Cass. soc., 30 mars 2011, n° 09-68.909
COUR DE CASSATION
Arrêt
Rejet
Attendu, selon les arrêts attaqués, que M. X..., engagé le 21 février 1989 en qualité de chef du service de boyauderie par la société Sica Cinq, après convocation à entretien préalable à un licenciement le 6 septembre 2000, a été licencié pour faute grave le 20 septembre suivant ; que le 3 juillet 2001, la société Sica Cinq a été absorbée par la société Charal, fusion-absorption publiée au registre du commerce et des sociétés de Metz le 7 septembre suivant tandis que le 12 juillet 2001, M. X... assignait son employeur devant la juridiction prudhomale;
Sur le premier moyen :
Attendu que le salarié fait grief au premier des arrêts de déclarer recevable l'appel formé par la société Charal le 31 août 2005 à l'encontre du jugement prudhomal du 1er septembre 2003, alors, selon le moyen, que la fusion absorption entraîne la dissolution sans liquidation de la société absorbée et la transmission universelle de son patrimoine à la société absorbante ; que la notification du jugement de première instance rendu à l'encontre de la société absorbée, faite au nom de la société absorbée, au lieu de son ancien siège social devenu l'un des établissements de la société absorbante est régulièrement faite à cette dernière en sa qualité d'ayant droit universel et est de nature à faire courir le délai d'appel à l'encontre de la société absorbante ; qu'en décidant que l'appel formé le 31 août 2005 à l'encontre du jugement du 1er septembre 2003 par la société Charal n'était pas tardif alors pourtant qu'elle avait constaté que la notification du jugement a été faite le 2 septembre 2003 au lieu de l'un des établissements de la société Charal, anciennement siège social de la société Sica Cinq, et que la signature de l'avis de réception émanait d'un employé de la société Charal, ce dont il s'évinçait que cette dernière avait eu connaissance de la décision, du délai d'appel et des modalités de l'appel, la cour d'appel a violé les articles 528, 538, 677 et 690 du code de procédure civile et R. 1454-26 du code du travail, ensemble l'article L. 236-3 du code de commerce ;
Mais attendu que l'arrêt constate, d'une part, que la notification du jugement a été faite à une société après disparition de sa personnalité morale consécutive à la publication de sa dissolution au registre du commerce et des sociétés de sorte que nulle, elle ne peut produire aucun effet, d'autre part, l'absence de toute notification à la société absorbante seule dotée de personnalité morale ; qu'il en déduit exactement que le délai d'appel n'a pas commencé à courir, peu important que les premiers juges n'aient pas été avisés de la modification de la situation juridique de ladite société ; que le moyen n'est pas fondé ;
Sur le deuxième moyen :
Attendu que le salarié fait grief à l'arrêt du 10 novembre 2008 d'infirmer le jugement et de le débouter de ses demandes indemnitaires pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, alors, selon le moyen :
1°/ que la charge de la preuve de la faute grave pèse sur l'employeur ; qu'en exigeant qu'il rapporte la preuve de ce que ses absences à compter du 4 septembre 2000 avaient été provoquées par l'employeur, la cour d'appel a inversé la charge de la preuve de la faute grave, en violation des articles L. 1234-1, L. 1234-5 et L. 1234-9 du code du travail ;
2°/ que ne constitue pas une faute grave le fait pour un salarié justifiant de plus de dix ans d'ancienneté et n'ayant jamais été sanctionné antérieurement à son licenciement, de se trouver en absence injustifiée depuis moins de trois jours ; qu'en décidant le contraire, la cour d'appel a violé les articles L. 1234-1, L. 1234-5 et L. 1234-9 du code du travail ;
Mais attendu que l'arrêt retient que bien que dûment prévenu d'avoir à se présenter en septembre 2000 à 5h30 pour prendre son service, le salarié n'a pas obtempéré ni justifié de son allégation selon laquelle il en aurait été dispensé le 2 septembre ni davantage déféré à réception de la lettre de convocation à l'entretien préalable ; que la cour d'appel a pu, sans inverser la charge de la preuve, décider que l'insubordination et l'abandon de son poste par le salarié rendaient impossible son maintien dans l'entreprise et constituaient une faute grave ; que le moyen n'est pas fondé ;
Mais sur le troisième moyen :
Vu l'article L. 3171-4 du code du travail ;
Attendu que pour débouter le salarié de sa demande en paiement d'heures supplémentaires et congés payés afférents, l'arrêt retient que les deux attestations du salarié non suffisamment circonstanciées ne sont pas de nature à étayer sa demande ;
Attendu cependant qu'en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail accomplies, il appartient au salarié d'étayer sa demande par la production d'éléments suffisamment précis quant aux horaires effectivement réalisés pour permettre à l'employeur de répondre en fournissant ses propres éléments ;
Qu'en statuant comme elle a fait, sans examiner les décomptes produits par le salarié au soutien de sa demande, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi en tant que dirigé contre l'arrêt de la cour d'appel de Metz du 21 janvier 2008 ;
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a débouté le salarié de sa demande au titre des heures supplémentaires et congés payés afférents, l'arrêt rendu le 10 novembre 2008, entre les parties, par la cour d'appel de Metz ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Nancy ;
Condamne les sociétés Charal et Sica Cinq aux dépens ;
Vu l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, condamne les sociétés Charal et Sica Cinq à payer à la SCP Masse-Dessen et Thouvenin la somme de 2 500 euros à charge pour cette dernière de renoncer à percevoir l'indemnité prévue par l'Etat ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ; (RG : 08/00898)
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du trente mars deux mille onze.