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Décisions

Cass. com., 9 novembre 1987, n° 86-11.989

COUR DE CASSATION

Arrêt

Rejet

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Baudoin

Rapporteur :

M. Hatoux

Avocat général :

M. Cochard

Avocats :

Me Choucroy, SCP Lyon-Caen, Fabiani et Liard

Paris, du 11 déc. 1985

11 décembre 1985

Attendu, selon l'arrêt déféré (Paris, 11 décembre 1985), que la société les Etablissements Laurent (société Laurent) a chargé la société Amoros, commissionnaire de transport, des opérations de transport et de dédouanement de marchandises importées par elle, et que la société Amoros a demandé à la société SNTC Tramar (société Tramar), commissionnaire en douane, d'effectuer les opérations de dédouanement ; que la société Amoros ayant été mise en liquidation des biens, la société Tramar, qui n'avait pas été payée par la société Amoros, a demandé à la société Laurent le remboursement des sommes qu'elle avait acquittées pour son compte ; .

Sur le premier moyen :

Attendu qu'il est fait grief à l'arrêt d'avoir accueilli la demande de la société Tramar au motif que cette société disposait, en qualité de mandataire substitué, d'une action directe et personnelle contre la société Laurent, alors, selon le pourvoi, que l'action directe dont dispose le sous-mandataire à l'encontre du mandant est une action directe imparfaite, qui n'entraîne une immobilisation de la créance du mandataire intermédiaire sur le mandant qu'à compter de son exercice ; qu'en l'espèce, le mandant ayant payé de bonne foi les factures que lui présentait son mandataire, avant que le sous-mandataire n'exerce son action directe, la cour d'appel ne pouvait pas faire droit à cette action sans violer les articles 1165 et 1994 du Code civil ;

Mais attendu que l'arrêt a retenu à bon droit que la société Laurent, mandant, ne pouvait opposer à la société Tramar, mandataire substitué, les paiements faits par elle à la société Amoros, sa mandataire, même si ces paiements étaient antérieurs à l'exercice par la société Tramar des droits propres qu'elle tenait des dispositions du second alinéa de l'article 1994 du code civil ; que le moyen n'est pas fondé ;

Sur le deuxième moyen, pris en ses quatre branches :

Attendu qu'il est encore fait grief à l'arrêt d'avoir statué ainsi qu'il l'a fait, au motif que la société Laurent avait tacitement autorisé la substitution de mandataire, alors, selon le pourvoi, que, d'une part, la substitution de mandat stricto sensu, qui s'analyse en une cession du contrat de mandat, suppose l'agrément clair et non équivoque du sous-mandataire par le mandant ; qu'en se bornant, en l'espèce, à relever que le mandant n'ignorait ni la nécessité pour son mandataire d'avoir recours aux services d'un tiers, ni l'identité de ce tiers, ce qui impliquait seulement que le mandant ne s'opposait pas à ce que son mandataire ait recours à l'aide d'une tierce personne pour exécuter les obligations de son mandat, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 1165 et 1994 du Code civil, alors que, d'autre part, la substitution de mandat stricto sensu suppose également la volonté du sous-mandataire de se substituer au mandataire intermédiaire, c'est-à-dire la volonté de se comporter, en connaissance de cause, comme le mandataire du mandant originaire ; qu'en ne recherchant pas si, en l'espèce, cet élément ne faisait pas défaut dès lors que, ainsi que les premiers juges l'avaient relevé, d'un côté, la société Tramar avait toujours facturé son intervention et les droits de douane à la seule société Amoros, d'un autre côté, que cette dernière avait réglé une partie de ces factures à la société Tramar, et que l'arrêt attaqué relève lui-même que la société Tramar n'avait agi contre la société Laurent que lorsqu'elle avait eu " la quasi-certitude de ne pas être payée par la société Amoros ", la cour d'appel a encore privé sa décision de base légale au regard des articles susvisés, alors que, de troisième part, la substitution de mandat suppose la volonté du mandataire originaire de laisser des liens directs s'instaurer entre le mandant et un tiers ; qu'en ne recherchant pas si, en l'espèce, cet élément ne faisait pas défaut, dès lors que la société Amoros avait constamment réclamé paiement à la société Laurent des avances et frais de la société Tramar et avait, elle, réglé, pour partie, cette société pour ses diligences, la cour d'appel a encore privé sa décision de base légale au regard des articles susvisés et alors qu'enfin, la cour d'appel ne pouvait, sans se contredire et méconnaître, en conséquence, les dispositions de l'article 455 du nouveau Code de procédure civile, retenir, d'un côté, que le mandant avait tacitement autorisé la substitution de la société Tramar, d'un autre côté, qu'il avait payé de bonne foi entre les mains de la société Amoros ;

Mais attendu que l'action directe du mandataire substitué contre le mandant peut être exercée dans tous les cas, que la substitution ait été, ou non, autorisée par le mandant ; que dès lors, le moyen critique des motifs surabondants et se trouve donc inopérant ;

Sur le troisième moyen :

Attendu qu'il est aussi fait grief à l'arrêt d'avoir décidé que la société Laurent ne pouvait opposer à la société Tramar les paiements qu'elle avait faits à la société Amoros, alors, selon le pourvoi, qu'à supposer même que, par l'effet d'une prétendue substitution, la société Tramar soit devenue directement créancière de la société Laurent, la cour d'appel devait vérifier si, comme l'avaient retenu les premiers juges, et ainsi que la société Laurent le faisait valoir, en facturant toujours son intervention et les droits de douane avancés à la société Amoros, et en y ajoutant les documents douaniers, la société Tramar n'avait pas habilité cette dernière à recevoir paiement en son nom et pour son compte de la société Laurent ; qu'ainsi, en ne recherchant pas si, dans ces circonstances, les paiements effectués de bonne foi par la société Laurent n'étaient pas valables et libératoires, comme faits à quelqu'un ayant pouvoir du créancier, la cour d'appel a privé sa décision de toute base légale au regard de l'article 1239 du Code civil et a entaché sa décision d'un défaut de motif, en méconnaissance de l'article 455 du nouveau Code de procédure civile ;

Mais attendu que la cour d'appel a constaté que la société Laurent avait donné mandat d'effectuer les opérations de dédouanement à la société Amoros qui s'était substituée la société Tramar dans l'exécution de ce mandat et en a déduit que leurs rapports étaient régis par la disposition de l'article 1994 du Code civil dont il résultait une action directe et personnelle du mandataire substitué contre le mandant ; qu'en l'état de ces constatations et énonciations, la cour d'appel a répondu aux conclusions invoquées et a légalement justifié sa décision sur le chef critiqué ; que le moyen n'est pas fondé ;

Sur la demande présentée au titre de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile :

Attendu que la société Tramar sollicite l'allocation d'une somme de 8 000 francs par application de ce texte ;

Mais attendu que cette demande a été présentée après l'expiration du délai prévu à l'article 982 du nouveau Code de procédure civile ; qu'elle est dès lors irrecevable ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Déclare IRRECEVABLE la demande présentée sur le fondement de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile.