dont appel.
La société THE RITZ HOTEL, appelante, demande à la cour, par conclusions du 27 avril 2004, de confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a débouté la société BANQUE SEPAH de sa demande tendant à voir constater que le renouvellement du bail lui est acquis et qu'un bail s'est formé à compter du 1er janvier 1999 et mis hors de cause le CREDIT FONCIER de FRANCE, d'infirmer le jugement pour le surplus et de :
Vu le jugement du 12 février 2002,
Vu le congé avec offre de renouvellement notifié par le Crédit Foncier de France à la société BANQUE SEPAH le 29 juin 1998,
Vu la notification du droit d'option faite par acte d'huissier du 25 novembre 1998 par le Crédit Foncier à la société BANQUE SEPAH,
- déclarer irrecevable la demande subsidiaire en indemnité d'éviction présentée par la société BANQUE SEPAH à la société THE RITZ HOTEL,
- constater que la société BANQUE SEPAH est forclose, en tout cas prescrite pour demander une indemnité d'éviction,
- constater en conséquence que la société BANQUE SEPAH est occupante sans droit ni titre des locaux devenus la propriété de la société THE RITZ HOTEL,
- prononcer l'expulsion de la société BANQUE SEPAH,
- fixer l'indemnité d'occupation due par la société BANQUE SEPAH à compter du 1er janvier 1999 à la somme de 294 971,07 € par an, outre indexation annuelle sur l'indice INSEE du coût de la construction et la condamner à verser cette somme en deniers ou quittances, avec intérêts au taux légal à compter du 1er janvier 1999 et capitalisation,
Subsidiairement, si la Cour croyait pouvoir reconnaître un droit direct à indemnité d'éviction au profit de la société BANQUE SEPAH contre la société THE RITZ HOTEL :
- dire que cette indemnité d'éviction ne peut inclure que les postes “indemnité principale, frais d'intermédiaire et de rédaction d'acte, déménagement et réinstallation, agencement et aménagement non amortis, trouble commercial“ pour un montant total de 451 980,77 €
- dire qu'il y a lieu de fixer en cette hypothèse l'indemnité d'éviction à 273 478,05 € sous réserve de production de justificatifs pour l'éventuelle quote part d'agencement et immobilisation non amortis à la libération des locaux et d'éventuels frais de licenciement
- prononcer la compensation entre les sommes dues de part et d'autre
- condamner la société BANQUE SEPAH au payement de la somme 10 000 € au titre de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile.
La société BANQUE SEPAH, intimée, prie la Cour, par conclusions du 20 novembre 2003, de confirmer le jugement entrepris en ses dispositions favorables à la société BANQUE SEPAH et l'infirmant pour le surplus :
- constater que le renouvellement du bail est acquis à la société BANQUE SEPAH et qu'un nouveau bail s'est formé à compter du 1er janvier 1999 en suite de l'offre notifiée par le Crédit Foncier de France le 29 juin 1998,
- dire qu'à défaut de conclusion d'un nouveau bail, le jugement à intervenir vaudra bail,
Subsidiairement,
- condamner la société THE RITZ HOTEL à payer à la société BANQUE SEPAH la somme de 7 056 544,85 € à titre d'indemnité d'éviction avec intérêts au taux légal à compter de l'acte introductif d'instance, outre les éventuels frais de licenciement, sur justificatifs,
- fixer l'indemnité d'occupation à 228 673,55 € et subsidiairement à 262 059,85 €,
Plus subsidiairement,
- condamner la société THE RITZ HOTEL à payer à la société BANQUE SEPAH la somme de 2 029 248,85 € à titre d'indemnité d'éviction avec intérêts au taux légal à compter de l'acte introductif d'instance, outre les éventuels frais de licenciement, sur justificatifs,
- dire qu'à cette somme s'ajouteront deux semaines de salaires, traitements et charges sociales soit 335 695,71 € et condamner la société THE RITZ HOTEL à payer ce montant à la société BANQUE SEPAH,
- fixer l'indemnité d'occupation à 228 673,55 € et subsidiairement à 262 059,85 €,
En tout hypothèse,
- condamner la société THE RITZ HOTEL aux dépens et à payer à la société BANQUE SEPAH la somme de 7 622 € au titre de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile,
SUR CE LA COUR
Sur la demande de constatation du renouvellement du bail
Considérant que pour soutenir que le renouvellement du bail lui est acquis, la société BANQUE SEPAH soutient que la bailleresse a perdu son droit d'option dès lors que la locataire a accepté non seulement le principe du renouvellement mais également le loyer proposé, ainsi qu'il résulte des pièces produites soit l'établissement de factures de loyers et de quittances pour les années 1998 à 2000 et le premier trimestre 2001, émises par le CCF puis la société THE RITZ HOTEL, jusqu'à ce que cette dernière, pour des raison de pure opportunité, émette une facture d'indemnité d'occupation (2ème trimestre 2001), dont la société BANQUE SEPAH a dénoncé la qualification par lettre recommandée du 11 avril 2001 ; que la société BANQUE SEPAH ajoute que la jurisprudence reconnaît plein effet juridique à l'émission de factures suivie de quittances ;
Mais considérant que le droit d'option, prévu par l'article L 145-57 du Code de commerce, peut être exercé par le bailleur tant que le preneur n'a pas accepté à la fois le principe du renouvellement et le prix proposé ;
Qu'en l'espèce, le congé avec offre de renouvellement a été notifié le 29 juin 1998 et rétracté le 25 novembre 1998, le CCF exerçant alors son droit d'option en refusant le renouvellement et offrant une indemnité d'éviction ; qu'entre ces deux dates, la société BANQUE SEPAH n'a manifesté ni expressément, ni tacitement et de manière non équivoque, son acceptation du principe du renouvellement du bail, et encore moins du nouveau loyer proposé ; qu'elle s'est bornée à régler les échéances de loyer au montant stipulé dans le bail venu à expiration ; que, de la délivrance des quittances correspondantes durant cette période ne peut dès lors être tiré aucun argument quant à l'acceptation par la société preneuse des conditions financières du bail renouvelé ; que la délivrance des quittances durant la période postérieure au 25 novembre 1998 est sans incidence, dès lors d'une part que le droit d'option avait été régulièrement exercé et avait produit ses effets en rétractant l'offre de renouvellement du bail, d'autre part que ces quittances, délivrées pour un loyer du montant du bail antérieur, ne pouvaient manifester un accord des parties sur le prix d'un nouveau bail porté, selon le congé initialement délivré, à 1 500 000 F en principal ;
Qu'en conséquence la demande de la société BANQUE SEPAH en constatation du renouvellement du bail en peut qu'être écartée ;
Sur la recevabilité de la demande d'indemnité d'éviction
Considérant que pour conclure à l'irrecevabilité de la demande d'indemnité d'éviction formée subsidiairement par la société BANQUE SEPAH, la société THE RITZ HOTEL après avoir rappelé que c'est le CFF, précédent propriétaire, qui a délivré congé avec offre de renouvellement puis rétracté ce congé, invoque la jurisprudence de la Cour de cassation en vertu de laquelle le débiteur de l'indemnité d'éviction est l'auteur du congé, propriétaire de l'immeuble à la date de sa délivrance ; que le fait que dans l'acte de vente de l'immeuble la société THE RITZ HOTEL s'est engagée à prendre à sa charge le payement de l'indemnité d'éviction ne constitue pas une dérogation aux règles de droit régissant la matière ; qu'en effet d'une part l'acte en question ne peut, en application de l'article 1165 du Code civil, être source de droits ou d'obligations pour la société BANQUE SEPAH, qui y est tiers ; que d'autre part, l'obligation figurant dans l'acte de vente avait pour unique objet de permettre au CFF de demander à la société THE RITZ HOTEL le remboursement des sommes éventuellement dues au titre de l'indemnité d'éviction et ne donnait pas à la société BANQUE SEPAH la faculté d'actionner directement la société THE RITZ HOTEL ; que l'appelante ajoute qu'elle ne s'est aucunement reconnue débitrice d'une indemnité d'éviction en mettant en oeuvre une procédure de référé expertise aux fins d'évaluation de cette indemnité ; qu'il s'agissait uniquement d'une démarche exploratoire émanant d'un agent économique raisonnable eu égard à son engagement de décharger le CFF du payement de cette indemnité si les conditions d'exigibilité en étaient remplies ; qu'en conséquence, la société BANQUE SEPAH s'étant abstenue de saisir le tribunal d'une demande de fixation d'une indemnité d'éviction à l'encontre du CFF dans le délai de deux ans à compter de la date d'effet du congé, soit le 31 décembre 1998, est forclose, l'assignation n'ayant été délivrée qu'à la société THE RITZ HOTEL ;
