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Décisions

Cass. soc., 25 octobre 1978, n° 78-60.693

COUR DE CASSATION

Arrêt

Cassation

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Laroque

Rapporteur :

M. Renard-Payen

Avocat général :

M. Rivière

Avocat :

Me Barbey

TI Mortagne, du 7 juin 1978

7 juin 1978

SUR LE PREMIER MOYEN, PRIS DE LA VIOLATION ET FAUSSE APPLICATION DES ARTICLES 1315 ET SUIVANTS DU CODE CIVIL, L. 412-10 ET L. 412-12 DU CODE DU TRAVAIL, 7 DE LA LOI DU 20 AVRIL 1810, 455 ET 458 DU NOUVEAU CODE DE PROCEDURE CIVILE, DEFAUT DE MOTIFS, MOTIFS HYPOTHETIQUES, MANQUE DE BASE LEGALE : ATTENDU QU'IL EST FAIT GRIEF AU JUGEMENT ATTAQUE D'AVOIR VALIDE LA DESIGNATION DE MARTEAU EN QUALITE DE DELEGUE SYNDICAL DANS LA SOCIETE DES ETABLISSEMENTS GASTON DREUX, AUX MOTIFS QUE, POUR CONTESTER LA DESIGNATION DU SALARIE, UN EMPLOYEUR NE PEUT EXIGER LA PRODUCTION DE SON CASIER JUDICIAIRE SANS PRETENDRE QUE L'INTERESSE AIT ETE FRAPPE D'UNE QUELCONQUE CONDAMNATION ;

QU'EN TOUT ETAT DE CAUSE, IL SUFFISAIT AU DELEGUE DESIGNE DE PRODUIRE SA CARTE D'ELECTEUR, ALORS QUE, D'UNE PART, LA PREUVE DE L'ABSENCE DE CONDAMNATION, CONDITION EXIGEE POUR ETRE DESIGNE COMME DELEGUE SYNDICAL, INCOMBE AU SALARIE ET NON A L'EMPLOYEUR DONT L'IGNORANCE EST PRESUMEE ;

QU'EN DECIDANT LE CONTRAIRE, LE TRIBUNAL A RENVERSE LA CHARGE DE LA PREUVE, ET ALORS QUE, D'AUTRE PART, EN TOUT ETAT, L'HYPOTHESE, ENVISAGEE PAR LE TRIBUNAL, D'APRES LAQUELLE LA SEULE PRODUCTION DE LA CARTE D'ELECTEUR DU DELEGUE DELIVREE PLUS D'UN AN AVANT SA DESIGNATION SUFFIRAIT A ETABLIR L'ABSENCE DE CONDAMNATION, SE HEURTE A L'OBLIGATION POUR LE JUGE DE L'ELECTION D'APPRECIER LES CONDITIONS A REMPLIR AU JOUR DE LA DESIGNATION ;

MAIS ATTENDU QUE LES SALARIES DE L'ENTREPRISE SONT PRESUMES JOUIR DE LEURS DROITS CIVIQUES SAUF PREUVE CONTRAIRE ET QUE L'EMPLOYEUR NE PEUT, PAR SUITE, COMME L'A RELEVE LE TRIBUNAL DANS UN MOTIF QUI SUFFIT A JUSTIFIER LA DECISION ATTAQUEE, EXIGER D'UN DELEGUE SYNDICAL LA PRODUCTION D'UN EXTRAIT DE CASIER JUDICIAIRE EN VUE DE CONTESTER SA DESIGNATION ;

SUR LE DEUXIEME MOYEN, PRIS DE LA VIOLATION ET FAUSSE APPLICATION DES ARTICLES 9 ET SUIVANTS DU NOUVEAU CODE DE PROCEDURE CIVILE, L. 412-10, L. 411-2 ET L. 411-7 DU CODE DU TRAVAIL, 7 DE LA LOI DU 20 AVRIL 1810, 455 ET 458 DU NOUVEAU CODE DE PROCEDURE CIVILE, DEFAUT DE MOTIFS ET MANQUE DE BASE LEGALE, DEFAUT DE REPONSE A CONCLUSIONS : ATTENDU QU'IL EST FAIT GRIEF AU JUGEMENT ATTAQUE D'AVOIR ECARTE LA CONTESTATION RELATIVE A LA QUALITE DE REPRESENTANT DU SYNDICAT CFDT, CONSTRUCTION BOIS, DE HERON QUI AVAIT DESIGNE MARTEAU COMME DELEGUE SYNDICAL, ALORS QUE, POUR AGIR AU NOM D'UN SYNDICAT, LE REPRESENTANT DE CELUI-CI DOIT EXERCER EFFECTIVEMENT LA PROFESSION EN CAUSE OU L'AVOIR EXERCEE PENDANT AU MOINS UN AN ;

QUE TEL N'EST PAS LE CAS DE CELUI QUI, COMME EN L'ESPECE, N'A JAMAIS EU UN EMPLOI PROFESSIONNEL SALARIE DANS UNE ENTREPRISE COMME LE SOUTENAIT L'EMPLOYEUR DANS DES CONCLUSIONS DEMEUREES SANS REPONSES ;

MAIS ATTENDU QUE L'AFFIRMATION DE LA DEMANDERESSE AU POURVOI QUI CONTESTAIT, NON LE MANDAT DONNE A HERON DE REPRESENTER LE SYNDICAT, MAIS SA SEULE CAPACITE A LE RECEVOIR CONSTITUAIT UNE ALLEGATION QUI N'ETAIT ETAYEE D'AUCUN ELEMENT DE PREUVE ;

SUR LE TROISIEME MOYEN, PRIS DE LA VIOLATION ET FAUSSE APPLICATION DES ARTICLES 1134 DU CODE CIVIL, 7 PARAGRAPHE 1, 9 ET 16 DU NOUVEAU CODE DE PROCEDURE CIVILE, L. 412-5 ET L. 412-10 DU CODE DU TRAVAIL, 7 DE LA LOI DU 20 AVRIL 1810, 455 ET 458 DU NOUVEAU CODE DE PROCEDURE CIVILE, DEFAUT DE MOTIFS, MECONNAISSANCE DES DROITS DE LA DEFENSE, MANQUE DE BASE LEGALE, DEFAUT DE REPONSE A CONCLUSIONS :

ATTENDU QU'IL EST FAIT GRIEF AU JUGEMENT ATTAQUE D'AVOIR VALIDE LA DESIGNATION D'UN DELEGUE SYNDICAL EN DEPIT DE L'ABSENCE DE SECTION SYNDICALE ET DU MANQUE DE REPRESENTATIVITE DU SYNDICAT, AUX MOTIFS ESSENTIELS QUE LA CONSTITUTION D'UNE SECTION SYNDICALE N'EST SOUMISE A AUCUNE FORME, ALORS QUE, D'UNE PART, S'IL SUFFIT, POUR CARACTERISER L'EXISTENCE PREALABLE D'UNE SECTION SYNDICALE ET SA REPRESENTATIVITE, D'ETABLIR QUE LES ADHERENTS DU SYNDICAT INTERESSE ONT MANIFESTE L'INTENTION DE SE GROUPER DANS L'ENTREPRISE POUR EXERCER UNE ACTION SYNDICALE COMMUNE, ENCORE FAUT-IL QUE LE TRIBUNAL CONSTATE QUE LE SYNDICAT EN CAUSE AIT EU DES ADHERENTS DANS L'ENTREPRISE ET DES ACTIVITES ANTERIEUREMENT A LA DESIGNATION LITIGIEUSE ;

QU'EN SE REFERANT SEULEMENT A DES DATES POSTERIEURES A LA DESIGNATION DU 6 JUIN ET A UNE " PREMIERE CORRESPONDANCE ", DONT LA DATE N'EST PAS PRECISEE, POUR RECONNAITRE L'ADHESION DE SALARIES AU SYNDICAT ET L'EXERCICE D'UNE ACTIVITE SYNDICALE, LE TRIBUNAL A ENTACHE SA DECISION DE MANQUE DE BASE LEGALE, ALORS QUE, D'AUTRE PART, LA GREVE DU 14 JUIN RELEVEE PAR LE TRIBUNAL NE POUVAIT ETRE ASSIMILEE A UN MOUVEMENT SYNDICAL ET NE POUVAIT DES LORS JUSTIFIER L'EXISTENCE D'UNE ACTIVITE SYNDICALE REPRESENTATIVE, ALORS ENCORE QU'EN RELEVANT D'OFFICE CE MOUVEMENT DU 14 JUIN ET DES EVENEMENTS SURVENUS LES 15 ET 20 JUIN, FAITS QUI N'ETAIENT INVOQUES PAR AUCUNE DES PARTIES ET SUR LESQUELS ELLES N'ONT PAS ETE INVITEES A S'EXPLIQUER, LE TRIBUNAL A MODIFIE LES TERMES DU LITIGE ET MECONNU LES DROITS DE LA DEFENSE, ET ALORS, ENFIN, QUE LE TRIBUNAL A LAISSE SANS REPONSE LES CONCLUSIONS DE L'EMPLOYEUR, QUI SOUTENAIT QU'IL N'ETAIT PAS JUSTIFIE D'UNE QUELCONQUE REPRESENTATIVITE DU SYNDICAT SELON LES ELEMENTS HABITUELS, TELS QU'EFFECTIFS REELS, COTISATIONS EFFECTIVEMENT ET LIBREMENT PERCUES, ANCIENNETE ;

MAIS ATTENDU QUE LE TRIBUNAL A ESTIME QUE LA PREUVE DE L'EXISTENCE DE LA SECTION SYNDICALE ETAIT SUFFISAMMENT APPORTEE EN L'ESPECE TANT PAR LA LETTRE QUI INFORMAIT L'EMPLOYEUR DE SA CONSTITUTION, QUE PAR LA DEMANDE CONCOMITTANTE DE PROCEDER A DES ELECTIONS PROFESSIONNELLES, DEMANDE APPUYEE PAR UN MOUVEMENT DE GREVE ULTERIEUR, AINSI QUE PAR L'APPARTENANCE A LA CFDT REPRESENTATIVE AU PLAN NATIONAL, DUDIT DELEGUE ET D'UN CERTAIN NOMBRE DE SALARIES ;

QUE LE TRIBUNAL POUVAIT RETENIR TOUS LES FAITS QUI AVAIENT ETE ALLEGUES DEVANT LUI ;

QUE LE MOYEN N'EST PAS FONDE ;

SUR LE QUATRIEME MOYEN, PRIS DE LA VIOLATION ET FAUSSE APPLICATION DES ARTICLES L. 412-12, L. 412-13 DU CODE DU TRAVAIL, 7 DE LA LOI DU 20 AVRIL 1810, 455 ET 458 DU NOUVEAU CODE DE PROCEDURE CIVILE, DEFAUT DE REPONSE A CONCLUSIONS, DEFAUT ET CONTRADICTION DE MOTIFS, MANQUE DE BASE LEGALE : ATTENDU QU'IL EST FAIT GRIEF AU JUGEMENT ATTAQUE D'AVOIR VALIDE LA DESIGNATION D'UN DELEGUE SYNDICAL, DONT LE CONTRAT DE TRAVAIL AVAIT ETE RESILIE, ALORS QUE, D'UNE PART, EN RELEVANT QUE LES CONDITIONS NECESSAIRES A LA DESIGNATION D'UN DELEGUE SYNDICAL ETAIENT REUNIS TOUT EN AJOUTANT QUE LE LICENCIEMENT N'ETAIT PAS REGULIER S'IL S'AGISSAIT D'UN DELEGUE SYNDICAL, LE TRIBUNAL S'EST FONDE SUR UN MOTIF DUBITATIF ET A ENTACHE SA DECISION D'UNE CONTRADICTION, ALORS QUE, D'AUTRE PART, DANS DES CONCLUSIONS DEMEUREES SANS REPONSE, L'EMPLOYEUR AVAIT SOULEVE L'EXCEPTION DE RESILIATION DE PLEIN DROIT EN RAISON DE LA FAUTE LOURDE DU DELEGUE AUQUEL ETAIENT REPROCHEES DES VOIES DE FAIT AINSI QUE DES INFRACTIONS PENALES POUR EN DEDUIRE QUE LE SALARIE NE POUVAIT ETRE DELEGUE SYNDICAL, ET ALORS ENFIN, QU'EN SE BORNANT A RELEVER QUE LE DELEGUE SYNDICAL AVAIT DENIE A TORT OU A RAISON LES FAITS QUI LUI ETAIENT REPROCHES ET QUE L'ISSUE DE LA PLAINTE DEPOSEE PAR L'EMPLOYEUR N'ETAIT PAS CONNUE, SANS EN TIRER DE CONSEQUENCE, LE TRIBUNAL A PRIVE SA DECISION DE BASE LEGALE ;

