Cass. soc., 23 septembre 2015, n° 14-16.170
COUR DE CASSATION
Arrêt
Cassation
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Mallard
Avocats :
Me Le Prado, SCP Rocheteau et Uzan-Sarano
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. X... a été engagé par la société Le Messager, absorbée par la société Adrexo le 16 novembre 2014, en qualité de distributeur d'imprimés publicitaires et de journaux gratuits ; qu'il a saisi la juridiction prud'homale de diverses demandes relatives à l'exécution et à la rupture du contrat de travail ;
Sur le premier moyen du pourvoi principal du salarié :
Vu l'article 4 du code de procédure civile ;
Attendu que pour débouter le salarié de sa demande de dommages et intérêts pour défaut de visite médicale périodique l'arrêt retient que dans ses dernières écritures, le salarié ne demande plus réparation du préjudice résultant de l'absence de visites médicales périodiques ;
Qu'en statuant ainsi, alors que les conclusions du salarié reprises oralement à l'audience contenaient une demande de dommages-intérêts de ce chef, la cour d'appel, qui a modifié l'objet du litige, a violé le texte susvisé ;
Sur le deuxième moyen du pourvoi principal :
Vu l'article L. 3171-4 du code du travail ;
Attendu qu'en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail accomplies, il appartient au salarié d'étayer sa demande par la production d'éléments suffisamment précis quant aux horaires effectivement réalisés pour permettre à l'employeur de répondre en fournissant ses propres éléments ;
Attendu que pour rejeter la demande du salarié en paiement de rappel de salaire sur les heures réelles de travail pour la période du 1er septembre 2006 au 31 décembre 2009 l'arrêt retient que les tableaux qu'il produit mentionnaient seulement le nombre d'heures prétendument travaillées dans le mois, sans aucune indication des heures de début et de fin du travail et sans même leur répartition dans la semaine ;
Qu'en statuant ainsi, alors que le salarié avait produit un décompte des heures qu'il prétendait avoir réalisées auquel l'employeur pouvait répondre, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;
Et attendu que la cassation à intervenir sur le chef de dispositif de l'arrêt attaqué qui a rejeté la demande en paiement de sommes à titre d'heures réelles de travail entraîne par voie de conséquence, en application de l'article 624 du code de procédure civile, la cassation du dispositif de l'arrêt attaqué, critiqué par les troisième, quatrième et cinquième moyens, qui a rejeté les demandes en paiement de prime d'ancienneté, de dommages-intérêts pour non-paiement des heures de travail et d'indemnité pour travail dissimulé ;
Sur le sixième moyen du pourvoi principal :
Vu l'article L. 1231-1 du code du travail ;
Attendu que pour rejeter la demande de prise d'acte de rupture du contrat de travail aux torts de l'employeur l'arrêt retient que les seuls manquements retenus sont d'une gravité insuffisante pour justifier la prise d'acte ;
Qu'en se déterminant ainsi sans rechercher si l'absence de visites médicales invoquées par le salarié constituait un manquement suffisamment grave de l'employeur empêchant la poursuite du contrat de travail, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision ;
Et sur le moyen unique du pourvoi incident de l'employeur :
Vu l'article 455 du code de procédure civile ;
Attendu que pour condamner l'employeur au paiement de 3 000 euros de dommages-intérêts l'arrêt retient que la société Adrexo, qui ne conteste pas l'utilisation par ses distributeurs de leur domicile en vue de la préparation des tournées, sera condamnée au paiement de 2 000 euros de dommages-intérêts de ce chef, que si cet argument est inopérant, il ne résulte pas des pièces produites que le salarié ait réclamé la mise à disposition d'un local pour ce travail de préparation ni que celui-ci ait été effectué au domicile de l'intéressé ; que le salarié sera donc débouté de ce chef ;
Qu'en statuant ainsi, par des motifs contradictoires, la cour d'appel n'a pas satisfait aux exigences du texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, sauf en ce qu'il condamne la société Adrexo à payer à M. X... la somme de 1 481,70 euros à titre de rappel de salaire et 148 euros à titre de rappel de congés payés, l'arrêt rendu le 21 février 2014, entre les parties, par la cour d'appel de Douai ; remet, en conséquence, sur les autres points restant en litige, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel d'Amiens.