Mais considérant que, s'il est vrai que, de jurisprudence constante, l'indemnité d'éviction reste en principe à la charge du vendeur de l'immeuble donné a bail qui a refusé le renouvellement avant la vente, il existe en l'espèce dans l'acte de vente conclu entre le Crédit foncier de France et la société THE RITZ HOTEL le 4 février 1999 une stipulation ainsi libellée : “Etant précisé qu'un congé avec offre de renouvellement suivi d'une dénonciation de cette offre ont été signifiés à la société BANQUE SEPAH à la demande du Crédit Foncier de France. Qu'à la suite une procédure a été intentée par le locataire. M. Klein au nom de THE RITZ HOTEL LIMITED déclare avoir parfaite connaissance de ces location et procédure dont les éléments lui ont été remis dès avant ce jour par le VENDEUR et déclare, ès-qualités, en faire son affaire personnelle déchargeant le vendeur de toutes les conséquences financières ; notamment L'ACQUÉREUR s'oblige à prendre à sa charge le payement de l'indemnité d'éviction ainsi que les frais et honoraires de cette procédure“ ;
Considérant qu'une telle clause s'analyse en une délégation imparfaite de payement par laquelle le CFF (délégant) a transmis à la société THE RITZ HOTEL (délégué) la charge du payement de l'indemnité d'éviction due à la société BANQUE SEPAH ; qu'une telle stipulation autorise le preneur, délégataire, à réclamer le payement de l'indemnité qui y est visée à la société THE RITZ HOTEL, acquéreur de l'immeuble, sans être tenue de s'adresser au CFF vendeur et sans que puisse lui être opposée la règle de l'effet relatif des conventions ;
Qu'il convient de retenir en outre, comme l'a, à juste titre, relevé le tribunal, qu'en prenant l'initiative, de faire désigner en référé un expert aux fins d'évaluer l'indemnité d'éviction et en déclarant, dans l'assignation délivrée à cette fin le 12 avril 1999, venir aux “droits et obligations du Crédit Foncier de France“, la société THE RITZ HOTEL s'est reconnue personnellement débitrice de l'indemnité d'éviction ; qu'il ne peut être sérieusement soutenu que cette demande était purement “exploratoire“ et conditionnée à la reconnaissance préalable du droit à indemnité d'éviction ; qu'en effet l'indemnité d'éviction ayant été offerte lors de la rétractation du congé initial et aucune cause de déchéance du droit à cette indemnité, dont la preuve incombe au bailleur, n'ayant jamais été invoquée par quiconque à aucun moment, la société THE RITZ HOTEL n'ignorait pas, lors de l'introduction de la demande d'expertise, que le principe de l'indemnité d'éviction était acquis ; que dans l'hypothèse contraire elle n'aurait pas, en tant “qu'agent économique raisonnable“, pris l'initiative d'engager cette procédure et d'exposer les frais d'une mesure d'instruction ;
Considérant enfin qu'aucune forclusion ne peut être invoquée en l'espèce ; que dans l'acte rétractant l'offre de renouvellement, le CFF alors propriétaire a offert le payement d'une indemnité d'éviction ; que la forclusion édictée par l'article L. 145-9 du Code de commerce ne concerne pas le refus de renouvellement avec offre d'indemnité d'éviction ; qu'en toute hypothèse, l'action, qui est recevable à l'encontre de la société THE RITZ HOTEL, a été engagée le 26 juin 2000 dans le délai de deux ans à compter du 25 novembre 1998, date de la notification du refus de renouvellement ;
Que, par ces motifs se substituant partiellement à ceux des premiers juges, il y a lieu de confirmer le jugement en ce qu'il a déclaré recevable la demande de la société BANQUE SEPAH dirigée contre la société THE RITZ HOTEL ;
Sur l'indemnité d'éviction
Considérant que la Cour se réfère au jugement entrepris pour la description des locaux et le rappel des clauses du bail, ces points ne faisant pas l'objet de contestations ;
Considérant qu'il n'est pas discuté que l'éviction n'entraîne pas la disparition du fonds de commerce de la société BANQUE SEPAH, qui est transférable ;
Indemnité principale
Considérant que les parties ne discutent pas le principe d'évaluation de cette indemnité principale à la rente égale à la différence entre la valeur locative de marché et leur valeur locative judiciaire ;