MAIS ATTENDU QUE LE JUGEMENT S'EST BORNE A CONSTATER, PAR UN MOTIF NON DUBITATIF, QUE L'EMPLOYEUR NE POUVAIT SE FAIRE JUSTICE A LUI-MEME ET LICENCIER LEDIT DELEGUE APRES SA DESIGNATION POUR TENTER DE FAIRE ECHEC A CELLE-CI ;

SUR LE SIXIEME MOYEN, PRIS DE LA VIOLATION ET FAUSSE APPLICATION DES ARTICLES 7 DE LA LOI DU 20 AVRIL 1810, 455 ET 458 DU NOUVEAU CODE DE PROCEDURE CIVILE, DEFAUT DE MOTIFS, MANQUE DE BASE LEGALE : ATTENDU QU'IL EST FAIT GRIEF AU JUGEMENT ATTAQUE DE NE PAS COMPORTER LA SIGNATURE DU PRESIDENT ALORS QUE TOUT JUGEMENT DOIT, A PEINE DE NULLITE, ETRE REVETU DE CETTE SIGNATURE ;

MAIS ATTENDU QU'IL RESULTE DES TERMES DU JUGEMENT ATTAQUE QUE CELUI-CI A ETE SIGNE PAR LE PRESIDENT AVEC L'AGENT TECHNIQUE DE BUREAU ASSERMENTE ;

QUE CETTE MENTION FAISANT FOI JUSQU'A INSCRIPTION DE FAUX, LE MOYEN NE PEUT ETRE ACCUEILLI ;

PAR CES MOTIFS : REJETTE LES PREMIER, DEUXIEME, TROISIEME, QUATRIEME ET SIXIEME MOYEN ;

MAIS SUR LE CINQUIEME MOYEN : VU L'ARTICLE L. 412-13 DU CODE DU TRAVAIL ;

ATTENDU QUE LE JUGEMENT ATTAQUE, QUI A REJETE LA CONTESTATION DE LA SOCIETE DES ETABLISSEMENTS GASTON DREUX, PORTANT SUR LA VALIDITE DE LA DESIGNATION D'UN DELEGUE SYNDICAL DANS CETTE ENTREPRISE A CONDAMNE L'EMPLOYEUR AUX DEPENS ;

QU'EN STATUANT AINSI, ALORS QUE LE TEXTE SUSVISE DISPOSE QU'EN CETTE MATIERE, LE TRIBUNAL D'INSTANCE STATUE SANS FRAIS, LE TRIBUNAL A VIOLE CELUI-CI ;

PAR CES MOTIFS : CASSE ET ANNULE, MAIS SEULEMENT DANS SA DISPOSITION CONDAMNANT LA SOCIETE DES ETABLISSEMENTS GASTON DREUX AUX DEPENS, LE JUGEMENT RENDU ENTRE LES PARTIES LE 27 JUIN 1978 PAR LE TRIBUNAL D'INSTANCE DE MORTAGNE-AU-PERCHE ET, ATTENDU QU'IL NE RESTE RIEN A JUGER, DIT QU'IL N'Y A PAS LIEU A RENVOI.