Considérant que pour soutenir que cette indemnité s'établit, selon l'expertise amiable Dacher, à la somme de 2 896 531,35 €, la société BANQUE SEPAH demande que l'ensemble des locaux soit appréhendé sans distinction entre la partie bureaux et la partie boutique et ajoute qu'il ne peut être jugé que le loyer aurait été déplafonné alors que le bail a une destination permettant l'exercice d'autres activités que celle de banque ;
Que de son côté la société THE RITZ HOTEL fait valoir que les règles de détermination du prix prévues notamment par l'article 23-5 du décret du 30 septembre 1953 se référant “aux pris couramment pratiqués dans le voisinage“ implique que les prix de bureaux soient les prix de marché ; que la valeur locative judiciaire pour la partie boutique, compte tenu d'une référence fournie pour une boutique située 25 place Vendôme et du fait que cette valeur s'est appréciée de 5 % entre janvier 1998 et janvier 1999, doit être évaluée à 12 600 F le m2 ; qu'en ce qui concerne la partie bureaux la valeur locative judiciaire ne saurait subir une décote, par rapport à la valeur locative de marché telle que chiffrée par l'expert Moreau, supérieure à 15 %, soit 3 825 F/m2 ;
Mais considérant d'une part que l'expert judiciaire a distingué, sans que les parties le critiquent sur ce point, les surfaces afférentes à l'entrée, au hall d'accueil et au hall de réception, qu'il a assimilées à des m2 boutiques et le surplus des surfaces correspondant à des m2 de bureaux ; que la prétention de la société BANQUE SEPAH à voir évaluer l'ensemble des surfaces comme bureaux ne peut être accueillie en ce qu'elle ne correspond pas à la réalité des locaux telle que constatée par l'expert et en ce qu'elle supposerait que la pondération ait été effectuée de manière homogène en m2 bureaux, ce qui n'est pas le cas en l'espèce eu égard à la méthode mixte adoptée par lui ; qu'il convient donc de retenir une surface pondérée de 95,6 m2 boutique et de 247,14 m2 bureaux ;
Considérant d'autre part que l'usage exclusif de bureaux s'apprécie au regard de la destination contractuelle des lieux ; que celle-ci est en l'espèce ainsi définie “toutes opérations de banque, d'escomptes, de commissions, de cautions, d'avances, de crédit en particulier par l'acceptation d'effet ; toutes opérations financières, commerciales, mobilières et immobilières ; toutes opérations de prises d'intérêt et de participation dans toutes affaires commerciales, bancaires, financières, industrielles, mobilières et immobilières et ce sous toutes formes et notamment par la constitution et la gestion d'un portefeuille de titre ou valeurs de toutes sortes françaises ou étrangères ; toutes études, interventions et prestations de service, se rattachant aux activités ci-dessus, la souscription, le placement, la vente de tous titres de toutes nature ; l'utilisation, l'achat, la location d'immeubles“ ;
Que tant l'activité de banque que toutes les autres activités de transactions immobilières, financières et commerciales énumérées par la clause précitée sont essentiellement d'ordre comptable, administratif ou juridique et s'exercent dans des locaux à usage de bureaux sans être affectées par la réception de clients ; qu'il en résulte que la règle du plafonnement aurait nécessairement été écartée pour la détermination du prix du bail en renouvellement ;
Considérant que la valeur locative de marché, estimée par l'expert à 15 000 F/m2 boutique et 4 500 F/m2 bureaux, n'est pas critiquée ;
Que tenant compte de ce que la valeur locative judiciaire est arbitrée à partir des références de marché et de références judiciaires, des termes de comparaison fournis par l'expert judiciaire, de l'exceptionnelle situation des locaux et de leur parfaite adaptation à leur destination, les premiers juges ont justement fixé cette valeur à 11 250 F/m2 boutique et 3 375 F/m2 de bureaux ;
Que, s'agissant du coefficient de situation, le coefficient 6, proposé par la société THE RITZ HOTEL est manifestement insuffisant au regard de la qualité de l'emplacement des locaux ; que le jugement doit être confirmé en ce qu'il a retenu le coefficient de situation de 9, qui rend compte à la fois de l'emplacement exceptionnel et des caractéristiques de la façade avec entrée en partie aveugle ;
Que l'indemnité principale s'établit en conséquence à 5 728 797 F ou 873 349,47 € ;
Indemnités accessoires
Considérant qu'au titre de l'indemnité de remploi, incluant les droits fiscaux, les frais de rédaction d'acte et les frais d'intermédiaire, la société THE RITZ HOTEL conteste l'évaluation expertale quant au coût de la rédaction d'acte et à l'éventualité des droits de mutation à payer, estimant que le marché locatif parisien permet la signature d'un bail neuf, non soumis à un droit d'enregistrement ; qu'étant observé que ce poste ne peut être évalué avec une précision parfaite tant que le locataire n'a pas effectivement pris à bail de nouveaux locaux, il y a lieu, conformément à l'usage, d'évaluer ce chef de préjudice sur la base d'un pourcentage de l'indemnité principale, qui compte tenu de la baisse des frais fiscaux, sera fixé à 8 % de l'indemnité principale soit 69 867,96 € ;
Considérant que le jugement sera confirmé en ce qu'il a fixé l'indemnité pour frais de déménagement à la somme de 15 244,90 €, telle que suggérée par l'expert, en l'absence de toute pièce permettant de modérer ou d'augmenter cette indemnité comme le demandent respectivement la société THE RITZ HOTEL et la société BANQUE SEPAH ;
Considérant qu'à juste titre le tribunal a calculé l'indemnité au titre des frais de réinstallation sur la base de la quote-part des agencements et aménagements non amortis au 31 décembre 1998, soit 55 423,91 € au 31 décembre 1998 et précisé qu'il y aurait lieu à réajustement comptable au jour du payement de l'indemnité d'éviction ;
Considérant que la société BANQUE SEPAH persiste à solliciter en cause d'appel l'allocation d'une indemnité de 20 000 000 F au titre du trouble commercial, sur la base d'une étude qui, sans fournir aucune justification méthodologique, insiste sur la “perte d'image“ résultant de la perte de l'adresse prestigieuse de l'établissement parisien ; que ce préjudice, ainsi défini, est purement hypothétique, partant du présupposé que les locaux de remplacement ne pourront remplir, en terme d'image, la fonction de ceux dont la banque SEPAH est évincée ; qu'en revanche il est constant que le déplacement du fonds entraîne nécessairement un trouble d'exploitation dont l'expert a chiffré le coût en fonction d'une perte sur salaires, justement fixée par le premier juge à 1 mois du montant annuel des salaires et charges soit 367 003,25 F ou 55 949,28 € ; qu'à cette somme il convient d'ajouter les frais de changement d'adresse, correspondance et publicité, tels que retenus par l'expert Moreau ; que l'indemnité totale pour trouble commercial s'établit dès lors à 71 194,19 € ;
Considérant que l'indemnité d'éviction s'établit en conséquence à la somme totale de 1 085 080,30 €, sous réserve de réajustement comptable en ce qui concerne les frais de réinstallation, outre les éventuels frais de licenciement sur justificatifs ;
Sur l'indemnité d'occupation
Considérant qu'il convient de confirmer le jugement en ce qu'il a retenu une indemnité d'occupation, due à compter de la date d'effet du congé jusqu'à la libération effective des lieux, qui correspond à la valeur locative telle qu'évaluée ci-dessus affectée d'un coefficient de précarité de 10 %, soit 262 004,52 € par an ;
Considérant en conséquence que le jugement entrepris sera confirmé en toutes ses dispositions, sauf en ce qui concerne le quantum de l'indemnité d'éviction ramené à la somme totale de 1 085 080,30 €, sous les réserves mentionnées supra ;
Considérant que l'équité ne commande de faire application des dispositions de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile au bénéfice de l'une ou l'autre partie ;
Que chacune des parties succombant partiellement en ses prétentions conservera la charge des dépens par elle exposés en cause d'appel ;
Par ces motifs, se substituant partiellement à ceux des premiers juges,
Statuant publiquement et contradictoirement ;
Confirme en toutes ses dispositions le jugement entrepris, sauf en ce qui concerne le quantum de l'indemnité d'éviction ramené à la somme de 1 085 080,30 € ;
Dit n'y avoir lieu à faire application des dispositions de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile ;
Dit que chaque partie conservera la charge des dépens par elle exposés en cause d'appel.